En des temps reculés, nous avions, mon camarade chanteur et moi-même (1), composé une chanson intitulée Je fume pour oublier que tu bois. Un jeune loup de l’immobilier m’avait interpellé : "Vous ne croyez pas qu’en opposant "fumeurs de cannabis" et "videurs de Pastis" vous opposez une drogue à une autre ?"

"Y en a une qui est légale, répondis-je, et en plus je ne connais pas de chauffard "raide"..." Quoi qu’il en soit, il me semble que ce texte tentait plutôt de dénoncer sournoisement une certaine forme d’hypocrisie que de faire l’apologie de la "petite main aux cinq doigts"...

Et puis, si nous préférons "les messages de fumée qui passent de mimine en mimine à la solitude agressive du buveur sans fond"... N’est-ce pas le droit le plus profond de l’être humain que le droit à la jouissance ? Plus l’homme est évolué, plus il recherche les plaisirs. Plus il se prend sa condition d’homme dans la tronche, plus il réclame son droit à l’ivresse...

Bien sûr, ce droit emmerde les instances supérieures... La musique, donc les concerts, le cannabis, réunissent les gens... On sait qu’elle est un fabuleux moyen d’introspection. Le chocolat chaud et le peyotl étaient des accessoires nécessaires à l’Aztèque qui voulait devenir un homme (comprenez adulte au sens le plus ouvert du terme). Hélas... cette bataille ne date pas d’aujourd’hui.

Plan d’hélicoptère sur la tonsure de nos bons vieux moines des temps reculés : les copains de frère Tuck savent lire en direct et entre les lignes. Ils vont, en les retranscrivant, supprimer du Kalévala finlandais (2) (une belle saga que je conseille à tous et aux autres) tout ce qui peut "stimuler" la connaissance, la sensualité : la liberté qu’a un corps de s’apprendre au travers, ou plutôt au-dedans de celui de l’autre.

Les moinillons ne s’arrêtent pas là : garde-fous du régime médiéval, ils vont virer de la musique tous ces accords qui "frottent" et provoquent de démoniaques sensations.

Ces accords répréhensibles seront appelés "les accords du diable" (3) : ne pas écouter la musique satanique de son propre corps, signifiera alors que l’homme ne doit pas "se laisser aller à ses passions" et que seul le "Seigneur" le peut.

Confondant aussi le "Seigneur" qui est "là-haut" avec celui du donjon, nos religieux amis exonèrent ainsi le propriétaire du château de toute obligation terrestre : qu’une famine éclate ou que la peste se déclare.

Il ne faudra en aucun cas tuer le Seigneur, mais par contre monter les croyants contre "ceux qui l’ont tué".

En lâchant la foule sur les ghettos, et en protégeant le maître après Dieu, les sauveurs de la foi on créé l’antisémitisme théologique, cher à Jules Isaac (4) (Jésus et Israël), et du même coup mis une pince à linge en forme de croix sur nos zigounettes... Et cela pour les sept siècles à venir.

Partant du principe "qu’on aura beau dire et qu’on aura beau faire, y aura de moins en moins de gens pour pleurer la bataille de Waterloo" (Alphonse Allais ), moi, le petit Boris Jakobovitch Bergman, je réclame démocratiquement le fétichisme pour tous et le droit à l’ivresse. A toi la pantoufle de Madonna. A Lui une mèche de la choukroute de Claudine Schouffleur (5).

A moi la guêpière et les bas noirs d’Angie Dickinson dans Rio Bravo... Avant d’être initié par les prostituées de Paphos (6), le jeune disciple grec était convié aux joies du chichon...

Le processus de paix chez tous les Indiens d’Amérique du Nord, commençait par une escale sur les herbes folles. Je sais, on a l’apéritif, bref...

Ne nous forcez pas à tirer sur le bambou dans le seul but de tirer un gigantesque rideau de fumée entre vous et nous.

On veut se mettre entre charentaises pour pousser le bouchon un peu plus loin... pour nous téléporter hors de la planète Béret, quand le béret nous pèse.

Qui êtes-vous pour codifier le plaisir ?

"Ça c’est bon" et "Ça c’est caca", faut pas toucher.

Hugo disait : "Ouvrez un livre et fermez une prison !" D’accord Victor, transposons : "roulez un pète, et ouvrez les têtes !"

Henry Miller (7) avait fait graver en VO sur son papier à lettres le dicton portugais suivant : "Le jour où l’on pourra chier de l’or, les pauvres n’auront plus de trou du cul !"

Qu’il se rassure. Les trous du cul, on les a, et on les aura. Seulement voilà, y sont pas au bon endroit.

Boris Bergman


1. Alain Bashung.

2. Ils ne se sont pas arrêtés là, ils ont "adapté" le Popol Vuh (légende indienne d’Amérique du Sud), ainsi qu’un récit scandinave, qui donna les Nibelungen.

3. Accord de quarte augmentée qui crée une tension et provoque chez le moine l’envie de passer à l’octave supérieur (la quinte).

4. Historien dont les enfants de France et de Navarre ont tous dû, à un moment ou à un autre, étudier le manuel. Auteur de nombreux ouvrages sur l’antisémitisme, malheureusement toujours d’actualité.

5. Légume germanique et top model.

6. Très belle ville grecque à visiter.

7. Jouisseur célèbre.