Je me suis demandé ce que je répondrai si la Cour internationale de La Haye me demandait mon opinion sur la barrière de séparation. D’un côté je pense que tout doit être fait contre cette barrière et que le gouvernement d’Ariel Sharon est une tragédie pour Israël, de l’autre, je suis infecté par ce germe du patriotisme qui me dissuade de collaborer avec des groupes étrangers contre le gouvernement israélien.
Sur le principe, rien ne vient me choquer dans le fait de construire une barrière pour protéger les Israéliens du terrorisme, mais ce n’est pas moi qui la construit, c’est Sharon. Je le connais suffisamment pour savoir qu’il va l’utiliser de façon malhonnête. En m’opposant à la barrière, j’ai été confronté à des personnes de bonne foi me rappelant que ce type de barrière sauvait des vies. Ils ont raison. Que dire aux victimes du terrorisme ? Que je suis suspicieux et que je soupçonne Sharon de faire commencer une séparation qui va devenir une annexion ? C’est pour cela que j’ai voté l’année dernière un texte du Meretz se prononçant en faveur de la barrière si elle suit le tracé de la frontière de 1967.
Depuis, Sharon est allé encore plus loin que dans mes cauchemars et il a édifier un mur visant à délimiter un Bantoustan. Comment expliquer désormais aux Palestiniens qui voient construire cet horrible mur que ce n’est pas ce que nous voulions ? Le mur de Sharon est un crime contre l’humanité et si la Cour internationale tient compte de mon avis, je suis prêt à signer ce texte comme ma déposition.

Source
Ha&8217;aretz (Israel)
Quotidien de référence de la gauche intellectuelle israélienne. Propriété de la famille Schocken. Diffusé à 75 000 exemplaires.

« My affidavit to The Hague », par Yossi Sarid, Ha’aretz, 21 janvier 2004.