Chas W. Freeman Junior, ancien ambassadeur états-unien en Arabie saoudite pendant la première guerre du Golfe, et expert sur la question du Proche-Orient, a évoqué, dans une interview à Arab News, jeudi 22 janvier 2004, l’état actuel des relations diplomatiques entre les États-Unis et l’Arabie saoudite, mais aussi la guerre en Irak, le terrorisme international, la société saoudienne et les réformes initiées par le prince Abdullah.
Chas Freeman, qui préside actuellement le Middle East Policy Council et Projects international, un cabinet d’affaires états-unien spécialisé dans l’établissement de joint-ventures internationales, a rencontré le prince héritier Abdullah, le ministre des Affaires étrangères, le prince Saoud al-Faisal, et le gouverneur de Riyad, le prince Salman. Au terme de ces entretiens, il a indiqué que l’Arabie saoudite devrait adopter une stratégie à long-terme afin de mettre un terme aux doutes quant à sa crédibilité qui existent dans l’opinion publique états-unienne.
Selon lui, plusieurs membres de l’administration Bush sont pleins de préjugés quant à l’Arabie saoudite, et nuisent ainsi aux relations entre Washington et Riyad, ce qui nécessite une réaction. Il a cité sans hésiter le nom de l’Attorney General états-unien, John Ashcroft, comme l’un de ces membres. Ce dernier, un « ami » et ancien « camarade de classe », participe, avec ses préjugés, d’une tendance qui ne sert pas les intérêts des États-Unis. Dans le même temps, Chas Freeman a indiqué que le président George W. Bush n’a aucune sorte de « rancune à l’égard du royaume ». Mieux, le président états-unien et le prince héritier ont « une excellente relation de travail ».
L’ancien ambassadeur a affirmé qu’une large majorité des États-uniens n’ont aucune compréhension de l’islam ou de l’Arabie saoudite : « ils croient ce qu’ils lisent et une fraction des médias états-uniens est anti-musulmane et anti-saoudienne, et cela se reflète dans l’angle de leurs articles ».
Cet état de fait est renforcé par le fait que, pour la plupart des citoyens états-uniens, la seule chose qui importe est que 15 des 19 membres des commandos suicide du 11 septembre étaient des Saoudiens. Chas Freeman a donc avancé l’idée qu’il était désormais du ressort de l’Arabie saoudite de clarifier sa position et de montrer que « les Saoudiens souffrent autant sous les coups des terroristes que les États-uniens, comme le montrent les attentats à la bombe contre les complexes résidentiels de Riyad en mai et novembre [2003] ».
Il a également suggéré que l’Arabie saoudite mette en place une fondation (« endowment ») afin de financer des campagnes pour améliorer son image, grâce à une augmentation des contacts individuels.
Interrogé sur l’Irak, Chas Freeman a déclaré que la situation y était très volatile et que les forces alliées ne devraient pas y rester. Il a néanmoins reconnu qu’un retrait des forces états-uniennes du pays ne serait pas facile, tant que Washington n’y aura pas mis en place « un semblant de système politique ».

Source
Arab News (Arabie saoudite)
Arab News est un quotidien saoudien qui propose, en plus de quelques articles originaux, une traduction en anglais des articles d’Asharq Al-Awsat. Celui-ci appartient au Saudi Research Marketing Group du Dr. Abdulmuhsun Alakkas, membre du Conseil consultatif saoudien.

« Ex-Envoy Urges Long-Term Strategy to Refurbish Saudi Image in US », par Saeed Haider, Arab News, 22 janvier 2004.