La décision de l’administration Bush de cesser de soutenir l’aide de 250 millions de dollars au Venezuela fournie par les institutions internationales n’a quasiment pas été notée par la presse. Pourtant, en demandant de telles sanctions maintenant, Washington risque de faire une nouvelle erreur dans sa gestion de l’homme fort vénézuélien Hugo Chavez. En annonçant sa décision au début du mois, la Maison-Blanche a mis en avant le rôle du Venezuela dans le trafic de femmes et d’enfants. L’administration Bush a raison de faire de cette question une priorité, même si des questions sur les véritables motifs de cette décision ont été soulevées. On voit mal, en outre, comment des sanctions économiques pourraient aider au règlement du problème.
Ce n’est pas la bonne façon de traiter avec M. Chavez. En dépit des réclamations de l’opposition, le référendum gagné par M. Chavez lui a rendu sa légitimité aux yeux de la communauté internationale, mais Washington n’a accepté le résultat qu’à contrecœur. Après cette élection, le moment semblait opportun pour une relation plus pragmatique entre les deux pays, mais la décision de Washington va décourager une meilleure relation même si elle sera appréciée par les durs dans l’administration Bush et dans le gouvernement de Caracas. Quoi qu’il en soit, cette décision sera symbolique puisque pour que les 250 millions de dollars ne soient pas versés, il faudrait un accord des autres pays. Or, le Venezuela bénéficie aujourd’hui de la hausse des bénéfices pétroliers et n’en a pas besoin. L’impact sur le Venezuela sera donc limité, mais Washington sera mal vu par les autres pays du continent.
Cette politique est aussi contre-productive que celle contre Cuba. Surtout que le Venezuela n’apparaissait même pas sur la liste des cinq pires pays concernant le trafic d’êtres humains en Amérique du Sud dans le rapport sur ce sujet rédigé en 2003 par le département d’État. Deux ans après avoir soutenu le coup d’État au Venezuela, il faut que Washington restaure sa crédibilité dans le pays, cette nouvelle politique n’en prend pas le chemin.

Source
New York Times (États-Unis)
Le New York Times ambitionne d’être le premier quotidien global au travers de ses éditions étrangères.

« Picking a Fight With Venezuela », par Michael Shifter, New York Times, 20 septembre 2004.