Les pays du Sud de l’Union européenne, Chypre, la Croatie, l’Espagne, la France, la Grèce, l’Italie, Malte, le Portugal et la Slovénie, réunis le 17 septembre 2021 à Athènes au niveau des chefs d’Etat et de gouvernement, avec la participation de la présidente de la Commission européenne, soulignent leur ferme conviction commune qu’une action internationale urgente et ambitieuse est plus nécessaire que jamais, tant au niveau national que régional et local, avec la participation de tous les acteurs, notamment de la société civile et du secteur privé, pour faire face à l’aggravation de la crise climatique et environnementale et pour construire un avenir durable, équitable, prospère et sûr, fondé sur des modèles d’économie circulaire, pour nos sociétés au 21e siècle.

Les pays du Sud de l’Union européenne :

Changement climatique

 Réaffirment leur ferme engagement à mettre en oeuvre l’Accord de Paris et leur soutien à l’objectif de limiter l’élévation de la température de la planète à 1,5° C par rapport aux niveaux préindustriels, ainsi que leur volonté de parvenir à la neutralité climatique d’ici 2050, dans le respect de la loi européenne sur le climat et de l’objectif de l’Union européenne de réduire les émissions nettes de gaz à effet de serre d’au moins 55 % d’ici 2030, par rapport à 1990.

 Prennent acte avec préoccupation du Rapport du Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat, publié le 9 août 2021, qui souligne l’urgence d’une réaction plus forte face au changement climatique pour limiter l’élévation de la température de la planète en dessous de 1,5° C par rapport aux niveaux préindustriels.

 Rappellent la Déclaration du Secrétaire général des Nations unies du 9 août 2021, selon laquelle il existe un risque imminent que la planète dépasse le seuil des 1,5° C très prochainement. La seule façon d’empêcher ce risque de se réaliser est d’intensifier nos efforts de toute urgence et de nous engager sur une trajectoire plus ambitieuse en agissant activement pour limiter l’élévation de la température à 1,5° C.

 Expriment leurs remerciements à la présidence italienne du G20 pour ses travaux qui relèvent le niveau d’ambition dans ce domaine, à l’échelle de la planète, et se félicitent des conclusions de la réunion ministérielle sur le climat et l’énergie qui s’est tenue à Naples.

 Reconnaissent que la Méditerranée est très vulnérable aux effets du changements climatique car exposée aux phénomènes météorologiques extrêmes, et qu’elle connaît déjà des épisodes plus longs, plus fréquents et plus graves de vagues de chaleur, de sécheresses, de fortes précipitations, d’inondations et d’incendies de forêts. De ce fait, la région subit déjà des dommages écologiques sans précédent et les capacités de réaction atteignent leurs limites.

 Soulignent que cette vulnérabilité continuera de s’aggraver en raison de l’accélération des effets du changement climatique dans la région, avec pour corollaire une perte de qualité de vie due aux effets du changement climatique, dès aujourd’hui et à l’avenir. Dans ce contexte, ces effets et la cohérence climatique doivent être pris en compte lors de l’élaboration et de la mise en oeuvre des politiques climatiques et énergétiques de l’UE, et se voir accorder la place qui leur revient, afin que nos pays ne soient pas désavantagés dans le contexte du changement climatique.

 Prennent acte de la nécessité de mettre en oeuvre des mesures d’adaptation et de résilience déterminantes qui soient conformes à la nouvelle stratégie de l’UE pour l’adaptation au changement climatique, ainsi que des mesures de prévention transversales dans tous les secteurs, y compris environnemental et socio-économique, susceptibles d’être affectés par le changement climatique dans la région méditerranéenne, puisque les effets du changement climatique font peser des menaces graves sur l’environnement, la société et l’économie.

 Décident d’intensifier la coopération multilatérale grâce à l’échange d’expériences et de bonnes pratiques en matière de planification et de mise en oeuvre des mesures d’adaptation et de prévention nécessaires pour réduire les risques aux niveaux national, régional et local, avec la participation de tous les acteurs, notamment les pouvoirs publics, la société civile et les entreprises.

 Soulignent la nécessité d’entamer un dialogue actif et de promouvoir des initiatives et des réponses communes de tous les Etats méditerranéens en adoptant une approche régionale face à la crise climatique dans le prolongement de l’action de l’UE.

 À cet effet, s’engagent en faveur des objectifs du pacte vert pour l’Europe et de progrès législatifs dans le cadre du paquet "Ajustement à l’objectif 55".

 Soulignent la nécessité d’étudier les principes ci-après pendant la durée des négociations de ce paquet : s’assurer de la décarbonation, de l’équité sociale et de la neutralité technologique, et soutenir l’innovation et les transitions industrielles, tout en prenant en compte les efforts déjà accomplis.

 Soutenir le principe d’un mécanisme d’ajustement carbone aux frontières, mesure climatique qui permet d’atténuer efficacement les risques de fuites de carbone dans le plein respect des règles de l’Organisation mondiale du commerce.

 S’engagent en faveur de la protection du patrimoine culturel et naturel de la Méditerranée menacé par les effets du changement climatique, en prenant des mesures actives et en soutenant l’initiative sur la lutte contre les effets du changement climatique lancée par la Grèce lors du sommet Action Climat de 2019 et actée par le Secrétaire général des Nations unies, à laquelle l’UNESCO, l’Organisation météorologique mondiale et la CCNUCC sont pleinement associées. Dans ce cadre, décident de participer au projet pilote pour la protection du patrimoine culturel et naturel en cours de préparation.

 Soulignent la nécessité de prendre les mesures qui s’imposent pour aligner rapidement les flux d’investissements publics et privés sur la trajectoire de réduction des émissions de gaz à effet de serre et de renforcement de la résilience au changement climatique afin d’accélérer la mise en place d’infrastructures à faible intensité de carbone et résistant au changement climatique.

 Reconnaissent la nécessité de prendre des mesures concertées pour remédier aux vulnérabilités qui découlent de la faible connectivité entre la Méditerranée et le continent européen.

 Décident de travailler en étroite collaboration pour instaurer des synergies qui favorisent la transition nécessaire entre combustibles fossiles et technologies à faible intensité de carbone grâce à un engagement public significatif dans leur planification et leur déploiement, en veillant tout particulièrement au respect des écosystèmes naturels.

 Décident de jouer un rôle actif dans la communication internationale sur la vulnérabilité spécifique de la région méditerranéenne au climat, en soulignant l’importance du lien entre espaces maritimes et climat et la nécessité de le faire passer au premier plan dans le contexte de l’action climatique.

 Décident de promouvoir les solutions fondées sur la nature pour l’adaptation au changement climatique et d’assurer une protection adéquate notamment des écosystèmes essentiels pour la prévention des catastrophes naturelles, en particulier les zones côtières, les bassins d’eau douce, les zones humides, les forêts et les zones urbaines.

 Reconnaissent le rôle fondamental des espaces maritimes dans le maintien de la vie sur Terre et les tensions significatives auxquels les espaces maritimes sont soumis en raison notamment du changement climatique. Prennent acte de la nécessité de renforcer les mesures de conservation et de protection des espaces maritimes et s’engagent à protéger au moins 30% des espaces maritimes de la planète d’ici 2030, ainsi qu’à renforcer l’adaptation liée à ces espaces.

 Reconnaissent qu’avec les effets du changement climatique sur la réduction de l’écoulement et de l’alimentation des nappes souterraines, ainsi que l’augmentation de la pression pour l’utilisation, la rareté de l’eau s’intensifiera, notamment dans les régions méridionales et orientales qui font déjà face à des ressources limitées, et un nombre croissant de personnes risquent de souffrir de stress hydrique.

 Dans la perspective de la COP 26 de la Convention-cadre des Nations unies sur le changement climatique, soulignent la nécessité pour toutes les Parties d’adopter des objectifs ambitieux de manière cohérente et équilibrée et s’engagent à les mettre en oeuvre, et discuteront avec l’UE et d’autres partenaires afin de permettre à la COP 26 d’atteindre les résultats les plus ambitieux, conformément au paquet "Ajustement à l’objectif 55" de l’UE.

 Soulignent à nouveau que la crise climatique constitue une menace planétaire qui requiert une action internationale concertée, et prient donc instamment tous les pays d’agir ensemble et sans délai comme l’a appelé le Secrétaire général des Nations unies dans sa déclaration du 9 août.

 À cet égard, demandent à tous les partenaires internationaux, en particulier les pays du G20, de ratifier l’Accord de Paris et de réhausser leur niveau d’ambition en communiquant des contributions déterminées au niveau national qui soient ambitieuses.

 Reconnaissent leur engagement d’intensifier rapidement le déploiement des technologies et des mesures qui permettent d’accélérer la transition en renonçant aux capacités exclusivement dépendantes du charbon.

 Demandent à tous les pays de participer à la COP 26 de la CCNUCC au niveau des chefs d’Etat et de gouvernement et de s’engager à atteindre l’objectif de neutralité climatique d’ici 2050.

Biodiversité

 Reconnaissent que la perte et la dégradation de l’habitat, davantage aggravées par les effets du changement climatique, menacent cette zone à risque unique que constitue la région méditerranéenne en termes de biodiversité et d’endémisme marins.

 Soulignent la nécessité urgente de prendre des mesures pour remédier à ces effets à long terme sur la biodiversité et les écosystèmes de la région et en conséquence, le besoin de changements en profondeur destinés à restaurer la biodiversité d’ici 2030, conformément à la Stratégie de l’UE en faveur de la biodiversité à l’horizon 2030.

 S’engagent à prendre des mesures pour étendre et mieux gérer le réseau d’aires protégées de l’UE, contribuant à l’objectif de protection de 30% de la superficie terrestre et maritime de l’UE à l’horizon 2030, dont un tiers sous une protection rigoureuse grâce à une action collective menée par tous les pays participant à cet effort concerté, en tenant compte des situations nationales.

 Considèrent l’intégration de la biodiversité dans toutes les politiques sectorielles comme un préalable indispensable à une relance verte et durable après la pandémie de la COVID-19.

 S’engagent à montrer l’exemple dans la lutte contre la crise mondiale de la biodiversité et, dans la perspective de la 15e Conférence des Parties à la Convention sur la diversité biologique, à oeuvrer en faveur d’un cadre mondial en matière de biodiversité pour l’après-2020 qui soit ambitieux et efficace.

 Décident de coopérer à la mise en place de mécanismes de mise en oeuvre solides et efficaces ainsi qu’à des cadres harmonisés concernant le suivi, l’établissement de rapports et l’examen de la biodiversité.

 Reconnaissent l’importance des conclusions du Congrès mondial de la nature de l’Union internationale pour la conservation de la nature (UICN), tenu à Marseille en septembre 2021, qui soulignent que les urgences en matière de climat et de biodiversité ne sont pas distinctes mais constituent deux aspects d’une même crise nécessitant des réponses et des objectifs qui se renforcent mutuellement, de manière à placer la nature en tête des priorités de l’action internationale et à jeter les bases d’une stratégie mondiale pour la biodiversité, ce qui est indispensable au bon fonctionnement des écosystèmes et à l’humanité.

Forêts

 Constatent les effets néfastes à long terme des incendies de forêts sur la biodiversité et les écosystèmes de la région méditerranéenne, qui menacent les espèces, modifient les caractéristiques hydrologiques et géomorphologiques des bassins versants et accentuent la dégradation des terres, notamment une grave érosion des sols.

 Reconnaissent que la gestion des forêts doit reposer sur la diversification des espèces et des provenances, adaptée aux futures conditions climatiques, et sur la diversification des structures forestières et de celles des peuplements.

 Rappellent qu’il importe de placer les forêts primaires et anciennes sous une protection stricte.

 Reconnaissent l’importance globale et le rôle majeur des services écosystémiques et des infrastructures vertes, ainsi que la fonction essentielle assurée par les forêts dans la régulation du cycle de l’eau et du carbone ainsi que l’atténuation du changement climatique.

 Soulignent la nécessité de continuer à promouvoir une gestion durable des forêts, de renforcer le rôle multifonctionnel des écosystèmes forestiers et d’assurer leur protection et leur restauration en mettant en place des mécanismes efficaces à cet effet. Soulignent en outre qu’il est nécessaire de mettre en oeuvre des projets de reforestation adéquats et, à cet égard, s’engagent à prendre des mesures visant à accroître la quantité, la qualité et la résilience des forêts, notamment en contribuant à l’engagement de planter au moins 3 milliards d’arbres supplémentaires dans l’UE à l’horizon 2030, dans le strict respect des principes écologiques.

 Reconnaissent que des stratégies coordonnées, globales et cohérentes sont requises de toute urgence en vue d’adapter les forêts au changement climatique.

 Estiment à cet égard que la nouvelle stratégie forestière de l’UE adoptée par la Commission en juillet 2021 peut appuyer les actions régionales et nationales.

 S’engagent à investir les ressources nécessaires, à exploiter les meilleures connaissances scientifiques disponibles et à mobiliser les sociétés afin de planifier des nettoyages forestiers, de créer des coupe-feux et de déployer toutes les mesures nationales et locales efficaces en matière de prévention des incendies de forêt, en recourant à l’informatique et aux outils de l’économie numérique.

 Décident d’engager une planification reposant sur les communautés locales et de mettre en oeuvre une gestion des risques de catastrophe fondée sur les connaissances scientifiques relatives aux écosystèmes, de prévenir les risques liés aux aléas climatiques, de partager les expériences et de coopérer à l’élaboration de mesures de réduction des risques.

 Encouragent le partage de technologies et d’expériences pour la remise en état des écosystèmes et la restauration des zones dégradées dans les aires protégées comme à l’extérieur de celles-ci, ainsi que la formulation d’initiatives contribuant à la connectivité des écosystèmes.

 Soutiennent le rôle stratégique des forêts et du secteur sylvicole pour trouver des solutions permettant d’accroître l’utilisation durable des produits du bois en remplacement d’autres matériaux à forte intensité d’émissions.

 Décident de promouvoir des solutions fondées sur la nature pour l’adaptation au changement climatique et l’atténuation de ses effets, au bénéfice de la biodiversité et en assurant une protection adéquate notamment des écosystèmes essentiels pour la prévention des catastrophes naturelles, en particulier les zones côtières, les bassins d’eau douce, les zones humides et les forêts.

 Au-delà des forêts méditerranéennes, soulignent la nécessité de lutter à l’échelle de l’UE contre la déforestation importée et la dégradation mondiale des forêts grâce à une nouvelle initiative législative.

Environnement marin/Economie bleue

 Reconnaissent le rôle joué par une économie bleue durable pour atteindre les objectifs du pacte vert pour l’Europe en Méditerranée, notamment par des investissements dans des technologies vertes novatrices et par une promotion accrue des principes de l’économie circulaire.

 Décident de promouvoir les modèles d’économie bleue de l’UE afin de les rendre circulaires et de réduire l’empreinte environnementale, climatique et énergétique de toutes les activités côtières connexes sur terre et en mer, en accordant une attention spéciale à la réduction de la pollution par les plastiques.

 Soulignent la nécessité de promouvoir un cadre de l’UE solide pour accompagner le développement de l’économie bleue ainsi qu’une politique maritime plus intégrée.

 Soulignent que l’aménagement de l’espace maritime, instrument politique et juridique important pour une gestion cohérente de l’espace maritime, constitue une composante clé d’une économie bleue durable en facilitant les synergies entre les secteurs économiques de l’économie bleue, tout en assurant la protection de l’environnement et une utilisation durable des ressources marines.

 Reconnaissent la valeur ajoutée de la Coalition pour une Méditerranée exemplaire en 2030 et de son plan d’action assorti de mesures ambitieuses, ainsi que leur complémentarité avec les cadres institutionnels existants en matière de protection et de développement durable de l’espace méditerranéen.

 Appellent tous les pays à participer activement, au plus haut niveau possible, à la deuxième Conférence des Nations unies sur les océans qui se tiendra à Lisbonne en 2022 (du 27 juin au 1er juillet) afin d’assurer un renforcement de l’engagement politique et des actions concrètes, au niveau mondial, en vue de la réalisation de l’ODD 14.

 Soutiennent fermement la désignation de la mer Méditerranée comme zone de contrôle des émissions de soufre (SECA) à compter du 1er mars 2024.

Protection civile, prévention et préparation

 Reconnaissent que le mécanisme de protection civile de l’UE sert de cadre de coopération et d’assistance en cas de situation d’urgence de grande ampleur, qui dépasse les capacités des Etats membres touchés, et soulignent qu’il importe de préserver et de continuer à soutenir ce mécanisme sur le plan institutionnel, financier et opérationnel.

 Appellent à une mise en oeuvre intégrale du mécanisme de protection civile de l’UE et au renforcement substantiel des moyens RescEU en Méditerranée, en tenant également compte des capacités et équipements existants dans les Etats membres, afin de fournir une réserve européenne. Demandent l’accélération de la constitution d’une flotte conséquente d’avions et d’hélicoptères de lutte contre les incendies ou autres, de capacités Medevac afin de mieux protéger les citoyens européens ainsi que l’environnement naturel contre des catastrophes de plus en plus graves et complexes, notamment les incendies, les inondations, les tremblements de terre et les épidémies, ainsi que des investissements dans les capacités de prévention des catastrophes et de préparation.

 Soulignent la nécessité urgente de renforcer et d’approfondir la coopération entre partenaires méditerranéens, eu égard au fait que les enjeux liés aux catastrophes naturelles partagent le même profil, sont souvent de nature transfrontalière et requièrent des initiatives en matière d’échanges d’experts, d’enseignements tirés, de bonnes pratiques, de ressources et d’expertise.

Compte tenu de ce qui précède, tout en maintenant les accords régionaux existants, nous décidons d’étendre davantage les travaux du groupe des pays du sud de l’UE en organisant des réunions sectorielles, à tous les niveaux requis, dans un cadre souple et informel, afin de faciliter une coordination et des échanges efficaces entre les neuf partenaires./.