Monsieur le Ministre,

Si j’ai souhaité revenir au Liban c’est d’abord pour exprimer la solidarité du peuple français envers le peuple libanais. La situation s’étant considérablement dégradée, l’urgence est avant tout celle d’aider les populations civiles victimes de ces affrontements. Pour cela, nous mettons en place un pont aérien et maritime humanitaire, à la demande du président de la République. Ce pont a commencé avec des avions qui sont partis de France dans les 24 dernières heures. Le premier bateau arrivera aujourd’hui à la mi-journée. Dans le même temps, nous demandons la mise en œuvre de couloirs humanitaires et j’ai déjà eu l’occasion d’en parler hier au gouvernement israélien.

Nous pensons que la spirale de la violence ne peut mener qu’à la catastrophe, partout dans le monde et en particulier dans cette région du monde. Nous avons condamné les actions du Hezbollah, nous avons condamné la riposte disproportionnée d’Israël. Nous pensons en effet, comme le Secrétaire général des Nations unies l’a dit hier, que cette violence est contre-productive. Nous pensons plus que jamais que ce n’est qu’une négociation politique, un processus politique qui peut permettre de trouver une solution durable à ce conflit.

Par ailleurs, je suis venu pour réaffirmer politiquement le soutien de la France au gouvernement libanais et à son Premier ministre, M. Fouad Siniora, pour souligner combien la souveraineté, l’intégrité, l’indépendance du Liban sont pour nous une priorité absolue. A ce titre, nous souhaitons la mise en place pleine et entière de la résolution 1559 du Conseil de sécurité des Nations unies. Nous souhaitons que cet Etat libanais auquel nous croyons ne soit pas attaqué dans sa souveraineté. C’est la raison pour laquelle nous avons condamné tout particulièrement le bombardement de casernes militaires, car la souveraineté de l’Etat libanais est pour nous une priorité.

Enfin je suis venu pour faire part au gouvernement libanais des derniers travaux à New York, du Conseil de sécurité des Nations unies, que la France préside au mois de juillet, et pour connaître aussi le point de vue du gouvernement libanais sur le conflit et sur l’analyse de la situation. Nous soutenons les propositions du Secrétaire général des Nations unies qu’il a faites hier. Nous pensons qu’il y a une urgence d’une action que doit conduire le Conseil de sécurité des Nations unies. Nous avons fait des propositions. Il est nécessaire que le Conseil de sécurité s’exprime fortement. Il y a eu un débat. Et maintenant nous devons présenter le plus vite possible une résolution de substance.

Nous demandons, comme le Secrétaire général des Nations unies, une cessation des hostilités. Et puis il faut créer le plus tôt possible des conditions d’une solution permanente à la crise actuelle afin d’obtenir un cessez-le-feu des deux côtés.

Je vous remercie.

Q - Vous avez adressé un message de solidarité au Liban, mais vous n’êtes pas venu avec une initiative de solution pour imposer le cessez-le-feu ? Est-ce que vous avez des promesses de la part d’Israël de sécuriser ces couloirs humanitaires comme vous dites ?

R : Nous travaillons à des solutions pour conduire à un cessez-le-feu. Nous avons demandé, le président de la République l’a demandé, des corridors humanitaires sûrs. Et nous avons demandé lundi dernier - Monsieur le Premier ministre Dominique de Villepin est venu ici - une trêve humanitaire. Nous travaillons à ces conditions politiques. Nous avons appelé toutes les parties à faire preuve de la plus grande retenue pour éviter des pertes additionnelles parmi les civils et les dommages au niveau des infrastructures civiles. Nous avons condamné les forces extrémistes qui cherchent à déstabiliser la région. Nous avons appelé à un cessez-le-feu global et durable. Et nous avons examiné des mesures qui pourraient contribuer dans l’avenir à prévenir la répétition d’hostilités entre Israël et le Liban, y compris la présence internationale de sécurité et de surveillance renforcée. Il s’agira donc de jeter des bases qui pourraient figurer dans un projet de résolution, je viens de le dire, que j’espère le plus rapidement possible.

Q - Pourquoi le Conseil de sécurité ne demande pas le cessez-le-feu surtout à Israël ? Parce que le Premier ministre libanais a demandé un cessez-le-feu ? Et la France travaille dessus pour une trêve humaine.

R - Je viens de dire qu’il était important pour nous d’obtenir un cessez-le-feu des deux côtés. Nous sommes derrière le Secrétaire général des Nations unies lorsqu’il appelle à une trêve immédiate des hostilités. Et nous pensons que ce n’est qu’à partir du moment où il y aura cette trêve, cet arrêt de la violence qu’alors une négociation politique pourra se mettre en place.

Q - Est-ce que vous pouvez nous donner davantage de précisions sur le renforcement aérien et maritime que vous avez évoqué tout à l’heure ? Deuxièmement, est-ce que cette force pourrait rester sur zone plus longtemps que le plan de l’évacuation ?

R : D’abord c’est trop tôt pour le dire. Ce que je peux vous dire c’est que déjà, le 20 juillet, à 6 h 45, est parti de Roissy un avion qui a embarqué une partie du fret disponible : près de 20 caisses de médicaments, divers groupes électrogènes, une station d’eau potable et des caisses de matériel chirurgical. Cet avion a atterri deux heures à Larnaca et, aujourd’hui, le ferry Iera Petra qui doit effectuer une rotation vers Beyrouth, apportera, puisqu’il est vide, ce fret humanitaire. Et puis un second avion est parti de Paris à 20 heures, hier, avec, là aussi, de l’aide d’urgence, du matériel d’urgence pédiatrique, des groupes électrogènes, des stations d’eau potable, des équipements médicaux et des rations alimentaires, en particulier pour le CICR et de la part de la Croix Rouge française. Voilà, il est évident que pour la conduite d’actions humanitaires, il est nécessaire d’avoir une évaluation. Actuellement des évaluations sont faites par l’UNICEF, le PNUD, l’OTAN et aussi très certainement par des personnels de l’armée française.

S’agissant du dispositif militaire, la frégate Jean de Vienne est à Beyrouth. Le TCD Siroco a quitté Toulon le 16 juillet dans après-midi avec 4 hélicoptères et une installation hospitalière en particulier deux blocs opératoires. Le porte-hélicoptères Mistral qui a appareillé le 18 juillet, devrait arriver à Beyrouth aujourd’hui. Il est doté d’un hôpital complet, de moyens amphibies permettant des sécuriser les ressortissants. Je rappelle qu’il peut transporter 4 000 civils. Quant aux moyens aériens, ce sont deux avions de transport Transall 160 et trois hélicoptères bi-moteurs Cougar.

Q - Vous allez rencontrer M. Berry, qui représente le Parlement, mais qui pourrait être un intermédiaire avec le parti Hezbollah, dans la mesure où vous essayer de faire appliquer un cessez-le-feu, d’être en contact avec toutes les parties. Comment se fait-il que vous n’ayez pas de contacts avec le Hezbollah ? Ou avec un soutien du Hezbollah c’est-à-dire éventuellement M. Berry ou l’Iran ?

R - Ce que je peux vous dire c’est que dans l’action diplomatique qui est la mienne, qui est la nôtre aujourd’hui, il est tout à fait nécessaire d’écouter les uns et les autres. C’est la raison pour laquelle je fais ce déplacement, pour parler avec mes homologues. Je rencontrerai le Premier ministre tout à l’heure. Il me consacre beaucoup de temps et je le remercie pour son analyse de la situation. Il est évident qu’il me parlera de son scénario de sortie de crise et je vais l’écouter. Je vais également écouter le président du Parlement. Vous venez d’évoquer dans quel contexte. J’irai voir mon homologue au Caire et aussi le président de la Ligue arabe. J’irai rencontrer les autorités jordaniennes, puis j’irai en Israël et peut-être dans les territoires palestiniens. Donc, à la fin, je pourrai peut-être mieux répondre à votre question.

Q - Est-ce qu’on peut dire qu’il y a un feu vert maintenant d’après les conseils de la France en ce qui concerne les troupes internationales pour la frontière ?

R - Le président de la République s’est exprimé sur ce sujet, en particulier au G8. Il nous paraît en effet important qu’il puisse y avoir une force internationale, une mission internationale de surveillance et/ou de sécurité qu’il faut définir, au Sud Liban, à la frontière israélo-libanaise./.

Source
France (ministère des Affaires étrangères)