Depuis la fin mai, Tin Kwan Ming, le chef militaire de la zone sud de l’United Wa State Army (Brigade 525 de l’UWSA), implanté le long de la frontière thaïlandaise, est porté disparu. Il était parti pour Kunming, la capitale du Yunnan, mais n’a plus ensuite donné signe de vie. La direction de l’UWSA, a d’abord essayé de masquer sa disparition, puis l’a remplacé par Nyi Kap, un chef politico - militaire wa expérimenté. La Brigade 525 est entièrement financée par une des plus grandes narco-organisations de la région, celle des frères Wei Shao (La Dépêche Internationale des Drogues n°9) et son rôle est d’assurer la protection des réseaux de drogues passant par la Thaïlande. Nyi Kap et Tin Kwan Ming ont toujours éprouvé une haine profonde à l’égard de leur rival de Khun Sa et cela d’autant plus que le "Roi de l’opium" renforçait son influence politique et militaire sur l’Etat Shan. Bien qu’il n’existe aucune certitude à ce sujet, la disparition soudaine de Tin Kwan Ming (dont la rumeur dit, à la frontière thaïlandaise, qu’il était sur une grosse affaire de drogues) a pu être attribuée par les Wa à Khun Sa et avoir provoqué la reprise brutale des combats entre l’UWSA et les Shan de la Mong Tai Army (MTA) dans le secteur de la vallée de Mong Yawn, qui est depuis longtemps une zone dont l’enjeu est capital pour le contrôle du trafic de teck mais surtout celui de l’héroïne. Mais il existe d’autres raisons à la reprise des hostilités. D’abord le fait que la fermeture de la frontière thaïlandaise a poussé Khun Sa à chercher de nouvelles routes de l’héroïne passant par le territoire wa (La Dépêche Internationale des Drogues n°47). D’autre part les Wa, encouragés par les militaires birmans, ont entrepris la construction d’une route devant relier Mong Hsat au massif de Sam Sao, proche de la Thaïlande. Cette route mettrait les premières défenses de Khun Sa à portée des mortiers des Wa et, éventuellement, de l’armée birmane. Khun Sa, lorsque le chantier a atteint son territoire en juin, a réagi et s’est emparé d’une base stratégique de l’UWSA contrôlant l’accès des vallées des rivières Yawn et Kok. Pour conserver une certaine crédibilité face au SLORC (la junte militaire au pouvoir), mais surtout pour garantir le passage de leurs caravanes d’opium, les Wa ont lancé de violentes contre - attaques dans ce secteur. L’intensification des combats a aussi pour but de contraindre les unités Shan à réduire leurs implantations au sud de Kengtoung, à la limite des territoires wa du nord. Mais Khun Sa et les Shan, désireux de montrer que leur puissance est intacte, n’ont pas l’intention de lâcher leurs gains territoriaux. Et cela surtout après la défection, le 6 juin, de Karnyod, commandant en second de la 16e Brigade de la MTA qui, avec quelques centaines de partisans, a créé la Shan State National Army. Dans cette situation de conflits ouverts entre minorités, le contrôle du marché de la drogue est essentiel pour financer les achats d’armes. La fermeture temporaire des frontières entre la Birmanie et la Thaïlande a compliqué le passage des marchandises illicites. Une nouvelle filière se développe directement entre la Birmanie et le Laos, avec, dans un sens la drogue, et dans l’autre les armes, d’autant que les Wa cherchent à se procurer des quantités considérables de matériel qui ne sont plus aussi facilement accessibles par la Thaïlande (correspondant de l’OGD en Birmanie).

(c) La Dépêche Internationale des Drogues n° 48