La proposition faite ces derniers mois de se désengager unilatéralement de la Cisjordanie et de la bande de Gaza si les relations entre les deux côtés restaient dans l’impasse a entraîné une crise à l’intérieur du Likoud. Cette crise était en germe dès la fondation de ce parti, en 1973, car il a toujours associé un réalisme politique acceptant le fait qu’un jour le sionisme devrait se concentrer sur le seul Israël face à l’opposition violente des Arabes et une vision nationaliste romantique fondamentalement attachée à la terre.
Cette association de deux extrêmes n’est plus tenable aujourd’hui et des figures importantes du Likoud considèrent que l’objectif essentiel d’un État juif fort avec un système démocratique libéral est mis en danger par l’insistance à conserver certains territoires. Cette constatation n’est pas le fruit de la menace militaire arabe ou de la condamnation internationale des politiques israéliennes, mais des évolutions démographiques. Comme l’a fait remarquer Ehud Olmert, « ce n’est qu’une affaire de temps avant que les Palestiniens demandent "un homme - une voix" et alors que ferons nous ? ».
C’est ce scénario qui pourrait émerger si les Arabes devenaient majoritaire entre le Jourdain et la Méditerranée avant la constitution de frontières stables. Dans le Likoud, certains extrémistes demandent l’expulsion des Palestiniens tandis que d’autres rejettent l’argument démographique en affirmant que ce problème n’existe pas puisque les Arabes ne seront jamais des citoyens israéliens. Ariel Sharon a lui-même rejeté publiquement l’argument démographique, mais son soutien à des mesures unilatérales de retrait ne s’explique que par la prise en compte de ce problème. En outre, il y a de plus en plus de partisans chez les Palestiniens d’un abandon de la solution des deux États au profit de la revendication d’un État unique où ils finiront par être majoritaires.
Si les Palestiniens ont renoncé à la partition, le seul moyen restant est le retrait unilatéral, même si la « feuille de route » aurait été préférable.

Source
The Guardian (Royaume-Uni)

« Israel’s demographic timebomb », par Jonathan Spyer, The Guardian, 14 janvier 2004.