Katherine Harris, qui joua un rôle clé dans le trucage des élections de 2000, assure aux déjà convaincus lecteurs du Washington Times que tout va pour le mieux dans l’organisation des élections de 2004. Elle accuse l’ancien président Jimmy Carter de mauvaise foi partisane lorsqu’il dénonce les trucages en Floride. Malheureusement, ces explications interviennent alors que le scrutin a déjà commencé en Floride dans le plus total désordre.
La mascarade électorale se reproduit aux États-Unis et elle s’exporte.
Le directeur de la Rand Coporation, James Dobbins, se félicite des élections en Afghanistan qui, selon lui, devraient servir de modèle pour l’Irak. Dans l’International Herald Tribune, il dégage la raison du succès : Hamid Karzaï n’est pas controversé aux États-Unis, il a donc obtenu le soutien de toutes les forces états-uniennes. Le résultat était donc aisé à contrôlé et programmé d’avance. De même la réussite des élections en Irak dépend de la volonté unanime des forces états-uniennes pour imposer Iyad Allaoui.
Dans le Washington Times, Don Ritter et Atiq Panjshiri s’émerveillent eux aussi des élections afghanes. Cependant, beaucoup plus réalistes, ils ne célèbrent pas la victoire de la démocratie, puisque tout le monde sait que le scrutin a été truqué à grande échelle, mais celle des urnes sur les balles, c’est-à-dire le retour de la paix. Un point de vue d’autant plus sincère que Don Ritter joua un rôle central dans l’organisation et le financement du jihad contre les Soviétiques et que le clan tadjik des Panjshiri fut son allié dans le renversement des talibans.

Ken Weinstein, directeur de l’Hudson Institute, a accordé un entretien au Figaro. Il récuse la notion de fracture transatlantique dans la mesure où, selon lui, les États-Unis n’ont pas de problèmes avec l’Europe, mais seulement avec la France et l’Allemagne. Il estime que le prochain président états-unien, quel qu’il soit, sera l’héritier et le continuateur de l’administration Bush 1. Plus, encore, si Bush restait à la Maison-Blanche, sa seconde équipe serait plus homogène et agressive que la première.
Quel est donc cet héritage politique ? Pour répondre à cette question, El Pais reproduit la préface que José Saramago a rédigé en introduction au Cartel Bush dont la version espagnole paraît la semaine prochaine. Le Prix Nobel de littérature y souligne que l’ère Bush est celle du mensonge, qui détruit la confiance et ouvre la voie à la guerre : « Il ment, il sait qu’il ment, il sait que nous savons qu’il ment, mais il continue de mentir », écrit-il.

George Soros appelle les lecteurs du Taipei Times, qui n’en ont pas le pouvoir, à chasser Bush de la Maison-Blanche. Ce n’est évidemment pas dans l’espoir de les convaincre à agir qu’il s’exprime ainsi, mais au contraire pour les préparer à subir. La campagne internationale des démocrates vise à préparer l’opinion publique étrangère à réserver un bon accueil à John Kerry s’il était élu. M. Soros va jusqu’à stigmatiser l’invasion de l’Irak alors même que son champion, le sénateur Kerry, a approuvé cette guerre et a confirmé qu’il la continuerait.
Comme en miroir, l’écrivain britannique John Le Carré s’adresse aux lecteurs du Los Angles Times pour leur demander de débarrasser le monde de George W. Bush. Cette apostrophe n’est pas isolée : le Guardian a appelé ses lecteurs à écrire aux citoyens états-uniens pour leur demander de voter Kerry. D’une manière générale, les Britanniques, humiliés par le suivisme de Tony Blair, jouent les grands frères européens vis-à-vis du Nouveau monde, ce qui suscite une irritation croissante outre-Atlantique.

Enfin, on sait que Laurent Gbagbo est en conflit avec la presse de gauche française qui l’a longuement accusé d’avoir commandité des massacres sans jamais avoir pu attester de l’existence même de ces tueries. C’est donc au quotidien conservateur Le Figaro que le président de gauche de la Côte d’Ivoire a accordé un entretien. Il y met en cause ses opposants armés, soulignant que ceux-ci ont un intérêt personnel à la poursuite de la guerre civile et se laissent aller à une dérive mafieuse. Jamais, il ne met la France en cause bien que l’armement des rebelles par Paris soit un secret de polichinelle. Cependant, et c’est certainement là le point le plus important de son propos, il met en garde les grandes puissances contre le rejet que leurs manipulations suscitent en Afrique. Il serait préjudiciable à tous que le conflit existant entre l’Occident et le monde arabe s’étende au monde noir.