Nombreux sont ceux qui ont évoqué devant la commission d’enquête les effets répulsifs pour les acteurs économiques de l’image de violence trop souvent associée à celle de la Corse.

On se bornera à citer le directeur régional de la Banque de France qui, devant la mission d’information sur la Corse, déclarait en février 1997 : " Il ne faut pas sous-estimer l’impact du contexte social défavorable de ces dernières années : grèves répétées des transports, grèves prolongées du secteur public, climat d’agitation politique et de violence. "

S’agissant de la violence elle-même, la question de la conditionnalité ou de la simultanéité des politiques répressives et de soutien à l’économie a été souvent posée.

Le rétablissement de l’État de droit constitue-t-il la condition préalable du décollage économique de l’île ou bien est-ce le redressement de l’économie insulaire qui est susceptible de créer un climat propice au retour à la paix ? Ou encore le gouvernement doit-il - peut-il - dans le même temps œuvrer pour le respect de l’État de droit et le décollage économique de la Corse ?

Trois anciens ministres de l’Intérieur ont livré leurs conceptions sur ce point à la commission d’enquête.

Pour l’un d’eux " il est bien évident que le problème de la Corse, le rétablissement de l’ordre public, n’est pas séparable du problème du développement. "

Pour un autre, "la violence est un peu inhérente à la Corse. Elle se manifeste avec plus ou moins d’intensité selon les périodes. ". Il a ajouté : " Je crois avant tout que la Corse est en état de sous-développement. Cela, chacun peut le constater et chacun, dans chaque gouvernement, pense que l’un des moyens de résoudre la crise politique, la crise issue de la violence, consiste à résoudre les problèmes économiques (...). "

Pour un troisième, " un des problèmes de la République française est d’avoir prétendu traiter de façon homogène des problèmes totalement différents. (...) Cette difficulté à considérer que des situations socio-économiques, sociologiques, historiques, culturelles différentes appellent des traitements différents explique que vis-à-vis de la Corse une grande part de l’opinion française soit partagée entre des sentiments de lassitude ou de crispation. Entre les deux, où est la vérité ? " (...). Le problème de la Corse est évidemment un problème pénal, un problème de justice, de criminalité, etc., mais il est avant tout un problème politique et psycho-sociologique. (...) Il est vrai qu’il y a un problème mécanique : comment amorcer la pompe pour entrer dans le développement et sortir du clanisme, de la délinquance, de la crainte de la délinquance ? (...) Il ajoutait : " Pour sortir d’une mécanique infernale, il faut monter une autre mécanique, qui est celle du développement et de la restauration de la démocratie. (...) Le problème de fond est de savoir quelles sont les perspectives de développement économique de la Corse. S’il n’y en avait pas, je ne dirais pas que je suis optimiste. Mais il y en a une et demie : le tourisme et l’informatique, qui permet la localisation d’activités intellectuelles à peu près n’importe où, en particulier dans les endroits agréables. Or, la Corse est un territoire vierge. (...) On peut penser que la Corse a aussi un avenir : le jour où la population et les élus corses prendront conscience que la Corse peut, avec les chances que lui offre son retard historique, choisir un nouveau type de développement (...). "


Source : Assemblée nationale. http://www.assemblee-nationale.fr