( UN EFFORT DEJA CONSIDERABLE DE L’UNION EUROPEENNE EN 1989-1993 ET UN SOUTIEN ACCRU SUR LA PERIODE 1994-1999

Au cours de cette période, plusieurs programmes ont couvert la région Corse. Dès 1986, des actions spécifiques avaient été menées grâce au Programme intégré méditerranéen (PIM) qui visait à aider les régions méditerranéennes de la France à pallier les effets de l’entrée dans le marché commun de l’Espagne et du Portugal. Le programme de l’Objectif 1 est venu renforcer en 1989 cet ensemble de mesures, complété par ailleurs par les initiatives communautaires telles que Interreg, Stride ou Envireg.

De multiples réalisations dans le cadre de l’Objectif 1 et du PIM ont porté sur le désenclavement de l’île. Le Fonds européen de développement régional (FEDER) contribua dans ce cadre à l’amélioration du réseau routier42 et des aménagements portuaires43 afin de permettre l’augmentation du trafic maritime des marchandises. Il finança des travaux visant à renforcer la capacité d’accueil des quatre aéroports accueillant des vols commerciaux. C’est ainsi que furent réalisés l’aménagement de l’aérogare d’Ajaccio, l’accroissement des aires d’accueil de l’aéroport de Bastia et l’amélioration des aéroports de Figari et de Calvi. Le deuxième grand axe des actions communautaires concerna le développement des PME-PMI dans le but de renforcer le tissu des moyennes entreprises en Corse.

Dans la période 1989-1993, une aide aux investissements d’un montant de 20 millions de francs permit d’accompagner le développement de plus de cinquante entreprises régionales. Dans le cadre de la promotion touristique de l’île, le FEDER cofinança en outre divers projets culturels, parmi lesquels la création du musée de la Corse à Corte ou l’aménagement d’un site archéologique à Aléria. Un quatrième volet fut axé autour de la mise en valeur des ressources agricoles. Ainsi, au cours de la période

1989-1993, la Corse bénéficia de près de 130 millions de francs au titre de l’adaptation des structures agricoles. Des cycles de formation furent proposés aux agriculteurs corses et des initiatives se multiplièrent pour optimiser le stockage, la transformation et la commercialisation des produits agricoles. 30 millions de francs furent par ailleurs alloués à l’aménagement de 13 ports, 7 en Haute-Corse et 6 en Corse-du-Sud. De même, l’Union européenne contribua à soutenir l’effort en faveur de l’enseignement supérieur et participa notamment au projet d’extension des capacités d’accueil et d’équipement de l’université de Corte44. Parmi les autres travaux aidés par l’Union européenne, il faut citer l’agrandissement du lycée Fred-Scamaroni de Bastia avec la réalisation d’une unité autonome destinée aux formations du secteur hôtelier, la création d’une structure d’accueil aux métiers du tourisme à Ville-di-Pietrabugno, du centre de formation des apprentis (CFA) de Corse-du-Sud à Ajaccio, du centre municipal de formation de Propriano et de l’Institut méditerranéen de formation de Borgo.

A ces actions se sont ajoutés les Programmes d’initiative communautaire (PIC) qui mobilisèrent plus de 270 millions de francs entre 1989 et 1993 pour compléter les programmes de l’Objectif 1 et les PIM dans des secteurs particuliers comme l’environnement45, le développement local et la coopération transfrontalière.

C’est en juillet 1993 que la liste des zones concernées par les programmes de l’Objectif 1 fut arrêtée. L’ensemble du territoire corse fut une nouvelle fois intégré alors que, du strict point de vue des règles, la Corse n’aurait pas dû y figurer.

( LE " COUP DE POUCE " DU GOUVERNEMENT FRANÇAIS EN 1993

Un haut responsable de la Commission européenne a indiqué : " Dans la période actuelle de programmation, entre 1994 et 1999, la Corse est considérée comme région éligible au titre de l’Objectif 1 qui, dans notre jargon, désigne les régions considérées en retard de développement, c’est-à-dire celles dont le produit intérieur brut est inférieur à 75 % de la moyenne communautaire. Celui de la Corse était légèrement supérieur, mais dans la négociation politique qui a eu lieu en 1993, la Corse a été incluse dans la liste des régions en retard, qui couvrent actuellement environ 25 % de la population européenne. La Corse en fait partie, comme les départements d’outre-mer français et le Valenciennois, dans le nord de la France. (....)

Cela avait été un choix du gouvernement français. A l’époque, quand nous avons négocié l’enveloppe de l’Objectif 1 pour la France entre les DOM, la Corse et le Valenciennois, il y ait eu une volonté importante de donner plus d’argent à la Corse, compte tenu d’une série de problèmes. La commission, souple comme souvent, l’avait accepté, même si cela ne correspondait pas à une certaine équité qui veut que l’on donne plus d’argent là où les gens sont les plus pauvres. (...)

La commission adresse à chaque État une lettre (...) disant : " selon l’application de critères objectifs, identiques à ceux appliqués pour répartir les crédits entre les pays - PIB par habitant, niveau de chômage, etc - voilà quelles seraient les allocations qui nous semblent raisonnables et justes. Il s’est trouvé qu’à l’époque, le gouvernement français n’a pas du tout suivi nos recommandations. Il n’était pas obligé de le faire, mais surprivilégier la Corse par rapport aux autres territoires de l’Objectif 1 a donné lieu, à nos yeux, à une très grande inégalité par rapport aux situations objectives. "

( UNE LARGE PALETTE DE PROGRAMMES COMMUNAUTAIRES

La Corse continue sur la période 1994-1999 à bénéficier des Programmes d’initiative communautaire. Grâce au Programme " Leader " renouvelé jusqu’en 1999, des actions de développement rural sont financées à hauteur de 19,5 millions de francs du FEDER, du FEOGA et du FSE. L’initiative " Pesca " en faveur de la reconversion des zones dépendantes du secteur de la pêche, c’est-à-dire l’ensemble des zones côtières de l’île, est dotée de 2 millions de francs. Les actions du PIC PME sont également poursuivies. De même, Interreg est reconduit pour la Corse : avec une dotation de 136 millions de francs, ce programme constitue, de par son importance, le second programme dont l’île bénéficie dans le cadre communautaire.

( VERS UN PROGRAMME DE TRANSITION ACCOMPAGNANT LA SORTIE DE L’OBJECTIF 1

La probable sortie de la Corse de l’Objectif 1 à partir de 1999 témoigne des progrès accomplis par la région pour combler son retard de développement. Il convient de s’en réjouir à ce titre. Cependant, il est clair que les flux des crédits européens ont permis sur la période récente la réalisation de divers projets structurels, notamment en matière de désenclavement. Il est donc indispensable d’élaborer pour la Corse un plan de transition qui lui permette de bénéficier pendant plusieurs années d’un soutien particulier de l’Union européenne.

Interrogé à ce propos par la commission d’enquête, un haut fonctionnaire européen a expliqué : " La proposition de la Commission européenne prévoit de concentrer les fonds dont nous disposerons pour la période prochaine sur les régions les plus défavorisées. Nous considérons qu’il faut une application stricte des critères d’éligibilité pour les régions d’Objectif 1, et la Corse est au-dessus de cela. Il y aura dans la proposition de la Commission une volonté de ne pas inclure la Corse, ni le Valenciennois dans les régions considérées en retard de développement au niveau européen et qui reçoivent les deux tiers de la dotation globale des financements.

Si les États membres suivent la position de la Commission, la Corse ne sera plus en Objectif 1 à partir du 1er janvier 2000.

Néanmoins, pour ne pas créer de fracture soudaine, nous proposons une période de transition longue et assez généreuse. Nous proposons la mise en place d’un programme " feasing out " de cinq ans, c’est-à-dire de sortie, graduelle, de sorte que l’on aurait encore, pour la prochaine période, un programme pour la Corse, mais d’un montant moins important. Il y aura encore des financements européens, en tout cas, pour quelques années, mais d’une intensité moindre. L’intensité n’est pas déterminée, cela dépendra de la négociation sur le budget communautaire, dans les prochaines semaines et les prochains mois. ".

Sans revenir sur l’échec du POSEICOR, le gouvernement français pourrait s’appuyer sur l’article 158 nouvellement rédigé du traité sur l’Union européenne pour inciter cette dernière à mieux prendre en compte les spécificités insulaires dans l’espace communautaire.


Source : Assemblée nationale. http://www.assemblee-nationale.fr