Annoncée par le Premier ministre lui-même lors de son déplacement sur l’île en juillet 1996, l’institution d’une zone franche sur l’ensemble du territoire de la Corse a pour objet de " donner un nouveau souffle à l’économie corse (...) parce qu’au fil des années celle-ci a été progressivement asphyxiée ou anémiée ". " Pour rattraper le retard accumulé depuis vingt ans, le gouvernement a décidé de manifester la solidarité de la Nation en érigeant la Corse en zone franche " poursuivit-il dans son discours prononcé devant l’Assemblée de Corse.

L’instauration de la zone franche a, dès lors, profondément changé la nature du statut fiscal dérogatoire de l’île.

Outre qu’elle poursuit le processus d’allégement de la taxe professionnelle en Corse53, elle institue en effet pour la première fois des exonérations sur les bénéfices sans commune mesure avec les modestes dispositifs cités ci-dessus. Elle innove en faisant bénéficier la Corse de mécanismes d’exonération des charges sociales exorbitants du droit commun. En outre, au contraire des autres zones franches existantes qui ne concernent que des territoires très limités, elle s’applique à l’ensemble d’une région qui bénéficiait déjà, en tout ou partie, des dispositifs de soutien de droit commun54. Hormis les cantons d’Ajaccio et de Bastia, la Corse est, en effet, classée en zone de revitalisation rurale. Elle est, en outre, classée en zone d’aménagement du territoire, donc éligible à la prime d’aménagement du territoire.

Sans entrer dans le détail des dispositions, la loi du 26 décembre 1996 s’applique aux entreprises existantes55 qui exercent une activité industrielle, artisanale, commerciale ou non commerciale56, aux entreprises en création ou en extension et, sur agrément administratif, pour les entreprises de moins de 250 salariés qui rencontrent des difficultés financières (c’est-à-dire qui font l’objet d’une procédure de redressement judiciaire ou lorsque leur situation financière rend imminente la cessation d’activité) et qui présentent un intérêt économique et social pour la Corse. Elle prévoit trois types d’exonération :

 une exonération d’impôt sur les bénéfices (impôt sur les sociétés ou impôt sur le revenu au titre des bénéfices industriels et commerciaux) limitée à 400.000 francs par période de douze mois et pour une durée de cinq ans à compter du 1er janvier 1997 ; les bénéfices exonérés doivent être maintenus dans l’entreprise57 ;

 une exonération de la part communale de la taxe professionnelle, sauf délibération contraire des communes ou de leurs groupements, dans la limite d’un montant de base nette imposable de 3 millions de francs par établissement, avant application de l’abattement spécifique de 25 % institué par la loi de 1994 ;

 un allégement de 23,4 % des charges sociales patronales sur les salaires inférieurs à deux fois le SMIC dans la limite d’un plafond de 1.500 francs par mois et par emploi.

D’après les éléments recueillis par la commission d’enquête, le coût pour l’État et les organismes de sécurité sociale s’élèverait au total à 516 millions de francs pour 1997 : 166 millions de francs au titre de la taxe professionnelle, 160 environ pour l’exonération partielle des bénéfices ou de l’impôt sur les sociétés58, 10 millions de francs pour l’exonération de l’imposition forfaitaire annuelle et environ 180 millions de francs pour l’allégement des charges sociales patronales.


Source : Assemblée nationale. http://www.assemblee-nationale.fr