LES TROIS SAINTS CŒURS

Le 30 avril 1975, la troisième chambre du Tribunal correctionnel de Mons condamnait les frères Melchior à 18 mois d’emprisonnement et Isabelle Westphal à 4 mois fermes pour enlèvement d’une mineure.

Le 1 er octobre 1987, le tribunal correctionnel de Bruxelles condamnait Robert Melchior notamment pour infractions aux lois fiscales et aux lois coordonnées sur les sociétés commerciales, pour faux en écriture et faits d’extorsion.

Lors de son audition, M. Godbille, premier substitut du procureur du Roi, a fait valoir que " les comportements sociaux des membres de la secte, décrits notamment au travers du procès de Mons, traduisent une emprise, une manipulation au moment du recrutement. Souvent les personnes concernées vivent des moments difficiles et se trouvent en position de faiblesse psychologique. Après un certain temps, l’attitude de convivialité observée au départ au sein de la secte disparaît, à un point tel que la personne ne peut plus quitter le groupe de son plein gré. On assiste à un éloignement induit par rapport à la famille et au milieu d’origine.

Par ailleurs, les droits et obligations des membres diffèrent largement en fonction de la hiérarchie du groupe. Ainsi, l’ascèse imposée aux membres de la secte n’est pas partagée par le gourou.

Il est également fait usage de la langue de bois. Les membres de la secte n’hésitent pas à mentir et refusent toute forme d’audit externe qui pourrait contredire les vérités proférées au sein du groupe.

Il est aussi apparu, au cours de l’enquête, que les adhérents sont obligés de verser leurs biens à la secte. Les dons sont souvent considérables. En s’attaquant aux biens de l’adhérent, on tente de déstructurer sa personnalité en l’insécurisant. Il est forcé de rester au sein de la secte. La personne qui exprime sa volonté d’en sortir devient un objet de haine et est rejetée par le groupe. "

Renvoyant aux attendus du jugement de 1987, M. Godbille a indiqué qu’il était " particulièrement intéressant de noter qu’au travers de ces faits, il avait également pu être établi que " la discipline du " groupe " était fondée sur une " aliénation psychologique " provoquée et constitutive de violence morale et une soumission sans condition excluant toute réaction constructive pendant la présence dans le " groupe " et même ultérieurement après la fuite de ce milieu ".

ECOOVIE

(voir à ce propos la quatrième partie du rapport - Examen du dossier judiciaire concernant la secte " Ecoovie " par M. Trousse)

Le 2 décembre 1993, la 49 e chambre du tribunal de 1 re instance de Bruxelles, statuant par défaut, condamnait M. Joseph Maltais, alias Norman William, à trois ans de prison et 200 francs d’amende, sans sursis et avec arrestation immédiate. Les préventions les plus importantes retenues étaient constitutives d’escroquerie parfois perpétrées au moyen de faux en écriture, d’un détournement, d’avoir été provocateur ou chef d’un association de malfaiteurs, de port public de faux nom, parfois avec faux en écriture, et de séjour illégal en Belgique.

Lors de son audition, le juge d’instruction Van Espen, qui a mené l’instruction du 12 décembre 1988 au 6 février 1991, a rappelé que les attendus du jugement soulignent " que l’examen du dossier démontre clairement que le prévenu a mis sur pied un mécanisme de délinquance spécifique, parfaitement structuré et international, dont il connaissait tous les rouages ; que ce prévenu a entraîné également par son activité d’autres personnes à commettre des infractions, qu’il a abusé et trompé de manière systématique la confiance d’autrui, mettant ainsi gravement en danger la sécurité indispensable qui doit protéger les relations financières (...). "

Il a précisé également que la saisie de certains documents et photos pouvait faire penser à l’existence d’un réseau de pédophilie. Aucun fait n’a cependant pu être prouvé.

MOON

Une jeune adepte, membre de l’Association du Saint Esprit pour l’Unification du Christianisme Mondial, rend visite à ses parents le 11 mai 1986. A son arrivée, sa famille et un médecin tentent de la persuader de quitter cette association. Elle est hospitalisée jusqu’au 14 mai 1986, date à laquelle ses parents l’emmènent chez un couple où elle affirme avoir été soumise à des séances de " déprogrammation ". Le 11 juin 1988, elle est ramenée définitivement chez ses parents et s’échappe quelques jours plus tard pour reprendre sa vie au sein de la secte à Bruxelles.

Plus de 3 ans après, la jeune adepte dépose plainte contre les personnes chez qui elle a séjourné et réclame une somme de 250 000 francs à titre de dommages et intérêts.

Le 4 février 1993, le tribunal de première instance a toutefois déclaré la demande principale non fondée à l’encontre du couple chez qui la demanderesse avait séjourné et ce sur la base de l’argumentation suivante :

" Attendu cependant que la demanderesse au principal reconnaît qu’aucune contrainte physique ne lui a été imposée par les époux (...) ; qu’ainsi, elle n’a jamais été sequestrée chez ceux-ci, ce qui implique qu’elle était physiquement libre de quitter cette habitation ;

Attendu que la demoiselle (...) a été conduite par ses parents chez les époux (...) qui n’ont donc commis aucun acte positif pour l’emmener chez eux ;

Attendu que (la demoiselle) en page six de ses conclusions principales, confirme être " en pleine possession de ses moyens mentaux et intellectuels " ;

Attendu qu’il n’est pas établi que les consorts (...) étrangers à la famille (...) ont utilisé la moindre contrainte physique ou morale pour retenir (la demoiselle) ;

Attendu que la jeune fille de 21 ans, d’un niveau intellectuel au-dessus de la moyenne (...) et se proclamant en bon état de santé mental, ne peut faire croire qu’elle était sous une emprise morale de la part des époux (...) (des étrangers par rapport à elle) la rendant incapable de ses actes ;

Attendu que le bon état de santé physique et morale de la demoiselle (...), ne faisant l’objet d’aucune contrainte, laisse plutôt penser que ce séjour chez les époux (...) a été librement accepté dans l’optique d’une recherche de sa personnalité suite à la transformation radicale de sa vie par son intégration dans la secte Moon ;

Attendu enfin que le Tribunal remarque avec intérêt que la demanderesse au principal n’a jamais déposé plainte contre les défendeurs et a attendu plus de trois ans avant de lancer la présente action ; que l’on peut se demander finalement qui est à la base de cette action si l’on sait que les époux (...) militent en faveur d’une association luttant, entre autres, contre certaines sectes ; " (...)

Une expertise neuro-psychiatrique a, par ailleurs, été ordonnée à la demande de la plaignante au sujet des circonstances dans lesquelles elle a été conduite à l’hôpital et des traitements qui lui ont éventuellement été appliqués

LES TEMOINS DE JEHOVAH

Plusieurs jugements concernent l’attribution du droit de garde et de visite accordés ou non à des parents, membres des Témoins de Jéhovah (cf. résumé des auditions publiques de MM. Ouardi et Janssen).

A titre d’exemple :

27 octobre 1988 (10 e chambre de la cour d’appel de Liège) : Celle-ci a estimé que lorsque les époux ont, pendant la vie commune, pratiqué avec leurs trois enfants la religion des Témoins de Jéhovah, on ne peut, après la séparation, interdire à la mère, même si l’administration de la personne et des biens d’un des enfants est confiée au père, de continuer à éduquer ses enfants dans les croyances et pratiques religieuses qu’elle considère comme bonnes, sauf si ces pratiques sont susceptibles d’entraîner pour l’enfant certains risques pour sa santé physique ou son équilibre psychique. C’est ainsi que la mère a obtenu l’autorisation de donner des cours particuliers de religion à ses enfants et de les emmener pour la prédication de porte à porte.

13 juin 1991 (tribunal de la jeunesse de Liège) : ce tribunal a estimé ne pas devoir modifier le droit de garde d’une fille de seize ans qui a été confié à sa mère au motif que la jeune fille adhère à la doctrine des Témoins de Jéhovah alors que la fréquentation de son père s’est jusque là avérée néfaste. L’article 14 de la Convention internationale des droits de l’enfant souligne l’obligation de respecter la liberté de pensée et de religion. Toutefois, la mère ne peut faire baptiser sa fille avant sa majorité tandis que le père sera tenu au courant de tout problème médical - no-tamment avec nécessité de transfusion sanguine et/ou de transplantation d’organes - et pourra désigner un médecin de son choix afin d’examiner sa fille.


Source : Chambre des Représentants de Belgique http://www.lachambre.be