Tout n’est pas si calme dans la bonne Confédération Helvétique. La justice, entre autres, a semble-t-il beaucoup de travail même si les différents procès concernant des " affaires rwando-suisse " traînent un peu en longueur. Essai d’explication.

Acte 1, Neufchatel

En 1994, Innocent Semuhire, Président de l’Assemblée des Rwandais de Suisse (ARS) est invité par l’église catholique du canton du Jura pour clore une action de récolte de fonds en faveur des " réfugiés " du Zaïre. Un gynécologue rwandais, le Dr. Rwakabayiza, habitant dans la région, et participant à cette conférence est pour le moins surpris par les propos tenus par Semuhire : sur des diapositives, Semuhire montre les enfants joufflus des anciens responsables administratifs du Rwanda, dont le Préfet de Kibuye (condamné à la prison à vie par tribunal international). Et dans la discussion qui s’en est suivie entre le médecin et Semuhire, celui-ci semble justifier tous les poncifs du discours raciste du Hutu-Power. Comme suite à cette soirée, un article intitulé : " La jeunesse catholique du Val Terbi infiltrée par un extrémiste hutu " paraît dans le journal du canton de Neuchâtel. Dès la parution de l’article, le journaliste auteur de l’article reçoit des menaces de mort et, pendant deux jours, vit avec la peur au ventre. En même temps Semuhire porte plainte contre le Dr. Rwakabayiza, contre l’auteur de l’article, ainsi que contre le rédacteur en chef du journal. Cette plainte a été levée en première et en deuxième instance à Neuchâtel, et Semuhire est débouté.

Acte 2, Courfaivre

Début 1995, une séance d’information a lieu à Courfaivre. Ce soir là, un grand nombre de fidèles du Hutu-Power sont présents. La tension est à son comble dans la salle. Les adeptes du Hutu-Power défendent avec agressivité leurs thèses révisionnistes et la séance tourne à la réunion d’intimidation (comme au bon vieux temps du MRND, ancien parti unique au Rwanda). Le lendemain de cette réunion, un autre article basé sur une interview d’un autre citoyen suisse paraît dans Le Quotidien jurassien, le principal journal de la région.

Acte 3, Le Bry

En 1996, la Confédération veut accorder à Semuhire le droit de se faire naturaliser suisse, dans la petite commune de Le Bry dans laquelle il réside. Des habitants réagissent aussitôt et envoient copie de l’article du Quotidien jurassien à la commune de Le Bry en précisant que Semuhire est un " nazi ". La commune de Le Bry refuse alors " l’indigénat " à Semuhire et celui-ci porte plainte contre les deux citoyens impliqués dans ces articles. En juin 1997, Semuhire est de nouveau débouté par le tribunal de première instance du canton de Neuchâtel, mais pose un recours et se fait défendre (gratuitement car il est indigent !) par un avocat député socialiste du canton de Fribourg. La chambre d’accusation du canton de Neuchâtel accepte partiellement ce recours.

Acte 4, Fribourg

En 1997, un journal fribourgeois de gauche, L’Objectif se saisit de l’affaire et dénonce les " nazis rwandais ". Suite à ces articles le rédacteur en chef et le journaliste (MM. Angéloz et Musy) reçoivent à leur tour des menaces anonymes. Semuhire et l’ARS portent de nouveau plainte contre les journalistes et c’est ainsi qu’a lieu un procès parallèle à Fribourg, où cette fois, les journalistes sont déboutés en première instance. Précisons toutefois que Semuhire reçu à ce moment là, le soutien de la Confédération. Ce qui s’explique parce qu’il a fait sa thèse de doctorat auprès du Prof. Michel, bras droit du Ministre des affaires étrangères. De plus les pères blancs, notamment le tristement célèbre Perraudin, sont basés à Fribourg et Semuhire est, on s’en doute, un de leurs amis. Du coup, l’Université de Fribourg a reconnu Semuhire comme un grand spécialiste des droits de l’homme ! Actuellement, les journalistes ont fait recours et l’affaire est loin d’être close.

Acte 5, Le Bry " bis "

Par 2 fois le canton de Fribourg a refusé le vote négatif de la commune de Le Bry pour la naturalisation de Semuhire (en Suisse, il faut un accord préalable de la collectivité locale ). Décidé-ment, la Confédération insiste donc pour naturaliser le Président de l’ARS. Aurait-il un soutien en haut lieu ? Des aventures judiciaires que nous ne manqueront pas de suivre pas à pas.