Survivront-ils à la guerre ?

Bagdad, Genève, 12 mars 2003 - Alors que la menace de guerre se précise en Iraq, l’UNICEF se prépare à offrir à plus de 400 000 enfants du pays une alimentation thérapeutique spéciale dans le souci de renforcer leurs chances de survie au cas où un conflit éclaterait.

De concert avec le Ministère de la santé, l’UNICEF a acheminé en Iraq ces derniers temps, par camion, plus de100 000 tonnes de biscuits à teneur élevée en protéines. Ces biscuits, que le gouvernement livre aux centres de santé du pays tout entier, font partie de la campagne que mène l’UNICEF en ce moment pour fournir aux enfants iraquiens des aliments nutritifs et des vaccins avant un éventuel conflit.

« Nous espérons toujours une issue pacifique à la crise, » a dit la Directrice générale de l’UNICEF Carol Bellamy. « Mais le fait est que les enfants de l’Iraq sont dans une situation d’extrême vulnérabilité. Une guerre compromettrait leur santé, leur alimentation, leur accès à l’eau salubre - déjà très menacés. En agissant maintenant, nous espérons sauver des vies au cours des semaines et mois à venir. »

L’UNICEF a également livré 155 tonnes de lait thérapeutique pour nourrir les enfants souffrant de malnutrition avancée, une des causes principales de décès chez les enfants de moins de 5 ans. Quelque 10 000 enfants au total bénéficieront immédiatement de ce lait enrichi, qui est en cours de livraison dans chacun des 63 centres de nutrition que gère le Ministère iraquien de la santé.

Les livraisons de l’UNICEF constituent le premier acheminement de biscuits à haute teneur en protéines et de lait thérapeutique dans le pays en deux ans. Ce stock devrait durer un mois. L’UNICEF a également livré divers produits nutritifs aux entrepôts des pays voisins de l’Iraq pour permettre une riposte rapide si la malnutrition venait à s’aggraver brutalement.

L’Iraq a l’un des taux de mortalité des moins de 5 ans les plus élevés du monde : plus d’un enfant sur huit meurt avant d’avoir 5 ans. Ce taux s’est certes amélioré ces dernières années mais la malnutrition reste élevée et affecte le quart des enfants iraquiens de moins de 5 ans - soit près d’un million d’enfants au total.

La moitié des 24,5 millions d’Iraquiens sont des enfants.

Les leçons de 1991

L’UNICEF a observé que la malnutrition des enfants s’était nettement aggravée suite à la guerre du Golfe en 1991, en partie à cause de la destruction de l’infrastructure, en partie à cause d’une mauvaise utilisation des ressources existantes et en partie à cause des sanctions internationales, qui ont considérablement diminué le pouvoir d’achat des familles et donc leur consommation de protéines (absence de viande dans le régime alimentaire). Ceci explique que 60 pour cent des femmes iraquiennes souffrent de d’anémie ferriprive, ce qui contribue au faible poids de leurs nouveau-nés.

« Aujourd’hui, près d’un quart des enfants iraquiens souffrent d’insuffisance pondérale à la naissance, et la même proportion d’enfants de moins de cinq ans souffre de malnutrition », a constaté Carel De Rooy, Représentant de l’UNICEF en Iraq. « Cela est déjà grave. Mais la guerre fait surgir d’autres problèmes : déplacement de populations, interruption de l’approvisionnement en eau et en nourriture, épidémies. Ces problèmes porteraient un coup très grave à une population d’enfants qui, déjà, luttent pour survivre. »

Depuis 1991, l’UNICEF aide le Ministère de la santé à établir des centres de nutrition dans les hôpitaux pour enfants du pays. L’institution offre des formations, des aliments nutritifs spécialisés et du matériel. Cet effort a été élargi pour créer 2 800 unités communautaires de soins aux enfants, chargés de repérer rapidement les enfants qui souffrent de malnutrition et de leur dispenser des soins appropriés. Ces unités, le plus souvent installées dans les écoles, ont permis de toucher environ 70 pour cent des enfants de moins de 5 ans.

L’UNICEF a affirmé qu’en règle générale, les enfants qui souffrent de malnutrition ne meurent pas de faim. « Mais dans cette situation, lorsque les enfants sont affaiblis, une diarrhée provoquée par de l’eau impure peut tuer », a assuré M. De Rooy. « Une détérioration supplémentaire de leur santé et de leur nutrition placera des millions d’enfants dans une situation extrêmement vulnérable », a-t-il précisé.

« C’est simple, ce sont les enfants qui souffrent le plus de la guerre », a affirmé Mme Bellamy. « Les enfants sont les plus vulnérables, sur les plans physique et affectif. Quoi que nous pensions de la guerre, il nous faut le reconnaître. Cela est vrai dans cette région comme cela l’est en Afghanistan, au Soudan, en Colombie et dans des dizaines d’autres pays. Le vrai problème consiste à protéger les enfants en temps de guerre. »

Contexte

Les biscuits à haute teneur en protéines, qui contiennent des protéines, des calories et des micronutriments, ont prouvé leur grande efficacité lors de diverses situations d’urgence dans le monde entier. Ni eau ni préparation ne sont nécessaires et ils peuvent donc être transportés facilement et consommés en toute sécurité dans n’importe quel milieu. Ces biscuits ont déjà été utilisés avec succès en Iraq.
Le lait thérapeutique est utilisé pour le traitement et le rétablissement des enfants qui souffrent d’une grave malnutrition et donc souvent également de conditions qui y sont liées comme la diarrhée chronique - conséquence habituelle d’une eau non salubre.

L’UNICEF aide les enfants iraquiens depuis 1953. Il a ouvert un bureau permanent à Bagdad en 1983 et travaille depuis cette date dans le pays. L’UNICEF s’efforce de veiller à ce que les enfants iraquiens soient vaccinés, bien alimentés et aient accès à de l’eau salubre et des services d’assainissement adéquats ainsi qu’à l’éducation.

Au-delà des efforts qu’il déploie pour améliorer la santé et la nutrition des enfants en prévision d’un éventuel conflit, l’UNICEF a envoyé des tonnes de fournitures humanitaires dans la région et se prépare à organiser une riposte d’urgence si cela s’avère nécessaire.

Source : Unicef