Il y a un an, quand la question d’une intervention militaire pour désarmer l’Irak a été soulevée, mon pays s’y est fermement opposé, convaincu que l’Irak n’était pas une menace immédiate pour la paix du monde et n’avait pas de liens avec Al Qaïda. Cela a entraîné de nombreuses accusations contre mon pays, visant à discréditer ses positions. Aujourd’hui, l’ouragan diplomatique s’est calmé et nous comprenons tous l’importance de ce qui nous rapproche dans la lutte contre le terrorisme global ou dans des conflits régionaux en Afghanistan, en Haïti ou au Kosovo.
C’est pourquoi j’ai été extrêmement surpris de voir une campagne d’accusation contre mon pays, ces derniers jours, lancée par des télévisions et des journalistes conservateurs. Ces accusations suggèrent que le gouvernement français a laissé l’Irak corrompre les entreprises françaises. Ces affirmations sont complètement fausses et n’ont pour objectif que de discréditer la France, une amie et alliée des États-Unis. En tant qu’ancien ambassadeur à l’ONU, laissez-moi vous expliquer comment fonctionnait le programme pétrole contre nourriture.
Le programme a été initié en 1996 et autorisait l’Irak à vendre une partie de son pétrole pour dégager des sommes qui devaient lui permettre d’acheter de la nourriture et d’autres équipements. Le programme était dirigé par l’ONU sous contrôle du Conseil de sécurité et chaque contrat devait être approuvé à l’unanimité des membres du Conseil. Par ailleurs, le Royaume-Uni et les États-Unis avaient exigé de disposer d’un contrôle plus étendu des contrats passés et les entreprises ne pouvaient pas acheter le pétrole irakien en dessous d’un certain cours. Il y a pu avoir de la corruption, c’est possible, et la France soutient la demande d’enquête de l’ONU.
La France n’était que le huitième pays contractant dans ce programme et beaucoup de contrats avec des Français n’étaient en fait que des contrats avec des filiales françaises de compagnies étrangères. On a également affirmé que la BNP récoltait tout l’argent de ce programme, mais c’est faux. 41 % des opérations financières étaient traitées par la J.P. Morgan Chase Bank, approuvée comme la BNP par le Conseil de sécurité. La position française n’a pas été dictée par le pétrole. En 2001, seuls 8 % du pétrole irakien étaient exportés vers la France contre 44 % pour les États-Unis.

Source
Los Angeles Times (États-Unis)

« First ’Freedom Fries,’ Now Oil-for-Food Lies : Give France a Break », par Jean-David Levitte, Los Angeles Times, 7 avril 2004.