Louange à Dieu
Prière et salut sur le prophète, sa famille et ses compagnons

Excellence, dr. Mahathir Mohamad, Premier ministre du royaume de Malaisie, président du 10e sommet de l’Organisation de la conférence islamique,
Majestés, Excellences, Altesses,
Mesdames et Messieurs,

Il me plait de vous adresser, Excellence, cher frère, monsieur le Premier ministre, l’expression sincère de mes remerciements, pour avoir accueilli le présent sommet ainsi que pour les dispositions prises par le gouvernement du pays frère qu’est la Malaisie, pour en assurer le succès.

Je tiens également à vous féliciter d’avoir accédé à la présidence de notre conférence. Je n’ai pas de doute que la sagesse et la perspicacité qui vous caractérisent sont autant de gages pour le succès de notre organisation a assumer, au mieux, les charges qui sont les siennes.

Je ne saurais laisser passer cette occasion, sans assurer notre vénéré frère, Son Altesse cheikh Hammad bin Khalifa al Thani, émir de l’État de Qatar, de toute l’estime que nous lui vouons pour les efforts efficients qu’il a déployés à la présidence du sommet précédent.

Nous nous retrouvons donc dans ce grand pays, animés d’une ferme volonté d’œuvrer davantage encore pour arrêter une vision islamique réaliste, qui nous permette d’affronter les défis que posent la conjoncture délicate actuelle et l’accélération des mutations qui s’opèrent dans le monde consécutif au 11 septembre 2001.

Il nous incombe, pour cela, de faire jouer la solidarité islamique et de mobiliser nos énergies au service des justes causes de notre oumma. Il nous appartient ainsi de nous investir, de façon active et efficiente, dans les efforts visant à faire régner la paix et la concorde dans tous les foyers de tension, et plus particulièrement dans la région du Moyen-Orient.

À cet égard, nous continuons à multiplier les initiatives visant à instaurer la paix dans la région et à faire prévaloir la logique de la loi sur celle de la force, nonobstant la tournure prise par les événements, et qui est porteuse des plus graves périls.

La cause qui est celle du peuple palestinien frère restera au cœur des préoccupations de notre organisation. À cet égard, notre engagement en faveur de la légalité internationale et de la voie de la négociation ne s’est jamais démenti.

Nous tenons, en effet, à réaffirmer notre attachement sans faille à une paix juste et globale, insistant, au passage, sur la nécessité pour Israël de se retirer totalement de l’ensemble des territoires arabes occupes, au lieu de s’ingénier à accroître la tension dans la région, en attentant sans vergogne à la souveraineté du pays frère qu’est la Syrie, agression qui va à l’encontre de l’unanimité de la communauté internationale qui s’est prononcée en faveur d’un apaisement dans la région permettant le rétablissement de la confiance, du dialogue et de la construction de la paix.

Or cet objectif n’est réalisable que si nos frères palestiniens sont rétablis dans leurs droits légitimes et sont en mesure de fonder leur État indépendant, ayant pour capitale al Qods al Charif, et vivant, dans la paix et la concorde, cote à cote avec l’État d’Israël.

La feuille de route, nantie du soutien international et agréée par toutes les parties, laisse, certes, entrevoir une lueur d’espoir pour un règlement de la question palestinienne. Mais, qu’en est-il des moyens d’accompagnement pour en assurer une mise en œuvre efficiente, propre à mettre un terme au conflit dans la région ?

La spirale de la violence continue inexorablement à récolter, au quotidien, des vies innocentes, traduisant la prééminence de la logique de la violence et de la crispation, et dressant un surcroît d’entraves sur le chemin de la paix.

Il n’en demeure pas moins que nous demeurons, on ne peut plus, attachés à la voie de la négociation pacifique, la seule démarche qui vaille pour réaliser cette paix que nous appelons de nos vœux.

En tant que président du comite al Qods, nous n’avons épargné aucun effort pour faire prendre aux parties concernées toute la mesure de la gravité de la situation et pour souligner la nécessité d’intervenir afin de convaincre le gouvernement israélien du devoir qui lui incombe de se plier aux résolutions de la légalité internationale et de préserver l’identité et le cachet culturel de cette ville, naguère synonyme de coexistence harmonieuse entre les trois religions révélées.

C’est dans le même esprit que nous appelons à des efforts qui permettent au peuple irakien frère d’exercer sa souveraineté, de préserver sa sécurité, sa stabilité, son unité nationale et son intégrité territoriale, à travers ses institutions démocratiques, et d’engager rapidement le processus de reconstruction de son pays, avec le concours effectif et efficace de l’Organisation des Nations unies.

Majestés,
Excellences,
Altesses,

Le terrorisme nous a posé et continue de nous poser un défi majeur qu’il nous faut relever. Ses tentacules criminelles se sont étendues jusqu’à un certain nombre de nos États islamiques, à des fins de déstabilisation. Mais la volonté inébranlable du Maroc, son roi et son peuple, d’assurer quiétude et sécurité à notre société, nous a donne la force de repousser le fléau du terrorisme avec toute la fermeté et toute la vigueur requises.

Nous nous y sommes pris en restant fermement attachés à notre option démocratique, forts de l’unanime condamnation par notre peuple d’un phénomène étranger à notre culture et incompatible avec les valeurs de notre religion tolérante qui prohibe l’effusion de sang et la violence meurtrière, prône la paix et la coexistence en bonne intelligence et récuse, en tout cas, les allégations dont est affublée notre sainte religion, pourtant vouée à honorer l’homme.

Former l’homme a toujours été une nécessité pressante. Aujourd’hui ce besoin est plus impérieux encore. Il nous faut donc accorder toute l’importance voulue à l’éducation et à l’enseignement de qualité, en ayant a l’esprit les exigences du présent et les impératifs de l’avenir.

Notre propos, en effet, est de préparer une jeunesse saine, imprégnée des valeurs de citoyenneté, consciente de ses responsabilités à l’égard de sa société.

Mais elle a besoin, pour y parvenir, de comprendre comme il se doit les vérités immuables de l’islam. Ce sont, en effet, ces constantes qui assurent à notre identité islamique, protection et immunité contre les déviations, l’ignorance et l’extrémisme.

Affranchir nos sociétés du carcan de l’analphabétisme et de la pauvreté, fléaux générateurs de désespoir et de scepticisme résigné face à l’avenir, voilà un des défis majeurs qui nous interpelle aujourd’hui.

Il exige que nous nous employions essentiellement à améliorer les conditions sociales de nos peuples et que nous nous prévalions des moyens disponibles pour endiguer ces fléaux et réaliser nos objectifs de développement durable.

D’où la nécessité d’une démarche globale où s’intègrent et se complètent la démocratie, le développement économique et la solidarité sociale, qui est le fondement même de la sécurité et de la stabilité.

Pour bâtir donc la personnalité du citoyen musulman, fidèle à son identité, ouvert sur son temps, je propose que soit élaboré un plan d’action bien défini dans ses échéances et ses moyens de réalisation et d’évaluation, pour l’éradication de l’analphabétisme qui constitue une honte pour une oummah dont le livre sacré commence par ce verset révélé : " Lis, au nom de ton Seigneur qui a crée tout .....".

En ces temps de globalisation déferlante, nous ne pouvons prétendre faire entendre notre voix, ni faire respecter notre parole parmi les nations, tant que nous ne nous sommes pas résolus à jeter les bases solides d’une solidarité économique à partir des richesses matérielles et des ressources humaines dont Dieu nous a dotés et qui nous habilitent à jouer de façon efficiente le rôle qui nous revient dans l’économie mondiale.

En effet, ce ne sont pas tant les moyens qui nous font défaut, mais plutôt une planification rigoureuse d’une politique économique ouverte, ayant des objectifs communs et bénéficiant d’une volonté à toute épreuve. À cet égard, l’histoire récente recèle quelques expériences dont nous devrions nous inspirer pour bâtir un système économique intégré, tenant compte des intérêts de tous.

Il est un fait qu’aucun pays ne pourra, à lui seul, faire face aux défis de la mondialisation. Nous ne pourrons, par ailleurs, attendre d’autrui qu’il redresse nos économies pour nous. Il nous incombe, donc, de compter sur nous-mêmes et de faire de l’élément humain à la fois le moyen et la finalité du processus de développement. Nous devons également faire du système démocratique, fondé sur la proximité et la participation, un outil pour l’éradication du chômage, de la pauvreté et de l’analphabétisme.

Ce faisant, nous serons plus à même d’assurer le progrès et la prospérité auxquels aspirent nos peuples, notamment en Afrique. D’où la nécessité de manifester à l’egard des pays africains musulmans une solidarité à la mesure de l’écart qui sépare leurs faibles moyens et leur ambitions, telle celle relative à l’initiative prometteuse du NEPAD.

C’est la la voie à suivre afin d’extirper les causes qui engendrent la frustration, la haine et le désespoir, et qui, par la violence et le terrorisme, se transforment en profonde rancœur et en agressivité.

Majestés,
Altesses,
Excellences,

Je demeure persuadé que notre oumma remplit toutes les conditions pour une solidarité islamique plus efficiente. Grâce à elle, notre communauté sera plus à même d’occuper la place qui lui revient sur la scène internationale et sera en mesure de défendre les justes causes qui sont les siennes.

D’où notre appel pour la mise en œuvre optimale de l’action islamique commune, dans le cadre de l’Organisation de la conférence islamique, que le Maroc s’honore d’avoir vu naître sur son sol et d’en avoir accueilli les sommets les plus déterminants.

L’heure est venue de revoir les structures et les méthodes de travail de notre organisation et de mettre à niveau ses organes, afin d’en faire un instrument efficace de coordination, d’intégration économique, d’interaction avec la société civile et de rayonnement de la civilisation islamique.

Le patrimoine commun de notre oumma constitue pour nous une immense responsabilité, qui nous impose de multiplier les efforts pour défendre les intérêts suprêmes de nos pays et de les prémunir contre les risques de déchirement et de démembrement.

Nous devons aussi agir en synergie positive avec la civilisation universelle et nous affirmer comme un regroupement international agissant, dans un monde ou les entités faibles, renfermées ou artificielles n’ont guère voix au chapitre.

Il est grand temps, aujourd’hui, de faire la part des choses et de distinguer entre les entraves subjectives et objectives, entre les raisons réelles et factices, et entre les facteurs conjoncturels et structurels qui entravent le progrès du monde islamique.

Ce qui est plus grave encore dans ces facteurs, c’est qu’ils nous empêchent d’affronter la réalité et de nous dire notre propre vérité par un effort d’autocritique qui constitue le point de départ le plus indiqué pour procéder à un diagnostic des carences et dysfonctionnements de notre société. Le Tres-Haut dit à cet égard : " Dieu ne changera point ce qu’il a accorde aux hommes, tant qu’ils ne le changeront pas les premiers ".

J’ai la conviction, autant que vous-mêmes, mes chers frères, les dirigeants des pays islamiques, que le présent sommet constitue pour nous une précieuse occasion pour nous rattraper, et pour donner sa pleine expression à la fraternité islamique dans sa plus noble acception, celle qui traduit notre attachement aux vertus de la tolérance, de la solidarité et de la paix universelle.

Wa salamou alaïkoum wa rahmatou allah wa barakatuh." .

Traduction officielle du palais royal marocain.