On observe enfin dans l’île des comportements particuliers, que certains n’ont pas hésité à qualifier de " folkloriques ", terme que l’importance ou la gravité des phénomènes rend pourtant totalement inadapté.

( LES INCENDIES D’ORIGINE PASTORALE : UNE ATTEINTE MAJEURE A L’ENVIRONNEMENT

Comme l’expliquait devant la mission d’information sur la Corse M. Paul Giacobbi, alors président de l’office de l’environnement, " l’une des grandes atteintes, pour ne pas dire la principale, à l’environnement de la Corse ces dernières années, a été l’incendie, d’origine criminelle dans la majorité des cas, c’est-à-dire l’incendie d’origine pastorale (...) Dans ma région d’origine, on peut dresser la carte prévisionnelle des mises à feu (...) en fonction des zones incendiées les années précédentes (...) Je le date de l’abandon des cultures, c’est-à-dire que cela s’adresse à des terrains dégradés, autrefois en cultures, en terrasses et certainement pas en brûlis. Il était beaucoup plus difficile de brûler des potagers ou des zones de céréales qui au surplus ne vous appartenaient pas dans un territoire qui était possédé et maillé par une utilisation agricole. Aujourd’hui, ce sont des terrains abandonnés du point de vue foncier et qui ne sont plus maillés par une présence humaine ; on peut les brûler et, par conséquent, on les utilise dans le cadre d’une agriculture extraordinairement primitive ".

Le paradoxe est que les efforts menés en terme de renforcement des moyens de la sécurité civile et de lutte contre les incendies semblent plutôt avoir des conséquences fâcheuses. Comme l’indiquait le directeur de la sécurité civile du ministère de l’Intérieur dans une note de février 1993 " les services d’intervention parvenant, grâce à la stratégie mise en œuvre, à contrôler les feux lorsque le niveau des risques est limité, les incendies sont allumés lorsque les conditions de propagation sont maximales, la pression se faisant de plus en plus forte avec l’avancement de la saison jusqu’à ce que les moyens d’intervention ne puissent plus faire face aux éclosions. Face à un tel comportement, il paraît évident que les efforts à entreprendre ne doivent pas porter sur le seul renforcement de la composante d’intervention. Dans la logique observée, tout dispositif, aussi performant soit-il, sera toujours confronté aux limites que lui imposera un comportement de surenchère devenu naturel "218.

( UN GOUT IMMODERE POUR LES ARMES

Sans évoquer les exhibitions pratiquées par les mouvements clandestins, le goût pour la détention d’armes à feu est un trait bien connu dans l’île. D’après certaines indications données à la commission d’enquête, il existerait de 30.000 à 40.000 armes dans les foyers corses, dont beaucoup, comme l’expliquait un haut responsable administratif " ne sont pas des armes de chasse ".

Ces armes ne sont pas uniquement détenues à domicile ou utilisées dans le cadre d’activités sportives ou de chasse. Elles sont fréquemment portées, même dans les lieux publics219. Il est arrivé que, un soir d’élections, des fusils-mitrailleurs soient brandis en fanfare devant la préfecture par les vainqueurs du jour220.

Comme l’expliquait le haut responsable administratif déjà cité, cette attirance pour les armes limite considérablement l’action des pouvoirs publics : " Actuellement, les autorisations de détention d’armes sont délivrées avec beaucoup de rigueur, puisque nous ne délivrons aucune autorisation pour des motifs de défense, on ne les renouvelle pas et on ne les octroie que de façon limitée pour les activités sportives. En outre, on exige des garanties de stockage des armes lorsque des personnes en possèdent plusieurs pour le sport. (...) Nous avons beaucoup de mal à appliquer la législation, car lorsque nous supprimons une autorisation de détention, nous ne savons pas quoi faire des armes. Vous savez que les détenteurs ont plusieurs possibilités : soit faire neutraliser l’arme - ce qui coûte environ 1.000 francs -, soit la remettre à un armurier - mais il y a de moins en moins d’armuriers agréés en Corse et peu d’entre eux acceptent de garder des armes par crainte des cambriolages - soit, enfin, la remettre à l’État pour qu’elle soit vendue - mais pour l’instant, je n’imagine pas organiser une vente d’armes en Corse ! ".

( LA MECONNAISSANCE DU CODE DE LA ROUTE

Il n’y a certes pas qu’en Corse que les automobilistes méconnaissent l’une ou l’autre des règles édictées par le code de la route. Cependant, tous les observateurs s’accordent à reconnaître que la situation insulaire relève d’un incivisme plus accentué qu’ailleurs.

Dans son numéro de mars 1998, l’INSEE-Corse indiquait que, de 1985 à 1996, 759 personnes avaient trouvé la mort sur les routes de l’île. Les trois-quarts des victimes avaient entre 18 et 35 ans. Avec 479 tués, la Haute-Corse apparaît comme le département le plus touché de France.

En se confrontant à la sécheresse des statistiques, on doit relever que, sur la période 1991-1994, le nombre de piétons tués pour 10.000 habitants a été de 0,38 en Corse (au lieu de 0,21 pour la France entière), celui de tués en deux-roues de 0,29 (au lieu de 0,21) et celui tués dans des accidents impliquant des voitures particulières de 1,59 (au lieu de 0,8).

Certes, l’état du réseau routier peut aussi être incriminé, mais cette situation relève aussi de l’inobservation très fréquente des règles élémentaires de sécurité, qu’il s’agisse du port du casque pour les deux-roues ou du bouclage de la ceinture de sécurité. La responsabilité des conducteurs est engagée dans plus de la moitié des accidents corporels de la route, alors que la moyenne nationale n’est que de 25%. Le non-respect des règles de sécurité est à l’origine du tiers environ des accidents corporels.


Source : Assemblée nationale. http://www.assemblee-nationale.fr