Faisant suite à nos lettres datées du 16 mars 2020 (A/74/752-S/2020/212) et du 28 mai 2020 (S/2020/454), ainsi qu’aux nombreuses communications antérieures concernant l’application du paragraphe 3 de l’annexe B de la résolution 2231 (2015) du Conseil de sécurité, j’ai l’honneur de réaffirmer une fois encore la position de la Fédération de Russie concernant cette question, en me référant à la lettre des Représentants permanents de l’Allemagne, de la France et du Royaume-Uni de Grande-Bretagne et d’Irlande du Nord, datée du 3 juin 2020 (S/2020/400).

La République islamique d’Iran, en tant que membre de l’Organisation des Nations Unies, a pleinement droit aux avantages qu’offrent la science et la technologie spatiales.

Aucun des instruments et mécanismes internationaux existants, notamment le Traité sur la non-prolifération des armes nucléaires ou le Régime de contrôle de la technologie des missiles, n’interdit explicitement ou implicitement à l’Iran de mettre au point des programmes de missiles et des programmes spatiaux.

Ni la résolution 2231 (2015) du Conseil, ni le Plan d’action global commun n’imposent de restriction aux droits et aux capacités de l’Iran de mettre au point de tels programmes au niveau national.

Les références faites au Régime de contrôle de la technologie des missiles et à la résolution 1929 (2010) du Conseil, ainsi qu’aux conclusions de la communication susmentionnée (S/2020/400), ne sont pas pertinentes. Les directives techniques du Régime de contrôle de la technologie des missiles ne sont mentionnées ni dans le Plan d’action global commun ni dans la résolution 2231 (2015) du Conseil de sécurité, y compris au paragraphe 3 de l’annexe B.

Nous nous opposons fermement à l’intention déclarée de l’Allemagne, de la France et du Royaume-Uni d’invoquer les critères des systèmes relevant de la catégorie I du Régime de contrôle de la technologie des missiles aux fins de l’application de la résolution 1540 (2004) du Conseil, en particulier de son paragraphe 2. L’objet réel du paragraphe est d’interdire à tout acteur non étatique, y compris les entités privées, de fabriquer, de se procurer, de mettre au point, de posséder, de transporter, de transférer ou d’utiliser tout lanceur spatial capable, du fait de sa conception technique, d’emporter 500 kilogrammes sur une distance d’au moins 300 kilomètres, quelle que soit l’intention déclarée. En cette ère d’exploration spatiale, et compte tenu des succès remportés récemment par des partenariats public-privé dans ce domaine, nous trouvons cette approche incompréhensible.

Nous tenons à rappeler une fois de plus à nos homologues européens : qu’à l’alinéa a) du paragraphe 7 de sa résolution 2231 (2015), le Conseil a décidé que les dispositions de la résolution 1929 (2010) seraient levées, y compris le paragraphe 9 qui interdisait à l’Iran de mener toute activité liée aux missiles balistiques pouvant emporter des armes nucléaires ;

que le paragraphe 3 de l’annexe B de la résolution 2231 (2015) exige de l’Iran qu’il « ne mène aucune activité liée à des missiles balistiques conçus pour pouvoir emporter des armes nucléaires » ;

que le paragraphe 36 du rapport final du Groupe d’experts créé en application de la résolution 1929 (2010) du Conseil de sécurité (S/2012/395, annexe), auquel il est fait référence dans la communication susmentionnée (S/2020/400), indique clairement que « le Groupe a noté que le lanceur spatial Safir lui-même n’était pas conçu pour emporter une arme nucléaire » même s’il dérivait de deux missiles à capacité nucléaire (le Shahab-3 et le missile balistique à lanceur sous-marin R-27 dans sa deuxième phase).

Par conséquent, la conclusion selon laquelle, étant basé sur la technologie du missile balistique Shahab-3, le Qased « en a les mêmes particularités de conception, ce qui lui confère une capacité nucléaire », est délibérément fallacieuse.

En conclusion, je tiens à souligner que quelles que soient les préoccupations de l’Allemagne, de la France et du Royaume-Uni concernant les programmes de missiles et les programmes spatiaux de l’Iran, celles-ci ne se dissiperont pas en accusant faussement l’Iran de « contrevenir » aux résolutions 2231 (2015), 2216 (2015) et 1540 (2004) du Conseil. La référence faite, dans ce contexte, à la résolution 1540 (2004) du Conseil – un dispositif conçu pour favoriser la coopération et non la coercition – est particulièrement regrettable. Exploitée pour étayer des accusations dénuées de fondement, elle ne fait que démontrer que certains pays sont prêts à anéantir toute une ère de coopération et d’œuvre collective visant à empêcher que les armes de destruction massive ne tombent entre les mains d’acteurs non étatiques.

Vu ce qui précède et puisqu’à ce jour, aucune preuve sérieuse du contraire n’a été communiquée au Conseil, la Fédération de Russie continue de penser, comme elle l’a déjà déclaré, que l’Iran respecte de bonne foi l’appel qui lui avait été adressé au paragraphe 3 de l’annexe B de la résolution 2231 (2015) selon lequel il était tenu de ne mener aucune activité liée aux missiles balistiques conçus pour pouvoir emporter des armes nucléaires.

Nous vous serions reconnaissants de bien vouloir faire distribuer le texte de la présente lettre comme document du Conseil de sécurité et saurions gré au Secrétaire général d’en tenir pleinement compte dans son prochain rapport sur l’application de la résolution 2231 (2015).

Source : S/2020/522