Dans un éditorial solennel, Jean-Marie Colombani, directeur du Monde, s’indigne de l’enlèvement de deux journalistes français en Irak et se félicite de l’union nationale pour condamner ce crime. Jusque-là, rien que du consensuel. Puis, il en conclut que la politique anti-américaine de la France ne saurait constituer une ligne Maginot la protégeant du terrorisme islamique. Et l’éditorialiste de continuer qu’il appartient aux musulmans français de faire la preuve en actes de leur sincérité laïque et démocratique pour démentir leur complicité avec le fanatisme des preneurs d’otages qu’ils ont pourtant déjà condamné en parole.
Le même quotidien publie un entretien avec le Premier ministre du gouvernement de Collaboration irakien, Iyad Allaoui. Ce dernier assure que les terroristes cherchent à frapper les États qui refusent de soutenir la Coalition et son gouvernement. Des attentats, précise-t-il, auront bientôt lieu à Paris, Nice et Cannes, ou encore à San Francisco, ville qui a voté une motion en faveur du retrait des troupes US. Notre « confrère », Le Monde, s’est abstenu de demander au Premier ministre ce qui pouvait pousser les prétendus résistants irakiens à frapper leurs alliés plutôt que leurs ennemis et comment il pouvait avoir connaissance de leurs prochaines cibles. Cette interview doit cependant être lue avec quelques réserves. En effet, les propos du Premier ministre irakien ont été livrés à plusieurs journaux qui n’en rendent pas compte sous la même forme, mais par des citations éparses en ne rapportant pas toujours les mêmes phrases, ni les mêmes formulations.
De son côté, l’éditorialiste Chérif Soliman explique dans Al-Ahram le voyage du ministre français des Affaires étrangères au Caire par le simple prestige de l’Égypte et sa capacité supposée à intervenir en Irak. Pas plus que le reste de la presse, il ne dit mot des contacts avec les services secrets égyptiens.

Washington est troublé par l’annonce de la découverte d’une taupe israélienne au Pentagone que le FBI s’apprêterait à appréhender après qu’elle eut transmis à Tel-Aviv, via l’AIPAC, des documents secrets relatifs à l’Iran. Le suspect, dit-on, serait proche du sous-secrétaire Douglas Feith, lauréat de l’Organisation sioniste américaine, alors que l’on apprend la démission sans motif du rabbin Dov Zakheim, contrôleur budgétaire du Pentagone.
Cette perspective amuse Youssef M. Ibrahim dans Gulf News. Le directeur du Strategic Energy Investment Group ironise que la surprise n’est pas qu’il y a ait un espion israélien au Pentagone, mais qu’il y a ait au Pentagone des secrets auquel Israël n’aurait pas déjà eu accès via les néo-conservateurs et autres sionistes.
L’ambassadeur Itamar Rabinovitch met en garde la communauté juive dans Ha’aretz. Selon lui, cette affaire d’espion pourrait être un coup fourré des responsables états-uniens opposés à une attaque de l’Iran pour convaincre l’opinion publique qu’une telle intervention serait inspirée par Israël, mais inutile aux intérêts US.
Prenant le problème en sens inverse, Frank J. Gaffney Jr, le coordinateur des faucons, remarque dans le Washington Times que si les démocrates ne veulent pas attaquer l’Iran et cherchent à se défausser sur Israël, il faudra bien que l’État juif rende ce service. Tel-Aviv n’avait-il pas déjà bombardé la centrale nucléaire irakienne de sa propre initiative, rendant ainsi possible pour les États-Unis d’engager ultérieurement l’opération Tempête du désert ?

Alors qu’il avait résilié tous ses engagements en Suisse et qu’il avait acheté une maison aux États-Unis pour venir enseigner à l’université Notre-Dame, le théologien Tariq Ramadan a appris l’annulation de son visa par le département d’État. Il s’est même trouvé empêché de participer à un colloque auquel l’avait invité l’ancien président Bill Clinton.
Présenté comme le grand instigateur de cette décision, le lobbyiste Daniel Pipes assure dans FrontPage que le département de la Sécurité de la patrie doit avoir ses raisons. Mais certaines sont connues de tous : ainsi, M. Ramadan est le petit-fils de son grand-père ; il est susceptible d’avoir rencontré Oussama Ben Laden qui était peut-être un élève de son père ; il a donné des cours de théologie à de nombreux élèves dont certains sont aujourd’hui suspectés de terrorisme. Etc.
De son côté, Tariq Ramadan se défend de ces insinuations dans un texte publié simultanément par le Guardian et l’International Herald Tribune et, sous une forme différente, par le New York Times. Il s’étonne des arguments de ses adversaires. Il est accusé d’entretenir un double discours, modéré en français et en anglais, radical en arabe. Mais personne n’a trouvé dans ses nombreux livres et articles des exemples concrets de cette duperie à citer. Et il ne voit pas en quoi être le petit-fils du fondateur des Frères musulmans serait une preuve à charge.
Mais les partisans du clash des civilisations n’ont pas besoin d’arguments, il se contentent d’instiller la peur de l’Autre.