Janine Davidson, ancienne pilote dans l’US Air Force s’inquiète dans le Washington Post des conséquences de la possible remise en cause de la structure « Total Force » de l’armée états-unienne, mise en place après la guerre du Vietnam. Ce système de fonctionnement rend quasiment impossible la conduite d’une guerre sans faire appel aux réservistes, ce qui induit une inquiétude dans la population et pousse, théoriquement, le Congrès à se montrer plus prudents quand il autorise la conduite d’une guerre. On peut donc craindre que la professionnalisation de l’armée US, qui se priverait de ses volontaires, diminuerait son contrôle démocratique. Or, ce contrôle est d’autant plus nécessaire quand certains, comme Max Boot dans le New York Times, demandent un retour aux méthodes de contre-insurrection qui ont fait leurs « preuves » au Vietnam. Le responsable de la page éditoriale du Wall Street Journal, tout en rappelant comme à son habitude que l’Irak n’a rien à voir avec le Vietnam, conseille de remettre au goût du jour l’opération Phœnix en s’appuyant sur des milices irakiennes composées d’anciens ba’asistes et de groupes s’étant opposés au régime de Saddam Hussein qui pourraient faire le sale boulot à la place d’une armée dont Boot critique l’esprit « boy scout ». On ne peut s’empêcher de voir dans cette proposition, un soutien à l’offre de service qu’Ahmed Chalabi proposait à la coalition et que nous avions résumé dans nos colonnes.
Toutefois, pour que les parlementaires états-unien exercent un contrôle efficace de l’action des troupes en Irak, ils doivent disposer d’informations fiables, difficiles à obtenir de la part de l’administration Bush. En effet, cette dernière, comme l’avait fait le gouvernement de Bush père, n’hésite pas à produire de faux témoignages et de fausses preuves au Congrès pour obtenir son soutien. Le Washington Times reproduit, sans le critiquer, le témoignage de Karl Zinsmeister, de l’American Enterprise Institute, devant la Commission des armées de la chambre des représentants. Il y reprend son analyse de l’état de l’opinion irakienne en s’appuyant sur un sondage réalisé par Zogby International pour affirmer que les Irakiens, et principalement les chiites, sont de plus en plus enthousiastes vis-à-vis de l’occupation états-unienne. Ce discours, repris par Dick Cheney dans les plus grands médias états-uniens, avait été contesté par John Zogby qui avait réalisé le sondage et affirmait que ses résultats étaient travestis par l’American Enterprise Institute. Zinsmeister affirme que la résistance en Irak n’est que le fait d’éléments étrangers détestés par les Irakiens. Un argument qui pourrait servir, d’après le journal libanias L’Orient le jour, à justifier une attaque de la Syrie par Israël avec l’aval de Washington.
Ce type d’entorse à la vérité n’a cependant d’importance que s’il existe une opposition prête à les dénoncer et à proposer une alternative à la politique de l’administration Bush, ce dont doute Robert Kagan dans le Washington Post. Le vulgarisateur de la pensée néo-conservatrice se réjouit des discours des principaux candidats démocrates qui, à l’exception de Wesley Clark, ne remettent pas en cause la guerre au terrorisme et les principes de politique étrangère affichés depuis le 11 septembre. Robert Kagan y voit une victoire idéologique du Project for a New American Century dont il est un membre éminent et prévient le reste du monde : le système bipartisan états-unien n’offre pas d’alternative à la politique de l’administration Bush.

Amir Taheri revient dans le New York Times sur les attentats en Arabie saoudite. Il y voit le signe des tensions entre les mouvements islamistes et le pouvoir saoudien qui les a financé depuis 40 ans pour lutter contre les ennemis de la monarchie. Oubliant de préciser que cette politique a été menée main dans la main avec Washington, il aboutit étrangement à la conclusion que les islamistes attaquent la monarchie saoudienne depuis que les troupes états-unienne ont quitté le pays et dans le but de condamner le rapprochement entre Riyad et Moscou.

Alors qu’en Israël, l’opposition des militaires à la politique de Sharon est de plus en plus importante, Avraham Burg demande à George W. Bush de relancer le processus de paix, car il n’en croit plus capables les autorités israéliennes et palestiniennes. Dans le Los Angeles Times, il demande au président états-unien de tourner le dos aux fondamentalistes dans son administration et de se rapprocher des Européens et des Arabes pour parvenir à un accord de paix dans toute la région.
Dans le même quotidien, Peter Hakim défend les politiques soutenues par Washington en Amérique latine. La dérégulation des économies du continent est une bonne chose, mais elle ne crée pas de richesses car elle se heurte dans ces pays aux inégalités économiques issues du racisme. Il faut donc poursuivre la privatisation des pays latino-américains tout en cherchant à mettre fin aux inégalités raciales.