Il serait faux de considérer que les taux d’élucidation en Corse sont très faibles. A cet égard, les statistiques d’ensemble sont encourageantes, ce que n’a pas manqué de souligner le ministre de l’Intérieur, M. Jean-Pierre Chevènement, devant les membres de la commission : " Le taux d’élucidation des crimes et délits atteint 43 % en Corse, ce qui le situe largement au-dessus de la moyenne nationale (30 %). Bien évidemment, le résultat le plus spectaculaire fut l’élucidation de l’assassinat du préfet Claude Erignac, grâce au travail effectué par la DNAT sous le contrôle des juges anti-terroristes, avec l’appui de la section de recherches de la Direction centrale des renseignements généraux (DCRG).(...)

S’agissant de la criminalité, on constate aussi une chute remarquable de 62 % des vols à main armée, qui sont passés de 160 en 1997 à 61 en 1998. Le nombre des homicides et tentatives d’homicide demeure stable, mais l’effort porté sur l’élucidation a été payant : 29 affaires ont trouvé leur solution en 1998. Jamais, depuis vingt ans, la police et la gendarmerie n’avaient obtenu pareil résultat. On peut dire qu’aujourd’hui, contrairement à une tradition ancienne, la plupart des auteurs de meurtres en Corse sont identifiés. D’autres élucidations devraient intervenir, suite au succès de l’enquête menée sur l’assassinat de M. Claude Erignac ".

Il est vrai qu’à l’exception de l’année 1993, le taux d’élucidation des crimes et délits enregistrés en Corse a toujours été supérieur à la moyenne nationale (cf. tableau n° 5 en annexe).

Les taux d’élucidation ne constituent toutefois pas toujours des indicateurs fiables de l’efficacité des services, dans la mesure où le nombre d’infractions constatées peut s’avérer faible comparé au nombre d’infractions effectives. Ainsi en matière de port et détention d’armes prohibées, le taux d’élucidation en Corse avoisine les 100 % mais le nombre d’affaires constatées est quantitativement faible, puisqu’il est compris entre 268 en 1993 et 182 en 1998.

S’agissant du taux d’élucidation global des crimes et délits contre les personnes, il est également globalement satisfaisant d’autant qu’il est en progression depuis 1993, les élucidations de crimes et délits étant passées de 611 à 866 sur la période 1993-1998 (cf. tableau n° 6 en annexe).

La situation est, en revanche, beaucoup moins satisfaisante en matière d’homicides ou de tentatives d’homicides. Le taux d’élucidation moyen constaté, sur la période 1993-1998, pour cette catégorie est en effet de 52 % pour la Corse tandis qu’il est de l’ordre de 75 % au niveau national (cf. tableau n° 8 en annexe).

La présentation de ces quelques résultats permet donc de nuancer la portée du taux global d’élucidation. En matière d’homicides et de tentatives d’homicide, les taux d’élucidation sont d’ailleurs très inférieurs en Corse à la moyenne nationale, alors même que ce type de criminalité est très important dans l’île, notamment du fait des règlements de compte entre nationalistes.

S’agissant des attentats, les statistiques sont exécrables (cf. tableau n° 9 en annexe). Le taux d’élucidation des attentats par explosifs contre les biens publics oscille ainsi entre 0 % pour les années 1993, 1994 et 1998 et 8,85 % pour l’année 1997, alors même que ce type d’attentat est le plus souvent revendiqué. Le taux d’élucidation moyen sur la période 1993-1998 s’élève pour cette catégorie à 2,7 % pour la Corse, contre 21,4 % au niveau national.

Les résultats en matière d’attentats par explosif contre des biens privés sont également très faibles avec des taux compris entre 0,4 % pour 1995 et 11,3 % pour 1997. Pour cette catégorie d’infractions, le taux d’élucidation moyen est de l’ordre de 4 % contre 13,6 % au niveau national.

Enfin, s’agissant des vols à main armée, le taux d’élucidation global demeure là aussi inférieur à ceux constatés sur l’ensemble du territoire national, avec un taux moyen de 20 % en Corse contre 35 % au niveau national sur la période 1993-1998 (cf. tableau n° 7 en annexe).

Si des résultats significatifs sont obtenus dans certains domaines tels les infractions économiques et financières ou les infractions à la législation sur les stupéfiants, force est de constater les carences des services enquêteurs sur les deux fronts principaux de la délinquance dans l’île : le grand banditisme et le terrorisme nationaliste. Cette situation se double par ailleurs d’une réponse insuffisante sur le plan judiciaire.


Source : Assemblée nationale. http://www.assemblee-nationale.fr