L’ancien ministre canadien des Affaires étrangères, Lloyd Axworthy, appelle dans le Toronto Star ses concitoyens à résister aux pressions des États-Unis. M. Bush, qui se rendra prochainement au Canada, tente d’étendre à toute l’Amérique du Nord les restrictions de libertés qu’il a imposé dans son pays. En outre, il veut déployer sur le sol canadien des éléments du dispositif dit « de guerre des étoiles ». Non seulement le bon voisinage ne signifie pas la soumission, mais le Canada serait bien inspiré de se rapprocher du Mexique qui subit les mêmes pressions que lui.
Comme pour donner raison aux craintes de M. Axworthy sur la paranoïa états-unienne, Daniel Pipes se félicite dans le New York Sun de la réaction rapide des Néerlandais à comprendre le péril islamique dès le premier meurtre. Il aura en effet suffit de l’assassinat de Theo van Gogh, revendiqué par un jihadiste, pour que le pays s’embrase dans un feu d’artifice d’actes islamophobes. Un sondage assure qu’aux Pays-Bas, pays de la tolérance, 40 % de la population veut désormais jeter les musulmans dehors. La guerre des civilisations est en marche .
À l’inverse le prix Nobel de la paix, Shirin Ebadi, relate dans le New York Times son désarroi devant l’interdiction qui lui est faite de publier son dernier livre aux Etats-Unis. En vertu de l’embargo économique que le président Bush vient de reconduire contre l’Iran, il est interdit aux agents littéraires, traducteurs, éditeurs etc. de collaborer avec elle. La célèbre avocate vient donc de porter plainte contre le département du Trésor pour atteinte à son droit d’expression. Dans une tribune libre, non-rémunérée, elle observe que, si son droit d’expression est limité en Iran, il est nul aux États-Unis.

Ed Feulner, président-fondateur de la Fondation Héritage, monte au créneau dans le Boston Globe. Il martèle que le président Bush a été largement élu et dispose donc d’un vrai mandat populaire. Sur les questions intérieures, il aurait bénéficié d’un fort soutien pour son projet de réforme des retraites et surtout pour sa défense du monopole hétérosexuel du mariage. Cette intervention tient de la méthode Coué : en réalité, l’organisation du scrutin (avec 36 millions de voix enregistrées électroniquement ou par Internet) ne permet pas de vérifier si M. Bush a été ou non bien élu. Il est par contre certain que sur les deux sujets évoqués, M. Bush dispose d’une majorité.
Quoi qu’il en soit, ce « mandat clair » autorise déjà M. Bush à exclure de son administration tous ceux qui contestent sa ligne. Michael Ledeen, journaliste et néanmoins ancien collaborateur des services secrets israéliens et états-uniens et ancien membre étranger de la Loge P2, se réjouit dans USA Today de la purge en cours à la CIA. Voilà trois ans qu’il l’attendait. Il reproche principalement aux cadres qui viennent d’être limogés d’avoir prétendu que les États-Unis devaient se distinguer d’Israël s’ils voulaient retrouver une crédibilité au Proche-Orient.

Shlomo Avineri, qui a joué le rôle d’expert ès démocratie pour le compte des États-Unis en Europe centrale, assure dans le Jerusalem Post que les élections palestiniennes ne sont qu’un leurre. Selon lui, quel que soit le successeur d’Arafat, il ne sera qu’un potentat de plus appuyé sur des polices secrètes. C’est une constante de la propagande israélienne de prétendre qu’Israël est un îlot démocratique, entouré d’un océan arabe non-démocratique. Cette généralisation absurde est un moyen de discréditer le président de l’Autorité palestinienne pour lui dénier la capacité de négocier au nom de son peuple.
Dans un entretien au Figaro, le ministre français des Affaires étrangères, Michel Barnier, souligne l’importance des élections présidentielle, municipales et législatives qui doivent avoir lieu en Palestine occupée, y compris à Jérusalem-Est. Or, le gouvernement d’Ariel Sharon, tout en déclarant soutenir le processus électoral, vient de faire fermer les bureaux d’enregistrement de Jérusalem-Est. M. Barnier se réjouit de la volonté du président Bush d’accompagner la création d’un État palestinien avant la fin de son mandat, en 2009, mais il rappelle que le même M. Bush s’était engagé, lors de la rédaction de la « feuille de route » à y parvenir avant 2005. À propos de l’Union européenne, l’ancien commissaire européen se considère sans surprise que l’adoption du Traité constitutionnel est indispensable.