« Pourquoi l’Irak a besoin de plus de troupes états-uniennes »

Why Iraq Needs More U.S. Troops
Washington Post (États-Unis)

[AUTEUR] [Robert A. Kagan] est membre de la Carnegie Endowment for International Peace et directeur du Project for a New American Century, le think-tank électoral de George W. Bush. Il est analyste sur les questions de stratégie militaire pour le Weekly Standard et écrit une tribune mensuelle dans le Washington Post. Il est l’auteur de Of Paradise and Power : America and Europe in the New World Order.
Robert Kagan est le fils de Donald Kagan (professeur d’histoire à l’université de Yale), le neveu de Frederik W. Kagan (professeur d’histoire à l’Académie militaire de West Point) et l’époux de Victoria Nuland (représentante-adjointe des États-Unis à l’OTAN).

[RESUME] Tôt ou tard, l’administration Bush devra faire ce qu’elle cherche à éviter : envoyer plus de troupes américaines en Irak.
Il n’y a pas assez de troupes en Irak pour développer un environnement suffisamment sûr permettant un développement politique et économique. C’est pour cette raison que Washington se tourne vers l’ONU et mène des négociations avec les Français. Cependant il existe une autre solution que de faire appel à des troupes étrangères : reconnaître que nous n’avons pas assez de troupes. C’est la même logique qui se trouve derrière une plus grande implication des Irakiens et notamment des partisans d’Amhed Chalabi.
En théorie, avoir plus de troupes étrangères en Irak n’est pas forcément un mal, mais rien ne prouve que cette politique porterait ses fruits. Dominique de Villepin et Jacques Chirac négocient, mais ne souhaitent pas aider les Etats-Unis. Ils veulent convaincre l’opinion européenne qu’il ne faut pas que leurs dirigeants nous soutiennent. De toute façon, les pays européens dont les troupes sont engagées en Afrique, en Afghanistan, dans les Balkans ou sont déjà en Irak n’ont plus de troupes à envoyer et des pays comme l’Inde ou la Turquie qui auraient la capacité d’envoyer des troupes ne veulent pas nous aider. De leur côté, les troupes irakiennes doivent encore être largement formées alors que se sont les prochains mois qui seront critiques.
Contrairement, à ce qu’affirment les généraux, nous n’avons pas assez de troupes en Irak. Il faut en envoyer maintenant, pas dans deux mois quand il sera trop tard.

« Pourquoi nous devons gagner »

Why We Must Win
Washington Post (États-Unis)

[AUTEUR] Ancien prisonnier de guerre au Vietnam et issu d’une famille de militaires états-uniens de haut rang, John McCain est sénateur républicain de l’Arizona. Il est président de la Commission du commerce, des sciences et des transports et membre de la Commission des forces armées du Sénat états-unien. Il était en 2000, le principal rival de George W. Bush à l’investiture républicaine pour l’élection présidentielle.

[RESUME] Ma récente visite en Irak m’a convaincu que nous avons eu raison de libérer l’Irak, que les Irakiens sont heureux d’être libérés et qu’un Irak libre peut transformer le Proche-Orient. J’ai également été convaincu, lors de ce voyage, qu’un échec de notre part remettrait en cause la suprématie américaine sur le monde, renforcerait nos ennemis et condamnerait les Irakiens à nouveau à la tyrannie.
Il faut transformer notre succès militaire en victoire politique afin que la région qui a produit Saddam Hussein, les Talibans et Al Qaïda s’engage dans une voie de démocratie et de prospérité économique en lieu et place du mélange d’humiliation, de pauvreté et de répression.
La mission de l’Amérique est trop importante pour que nous échouions. L’administration Bush doit faire comprendre les implications et les coûts requis pour transformer l’Irak. L’Amérique doit se préparer à des sacrifices. Sans effort d’explication ou engagement financier, nous pouvons être vaincus en Irak.
Nous devons démontrer les intérêts tangibles de l’occupation à la majorité silencieuse des Irakiens en améliorant leurs conditions de vie quotidienne, en rétablissant la sécurité et en développant leur participation dans le gouvernement de leur pays. Il faut donner plus de moyens financiers à Paul Bremer et déployer au moins une nouvelle division militaire sur place tout en faisant appel à des troupes étrangères, notamment celles de nos alliés musulmans turcs et pakistanais. Nous devons aussi envoyer plus d’experts civils. Les Irakiens ne font pas confiance à l’ONU, c’est pourquoi il faut que l’ONU aide les Etats-Unis, mais ne dispose pas de la prééminence dans la reconstruction de l’Irak. Nous devons faire participer les Irakiens activement.
L’Irak est une bataille centrale dans la guerre au terrorisme, car tous nos ennemis souhaitent notre échec.

« Les opérations spéciales ne sont pas un modèle pour les opérations militaires »

Special Ops No Model for Military
Los Angeles Times (États-Unis)

[AUTEUR] William M. Arkin est analyste en questions militaires, rédacteur du site The U.S. Military Online. Il est chroniqueur du Los Angeles Times.

[RESUME] L’administration Bush voit les opérations spéciales comme la pièce centrale de la guerre au terrorisme et de sa transformation de l’armée. Donald Rumsfeld fait régulièrement référence à la vision séductrice qu’offre l’exercice militaire « Giant Shadow » qui mettait en scène les activités des forces spéciales. En outre, les Talibans et Saddam Hussein ont été renversées par des campagnes militaires mettant largement à contribution ces forces.
Pourtant, aujourd’hui, il eu a eu plus de morts dans nos troupes depuis la fin des combats en Irak que pendant la guerre, les Talibans se reconstituent en Afghanistan et Al Qaïda et d’autres organisations terroristes demeurent puissantes et menaçantes. Le problème de la stratégie des opérations spéciales est que, par définition, elles déploient peu de troupes au sol, ce qui laisse à l’ennemi la possibilité de se déplacer et ne permet pas d’assurer la sécurité sur le terrain par la suite. Comme les Talibans en Afghanistan, les partisans de Saddam Hussein se sont contentés de bouger tout en conservant leurs possibilités d’action. Dans le Sud, où l’armée de Saddam Hussein a été battue de façon plus conventionnelle, il y a beaucoup moins de morts depuis l’arrêt des combats que dans le centre du pays.
Les responsables du Pentagone veulent transformer les troupes au sol afin qu’elles ressemblent plus aux troupes des forces spéciales. Rumsfeld souhaite également mettre l’accent sur la psychologie et l’adhésion des populations. Pourtant, ironiquement, cette adhésion est bien plus facile quand la population est au contact des troupes et qu’elle peut constater qu’elles s’efforcent de les nourrir et d’améliorer leur vie. Or, cela nécessiterait plus de troupes et pas une occupation légère gérée par des forces spéciales.

« La vision de la situation depuis l’Irak »

The View From Iraq
Washington Post (États-Unis)

[AUTEUR] Ahmed Chalabi est président de l’Iraqi National Congress, un groupe d’opposition irakienne créé par la CIA dans les années 90. Il est membre du Conseil de gouvernement irakien.

[RESUME] Bien que Saddam Hussein ait été renversé, il continue de terroriser la population. Il est inutile de se demander si lui et ses partisans sont derrière l’attentat qui a entraîné la mort de l’ayatollah Mahammed Bakr Al Hakim afin d’embraser le Sud du pays, c’est évident.
Nous avons une immense gratitude pour George W. Bush et un grand respect pour l’ambassadeur L. Paul Bremer, mais il faut qu’ils agissent vite pour résoudre la crise actuelle et renforcer la sécurité. En effet, Hussein n’avait pas prévu une stratégie pour combattre sur le champ de bataille, mais une stratégie post-défaite qui consistait à mener des attaques terroristes contre les États-Unis et les Irakiens afin d’entraîner un retrait des troupes américaines.
Les réseaux d’Hussein ne sont pas nombreux, mais ils sont bien organisés, bien équipés et bien financés (Hussein a volé un milliard de dollars à la banque nationale irakienne dans ce seul but). Pour vaincre ces réseaux, les États-Unis doivent impliquer les Irakiens dans la lutte et Washington doit accélérer le rétablissement de la souveraineté irakienne car la population supporte mal l’occupation. Les États-Unis doivent également :
 Arrêter et interroger des milliers de personnes en lien avec le régime de Saddam Hussein. L’Iraqi National Congress pourra fournir des noms et prêter assistance durant les interrogatoires.
 Mener des actions dans les villes. Il faut arriver dans les villes où la résistance est concentrée et donner 48 heures aux habitants pour venir déposer toutes les armes illégales. Passé ce délai, chaque maison sera fouillée et toute arme trouvée entraînera l’arrestation de tous les hommes de la maison ayant entre 15 et 50 ans.
 Instaurer un strict contrôle des frontières.
 Mettre en place une force paramilitaire irakienne sur le modèle des carabiniers italiens.
 Engager les forces irakiennes amies, comme l’INC ou les forces kurdes, dans la traque de Saddam Hussein.
Certaines de ces mesures provoqueraient du ressentiment à court terme, mais elles sont nécessaires et urgentes.

« Mettre Arafat sur la touche le renforce »

Sidelining Arafat strengthened him
International Herald Tribune (États-Unis)

[AUTEUR] Le Dr. Hanan Ashrawi est secrétaire général de la Palestinian Initiative for the Promotion of Global Dialogue and Democracy, une organisation qu’elle a fondé en 1998. Elle est représentante du district de Jérusalem au Conseil législatif palestinien.

[RESUME] Depuis que les États-Unis et Israël s’en prennent à Arafat, la population palestinienne se rallie à lui et Washington et Tel-Aviv ont perdu toute possibilité de l’influencer directement.
Les États-Unis et Israël doivent s’adresser directement à Arafat . Si Washington veut réellement la paix, il doit traiter les réalités palestiniennes et non des fantasmes. Mahmoud Abbas ne peut rien faire sans la collaboration d’Arafat, du Fatah et du Conseil législatif palestinienne. Il doit comprendre que sa légitimité vient du peuple et pas des Américains et des Israéliens.
Il semble que le département d’État ait compris le fonctionnement interne de la vie politique palestinienne. Je crois que Condoleezza Rice est en train de le comprendre également. Les États-Unis doivent réaliser que quand ils attaquent Arafat, il bénéficie de plus de soutien, et que quand ils soutiennent Abbas, celui-ci dispose de moins d’appui.
Le Pentagone et la Maison-Blanche ne connaissent pas les Palestiniens et le point de vue arabe. Ils prennent des décisions simplistes en s’appuyant sur la seule vision israélienne. On ne peut pas demander à l’Autorité palestinienne de détruire l’infrastructure du terrorisme alors qu’Israël, puissance occupante pendant toutes ces années, n’y est pas parvenue.

« La démonologie des Islamistes du Sud-Est asiatique »

The demonology of SE Asian Islamists
Jerusalem Post (Israël)

[AUTEUR] Michael Danby est député australien de la circonscription de Melbourne Ports. Il est secrétaire de l’association parlementaire australo-israélienne des amis d’Israël.

[RESUME] Quand on parle des raisons du terrorisme, je pense toujours à Sue Malony et Dona Croxford, deux victimes de l’attentat de Bali qui vivaient dans ma circonscription.
Deux des terroristes reconnus ont donné comme principale raison de leurs actes leur volonté de vengeance « contre les juifs », alors que, à ma connaissance, il n’y a pas de juifs en Indonésie. Riduan Isamuddin et Abu Bakr Bashir, les deux dirigeants de la Jemaah Islamiah partagent eux aussi cette haine des juifs et de l’État juif. Ils sont persuadés que les juifs contrôlent les États-Unis et l’Australie et qu’ils veulent pervertir l’islam avec la complicité de leurs alliés chrétiens.
L’obsession indonésienne sur les juifs est un phénomène récent. Jusqu’ici, l’Indonésie n’était pas concernée par l’extrémisme islamique qui touche régulièrement le monde arabe. Le développement des échanges internationaux a favorisé l’endoctrinement de la jeunesse pauvre du pays par des prédicateurs wahhabites. En outre, les difficultés du pays à passer d’un régime dictatorial à une démocratie offrent une opportunité à ces groupes.
Les militants musulmans modérés indonésiens doivent s’attaquer à ces groupes à l’idéologie importée et réduire l’influence de la « charité » saoudienne. L’Australie doit s’impliquer dans l’avenir de l’Indonésie avec ces groupes afin que la prochaine bombe ne soit pas posée à Sydney ou Melbourne.

« Mettre fin à la culture de la tromperie »

End the culture of deceit
The Independant (Royaume-Uni)

[AUTEUR] Iain Duncan Smith est député à la Chambre des communes britannique où il est le leader de l’opposition conservatrice au gouvernement de Tony Blair. Il avait voté en faveur de la participation de son pays à la guerre en Irak.

[RESUME] J’ai observé la tragédie de David Kelly avec un sentiment croissant d’horreur.
Alastair Campbell a certes été accusé, non sans raisons, d’être pour beaucoup dans les excès du New Labour mais sa démission, que j’avais demandé il y a déjà plusieurs mois, n’a pas mis fin à la culture de tromperie des travaillistes car il n’était qu’un « serviteur loyal », selon les propres mots de Tony Blair. La tromperie est une pratique courante pour le gouvernement de Blair qui avait déjà profité du 11 septembre pour annoncer des mauvaises nouvelles et n’a pas hésité à présenter le Dr. Kelly comme un nouveau « Walter Mitty », la semaine de ses funérailles.
La commission Hutton a mis en évidence la responsabilité de Blair dans la révélation de l’identité du Dr. Kelly, mais Campbell rend un dernier service à son maître en démissionnant et en faisant croire que son départ entraînera plus de sincérité de la part du gouvernement.
La population britannique ne veut pas seulement le départ de Tony Blair de Downing Street, elle veut un nouveau type de gouvernement. C’est pourquoi, la lourde tâche du Parti conservateur sera de démanteler ce qui a caractérisé le projet du New Labour en libéralisant la société britannique et en mettant un terme à la tromperie.
Le vrai responsable de la communication de Downing Street, Tony Blair, doit partir.

« Un miroir en face de l’Amérique »

A mirror in the face of America
The Independant (Royaume-Uni)

[AUTEUR] [Colin L. Powell] est secrétaire d’État des États-Unis. Il a été assistant aux affaires de sécurité nationale du président Reagan (1987-1989) et chef d’état-major de l’armée états-unienne (1989-1993) sous la présidence de George Herbert Walker Bush. En outre, M. Powell préside une association d’insertion particulièrement attentive au sort des jeunes noirs, America’s Promise. Cette tribune est adaptée d’un discours en l’honneur de Martin Luther King diffusé sur la chaîne de télévision NBC.

[RESUME] Je n’étais pas aux États-Unis quand le Dr. King a prononcé son célèbre discours, car j’étais au Vietnam depuis huit mois. Je n’ai même pas été informé à l’époque de ce qui avait été dit. Il a pourtant une grande importance pour moi, car au même moment ma femme et mon fils vivaient dans l’Alabama, lieu de violence raciale contre ceux qui osaient demander leurs droits et leur liberté.
Pendant 80 ans, la Constitution n’avait aucun sens pour les noirs et la guerre civile n’a finalement pas fait beaucoup évoluer la situation pour eux. Il a fallu attendre un siècle pour que le travail reprenne et que Martin Luther King mette un miroir en face de l’Amérique en diffusant un message de réconciliation pour tous les enfants de Dieu, blancs ou noirs.
Nous avons fait beaucoup en 40 ans et aujourd’hui je suis secrétaire d’État, moi, un homme noir. Malheureusement, aujourd’hui, il y a encore beaucoup de jeunes hommes et femmes noirs qui ne peuvent approcher de la réalité de ce rêve et c’est pour cela que nous devons nous tourner à nouveau vers les objectifs du Dr. King et des pères fondateurs.