On m’avait prévenue qu’il serait difficile de changer l’opinion des Russes au sujet de l’OTAN. Je suis l’adversaire des stéréotypes négatifs et des vieilles idées, j’ai peu de moyens mais je suis confiante. Je suis là pour informer sur le rôle et la politique de cette alliance, ainsi que sur les activités du conseil Russie-OTAN. Cette année, nous allons soutenir différentes universités pour ouvrir des lieux de discussion sur les questions de sécurité internationale. Nous allons continuer à promouvoir les visites réciproques de représentants des deux parties, comme le dit le vieux dicton populaire russe " mieux vaut voir quelqu’un une fois que de l’entendre cent fois ".
Si l’OTAN n’a pas disparu en même temps que le pacte de Varsovie, c’est qu’elle est indispensable, elle s’est adaptée aux nouvelles menaces. Des représentants sont présents là où on ne peut se passer d’eux, dans les Balkans, en Afghanistan, en Irak, son rôle est de plus en plus important dans la régulation des conflits de l’ensemble du Proche-Orient. La situation n’est pas plus dangereuse aujourd’hui qu’avant la chute de l’URSS, elle revêt simplement un caractère différent. L’action de l’Alliance est fondée sur la démocratie, les Droits de l’Homme et la primauté de la loi. Si l’alliance était un bloc militaire agressif plein de mauvaises intentions, elle aurait déjà disparu. Les cinq tâches essentielles sont : assurer la sécurité, mener des consultations, assurer la répression et la défense, la régulation des conflits et la création de partenariats. La lutte contre le terrorisme et les armes de destruction massive est un domaine où le partenariat est très actif avec la Russie.
L’OTAN est en pleine transformation, mais elle reste une organisation politico-militaire, l’un des objectifs consiste à se doter de moyens d’action. Les pays membres ont répété qu’ils n’ont pas l’intention d’ouvrir de bases militaires dans les futurs pays membres de l’Europe de l’Est, les pays baltes par exemple, que certains qualifient de " zone grise ", même chose pour les armes nucléaires. La conception de la sécurité nationale a évolué, le terrorisme a changé la donne, la conception des zones d’influence n’est plus valable, aujourd’hui, pour nos enfants comme pour les vôtres, l’Internet constitue une menace plus grande que l’OTAN se rapprochant des frontières de la Russie. La stabilité, la démocratie et la prospérité de vos voisins eux seuls favoriseront l’augmentation du degré de sécurité de la Russie. Quand les gens comprendront cela, il n’y aura plus aucun obstacle à l’élargissement des frontières géographiques de l’OTAN.
L’Union européenne a le droit de se prononcer en faveur d’une force d’intervention propre, sans participation des États-Unis. L’entente entre les deux organisations est bonne, même si leurs processus parallèles de création d’une force d’intervention sont deux initiatives indépendantes. L’Union européenne et l’OTAN ont collaboré sur le terrain en Bosnie Herzégovine dans le cadre de l’opération " Altéia " suite à ce que nous appelons les accords " Berlin plus ".
Il y a quelques difficultés dans les relations OTAN-Russie, nous avons besoin de temps pour démontrer nos intentions et le public est toujours en attente de résultats immédiats. Je salue le courage de Sergeï Ivanov, favorable au partenariat, qui n’est pas soutenu par la majorité de la population. Les militaires russes semblent en majorité favorables même si les discussions sont âpres. D’après ce que j’ai compris, c’est à cause du processus bureaucratique interne que la Russie n’a pas signé l’accord sur le statut des forces militaires dans le cadre de notre " partenariat pour la paix ". Nous allons continuer le dialogue politique, nous avons discuté de questions difficiles, la Géorgie, l’Irak, l’Afghanistan. Nous avons actuellement 17 domaines de coopération et les ministres de la défense préparent la création d’une brigade russe de soldats de la paix. La Russie va aussi participer à l’opération anti-terroriste de l’OTAN " effort actif " en méditerranée.
Concernant l’Afghanistan, le commandement de l’OTAN a accepté avec compréhension la décision de la Russie d’apporter son aide, indispensable aux actions de l’alliance, sans être présent dans le pays. Pour ce qui est de l’Irak, je citerai simplement le secrétaire général de l’OTAN : " A l’heure actuelle, les discussions politiques continuent, nous poursuivons un seul et même but en Irak : former et équiper les forces nationales ".

Source
Nezavissimaïa Gazeta

« ИНТЕРНЕТ СТРАШНЕЕ, ЧЕМ НАТО », par Isabelle François, Nezavissimaïa Gazeta, 4 mars 2005. Ce texte est adapté d’une interview.