Les états-majors de campagne des candidats à l’élection présidentielle états-unienne tentent de cerner le thème sur lequel les électeurs détermineront leur choix. Pour l’équipe de Bush, ce sera la sécurité intérieure face au terrorisme. Pour les démocrates, ce sera soit la crise du système de santé et de retraite, soit la multiplication des guerres. Dans le quotidien australien, The Age, l’ancienne secrétaire d’État démocrate Madeleine Albright en détermine un autre : la continuation ou la rupture des relations transatlantiques.
Relativisant l’attitude l’administration Bush que critique Mme Albright, le général James L. Jones, commandeur suprême de l’OTAN en Europe, se félicite dans Le Figaro du bon fonctionnement de l’OTAN,. Il propose de résoudre la querelle à propos d’une force de défense européenne indépendante de l’Alliance en reconnaissant le droit des États européens à mener des actions au sein de l’OTAN sans les États-Unis.
Pour mener campagne sur la sécurité intérieure encore faut-il éviter de banaliser le risque terroriste. C’est pourquoi, le stratège Edward N. Luttwak demande la suppression du système d’alerte actuel. Il explique, dans le Los Angeles Times, que les politiciens, inquiets de se voir reprocher s’il survenait un drame de ne pas avoir prévenu les populations, en font un usage excessif. À force, l’opinion n’en tient plus compte et finit par douter de l’existence du risque terroriste.
La guerre est aussi un sujet sensible, d’autant que l’on assiste à un début de scénario à la vietnamienne : une victoire militaire extérieure s’accompagnant d’une défaite politique intérieure. Ainsi, le lieutenant-colonel Gian P. Gentile stigmatise dans le Washington Post l’inefficacité de la stratégie du « gant de velours » préconisée par le Corps des marines en Irak. Par opposition, il glorifie le bilan de l’action énergique de l’Army dans le triangle sunnite. Sa tribune manifeste le besoin de l’Army de justifier des méthodes contre-insurrectionnelles dont la brutalité est aujourd’hui contestée.

Washington finit par mesurer le coût du bourbier irakien qu’il a voulu gérer seul. Changeant brutalement de stratégie, la Maison-Blanche souhaite aujourd’hui se défausser de ses responsabilités sur l’ONU. C’est pourquoi l’ambassadeur James Dobbins, ancien responsable états-unien de la reconstruction en Haïti, en Somalie, dans les Balkans et en Afghanistan, propose dans l’International Herald Tribune que l’on s’appuie en Irak sur l’exemple afghan. On comprend que cette présentation technique permettrait aux États-Unis de justifier leur revirement politique sans perdre la face.

Le directeur de la planification du département d’État, Richard N. Haas, assure dans le Taipei Times que les États-Unis soutiennent la démocratie partout dans le monde et que cette préoccupation guide désormais leur politique dans le monde musulman où toute démocratie est absente. Une telle affirmation vise à la fois à valoriser les États-Unis, auto-qualifiés de pays de la Liberté, et Israël, que l’on s’emploie à présenter contre toute évidence comme la seule démocratie du Proche-Orient.
Peu convaincus par cette rhétorique, le chanteur Bono et le sénateur républicain Mitch McConnell plaident dans l’International Herald Tribune pour une action de la communauté internationale visant à rétablir la démocratie en Birmanie. Une junte narco-militaire y a réduit la population en esclavage ne soulevant que des protestations de pure forme de la part des grandes puissances.

Alors que le gouvernement Sharon vient de financer une campagne de relations publiques internationales pour justifier de la construction du « mur de séparation », Maîtres David Rifkin et Darin R. Bartram tentent de démontrer que les États-Unis et le Royaume-Uni doivent défendre Israël à ce sujet devant la Cour internationale de Justice. Ils s’efforcent pour cela de neutraliser l’accusation d’annexion du territoire palestinien et d’assimiler le mur à diverses barrières installées en Irak ou en Irlande. Ils décrivent donc, dans l’International Herald Tribune, la « barrière de sécurité » comme un ouvrage provisoire n’entravant pas la circulation des Palestiniens, mais filtrant les « terroristes ».