De nombreux témoins ont déclaré devant la commission que l’entrée de leur partenaire, enfant ou parent dans l’organisation sectaire a provoqué une rupture avec eux. Exemples :

— l’Eglise du Christ de Bruxelles, qui s’efforce d’éloigner ses membres de leur famille ;

— le témoin qui a vu disparaître son conjoint et ses enfants au sein de la Fraternité Blanche Universelle. Ce témoin a remarqué que, depuis que son conjoint avait des contacts avec ce mouvement et qu’ils utilisaient tous deux des préparations médicales de celui-ci, l’agressivité entre eux deux et les enfants avait fortement augmenté et la situation avait abouti progressivement à une séparation ;

— le témoin dont le partenaire " a adhéré " au mouvement de l’Ange Albert et qui a vu sa relation se détériorer progressivement avant son adhésion définitive ;

— les parents de membres du Mouvement humaniste dont les contacts avec leurs enfants et petits-enfants s’espacent progressivement ;

— les témoins qui ont perdu tout contact avec leur conjoint, parti vivre avec d’autres adeptes d’Ex Deo Nascimur, de Sûkyô Mahikari ou encore au sein d’une communauté appliquant les principes de R. Steiner ;

— les grands-parents, parents et membres de la famille d’adeptes de Sahaja Yoga, qui décrivent le changement de comportement des adeptes après leur adhésion à la secte, la façon dont ils rejettent les contacts avec leur famille, et la rupture qui se produit lorsque les intéressés veulent envoyer leurs enfants dans les écoles de Sahaja Yoga à l’étranger ;

— les témoins qui ont un partenaire ou un parent chez les Témoins de Jéhovah et qui sont systématiquement éloignés de leur partenaire ou de leurs enfants parce qu’ils ne sont pas (plus) membres des Témoins ;

— un adepte entré chez l’Association internationale pour la conscience de Krishna (AICK), et qui a assez rapidement fait comprendre à ses parents qu’il était trop occupé pour continuer à les voir (il devait vendre des cassettes et des livres pour le mouvement). Avant son admission définitive dans le mouvement, son comportement s’était fortement dégradé : il se révoltait, était devenu agressif et refusait toute communication avec ses parents. Un autre témoin, ex-membre de l’AICK, confirme également que ce mouvement s’efforce de changer la personnalité du disciple et de le couper de la vie qu’il s’était construite ;

— les membres de Opus Dei, qui, d’après des témoignages indirects, sont systématiquement éloignés de leurs parents et connaissances ; - les anciens membres de L’OEuvre, qui parlent de la façon dont ils ont été isolés de leur famille. Dans un certain nombre de cas, les partenaires ont été montés les uns contre les autres, mais les liens du mariage ont résisté (" Kreatieve Energie ").

Certains mouvements essayent de provoquer la rupture avec le partenaire, la famille et les proches. En vue de pouvoir maintenir les disciples dans la secte et de leur inculquer l’idéologie du groupe, les contacts entre les membres et les personnes extérieures, et entre les membres eux-mêmes sont sévèrement contrôlés. Les membres sont autant que possible isolés de leurs amis et de leur famille, car ils doivent être protégés des influences indésirables de l’extérieur et être disponibles sans limite pour réaliser les objectifs du groupe et/ou du dirigeant. Les techniques suivantes sont utilisées à cet effet :

— Pour que les adeptes prennent leurs distances à l’égard de leurs parents, de leurs proches et de leurs amis, ceux-ci sont présentés comme des personnes à éviter, comme Satan ou comme des personnes qui n’y ont rien compris. Leurs attaches antérieures font partie d’un système athée ou hostile, responsable de la mauvaise éducation de l’adepte, ou du moins du fait que celui-ci a des problèmes.

— Les proches et même les partenaires qui n’éprouvent pas de sympathie à l’égard des activités de l’organisation sectaire sont présentés comme des personnes à éviter, comme un " obstacle majeur ", c’est-à-dire comme des personnes qui entravent le développement personnel et qui doivent être convaincues, sinon délaissées.

— Les expériences antérieures à la vie sectaire sont dévaluées ou interprétées comme fautives ou vides de sens. Il faut démontrer en permanence que l’on renie son ancienne image personnelle et les valeurs auxquelles on était attaché antérieurement.

— Les partenaires et les proches doivent être convaincus du caractère judicieux du choix de l’adepte. S’ils ne peuvent l’être, le mouvement tente de provoquer une séparation.

— Les contacts que la correspondance permet d’entretenir avec le monde extérieur sont coupés.

— Certains groupes émigrent à l’étranger, comme Ecoovie et Sierra 21.

— Certains se déplacent en permanence ou envoient continuellement leurs disciples dans d’autres régions et même d’autres pays.

— Il faut renoncer à sa profession ou à ses affaires.

— Il faut prendre un autre nom ou prénom.

— Il est fait usage d’un langage propre au mouvement.

— Les vêtements et autres objets personnels qui rappellent la vie antérieure ou le monde extérieur doivent être détruits, souvent de façon rituelle.

Souvent, le groupe tente d’empêcher ses membres de le quitter :

Tant qu’ils sont membres du groupement, les adeptes sont liés à celui-ci par l’effet des techniques de manipulation mentale déjà décrites :

— Le groupe totalitaire exerce un contrôle très sévère sur le comportement de ses membres, ce qui a pour effet d’entraver fortement la manifestation de comportements alternatifs et, notamment, d’étouffer les velléités de quitter le groupe.

— On empêche la communication interne et ex-terne et les contacts.

— On exerce une forte pression sur celui qui quitte le groupe (ou songe à le faire). On lui fait croire qu’il met le groupe en danger, qu’il sera privé de la félicité éternelle, qu’il sera puni par Dieu ou par le principe final, qu’il trahit les objectifs du groupe.

— Certains mouvements menacent l’adepte qui veut mettre un terme à sa participation et qui exige le remboursement des cours d’être banni à vie du mouvement. Cette menace contribue sans aucun doute à retenir les membres qui, somme toute, trouvent l’offre du mouvement positive.

— Certains mouvements " prennent (psychologiquement) en otages " les enfants des membres, qui peuvent alors difficilement quitter la secte, par exemple en offrant aux enfants un beau cadre de vie sur les plans matériel et social ou en liant formellement les parents entre eux. Cette prise en otage peut également se réaliser par le biais de mesures judiciaires, en vertu desquelles les enfants sont confiés au parent faisant partie de l’organisation sectaire.

Même après avoir quitté l’organisation sectaire, les ex-membres continuent souvent d’être harcelés, du moins par certains groupements :

— Les ex-membres sont mis sous pression par des lettres ou des coups de téléphone pour les amener à nouveau au mouvement. Les représentants du groupe les guettent et écrivent des lettres pour les inviter à participer à une discussion avec le groupe. Celui qui veut reprendre ses affaires, doit également le faire en personne. De cette manière, le groupe re-prend contact avec l’intéressé.

— Les groupes font aussi souvent appel au sens de l’honneur : les membres qui quittent le groupe sont normalement tenus vis-à-vis d’eux-mêmes et du groupe d’expliquer les motifs de leur départ.

— Les ex-membres font l’objet de poursuites judiciaires parce qu’ils n’ont pas respecté les promesses (contractuelles).

— Bon nombre de témoins font état de toutes sortes de formes de harcèlement allant du comportement perturbateur (filature, appels téléphoniques, ...) aux menaces et infractions pénales dirigées contre les ex-membres ou leur famille (vol de courrier, vol d’objets, dégradations immobilières, exactions perpétrées sur les animaux domestiques, dégradations aux véhicules, ...).

— Des membres sont également menacés de plaintes pour calomnie et diffamation. Certains mouvements excellent dans l’art de réagir à toute déclaration négative à leur égard en déposant plainte devant le juge.

— Des ex-membres sont parfois accusés de délits à caractère sexuel (surtout lors des procédures de divorce entre époux) et de coups et blessures.

Les (grands-)parents et membres de la famille sont aussi vivement pris à partie s’ils s’opposent à l’adhésion de leurs enfants ou des membres de leur famille à une organisation sectaire, et surtout si cela a des conséquences pour les (petits-)enfants, comme dans le cas de Sahaja Yoga et des Témoins de Jéhovah.


Source : Chambre des Représentants de Belgique http://www.lachambre.be