Je pense que l’attitude des États-Unis à l’égard du régime de Damas a fondamentalement changé. D’abord, il y a eu le Syria Accountability and Lebanese Sovereignty Restoration Act, une loi pour laquelle mes amis et moi avons fait du lobbying dès avant le 11 septembre 2001. Elle prévoit des sanctions pour contraindre la Syrie à ne plus soutenir les groupes terroristes, à respecter la souveraineté du Liban et à s’engager enfin sur la voie de vraies réformes politiques et économiques. Ensuite, il y a eu le vote de la résolution 1559 du Conseil de sécurité de l’ONU présenté par la France et les États-Unis et qui vise explicitement la Syrie et le Hezbollah. Les sanctions économiques donnent déjà des résultats. La combinaison du Syria Accountability Act et de la résolution 1559 nous fournit un parapluie sous lequel le peuple libanais peut déjà s’exprimer plus librement, malgré les interdits du ministère de l’Intérieur.
Beaucoup de résolutions de l’ONU restent lettre morte, mais quand les grandes puissances veulent en faire appliquer certaines, elles y parviennent ! Cela est d’autant plus vrai que le régime syrien est fragile. Les États-Unis ont cautionné de façon implicite par le passé l’invasion du Liban, mais aujourd’hui la situation est différente. La Syrie est le point de rencontre de toutes les organisations terroristes et sans résoudre ce problème on ne peut pas avancer dans la région. La Syrie est un régime terroriste et si je n’ai pas de preuves formelles de son implication dans l’enlèvement des journalistes français, Christian Chesnot et George Malbrunot, j’ai des preuves pour d’autres actions.
Déjà, la guerre au Liban a été causée par les infiltrations de Palestiniens organisées par la Syrie. C’est elle qui a déstabilisé le Liban pour avoir le prétexte, ensuite, de le stabiliser ! Si George W. Bush veut démocratiser la région, il doit faire revivre ce qu’avant la guerre on appelait le « modèle libanais ». Il ne faut pas croire que la guerre au Liban était une guerre civile. Ce fut une guerre contre un front islamo-progressiste et palestinien importé au Liban et ce que la Jordanie a fait lors du fameux « Septembre noir », le Liban ne l’a pas pu.
J’invite tous les partis et toutes les forces vives du Liban, ainsi que l’État syrien, à participer officiellement à un dialogue ouvert, qui aura lieu dans un pays sûr, pour tenter de parvenir à un accord sur le retrait des quelque 20 000 soldats syriens stationnés au Liban. Mais j’appelle aussi l’opposition dans toutes ses composantes à se regrouper si la Syrie et ses partisans déclinent notre offre afin de parer à toutes les éventualités.

Source
Le Figaro (France)
Diffusion 350 000 exemplaires. Propriété de la Socpresse (anciennement créée par Robert Hersant, aujourd’hui détenue par l’avionneur Serge Dassault). Le quotidien de référence de la droite française.

« La Syrie est un pompier pyromane ! », par Michel Aoun, Le Figaro, 30 novembre 2004. Ce texte est adapté d’une interview.