Un congrès du Front national ne doit pas être interprété comme un congrès de parti démocratique. Ce n’est pas un lieu de débat, idéologique ou stratégique, ni un organe décisionnel, mais la célébration d’une identité commune. Les statuts du Front, et la loi de 1901 qui les régit, le contraignent malgré lui à convoquer cette assemblée générale pour maintenir son apparence démocratique, au minimum tous les trois ans. Cette obligation est mise à profit pour développer une vaste opération de communication externe et interne, une " mise à jour " de l’opinion publique et des militants.
Sont convoqués des membres de droit et des délégués des fédérations élus par les congrès départementaux. En outre, chaque participant peut être accompagné d’une personne de son choix à titre d’observateur. Pour l’élection du Comité central, les membres du Congrès sont invités à désigner cent noms sur une liste de trois cent quatre vingt-sept candidats.
Nos confrères ont justement souligné que le résultat de cette consultation était favorable au " clan Mégret ". Mais ce succès ne peut aucunement être analysé comme la victoire d’une ligne politique contre une autre. En effet, le vote se joue uniquement sur la réputation dont bénéficient les candidats. C’est une sorte de hit-parade de la notoriété, qu’elle soit due à un mandat électif, à l’ancienneté militante, à une position dans la structure frontiste, ou à une présence dans la presse d’extrême droite. Ainsi sept dirigeants ou collaborateurs de National Hebdo ont été élus, alors que des hommes-clés, qui assurent dans l’ombre la prospérité du parti, ont été négligés.
Pour accroître la visibilité de leur influence, les différents courants peuvent se concurrencer de plusieurs façons : en assistant en invité vedette à des congrès départementaux, ils peuvent favoriser le plébiscite de " leurs " délégués-électeurs au congrès national ; en plaçant leurs hommes, au siège du parti, à des postes en contact avec les fédérations et les militants, ils peuvent augmenter leur notoriété interne ; en contrôlant telle ou telle publication du parti, ils peuvent mettre en valeur les activités de tel ou tel de leurs affidés. En outre, au moment même du vote, dans la salle du congrès, les courants les mieux organisés peuvent faire passer des " conseillers " dans les rangs pour " souffler " quelques noms à ceux qui se trouvent en mal d’en reconnaître une centaine.
Les résultats du vote montrent que le " courant Mégret ", bien organisé, excelle à ce petit jeu au détriment aussi bien du " courant Gollnisch " que des " hommes de Le Pen ", généralement peu impliqués dans l’activité militante. Reste que la composition du Comité central n’a que peu d’importance. Se réunissant au plus une fois par an, il n’est que l’alibi démocratique du FN, dont l’appareil exécutif reste statutairement soumis au président.
Après l’élection par acclamation du président, qui était l’unique candidat à sa propre succession, le Comité central fraîchement élu se réunit sous sa présidence et procède à l’élection du Bureau politique. Cette opération, qui dure moins d’une demi-heure, se limite à approuver la liste proposée par le président. Celui-ci apprécie seul l’équilibre entre les différentes tendances, vraisemblablement en tenant compte de multiples requêtes et tractations.
Se réunissant théoriquement une fois par semaine, le Bureau politique n’est pas non plus vraiment le lieu où se décident les grandes orientations politiques du mouvement. Les cadres du Front s’y réunissent principalement pour prendre les consignes, échanger les points de vue, les informations, et entériner les décisions émanant de la présidence. Il a toutefois pour attribution de nommer les secrétaires départementaux et régionaux.
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