Procès-verbal de la séance du mardi 29 avril 2003

Présidence de M. Xavier de Roux, vice-président

Les témoins sont introduits.

M. le Président leur rappelle que les dispositions législatives relatives aux commissions d’enquête leur ont été communiquées. A l’invitation du Président, les témoins prêtent serment.

M. le Président : La commission a souhaité vous entendre car votre société a été en négociation avec la compagnie Air Lib, puis avec le groupe IMCA pour l’achat d’appareils qui étaient censés permettre à la compagnie Air Lib d’adapter sa flotte à son plan d’affaires et de diminuer ses coûts d’exploitation. Pourriez-vous nous exposer brièvement ces deux épisodes de négociations ?

M. Noël FORGEARD : J’ai souhaité aujourd’hui me faire accompagner de M. Claude Brandes, car je n’ai eu moi-même que peu de contacts directs avec les représentants d’Air Lib et d’IMCA. J’ai dû rencontrer le président Jean-Charles Corbet, pour la première fois, au cours du deuxième semestre 2001 et je n’ai eu avec lui que quelques réunions dont la dernière doit se situer en juin 2002. En effet, le caractère vain de ces réunions m’avait poussé à l’orienter vers d’autres collaborateurs de notre société.

M. le Président : Pourquoi le caractère vain ?

M. Noël FORGEARD : Parce que nous disions beaucoup de choses qui n’étaient guère suivies d’effets. Ces réunions auraient donc été très consommatrices de temps et d’énergie. J’ai rapidement vu que le président Corbet avait des ambitions qui allaient probablement au-delà des possibilités de sa société.

M. le Président : Vous parlez là de la phase avec M. Corbet.

M. Noël FORGEARD : Tout à fait. Je voudrais dire également, parce que cela me paraît être une remarque liminaire importante, que finalement toutes ces réunions, tant avec Air Lib qu’avec IMCA, ont été totalement platoniques puisqu’elles n’ont abouti à rien, dans aucun domaine, ni signature de quelque contrat que ce soit, ni transfert de fonds dans un sens ou dans l’autre, entre Airbus et ces sociétés.

Pour entrer dans le détail, les relations d’Airbus avec l’une des racines du futur groupe AOM-Air Liberté ont commencé avec la signature, en juillet 1998, d’un contrat de location de deux appareils A340-200 par AOM auprès d’Airbus. Il s’agissait pour eux de remplacer des DC10 vieillissants.

Après le rachat des compagnies AOM et Air Liberté, le groupe Swissair a confirmé qu’il souhaitait poursuivre ces relations. Sa filiale, Flightlease, a alors commandé quatre appareils A340-300, un modèle plus récent, dans le but de les louer à AOM. Deux de ces avions étaient livrables à la fin de l’année 2000 et les deux autres à la fin 2001. En fait, seuls les deux premiers appareils, c’est-à-dire ceux livrables à la fin de l’année 2000, ont été livrés à AOM car, par la suite, Flightlease, filiale d’achat du groupe Swissair, a fait défaut, ce qui a conduit à l’annulation du contrat de vente des deux derniers A340-300.

Cependant, la nouvelle compagnie Air Lib confirmait avoir besoin de ces avions. Dès novembre 2001, des discussions ont été entreprises avec la direction d’Holco qui confirmait la volonté de disposer des A340. Nous sommes, à partir de là, entrés dans une longue période de discussions qui s’est étendue de novembre 2001 à juillet 2002 pour la vente des A340-300 à Air Lib.

Il y avait une motivation de la part d’Air Lib et de notre part, puisque nous avions ces deux appareils qui pesaient sur nos stocks et qui n’étaient pas placés. Nous avons fini par formuler une offre ultime, que je me rappelle avoir personnellement approuvée, sinon dans ses détails, du moins quant à son niveau, un prix extrêmement attractif pour ce type d’avion.

M. le Président : De quel ordre est cette décote ?

M. Noël FORGEARD : Cela dépend de la configuration de l’appareil, mais 100 millions de dollars n’est pas un prix déraisonnable pour un A340.

M. le Président : Pourquoi une telle décote ?

M. Noël FORGEARD : Parce que nous avions les appareils en stock et qu’aucun client n’était prêt à les prendre. D’autre part, nous avions en caisse les acomptes reçus de Flightlease à hauteur de 27 millions de dollars par avion. Ces acomptes nous étant définitivement acquis - ce point aura son importance pour la suite - au terme du contrat que nous avions avec Flightlease, nous pouvions donc considérer que la recette que nous aurions sur ces avions était le le prix qu’Air Lib aurait dû payer plus les 27 millions de dollars reçus de Flightlease.

Nous étions allés assez loin dans cette discussion avec Air Lib, au point d’ailleurs de faire quelques concessions dans d’autres domaines. Il y avait des impayés sur le contrat de location des A340-200 que j’ai cités au début. Nous les avions remis pour essayer de régler l’affaire. Ensuite, la disparition subite de Swissair a privé Air Lib de l’injection de capitaux qu’ils attendaient, c’est-à-dire les 400 millions de francs cités à plusieurs reprises. Je ne sais absolument pas si ce montant est exact ou pas. Les conseillers financiers d’Holco ont imaginé que l’achat des A340 à Airbus pourrait en fait contribuer à boucher le trou financier d’Air Lib.

M. le Président : Qui étaient les conseillers financiers d’Holco qui apparaissaient dans la négociation ?

M. Claude BRANDES : Essentiellement la banque Arjil, ainsi que le conseiller juridique qui avait piloté l’opération de reprise d’AOM-Air Lib, le cabinet Léonzi.

M. le Président : Selon vous, la transaction pouvait-elle éventuellement contribuer à boucher le trou financier d’Air Lib ?

M. Noël FORGEARD : Cela peut sembler paradoxal puisqu’un achat se traduit plutôt par un décaissement et non pas par un encaissement. L’idée était de créer une structure de lease fiscal, basé sur l’article 39-CA du code des impôts. Holco nous aurait acheté les avions au prix attractif dont nous avons parlé précédemment, les aurait revendus au vrai prix de marché - disons 100 millions - à la structure de lease fiscal qui les aurait financés par des apports de capital et de dette auprès de partenaires financiers.

On est entré dans une période de plusieurs mois dans laquelle il y a eu plusieurs partenaires financiers putatifs. Au final, l’affaire n’a jamais pu se monter.

M. le Président : Qui avez-vous vu en termes de partenaires financiers ?

M. Noël FORGEARD : Il y a eu le Crédit agricole à la fois en tant qu’arrangeur et prêteur.

M. Claude BRANDES : Il y a eu PKAirfinance , une filiale du groupe General Electric et un partenaire fondamental dans l’opération qui était Air France.

M. le Président : Quel était le rôle d’Air France dans l’affaire ?

M. Claude BRANDES : Le rôle d’Air France consistait à reprendre les avions dans l’hypothèse où, pendant la durée initiale du financement, c’est-à-dire huit ans et huit mois, Air Lib n’aurait pas survécu. C’est une garantie qui permettait en particulier d’assurer aux apporteurs de capitaux que les bénéfices fiscaux qu’ils retiraient de la structure mise en place ne seraient pas remis en cause par l’administration fiscale. C’était un point d’ancrage fondamental. C’est une des raisons pour lesquelles l’opération ne s’est pas réalisée en juin, comme on le supposait.

M. le Président : C’est à cause d’Air France.

M. Claude BRANDES : C’est une des raisons. Il y a trois intervenants dans l’opération : les apporteurs de capitaux ou investisseurs, les prêteurs et Air France qui était le liant et qui devait donner confiance à la fois aux investisseurs et aux prêteurs. On ne peut pas imputer la responsabilité de l’échec sur le A340-300 à l’un ou l’autre, mais force est de constater qu’à fin juin 2002, l’opération ne se mettait pas en place.

M. le Président : Les prêteurs étaient Crédit Agricole Indosuez.

M. Claude BRANDES : Au départ, mais par la suite, le Crédit agricole a eu des exigences telles que l’opération ne pouvait se monter. Un autre prêteur, la société PK Airfinance, filiale du groupe General Electric, est intervenue jusqu’à son renoncement fin juin 2002.

M. le Président : Qui était l’investisseur ?

M. Claude BRANDES : Il n’y a jamais eu d’investisseur.

M. le Rapporteur : Vous qui avez une grande pratique de ces montages, comment vous expliquez-vous, alors que vous aviez fait un effort considérable - -, qu’ils n’aient jamais réussi à monter ce GIE fiscal ?

M. Noël FORGEARD : Il s’agissait de financer l’avion au prix de 100 millions et non au prix consenti à Holco.

M. le Rapporteur : Oui, mais il y avait la garantie d’Air France.

M. Claude BRANDES : La garantie d’Air France n’était pas inconditionnelle. L’objectif, pour rassurer tout le monde, aurait été qu’Air France, dès l’instant où Air Lib disparaissait d’une manière ou d’une autre, reprenne du jour au lendemain les avions et à un loyer qui soit acceptable.

Les discussions du premier semestre 2002 ont porté sur les conditions de reprise des avions par Air France. Comme vous pouvez l’imaginer, Air France avait des difficultés à la fois sur le loyer et les conditions de reprise des avions. Quel que soit le financement et quels que soient les avantages qui peuvent être consentis par un client, que ce soit sur le prix de l’avion ou sur le bénéfice fiscal, c’est le client qui est fondamental dans l’appréciation du risque. Or Air Lib, même pendant la première année de l’année 2002, n’a jamais suscité une confiance telle que soit les investisseurs, soit les prêteurs étaient prêts à monter dans l’opération.

M. le Rapporteur : Sans trahir des secrets commerciaux, le prix des A340 achetés sur la même période par Air France était-il inférieur ou supérieur à 100 millions de dollars ?

M. Claude BRANDES : Le prix consenti à Air France pour l’achat de ses avions était plus proche de 100 millions que celui consenti à Air Lib.

M. le Rapporteur : Vous aviez donc fait un effort tout à fait exceptionnel.

M. Claude BRANDES : Malgré cet effort exceptionnel sur le prix, le financement n’était pas là. Il est important de savoir que, dans un financement aéronautique, l’actif, c’est-à-dire l’avion, joue un rôle fondamental. Or on aurait pu supposer que soit des investisseurs, soit des prêteurs, guère confiants dans l’avenir d’Air Lib, auraient été davantage confiants dans le prix de l’avion qu’ils pouvaient récupérer en cas de défaut. Toutefois, tous les prêteurs et investisseurs approchés se sont focalisés sur la situation d’Air Lib et les conditions dans lesquelles, éventuellement, ces avions seraient repris par Air France.

M. le Rapporteur : Vous avez indiqué qu’Air France était intéressé, mais dans quelles conditions précisément.

M. Claude BRANDES : Du côté d’Air France, il y a eu trois obstacles essentiels. Le premier, c’est que, dès le départ, Air France a indiqué clairement qu’à l’expiration initiale du financement, ils n’achèteraient pas les avions. Nous avions une structure fiscale faite sur treize ans et la période initiale était de huit ans et huit mois. Or, à la fin de cette période, les prêteurs s’attendaient à ce qu’Air France achète l’avion. Si Air France n’achetait pas l’avion, cela signifiait que les prêteurs récupéraient l’avion et devaient le vendre sur le marché. Dans une période post-11 septembre, c’est une situation que les prêteurs n’aimaient pas trop.

Le deuxième obstacle était le montant du loyer. Air France ne souhaitait pas payer davantage que 500 000 dollars par mois, hors les réserves de maintenance pour faire en sorte que l’avion soit correctement entretenu. Au regard d’un tel chiffre, lorsqu’on essaie d’amortir la dette, on s’aperçoit que, et ce compte tenu de l’attitude des prêteurs, l’on ne parviendrait pas à boucler la partie dette de l’opération. D’où une autre difficulté : qui allait prendre en charge cette partie dette qui n’était pas apportée ou que les prêteurs ne souhaitaient pas apporter ?

Le troisième obstacle était les conditions de reprise de l’avion par Air France. Les questions suivantes se posaient : dans quelles conditions la compagnie Air France accepterait-elle de reprendre les avions ? Comment les avions devraient-ils être entretenus par Air Lib ? Air France aurait-elle un droit de regard sur les conditions de l’entretien ? Dans l’hypothèse où l’avion ne serait pas transféré à Air France dans des conditions satisfaisantes, qui paierait les frais et au bout de combien de temps Air France serait amenée à récupérer ces avions ? Si la période entre Air Lib et Air France est d’un mois, tout le monde peut le supporter, mais au-delà, Air France continuant à payer des loyers, elle n’y retrouverait pas son compte.

M. le Rapporteur : Cela dure plusieurs mois et, au final, vous vendez à Air Tahiti Nui.

M. Noël FORGEARD : C’est là que le mot "vain", que j’ai utilisé tout à l’heure, apparaît. Au mois de juin 2002, j’ai commencé, en tant que patron d’Airbus, à m’énerver parce que j’avais toujours ces avions en stock et que je voyais bien que les discussions ne menaient nulle part.

Je crois que c’est à cette époque que nous avons signifié à Air Lib qu’il pouvait toujours acheter les avions, mais que nous ne les réservions plus. Air Lib pouvait les prendre sous réserve que personne d’autre ne les ait pris entre-temps. Puis l’affaire avec Air Tahiti s’est nouée et les avions ont été, à notre grande satisfaction, vendus à cette compagnie en août.

M. le Rapporteur : A quel prix les avez-vous vendus ?

M. Claude BRANDES : A un prix équivalent à celui d’Air Lib .

M. le Rapporteur : Les acomptes versés par Swissair, puis transférés suite à la décision du tribunal, vous étaient-ils acquis ?

M. Noël FORGEARD : Le contrat qui liait le groupe Airbus à Swissair est tout à fait explicite en cas de défaillance de l’acheteur. Les acomptes sont acquis au fabricant. Je peux vous expliquer le pourquoi de cette pratique très générale dans les contrats d’avion.

Quand un acheteur fait défaut, le fabricant doit supporter l’avion en stock pendant plusieurs mois, voire plusieurs années, et surtout le reconfigurer. On n’imagine pas à quel point un avion comporte des éléments spécifiques à un client. Les avions sont de plus en plus faits sur mesure. La cabine, voire certains des systèmes, sont totalement spécifiques. Puis il y a des frais de remarketing. C’est la raison pour laquelle les acomptes sont acquis au fabricant si l’acheteur fait défaut.

M. le Rapporteur : Peut-on dire qu’en définitive Airbus s’en est bien tiré ? En effet, vous avez touché les 27 millions d’acompte que vous avez pu placer en attendant, plus le prix payé par Air Tahiti, c’est-à-dire que grosso modo, vous avez vendu ces avions au prix moyen que vous les vendez habituellement et que, pour Air Tahiti, cela a été une opération très intéressante. Peut-on dire cela ?

M. Claude BRANDES : Je ne le pense pas.

M. le Rapporteur : In fine, vous ne pensez pas que cela a été une bonne affaire pour Airbus.

M. Claude BRANDES : N’oublions pas que ces avions étaient disponibles depuis le mois d’octobre 2001 et qu’ils n’ont quitté le parking d’Airbus qu’à la fin de l’année 2002. Nous espérions une recette sur ces avions dès octobre 2001.

M. le Rapporteur : Même en considérant que vous avez supporté un coût de financement à 4,5 ou 5 % à l’époque, sur 100 millions, cela fait cinq millions. Certes, il y avait les coûts de transformation. De quel ordre ont-ils été pour cette opération ?

M. Claude BRANDES : Dans ce cas particulier, ils ont été de 7 ou 8 millions de dollars.

M. le Rapporteur : Vous vous êtes quand même bien sortis de cette affaire.

M. Noël FORGEARD : Certes, mais alors que nous aurions pu espérer une recette de 100 millions de dollars à la fin 2001. En l’occurrence, c’est plutôt une transaction qui se situe, pour nous, dans les 85 millions de dollars.

M. le Président : Pour en revenir au coeur de l’affaire qui nous concerne et qui est le financement d’Air Lib, avez-vous eu le sentiment d’une pression des pouvoirs publics pour arriver à ce marché ?

M. le Rapporteur : Avez-vous subi des pressions sur cette affaire ou avez-vous été totalement libres ?

M. Noël FORGEARD : Nous avons subi, de la part du ministre des Transports de l’époque, M. Jean-Claude Gayssot, des invitations à essayer de conclure cette affaire. M. Jean-Claude Gayssot, qui a été un excellent ministre de l’aéronautique, voulait en l’espèce trouver une solution pour une compagnie qui comportait des emplois. De même que ses successeurs plus tard, il essayait en toute bonne foi de trouver une solution.

Comme ce surfinancement des avions était un élément de solution, il nous y encourageait. Néanmoins, il était démuni car il ne pouvait pas convaincre les investisseurs défaillants.

M. le Rapporteur : Le ministre vous a-t-il appelé en personne ou cela s’est-il passé au niveau de votre directeur de cabinet ou votre directeur financier ?

M. Noël FORGEARD : Je ne pense pas que M. Gayssot m’ait appelé directement. En revanche, je lui rendais visite environ trois fois par an pour faire un tour d’horizon sur Airbus, car nous avons beaucoup de relations d’affaires avec le Ministère, en particulier les avances remboursables pour le développement des Airbus. Nous avons certainement, à une occasion ou une autre, évoqué cette question avec M. Gayssot. Je n’en ai pas de souvenir précis.

M. le Rapporteur : Il n’y a donc pas eu de marché avec un écrit.

M. Noël FORGEARD : Pas du tout.

M. le Rapporteur : Les pressions n’ont pas été très fortes.

M. Noël FORGEARD : Non, d’ailleurs s’il m’avait été demandé de vendre l’avion 60 millions, j’aurais refusé.

M. le Président : Je souhaiterais étendre la question. Avez-vous eu le sentiment du rôle que jouait l’Etat dans le montage de ce marché ou avez-vous eu le sentiment que c’était plutôt une affaire très privée entre le Crédit agricole, Air France et les autres partenaires ?

M. Noël FORGEARD : Je parle sous le contrôle de M. Brandes. J’ai eu le sentiment que l’équipe d’Air Lib était très désemparée. Elle faisait le tour de Paris pour trouver une solution. Elle recueillait de bonnes paroles dans les cabinets des ministres. Elle essayait de monter son tour de table financier sans y parvenir. Il a dû y avoir quelques coups de fil entre Bercy, le ministère des Transports et les investisseurs potentiels, mais tout cela n’a jamais vraiment convergé.

M. le Rapporteur : Vous avez dit tout à l’heure avoir eu quelques contacts avec M. Corbet, puis avoir confié l’affaire à votre directeur financier. Vous avez laissé entendre que ces relations n’aboutiraient à rien. Hélas, la suite l’a prouvé, mais quels sont les éléments qui vous avaient amené à cette conclusion ?

M. Claude BRANDES : Dès l’instant où la structure fiscale, qui était la condition indispensable à l’opération, ne voyait pas le jour, que les prêteurs n’étaient pas légion -du moins ceux qui existaient ont disparu assez rapidement- et qu’il n’y avait pas d’investisseur, il n’y avait strictement aucune perspective de mise en oeuvre de l’opération.

Il est important de souligner que, certes, Airbus a fait de gros efforts sur les prix, mais sans la mise en oeuvre de la structure fiscale, l’opération pour Air Lib ne présentait aucun intérêt.

M. le Rapporteur : Aviez-vous demandé des éléments financiers sur la situation du groupe Holco et de sa filiale, la société d’exploitation Air Lib, pour conseiller votre président avant qu’il ne prenne sa décision ?

M. Claude BRANDES : Oui, nous avons eu des contacts très larges et non pas seulement limités au président d’Holco et les responsables d’Air Lib. Nous avions donc une idée très précise de ce qu’était la situation financière d’Air Lib. Il est évident que, dès l’instant où notre intervention dans l’opération se limitait à la vente de l’avion, même si nous avons eu peu à peu d’autres engagements financiers, nous n’avions aucune raison particulière d’aller plus avant dans l’analyse de la situation financière d’Holco.

M. le Rapporteur : La compagnie Air Lib vous avait-elle remis des documents financiers sur sa situation et ses perspectives ?

M. Claude BRANDES : Non pas officiellement.

M. le Rapporteur : Avez-vous négocié avec le groupe Holco ou la société d’exploitation ?

M. Claude BRANDES : Les partenaires à la table des discussions étaient le président Corbet, qui présidait à la fois Holco et Air Lib, le directeur financier d’Air Lib et le conseiller financier de la banque Arjil chargée de trouver un investisseur et de convaincre Bercy d’accepter une structure dérogatoire par rapport à ce qui se fait dans ce domaine.

M. le Rapporteur : Qui était le responsable à la banque Arjil de ce dossier ?

M. Claude BRANDES : Il y avait trois personnes dont un partenaire d’Arjil M. Jean-François Court. Cette personne, qui connaissait bien les arcanes de Bercy, a été l’un des éléments clés pour négocier avec l’administration fiscale.

M. le Rapporteur : Dans vos négociations avec la plupart des compagnies, est-ce courant d’avoir une banque d’affaires type banque Arjil ?

M. Noël FORGEARD : Pas du tout. Cela n’arrive jamais. Dans ce cas précis, la négociation était très particulière puisqu’il s’agissait accessoirement de vendre des avions, mais surtout du point de vue des acheteurs, de trouver un financement.

M. le Rapporteur : La commission versée à la banque Arjil pour essayer de trouver un financement s’élève à 800 000 euros. Est-ce quelque chose qui vous étonne, vu les pratiques du milieu ?

M. Noël FORGEARD : Non.

M. le Rapporteur : Bien qu’il soit exceptionnel d’avoir une banque d’affaires qui aide à trouver un mode de financement.

M. Noël FORGEARD : Il n’est pas exceptionnel qu’une banque d’affaires aide à trouver un financement, mais il est rare qu’une banque d’affaires soit associée à une transaction commerciale. Toutefois, je ne vois rien de très étonnant à ce qu’Holco et Air Lib aient pris une banque d’affaires, même si l’intervention de la banque Arjil, me semble-t-il, portait surtout sur le GIE fiscal et la recherche d’un investisseur.

Pour éviter toute zone obscure, la banque Arjil se trouve être, par une pure coïncidence, une filiale du groupe Lagardère qui est l’un des actionnaires de référence du groupe EADS, dont Airbus est elle-même filiale. Mais c’est une coïncidence totale, à moins que les dirigeants d’Air Lib Holco aient fait le raisonnement que cela pourrait aider. Toutefois, à ma connaissance, il n’y a eu à aucun moment de contacts directs ou sans témoin entre nous et la banque Arjil.

M. le Rapporteur : Avez-vous pu savoir la raison pour laquelle ils avaient pris la banque Arjil ?

M. Claude BRANDES : Je crois que la banque Arjil a dû intervenir dans la reprise par Holco, donc M. Corbet, de la mouvance Air Liberté AOM. Je pense que les contacts se sont noués à ce moment-là.

M. le Rapporteur : Il y avait une autre banque canadienne, mais c’est surtout la banque Arjil qui a été largement rémunérée à cette fin.

M. Claude BRANDES : La CIBC est la banque canadienne qui, au demeurant était sur le point de se retirer du financement aéronautique, a été approchée dans l’opération A340-300 afin d’apporter de la dette, mais qui n’a pas hésité longtemps avant de faire savoir qu’elle n’était pas intéressée par l’opération.

M. le Président : C’est un point important pour nous parce que cela fixe le cadre. Ainsi la CIBC n’a manifesté aucun intérêt à la création du GIE fiscal.

M. le Rapporteur : Les avez-vous vus assister à des réunions ?

M. Claude BRANDES : Une seule fois.

M. le Rapporteur : Vous souvenez-vous de la personne qui était présente ? N’était-ce pas un dénommé David Mongeau ?

(Ils répondent par la négative au nom de David Mongeau.)

M. Claude BRANDES : Les personnes qui participaient aux réunions étaient des représentants de la banque à Londres.

M. le Rapporteur : Oui, mais ce sont des représentants de la banque à Londres qui sont venus conseiller Holco.

La deuxième partie de notre entretien concerne les négociations engagées par IMCA, fin 2002 début 2003, pour l’achat d’appareils neufs. Quel a été votre rôle dans ces discussions et ces négociations, et les propositions exactes formulées par M. de Vlieger ? Comment se sont déroulées les négociations et pourquoi n’ont-elles pas abouti ?

M. Noël FORGEARD : Pour l’exhaustivité des débats, entre la phase dont on vient de parler et celle que nous allons aborder, il y a eu encore quelques tentatives avortées de lease fiscal d’autres avions que des A340-300. Par exemple, nous avons essayé avec un A330 d’Air Louxor que nous avions en stock et que nous appelons dans notre jargon une "queue blanche", avec des A320 d’occasion de la compagnie australienne Ansett qui étaient restés sur les bras des Agences de Crédit Export. Nous avons cherché tous les avions sur lesquels des prix très bas pouvaient être consentis afin d’aider à la mise en place d’une structure fiscale qui aurait aidé à résoudre leur problème de financement. Rien de tout cela n’a marché.

M. Claude BRANDES : Concernant les avions d’occasion, la propriété n’était pas celle d’Airbus. Ces avions appartenaient aux Agences de Crédit Export, donc aux gouvernements européens. Par ailleurs, il y avait un problème de principe juridique qui se posait dans la mesure où une structure fiscale, telle que nous l’avons rapidement évoquée, ne peut fonctionner que pour des avions neufs et non pas des avions d’occasion.

M. Alain GOURIOU : De manière générale, dans quel délai la société Airbus est-elle capable de fournir un achat qui peut s’avérer urgent ? Avez-vous des avions en stock ?

M. Noël FORGEARD : Nous ne fabriquons les avions que sur commande. Il peut arriver, et c’était le cas de cet avion d’Air Louxor, que l’acheteur fasse défaut. Nous avons donc un avion en stock que nous essayons de revendre.

En ce qui concerne les avions d’occasion, nous en avons effectivement une flotte. A cet égard, nous avons une activité que l’on appelle d’"asset management". Ce sont des avions dont, pour une raison ou une autre, nous avons dû financer la vente et donc que nous louons. Ils peuvent revenir chez nous auquel cas nous les replaçons ailleurs.

M. Alain GOURIOU : Combien d’unités avez-vous dans cette flotte d’occasion ?

M. Noël FORGEARD : Plusieurs dizaines d’avions, mais essentiellement des avions de génération ancienne, des A310 de différents types, des A300, beaucoup plus que des avions modernes.

M. Claude BRANDES : Il faut distinguer deux choses dans l’"asset management".

Ce sont tous les avions sur lesquels Airbus, d’une manière ou d’une autre, a pris un engagement financier. Cela ne signifie pas que ces avions sont disponibles à la revente. Ils sont chez les clients, mais il y a un engagement financier qu’Airbus suit de manière attentive.

La deuxième catégorie, ce sont ces mêmes avions sur lesquels nous avons effectué un financement. En cas de défaut de la compagnie, nous récupérons ces avions. C’est ce type d’avion qui est recommercialisé par la structure "asset management".

M. le Rapporteur : Quel a été votre rôle dans ces négociations qui n’ont pas abouti ?

M. Noël FORGEARD : Fin 2002, il a commencé à être verbalement question d’un achat d’avions neufs de la famille A320. En tant que président d’Airbus, je suis obligé de sélectionner mes priorités, mais quand j’ai su qu’il s’agissait d’un achat d’avions neufs, je m’en suis totalement désintéressé car, connaissant le fond du problème d’Air Lib qui était de trouver du cash, il était par construction évident qu’un achat d’avions neufs ne pouvait pas permettre de générer du cash puisqu’il n’y avait pas de possibilité de réaliser une plus-value. Je me suis dit que cette affaire allait nous faire perdre encore plus de temps que la précédente.

Je ne me suis pas opposé aux contacts des équipes d’Airbus avec les responsables d’IMCA. Dans un courrier du 23 janvier 2003, IMCA a déclaré son intention d’acquérir dix-sept plus douze appareils de type A320.

M. le Président : Qui était IMCA en l’occurrence ?

M. Claude BRANDES : Erik de Vlieger.

M. le Rapporteur : C’est le groupe familial.

M. Claude BRANDES : Il a été accompagné, dans ces discussions, de M. Corbet.

M. le Rapporteur : Pour être précis, est-ce une lettre d’une commande ferme ?

M. Noël FORGEARD : Non, c’est une déclaration d’intention de négociation.

M. Claude BRANDES : Il demande à Airbus de faire une proposition pour l’achat de ces appareils : dix-sept fermes et douze options.

M. Noël FORGEARD : Il y a eu ces contacts avec une proposition en février. Pour ma part, je continuais à me demander où nous allions. Cet investisseur semblait être court en fonds pour renflouer l’entreprise. Je me demandais jusqu’où il voulait aller, jusqu’au moment où j’ai compris que le but de l’opération était, de leur point de vue, d’obtenir d’Airbus l’injection d’environ 50 millions de dollars dans Air Lib, au motif totalement fallacieux que les 54 millions que nous avions reçus en acompte de Flightlease sur les A340 étaient en quelque sorte la propriété d’Air Lib et devaient leur être rendus.

Quand j’ai pris conscience de cela, j’ai compris le pourquoi de cette initiative absurde. Il n’était évidemment pas question de rendre les 50 millions, puisqu’ils nous étaient acquis par suite du défaut de Flightlease. Pour notre part, nous n’avions strictement rien à voir dans le contentieux entre Air Lib et Swissair. La réponse était connue d’avance, c’était totalement non.

Il y a eu toute une période assez longue et très paradoxale où IMCA déclarait vouloir acheter des avions. Nous leur montrions les acomptes et leur demandions s’ils étaient prêts à les payer. Leur réponse était non et que c’était nous qui leur devions de l’argent. Ils réclamaient les 50 millions de dollars. En fait, ce qu’ils voulaient, c’était que nous injections 50 millions de dollars de fonds frais dans Air Lib, en échange d’une vague promesse d’acheter un jour des Airbus.

M. le Président : Avez-vous reçu, de la part d’IMCA, d’autres documents que cette lettre d’intention ?

M. le Rapporteur : Il n’y a eu que cette lettre, qui est une lettre d’intention et qui n’a jamais débouché sur autre chose.

M. Claude BRANDES : Ce n’est même pas une lettre d’intention, mais une lettre de consultation.

M. le Président : Cela n’a jamais été plus loin que cela ?

M. Noël FORGEARD : Non.

M. le Rapporteur : Avez-vous négocié avec M. de Vlieger en personne ?

M. Claude BRANDES : Oui.

M. le Rapporteur : Quel sentiment vous a donné M. de Vlieger au regard du dossier dont nous avons la charge ? L’avez-vous senti très intéressé par la reprise d’Air Lib ?

M. Claude BRANDES : Il voyait dans Air Lib une opportunité dans le marché aéronautique. Air Lib s’était engagé, par le biais d’une de ses divisions, Air Lib Express, à faire du " bas prix ". M. de Vlieger y a vu en l’occurrence une opportunité, compte tenu du fait qu’Air Lib avait des créneaux très importants.

La deuxième motivation était aussi de rentabiliser des investissements engagés par ailleurs par M. de Vlieger. A titre d’exemple, M. de Vlieger a acheté un aéroport dans la région de Düsseldorf. Lors des premiers contacts que nous avons eus avec lui, il nous indiquait qu’il y aurait deux centres de départ, l’un Paris, l’autre Düsseldorf.

Il y avait, ce qui est logique de la part d’investisseurs pour entrer dans l’opération, d’une part, une opportunité avec le marché français -Air Lib Express-, d’autre part, un moyen de rentabiliser ses premières approches dans le marché aéronautique.

M. le Rapporteur : Avez-vous eu, à ce moment-là, des contacts avec les autorités politiques, le ministère des Finances ou de l’Equipement, ou les cabinets ? Y a-t-il eu des pressions de quelle que nature que ce soit ?

M. Claude BRANDES : Pour nous, c’était une opération purement commerciale. Si un client est intéressé à acheter des avions, nous sommes amenés à répondre et à discuter. Mais l’obstacle fondamental dans cette opération était l’aspect financier. Autant dans la première partie de l’opération, c’est-à-dire les A340, l’avion était là et il était possible de générer de la trésorerie, autant dans le cadre des A319, non seulement il n’était pas possible de générer de la trésorerie parce que les avions étaient livrables en 2004 ou 2005, donc les structures fiscales ne pouvaient avoir de sens qu’à ce moment-là, mais en plus il fallait qu’IMCA ou Air Lib paie les acomptes qui n’étaient pas négligeables.

M. le Rapporteur : Avez-vous fait l’objet de contacts ou de pressions de la part des cabinets ?

M. Noël FORGEARD : Nous avons eu des contacts avec les cabinets du ministre des Transports, du secrétaire d’Etat aux transports, M. Bussereau, et avec de hauts fonctionnaires légitimement concernés à tenter de sauver Air Lib d’un désastre et d’explorer à fond cette ultime piste. Avec la difficulté suivante : quand on n’est pas dans ces types de métier, on peut avoir des difficultés à comprendre que certaines choses ne peuvent pas marcher par construction. Pour ma part, je l’avais vu tout de suite.

M. le Rapporteur : Quelles étaient les demandes : une réduction sur les prix, aucun versement d’acompte, etc. ?

M. Noël FORGEARD : Non, cela n’a jamais été aussi précis que cela. On nous a certes demandé une réduction sur les prix, mais admettons même que nous ayons fait une grosse réduction sur les prix, cela aurait généré un delta absolument minime par rapport à celui de l’affaire A340. Jamais cela n’aurait été suffisant pour renflouer la trésorerie.

M. le Rapporteur : Combien vaut un A320 ?

M. Noël FORGEARD : Le prix moyen est de 40 millions.

M. Alain GOURIOU : M. de Vlieger n’était peut-être pas un client traditionnel des fabricants d’avions puisque son intention, en rentrant dans la participation d’Air Lib, était précisément d’orienter son groupe dans cette nouvelle activité.

M. Claude BRANDES : L’une des filiales d’IMCA avait approché Airbus pour obtenir quelques informations sur les avions, mais ce n’était pas IMCA en direct, comme cela a été le cas à un moment donné.

M. Alain GOURIOU : IMCA vous avait-il donc déjà contacté avant même ces premiers contacts dans le cadre de l’action Air Lib ?

M. Claude BRANDES : Oui, mais pas M. de Vlieger directement. C’était une filiale d’IMCA.

M. Alain GOURIOU : Il m’a semblé lire, dans une correspondance adressée par M. de Vlieger aux salariés d’Air Lib, que l’une des raisons de l’échec de son entrée en participation a été le refus d’Airbus de pratiquer des prix identiques à ceux qui auraient été pratiqués pour une compagnie à bas coût.

M. Noël FORGEARD : Je ne connais pas ce document. Mais il est possible qu’il ait utilisé cet argument.

M. Alain GOURIOU : Je l’ai vu de mes propres yeux. Selon vous, il n’y a donc pas eu, entre vous, de référence à des prix qui auraient été pratiqués à EasyJet ou Ryanair, etc.

M. Claude BRANDES : La référence a été catégoriquement refusée. Il n’était pas envisageable, d’une part, d’aller divulguer des questions commerciales qui tiennent à la relation directe entre un client et un fournisseur. D’autre part, il est évident que, dans la négociation avec IMCA, d’autres éléments devaient entrer en considération.

M. Noël FORGEARD : Supposons un instant que nous nous soyons engagés dans une discussion de réduction de prix pour ces avions.

M. Alain GOURIOU : Cela peut vous arriver avec d’autres compagnies.

M. Noël FORGEARD : Tout à fait. De toute façon, nous aurions buté sur un élément incontournable qui était la volonté claire de M. de Vlieger de ne pas sortir d’argent, mais d’en recevoir de notre part. Il était, de toute façon, hors de question pour lui de payer le moindre acompte, et toute réunion comportait invariablement la référence aux 50 millions de dollars. Les avions n’étaient qu’un prétexte, il n’avait aucun souci de comprendre ce qu’était un avion, quels seraient l’aménagement de la cabine, la densité, l’écartement des sièges... Cela prouve qu’il n’avait aucune intention probablement d’exploiter à court terme des avions.

M. Alain GOURIOU : Pourquoi avait-il alors choisi ces chiffres précis : dix-sept commandes fermes plus douze options ?

M. Claude BRANDES : La flotte d’Air Lib comportait un certain nombre d’avions McDonnell Douglas. M. de Vlieger était parvenu à la conclusion, qui était déjà celle de M. Corbet, qu’un jour ou l’autre, il faudrait remplacer ces avions. C’est le chiffre magique auquel s’ajoutaient de nouvelles dessertes que M. de Vlieger souhaitait introduire.

M. Alain GOURIOU : Les 50 millions de dollars qu’il vous réclamait ne pouvaient, de toute évidence, représenter un acompte sérieux par rapport à la commande qu’il envisageait.

M. le Rapporteur : Cette commande représentait environ 700 millions de dollars.

M. Alain GOURIOU : Il considérait les 50 millions de dollars comme un avoir qu’il aurait eu auprès d’Airbus.

M. Noël FORGEARD : Lors de nos discussions, il ne considérait pas ces 50 millions de dollars comme un acompte, il espérait bel et bien les récupérer en cash et sur-le-champ.

M. le Président : Pour résumer, les parties au contrat étaient totalement différentes, puisque c’était la filiale de leasing de Swissair qui avait contracté avec vous.

M. le Rapporteur : Avez-vous des déclarations à faire sur M. Corbet, son sérieux, sa capacité de gestion, suite aux différents contacts que vous avez eus avec lui ?

M. Claude BRANDES : Nous avons toujours entretenu des relations extrêmement cordiales avec M. Corbet. Lors de nos discussions, j’ai toujours eu l’impression d’un homme sincère et confronté à un problème insurmontable, c’est-à-dire son problème financier. La preuve de sa bonne volonté est que, pour les A340, quand nous ne sommes pas parvenus à trouver les prêteurs au niveau qui nous semblait souhaitable, il a accepté de rétrocéder une partie du bénéfice fiscal qui devait aller dans la trésorerie d’Air Lib pour participer à l’opération de montage financier. J’ai eu cette impression d’un homme sincère.

M. Noël FORGEARD : M. Corbet avait une bonne réputation de pilote à Air France. C’est un homme d’un charisme personnel certain, mais dépassé par la technicité de tous ces dossiers, entouré d’experts, de pseudo-experts ou de conseillers qui ont dû d’ailleurs lui faire bâtir cette nébuleuse.

M. le Rapporteur : Avez-vous beaucoup fréquenté Me Léonzi ?

M. Claude BRANDES : Pour ma part, je l’ai rencontré, mais pas dans le cadre de la négociation. Lors de la première négociation sur les A340, il y a eu une courte visite au cabinet Léonzi, mais par la suite, nous ne l’avons plus vu dans l’opération.

M. le Président : Je vous remercie pour toutes ces informations.


Source : Assemblée nationale (France)