Après avoir longtemps bataillé contre l’Union européenne, Tomislav Nikolić a démissionné du Parti radical et est parvenu à se faire élire président de la République de Serbie. Treize ans après les bombardements de l’OTAN, le temps est venu de passer sous les fourches caudines d’Herman van Rompuy.

L’Union Européenne essaye à tout prix de saboter les relations entre la Serbie et la Russie. Peut-être que la Serbie est déjà devenue membre de l’UE, mais la majorité d’entre nous n’est pas encore au courant. En effet, début septembre, un jour ou deux avant la rencontre à Sotchi entre les présidents serbe et russe, la Serbie et les membres de l’UE avaient condamné Moscou pour l’affaire du groupe Pussy Riot à l’occasion de la conférence de l’OSCE à Vienne.

À Belgrade, l’ambassade russe a demandé de quoi il s’agissait : est-ce que la Serbie est secrètement devenue membre de l’UE ? C’est la raison pour laquelle l’ambassadeur russe à Belgrade avait posé la question aux responsables serbes de ce vote à Vienne et la réponse qu’il a reçue était qu’il s’agissait d’un « automatisme ». Selon ce même principe, Moscou aurait pu annuler la visite du président de Serbie, Tomislav Nikolic, et on se demande alors si cet automatisme serbe ou européen est arrivé par « automatisme » ou bien, quelqu’un a peut-être pensé que ces filles du groupe Pussy Riot étaient en fait des fusées intercontinentales à tête nucléaire ? La Russie a noté cette déclaration de l’Union Européenne comme « contreproductive ». Mais apparemment, la Serbie est l’un des candidats à l’UE le plus ardent et plus souple. En fait, nous sommes des bons croyants et rien ne nous écartera du chemin vers un futur meilleur, et sur ce chemin, nous n’avons qu’une seule religion, celle de l’UE. Et quand on choisit une religion, il n’y a plus de retour possible, on y reste fidèle jusqu’à la fin du déluge. Jadis le communisme, aujourd’hui l’européisme. Les mêmes « -ismes » sont défendus avec la même adoration et la même loyauté et soumission sans réserve par les mêmes personnes ou par leurs descendants. J’ai déjà peur qu’on nous glisse par « automatisme » vers une guerre dans laquelle participe l’UE. Puisqu’on participe déjà à des missions militaires de l’UE. Dans l’Océan Indien contre les pirates. Une excellente expérience pour une lutte contre les pirates du Danube.

N’avons-nous donc pas pu nous retenir concernant la déclaration de l’UE sur la question du groupe Pussy Riot ? Surtout que nous voulons la signature du traité sur le partenariat stratégique avec la Russie. Et devinez quoi ? C’est seulement maintenant qu’on révèle au public que les entreprises russes n’étaient pas traitées de la même manière par notre économie que les entreprises occidentales. Je pensais que chez nous tout le monde était traité pareil. J’avais tort.

Le ministre des Affaires étrangères tchèque, Monsieur Karel Schwarzenberg, a déclaré pour l’un de nos quotidiens qu’il « serait mieux qu’on accepte ce que de toutes façons nous ne pourrons pas changer, puisque de toutes façons vous êtes obligés de remplir les conditions demandées ». Monsieur Schwarzenberg pense au Kosovo et poursuit « que la Serbie a perdu la guerre, et que les territoires sont souvent perdus pendant les guerres, que cela a toujours été comme ça dans l’histoire, qu’on perd toujours contre quelqu’un ». Je ne savais vraiment pas qu’on perdait parfois des territoires pendant les guerres, je remercie le ministre des Affaires étrangères tchèque pour cette découverte incroyable, on devrait mettre sa déclaration dans les livres scolaires. À ce que je sache, la Tchécoslovaque avait perdu les Sudètes sans guerre, sans un seul coup de feu, mais elle ne s’est jamais résignée à cette idée. Et c’était la réalité à ce moment-là, les troupes de Wehrmacht chez les Sudètes, et plus tard à Prague. Pourquoi les Tchécoslovaques n’ont-ils pas accepté cette réalité à ce moment-là ? C’était aussi la « Nouvelle Europe ». Sans frontières. Puisqu’Hitler les avait un peu détruites.

« Celui qui perd, doit l’accepter », dit le ministre des Affaires étrangères tchèque et ainsi il contribue directement à la violation du droit international. L’agression par l’OTAN de la Yougoslavie en 1999 a été réalisée sans l’accord du Conseil de Sécurité de l’ONU, qui est le seul autorisé à donner l’aval pour l’utilisation de la force. Celui qui accepte cette nouvelle réalité comme la conséquence de l’agression de l’OTAN, donne sa contribution à « la loi de la force, la loi de l’empire ». Est-ce que Monsieur Schwarzenberg a aussi l’intention de définir les nouvelles normes du droit international ?

Dans ce contexte, quel est le sens global de l’Europe ? La gouvernance du droit, la morale, la corruption, le nationalisme, le racisme, les intérêts particuliers, l’unité politique des continents, l’eurocratie de Bruxelles, l’arrogance ? L’Europe de l’Allemagne ou l’Europe des petites patries ?
Il y a un mois, dans un bus à Belgrade, j’écoutais la conversation entre un jeune Anglais et un vieux monsieur belgradois. Le monsieur belgradois avait averti l’Anglais qu’il ne devrait pas mettre ses pieds sur le siège et l’a invité à les enlever. L’Anglais était direct : « Je ne veux pas, nous vous avons battu pendant la guerre en 1999. »

Traduction
Svetlana Maksovic
Source
Politika (Serbie)