« Ils ont peur de la paix »

They are afraid of peace
Ha’aretz (Israël)

[AUTEUR] Amram Mitzna est député travailliste à la Knesset. C’est lui qui a mené les travaillistes lors de la dernière élection législative en Israël.

[RESUME] L’initiative de Genève prouve qu’il existe un partenaire avec qui nous pouvons discuter dans l’autre camp et qu’il existe une alternative au bain de sang. Si le gouvernement attaque le parti travailliste et les autres partis liés au document, c’est parce qu’il a peur de la paix qui démontrerait qu’il a trompé la population pendant trois ans.
Le gouvernement nous a fait croire que si nous étions forts, le terrorisme cesserait. Mais la situation n’a fait qu’empirer. Aujourd’hui, l’assassinat est la seule politique du gouvernement. Le terrorisme s’intensifie, l’économie et la société s’effondrent et les réalités démographiques menacent l’existence même d’Israël en tant qu’État juif. Rien de tout cela n’a fait changer le gouvernement. Nous avons obtenu l’initiative de Genève après d’âpres discussions et nous avons combattu pour des frontières permanentes d’Israël dans une guerre sans blessés. Pour la première fois, les Palestiniens reconnaissent Israël comme l’État des juifs pour toujours et renoncent au droit au retour. Nous avons obtenu la conservation des quartiers juifs de Jérusalem et aucune des colonies autour ne devra être abandonnée.
Ariel Sharon ne veut pas de cet accord car il démontre que sa politique est une erreur. Le gouvernement panique car l’initiative prouve qu’il a envoyé nos citoyens dans une guerre inutile et qu’il est donc illégitime. L’initiative de Genève est un modèle, une proposition pour un accord permanent. Elle s’attache à résoudre chaque question et permet la reconnaissance de l’Autorité palestinienne. C’est un tournant historique et j’espère que les citoyens ne cèderont pas aux appels du gouvernement qui panique.

« Le Mont du temple est plus important que la paix »

Temple Mount is more important than peace
Ha’aretz (Israël)

[AUTEUR] Natan Sharansky est président et fondateur du parti Yisrael B’Alyia Anglos, membre de la coalition au pouvoir en Israël. Il est ministre de la Diaspora et de Jérusalem.

[RESUME] Depuis que l’initiative de Genève a été rendue publique dimanche, elle a été beaucoup critiquée en raison de la personnalité de ceux qui l’ont menée, un gang de personnes qui ne sont même pas élues, et en raisons des concessions irresponsables qui ont été faites. Bien que ces critiques soient justifiées et correctes, elles nous éloignent des plus importantes de l’accord et surtout de l’abandon de Jérusalem.
Quand j’étais dans le gouvernement d’Ehud Barak, Yossi Beilin essayait déjà de nous convaincre qu’il fallait donner le Mont du temple et le quartier chrétien de Jérusalem aux Palestiniens. Quand je m’étais étonné de ces concessions ne comprenant pas bien pourquoi les chrétiens devaient être confié aux Palestiniens, il me regarda d’un air surpris et me répondit que ça c’étais le problème des chrétiens, pas le notre. J’avais alors cru que Beilin était dédaigneux vis-à-vis des autres valeurs. Aujourd’hui, j’ai compris qu’il ne conférait aucune importance à aucune valeur, hormis la paix.
Mais la paix n’est pas une fin en soi, c’est un moyen essentiel à l’existence d’une nation. Ce n’est pas ce que veulent les juifs et pourquoi ils prient depuis des millénaires. Ils prient pour Jérusalem. Si nous abandonnons nos valeurs, les Palestiniens interprèteront cela comme un signe de faiblesse et comme un appel à la guerre. Jérusalem ne représente pas que des valeurs religieuses, elle représente notre lien avec le passé, l’abandon du Mont du temple signifierait que nous validons l’argument palestinien selon lequel nous n’avons aucun droit sur cette terre car rien ne nous y rattache. Cela, historiquement, les socialistes séculiers qui ont fondé le sionisme, l’avaient bien compris.

« Le Pentagone lance un croisé »

The Pentagon Unleashes a Holy Warrior
Los Angeles Times (États-Unis)

[AUTEUR] William M. Arkin est analyste en questions militaires, rédacteur du site The U.S. Military Online. Il est chroniqueur du Los Angeles Times.

[RESUME] En juin 2002, Jerry Boykin est monté à la tribune de l’église baptiste de Broken Arrow dans l’Oklahoma pour montrer les photos qu’il avait prises à Mogadiscio peu de temps après la « chute du faucon noir ». Sur l’une des photos, on peut voir une étrange marque noire sur la ville que Jerry interprète comme étant une « présence démoniaque sur la ville que Dieu me présente comme étant l’ennemi ». En juin dernier, il a également affirmé au pupitre de la Good Shepherd Community de Sandy, dans l’Oregon, que Ben Laden, Saddam Hussein et Kim Jong Il nous détestaient parce que nous étions chrétiens et que nous ne pourrions donc vaincre qu’en combattant au nom de Jésus.
Qui est Jerry Boykin ? C’est le général William G. « Jerry » Boykin, récemment nommé au nouveau poste de vice sous-secrétaire à la Défense chargé des questions de renseignement, poste où il devra relancer la traque à Ben Laden, d’Hussein, du mollah Omar et d’autres leaders terroristes dans le monde. C’est un expert militaire reconnu du renseignement, mais c’est aussi un extrémiste qui se définit comme un combattant de Dieu, qui estime que l’armée états-unienne est une armée chrétienne et que si Bush n’a pas été choisi par une majorité d’Américains, il a, en revanche été choisi par Dieu.
Lui confier un poste de direction est dangereux car il prétend recevoir ses ordres de Dieu plus que de ses supérieurs. Il va devoir mener des opérations en Irak et en Afghanistan alors qu’il considère que l’Islam est une religion blasphématoire. Il est persuadé que l’Amérique est une nation chrétienne et que « Satan veut détruire cette nation ». Depuis le 11 septembre, la guerre au terrorisme est de plus en plus liée aux opérations spéciales et Boykin va avoir un rôle central dans ce domaine. Bush a souvent déclaré que la guerre au terrorisme n’était pas une guerre contre l’Islam, pourtant cette nomination envoie le message inverse.

« Pourquoi nous sommes partis en guerre »

Why We Went to War
Weekly Standard (États-Unis)

[AUTEURS] [William Kristol] est rédacteur en chef de Weekly Standard. Il est président du Project for the New American Century. [Robert Kagan] est membre de la Carnegie Endowment for International Peace et directeur du Project for a New American Century, le think-tank électoral de George W. Bush. Il est analyste sur les questions de stratégie militaire pour le Weekly Standard et écrit une tribune mensuelle dans le Washington Post. Il est l’auteur de Of Paradise and Power : America and Europe in the New World Order.
Robert Kagan est le fils de Donald Kagan (professeur d’histoire à l’université de Yale), le neveu de Frederik W. Kagan (professeur d’histoire à l’Académie militaire de West Point), et l’époux de Victoria Nuland (représentant adjoint des États-Unis à l’OTAN).

[RESUME] Dans la frénésie des derniers mois, il semble que nous ayons oublié que presque tout ce que nous savons des programmes d’armes de destruction massive de l’Irak, nous le tenons des Irakiens eux-mêmes. En 1991, les inspecteurs de l’ONU ont découvert un programme nucléaire irakien beaucoup plus développé que nous ne le pensions et qui a été confirmé par des Irakiens. En 1995, sans les révélations des transfuges irakiens, nous n’aurions jamais su que l’Irak produisait du gaz VX, en équipait ses lanceurs et avait un programme biologique. De même en 1998, Bagdad admettait que :
 Après la première Guerre du Golfe, l’Irak a produit 3,9 tonnes de VX et a acquis 805 tonnes d’ingrédients pour en produire davantage et 4000 tonnes pour produire d’autres poisons.
 L’Irak a produit 8500 litres d’anthrax.
 L’Irak a construit 500 bombes permettant la diffusion de ces produits.
 Il a produit 550 obus au gaz moutarde.
 Il a produit ou importé 107500 enveloppes pour des armes chimiques.
 Il a construit au moins 157 bombes bactériologiques et 25 missiles.
C’est ce matériel que l’Irak a admis avoir possédé, mais a prétendu avoir détruit secrètement, sans être capable d’en fournir les preuves.
Entre 1995 et 1997, les rapports entre Bagdad et les inspecteurs devinrent de plus en plus conflictuels. Finalement l’Irak ne permit plus aux inspecteurs d’exercer leur travail et exigea que les équipes d’inspection ne comprennent plus d’inspecteurs américains. L’administration Clinton tenta d’obtenir des sanctions supplémentaires au Conseil de sécurité de l’ONU, mais les Français et les Russes, qui souhaitaient leur abandon, les refusèrent. C’est à ce moment-là, le 26 janvier 1998, que notre magazine a demandé que les États-Unis attaquent l’Irak.
En février, Bill Clinton déclara que la plus grande menace pour les États-Unis était l’axe qui liait les terroristes aux États hors-la-loi produisant des armes de destruction massive et que l’exemple le plus frappant était l’Irak de Saddam Hussein, un pays qui, par ailleurs ne respectait pas les obligations de l’ONU et faisait de fausses déclarations. Le président exigea alors que les inspecteurs aient accès aux sites présidentiels et il ajouta que, si la communauté internationale refusait d’agir rapidement, Saddam continuerait de produire des armes de destruction massive et qu’un jour, il les utiliserait. Pourtant, malgré ses déclarations, le président accepta un compromis préparé par Kofi Annan. Saddam continua à faire de l’obstruction au travail des inspecteurs et cela conduisait à l’opération « renard du désert » qui fut utilisée par Saddam Hussein pour expulser les inspecteurs. On ignore ce que les quatre jours de bombardement sont parvenus à détruire, mais cela entraîna l’absence des inspecteurs pendant quatre ans.
En août dernier, l’administration Bush remit la question de l’Irak en avant et une nouvelle résolution sur l’Irak, la résolution 1441, fut adoptée. Hans Blix reconnut que l’Irak n’avait pas pleinement coopéré et la guerre commença.
Le rappel de cette histoire nous permet de démontrer que nous n’avons pas fait la guerre pour démocratiser la région (même si cela est souhaitable), pour accroître les chances du processus de paix israélo-arabe, parce que nous croyions que l’Irak était mêlé au 11 septembre (même si les liens avec Al-Qaïda sont de plus en plus évidents) ou à cause d’un éventuel transfert d’uranium en provenance du Niger. Cette guerre a été menée en raison de la barbarie de Saddam Hussein, sa possession d’armes de destruction massive et de son programme pour en construire plus. Ce sont les mêmes raisons qui avaient poussé les démocrates à juger que l’Irak était une menace, même si aujourd’hui ils le nient sous la pression de leur aile gauche. Rien qui a ou n’a pas été découvert en Irak ne vient changer ce jugement.
Les opposants à la guerre tentent de la délégitimer aujourd’hui, mais les raisons étaient valables et elles le sont encore. Il n’est en outre pas étonnant que les équipes de Kay ne trouvent pas en quatre mois ce que les inspecteurs n’ont pas trouvé en 12 ans alors qu’elles n’ont eu le temps que d’examiner 10 des 130 dépôts d’armes répertoriés. En outre, Saddam Hussein a eu quatre ans pour déménager ses stocks d’armes. Cela n’a cependant pas empêché Kay de trouver des réseaux de laboratoires clandestins, une prison laboratoire, différentes preuves de recherches biologiques et bactériologiques et surtout des preuves de la destruction de documents concernant les armes de destruction massive pendant la guerre. On peut donc émettre l’hypothèse que Saddam Hussein avaient réduit son programme d’armement, mais l’avait conservé caché et prêt à resservir en attendant que les sanctions soient levées. Il ne pouvait pas cependant laisser les inspecteurs tout examiner sous peine d’être découvert. Si nous n’étions pas intervenus maintenant, nous aurions dû agir plus tard, à un moment plus dangereux pour nous.
Certaines personnes ne croiront jamais à cela et préfèreront les théories conspirationistes. Parmi eux, on compte des candidats démocrates et même un ancien général ayant combattu Milosevic. Nous leur souhaitons bonne chance pour convaincre les États-uniens, mais nous pensons que Clinton ne les soutiendra pas.

« L’obsession malsaine d’Annan »

Annan’s unhealthy obsession
Jerusalem Post (Israël)

[AUTEUR] Anne Bayefsky est avocate internationale et professeur à la York University de Toronto. Elle a représenté l’International Association of Jewish Lawyers and Jurists au forum des ONG de Durban et l’organisation UN Watch à la Conférence mondiale contre le Racisme.

[RESUME] L’administration Bush a paru surprise par les commentaires négatifs de Kofi Annan qui ont contrecarré les tentatives des États-Unis au conseil de sécurité pour la reconstruction de l’Irak.
Pourtant, avant le discours de George W. Bush du 12 septembre 2002, avant celui de Powell sur le dossier irakien devant le Conseil de sécurité et avant que Bush ne demande l’aide de l’ONU pour la reconstruction de l’Irak en septembre dernier, le secrétaire général de l’ONU a fait des déclarations allant dans le sens opposé. Annan est un homme qui croit que les ressources de l’ONU sont mieux utilisées à lutter contre Israël qu’à participer à la lutte contre le terrorisme ou en faveur de la démocratisation du monde arabe. Il préfère critiquer les attaques contre la Syrie que de considérer que les attentats d’Haïfa dans lesquels la Syrie est impliquée menacent la sécurité de la région. Il ne réclame pas non plus que l’ONU définisse précisément ce qu’est le terrorisme pour commencer le combat.
Face à cette situation, le congrès a raison de refuser que les États-Unis s’associent à la Commission des Droits de l’homme de l’ONU dirigée par la Libye, une organisation qui protège les criminels qu’elle est censée combattre.

« Le grand saut de l’Arabie saoudite »

Saudi Arabia’s Big Leap
New York Times (États-Unis)

[AUTEUR] Kenneth M. Pollack est membre du Center for Foreign Policy Studies de la Brooking Institution et du Council on Foreign Relations. Il est ancien membre du National Security Council et ancien analyste militaire spécialisé sur les question iraniennes et irakiennes à la CIA (1988-1995).

[RESUME] L’annonce lundi de la mise en place d’élections municipales l’année prochaine en Arabie saoudite est le premier mouvement d’un tremblement de terre lent qui frappe cette région. Les cyniques feront remarquer qu’il ne s’agit que d’une annonce, que nous n’avons aucune garantie concernant la transparence du scrutin, le vote des femmes et qu’il ne s’agit que d’une petite étape, mais ils devraient également noter que cette élection dans le plus conservateur des pays arabes pourrait avoir un impact dans toute la région puisque les autres pays devront suivre le mouvement.
Cette réforme est la seule façon de lutter contre les liens des terroristes en Arabie saoudite et contre la frustration de la population qui pourrait rendre le pays instable. Situation grave pour l’économie internationale. L’Arabie saoudite est un pays sclérosé et il faut le réformer maintenant. Le système légal et éducatif est d’un autre âge et le chômage est supérieur à 30 %, créant une situation révolutionnaire.
Les États-Unis doivent soutenir cette réforme et demander que la libéralisation soit progressive. Ils doivent organiser des réunions entre dirigeants politiques afin de comprendre par quels moyens ils pourront soutenir les réformes. Cela pourrait passer par une sortie du conflit israélo-arabe pour calmer la colère des Saoudiens sur ce point.