Présidence de M. Paul Quilès, Président

M. Patrick Pruvot a préalablement rappelé que la coopération de la France avec le Rwanda datait quasiment de l’indépendance de ce pays, avec le versement en 1963 des premières subventions du Fonds d’aide et de coopération (FAC), l’octroi en 1979 de prêts de la Caisse centrale de coopération économique (CCCE) et la mise en place de jumelages, à partir de 1985, avec les collectivités territoriales françaises.

Il a précisé qu’il ne parlerait que de la période pendant laquelle il fut Chef de la Mission de coopération et d’action culturelle (MCAC) à Kigali, du 25 janvier 1987 au 31 mars 1992.

Il a tout d’abord souligné les deux contraintes majeures affectant le Rwanda : la pression démographique et l’enclavement.

La pression démographique est extrême avec une densité moyenne sur les terres cultivables proche de 400 habitants par km² (des pointes à 700 habitants par km² n’étant pas rares) et un taux d’accroissement annuel de la population supérieur à 3 %. Ses conséquences en sont un manque de terres agricoles, une amorce de regroupement urbain anarchique, des risques pesant sur la santé, une surcharge du système éducatif, des ménages aux revenus moyens très bas avec, par conséquent, peu de marge de taxation pour l’Etat.

L’enclavement géographique est patent et se traduit par un isolement des grands circuits de communication et d’information, de lourdes dépenses dans le domaine des infrastructures routières, le renchérissement des importations, la difficulté d’exporter et donc l’étroitesse de la base des ressources fiscales ou douanières qui ne permettent pas à l’Etat de s’assurer des recettes budgétaires suffisantes.

Ces facteurs prendront une importance cruciale au milieu des années quatre-vingts. A cette époque, le dogme de l’autosuffisance alimentaire est remis en question ; fondé sans doute sur la nécessité de pallier les inconvénients de l’enclavement et de se garder de la fragilité d’exportations reposant pour l’essentiel sur le café, ce dogme s’effondre avec les cours du café et sous la pression qui s’exerce sur des terres exploitables saturées ; le Rwanda glisse alors vers l’ajustement structurel et se retrouve exposé à des difficultés sociales auxquelles peu de pays d’Afrique ont eu à faire face à ce degré. Le caractère inéluctable de cette dégradation des conditions de vie (accentuée par le déferlement du sida), qui semble rendre vains les efforts acharnés du passé, tout en imposant aux Rwandais une véritable lutte pour la vie, ne pouvait pas avoir été sans effet sur la détresse de la population et ses rapports à la mort.

M. Patrick Pruvot a ensuite traité des grands objectifs poursuivis par la coopération franco-rwandaise : améliorer de manière pérenne le bien-être de la population sur le plan de ses revenus, de son alimentation, de sa santé et de son éducation ; donner au Rwanda les moyens de s’ouvrir sur et à l’extérieur en matière économique et culturelle ; fournir au pays des ressources nouvelles et stables et des instruments de gestion efficaces, le faire évoluer progressivement vers une société de droit moderne, plus démocratique et participative.

Il a indiqué que la stratégie à suivre pour atteindre ces objectifs devait tenir compte des spécificités du Rwanda. Il a ainsi souligné que ce pays était habité par une population courageuse et dure au travail, vivant dans un milieu social très dense, fortement structuré jusqu’à la colline et au " rugo ", type d’organisation qui, du moins pour ce qui regarde la diffusion des messages formateurs et les possibilités de démultiplication de l’impact des projets, présentait des avantages. Il a rappelé par ailleurs que les besoins étaient considérables, en regard de l’importance numérique de la population et de l’état des ressources disponibles, et que cette situation imposait une coordination particulière des efforts de toutes les parties prenantes, à savoir le Gouvernement, les bailleurs de fonds, les organisations non gouvernementales et, au premier chef, les habitants eux-mêmes qui devaient être mis en mesure de participer à leur propre développement.

C’est pourquoi, dans l’ensemble des actions financées par la France, un accent particulier fut mis sur la formation à tous les niveaux : formation de cadres mais surtout formation de formateurs capables de démultiplier rapidement les actions entreprises.

C’est pourquoi aussi la concertation avec nos partenaires et la transparence dans la préparation et le suivi des actions fut la règle. La MCAC élaborait son programme en liaison étroite avec la CCCE ; la préparation des Commissions mixtes était l’occasion d’une intense concertation avec les ministères rwandais. La MCAC participait à des échanges de vues réguliers avec la représentation de l’Union européenne, avec les principales agences du système des Nations Unies, avec ses principaux partenaires, tant au sujet de l’aide au développement que de l’aide humanitaire.

Sur le plan interne au dispositif français, des sessions d’information associaient les coopérants, ainsi que les responsables des principales organisations non gouvernementales de développement (ONG) et des jumelages ; ces organisations furent d’ailleurs invitées à participer aux Commissions mixtes à partir de 1989.

M. Patrick Pruvot a précisé que la Mission de Coopération établissait chaque année un bilan exhaustif et détaillé des actions menées avec le soutien de la France, qui était diffusé auprès de tous nos partenaires, rwandais comme étrangers, bilatéraux comme multilatéraux, publics comme privés.

Il a ensuite évoqué les secteurs bénéficiant en priorité de la répartition des crédits de la MCAC, qu’il s’agisse du FAC, de l’assistance technique ou des appuis aux opérations.

Le secteur éducatif et culturel bénéficiait de 40 % des ressources sous forme d’assistance technique, de crédits d’appui et de bourses de stage et d’étude. Toute la pyramide éducative et culturelle était concernée : l’individu par la diffusion du livre dans un réseau de bibliothèques rurales, par l’appui au mouvement sportif, par la promotion de la culture rwandaise ; l’élève par la rénovation de l’enseignement du français dans les écoles primaires et le soutien accordé à divers lycées ; les maîtres par la formation dans les écoles normales ; les étudiants par l’enseignement universitaire et le fonctionnement des accords universitaires.

Le secteur rural recevait 25 % des ressources qui servaient au financement de projets visant à maintenir la fertilité des terres, à intensifier les cultures, à améliorer les systèmes agraires (notamment l’élevage et la bananeraie). La priorité était donnée à la recherche-développement, à la vulgarisation et à la formation ainsi qu’au recyclage des cadres de l’agriculture.

Le secteur de la santé se voyait attribuer 10 % des ressources, consacrées à deux hôpitaux de référence, chargés notamment de former et recycler les personnels médicaux des régions, à des enquêtes épidémiologiques et au programme de lutte contre le sida.

Le dernier secteur, moins homogène, concernait principalement les infrastructures. 20 % des crédits et moyens lui étaient destinés, concentrés sur les télécommunications, la gestion du réseau routier, l’établissement d’un fichier foncier, l’informatisation du service des douanes.

M. Patrick Pruvot a précisé que le dispositif de coopération civile, technique et culturelle était réparti sur de nombreuses communes du territoire rwandais et concernait la plupart des grands secteurs d’activité. Ce dispositif comprenait :

 des programmes couvrant l’ensemble du territoire, tels que le projet d’artisanat rural et d’équipement des écoles en mobilier scolaire, les bibliothèques circulantes, l’appui aux installations sportives, le projet d’équipement et de modernisation des télécommunications, les programmes de recyclage des cadres de l’agriculture et de formation des maîtres d’école, la formation hospitalière ; mais encore des actions localisées à vocation nationale telles que l’appui aux universités et au ministère de l’Agriculture ;

 des projets plus localisés mais couvrant plusieurs communes, voire une région entière, tels que les projets de développement rural dans la zone de la forêt de Nyungwe, dans les communes voisines de Butare, de Rushashi, de Masaka, les programmes d’enquête épidémiologique et de pharmacies rurales dans les régions de Gisenyi et Ruhengeri ainsi que le projet de formation par les Maisons familiales rurales dans la région de Gisenyi ;

 des jumelages entre des collectivités françaises et des communes rwandaises ainsi que des projets de l’Association des volontaires du progrès (AFVP) dans les préfectures de Kibuye (à l’est), de Butare (au sud), de Gitarama (au centre), de Byumba et Ruhengeri (au nord) et dans la région de Bugesera (au sud-est).

Il a ainsi décrit les moyens qui consistaient en personnel d’assistance technique et en contributions financières :

 des coopérants, civils et VSN, enseignants et techniciens, au nombre de 75 à 80, des volontaires et des agents mis à la disposition de la coopération décentralisée au nombre de 20 à 25, des personnels en poste dans les écoles françaises et les centres culturels au nombre de 12. Au total, environ 115 personnes ;

 des moyens financiers de l’ordre de 75 millions de francs en année courante, se répartissant entre le FAC (28 millions de francs), les appuis aux opérations (14 millions de francs) et le personnel d’assistance technique (33 millions de francs), enfin l’aide d’urgence (1 million de francs en moyenne). A ces financements propres à l’action de la MCAC, il convient d’ajouter les engagements de la CCCE (entre 20 millions de francs et 120 millions de francs selon le mûrissement des dossiers instruits), puis, à partir de 1989, la réduction du service de la dette (représentant une économie de 36 millions de francs pour le budget rwandais) et des aides budgétaires, notamment pour l’appui à l’ajustement structurel (70 millions de francs), enfin les engagements propres de la coopération décentralisée (de l’ordre de 2 millions de francs par an).

Il a souligné que si ces moyens pouvaient paraître modestes en comparaison des immenses besoins d’un pays de 7 millions d’âmes, la France tenait pourtant, avec la Belgique, le premier rang des bailleurs bilatéraux, offrant environ 10 % de l’aide publique reçue par le Rwanda. Elle se devait donc d’entraîner ses partenaires et de militer pour la concertation. Il a estimé que la France y était parvenue et que les résultats concrets de notre coopération étaient là pour le prouver.

Il a enfin signalé que le fonctionnement de la MCAC et la manière dont les projets étaient gérés furent vérifiés par une mission d’inspection générale conduite en 1990 par M. Louis Amigues, en liaison avec l’ambassade et la CCCE.

Abordant le conflit d’octobre 1990, il a déclaré que la situation militaire allait ajouter au fardeau de la population rwandaise. La menace s’installe aux marches du nord et l’effort de guerre grèvera de manière insupportable le budget. Les premiers massacres sont perpétrés. L’insécurité s’installe partout.

Un plan d’évacuation des personnels sera préparé par la MCAC avec l’ambassade et les responsables de l’opération Noroît, et présenté à M. Jacques Pelletier lors de la visite qu’il fera au Rwanda début novembre 1990. Ce plan sera constamment amélioré, mis à jour et articulé avec les dispositifs d’autres organisations présentes au Rwanda.

Dès le mois de décembre, des dispositions de sécurité seront arrêtées par la MCAC dans le cadre d’un plan de réaffectation des personnels destiné à maintenir une utilisation optimale du potentiel d’assistance technique en cas de troubles localisés.

En conclusion, M. Patrick Pruvot a indiqué que, par deux fois, les personnels ou leur famille ont dû, à contre coeur, être évacués ; pour des raisons humanitaires évidentes, certains d’entre eux, les médecins, ont accepté d’être maintenus. Tous ont repris ensuite leur travail au service de la population rwandaise avec la même conviction, en fondant leur action sur l’espoir de la réconciliation et de la paix, et en oeuvrant pour y contribuer. Il a tenu à leur rendre hommage sans oublier le sacrifice des coopérants morts dans l’attentat du 6 avril 1994.

M. Jacques Myard, après avoir indiqué à M. Patrick Pruvot que son successeur avait déclaré à la mission que la France avait agi avec ignorance et suffisance au Rwanda, lui a demandé s’il pensait que la politique de propagation de la haine avait été partagée par l’appareil d’Etat rwandais et quelle avait été l’action des autorités françaises sur place pour tenter d’apaiser la situation, sachant que la France n’était pas en situation d’imposer ses vues à un pays souverain.

M. Patrick Pruvot a répondu que la France menait une politique de coopération avec le Rwanda depuis 1963 ; les premiers jumelages entre collectivités territoriales rwandaises et françaises datent de 1985 et en 1992, il y avait quarante demandes de jumelage en attente ; il a estimé que ce bilan montrait que les Français avaient pu nouer une coopération efficace avec le Rwanda.

Rappelant que la montée de la haine était ancienne, il a souligné qu’elle concernait le Rwanda comme le Burundi et indiqué qu’il avait lui-même assisté aux massacres de 1971 dans ce dernier pays. Il a estimé que, de ce fait, on ne pouvait pas ne pas être informé de la tension entre Hutus et Tutsis.

Cependant, son rôle en tant que Chef de la Mission de Coopération civile était de faire tout ce qui était en son pouvoir pour oeuvrer à l’accroissement du bien-être de la population rwandaise, et non du Gouvernement. De ce fait les objectifs poursuivis étaient très clairs et tout à fait irréprochables, cette appréciation valant pour l’ensemble de la collectivité internationale. A ce propos, M. Patrick Pruvot a précisé qu’il existait, au Rwanda, une collaboration et une concertation plus efficaces que dans d’autres pays d’Afrique, entre les différents partenaires de l’aide au développement et de l’aide humanitaire, et notamment avec les organisations de l’ONU, dont le PNUD, et nos partenaires européens avec lesquels nous avions des rencontres régulières.

M. Patrick Pruvot a alors estimé que si la haine brute n’avait explosé qu’après son départ, la haine latente était là, d’abord parmi les Rwandais eux-mêmes, et qu’il fallait vivre avec cette situation.

M. Jacques Myard insistant pour savoir si M. Patrick Pruvot estimait que la France avait agi par ignorance, celui-ci a répondu que, pour lui, la réponse était négative.

M. Roland Blum a alors demandé si, en matière de coopération économique et d’aide au développement, il y avait eu un souci d’équité et de répartition de l’aide entre les ethnies et si cette question était évoquée à l’époque avec les autorités rwandaises. Il s’est également interrogé sur le point de savoir si la France avait des raisons économiques de s’intéresser au Rwanda.

M. Patrick Pruvot a répondu que, pour lui, la première question ne faisait pas forcément sens dans la mesure où il n’y avait pas de répartition géographique des ethnies au Rwanda, l’immense majorité du pays étant hutue. Il n’y a pas de collines ou de villes tutsies même s’il y a des régions comme celle des Bagogwe ou le Bugesera où, pour des raisons historiques ou autres, la densité de population tutsie était plus forte. Il a précisé que de ce fait, lorsque ses services préparaient les programmes de coopération, cette question n’était pas posée, et ce par aucune autorité rwandaise.

Il a ajouté que, si une ignorance pouvait être reprochée, c’est bien celle de la répartition entre ethnies de l’effort de coopération ; cependant cette ignorance n’aurait pu être levée qu’en allant vérifier sur le terrain les cartes d’identité des bénéficiaires, puisqu’elles portaient la mention " Hutu " ou " Tutsi " et, en quelque sorte, étaient établies sur la base d’un recensement des Rwandais selon leur appartenance ethnique.

M. Patrick Pruvot a rappelé au passage que la Mission de Coopération avait effectué un recensement, avec l’INSEE, des populations rwandaises pendant la période où il était Chef de Mission. Il a répété qu’au Rwanda on ne pouvait ignorer la division ethnique mais qu’elle ne pouvait pas servir de critère de sélection.

Quant aux intérêts économiques, M. Patrick Pruvot a remarqué qu’il s’agissait là plutôt du domaine de la Caisse centrale de coopération économique (CCCE) mais qu’en tout état de cause les entreprises françaises implantées au Rwanda étaient très peu nombreuses. Il a estimé que les intérêts de la France au Rwanda étaient plus d’ordre géopolitique ou liés à la francophonie qu’économiques.

M. Yves Dauge a demandé des précisions sur la coopération en matière linguistique. Il a émis l’hypothèse d’un double jeu de la part de l’exécutif rwandais : d’un côté, un discours officiel destiné à l’étranger selon lequel on s’orienterait vers la démocratisation, de l’autre, une réalité figée, difficile à décrypter en raison notamment de la barrière linguistique.

M. Patrick Pruvot a rappelé que le Rwanda, très isolé, était pris en tenaille entre d’une part le Zaïre, où l’on parlait essentiellement, dans les régions frontalières, le lingala, et d’autre part des pays anglophones dont la langue vernaculaire est le swahili, peu parlé au Rwanda. Dans ce contexte, le français apparaissait comme la langue de communication qui devait permettre au Rwanda de s’ouvrir sur l’extérieur, ce qui était la meilleure garantie de démocratisation. Aussi 40 % des crédits de la coopération étaient-ils destinés à des actions linguistiques et culturelles. Une tournée en France de ballets rwandais traditionnels tutsis a ainsi été financée, et des bourses d’études et de sport ont été accordées.

M. Patrick Pruvot a estimé que la chancellerie ne disposait pas de services suffisants pour analyser tout ce qui se disait et s’écrivait dans la presse et que peu de Français étaient à même de comprendre le kinyarwanda, que certains officiels n’hésitaient pas à utiliser entre eux lors de réunions avec des représentants de l’ambassade.

M. Kofi Yamgnane a estimé que ce qui s’est passé au Rwanda aurait pu se dérouler ailleurs en Afrique, dans tous les pays où existent des oppositions ethniques ou régionales continuant de couver sous la cendre. Ce qui est surprenant, c’est que la France se soit laissée prendre dans ce guêpier alors que nos diplomates devraient connaître les risques et les dangers des sociétés africaines.

M. Patrick Pruvot a répondu qu’il est très douteux que la France se soit laissée surprendre par ignorance. Le Ministre de la Coopération de l’époque, M. Jacques Pelletier, a effectué en novembre 1990 un voyage dans la région des Grands Lacs, au cours duquel il a insisté auprès du Président Habyarimana sur la nécessité d’améliorer les relations entre les communautés, alors même que les mariages mixtes étaient fréquents, et l’a encouragé à prendre diverses dispositions pour éviter l’explosion. L’exemple voisin du Burundi illustrait les risques encourus.

Le Président Paul Quilès a demandé comment réagissait le Président Habyarimana aux conseils qu’il recevait de la part des Français. Estimait-il réellement qu’il était de son intérêt de les suivre ou se contentait-il de les entendre en laissant les choses suivre leur cours ?

M. Patrick Pruvot a répondu qu’il n’avait rencontré le Président Habyarimana qu’une seule fois lors de la visite de son ministre de tutelle. Son sentiment personnel est que le Président Habyarimana ne jouait pas un double jeu et recherchait une solution. C’est peut-être ce qui lui a coûté la vie, à moins qu’au contraire les auteurs de son assassinat aient considéré qu’il ne voulait pas de cette solution.

M. Kofi Yamgnane a observé que les dirigeants africains se disent souvent disposés à dialoguer mais ils se préparent parallèlement, en cas de crise, à imposer une solution par la force dès lors que celle-ci joue en leur faveur.

Le Président Paul Quilès a fait remarquer que ce n’était pas là une attitude propre à l’Afrique.

M. Pierre Brana a demandé quelles ont été les grandes actions de coopération menées de 1987 à 1992 au Rwanda.

M. Patrick Pruvot a précisé que les crédits de la Mission de Coopération et d’Action culturelle étaient consacrés pour 40 % au secteur éducatif et culturel, pour 10 % au secteur de la santé et pour 20 % à un secteur moins homogène comprenant les télécommunications, la gestion du réseau routier, l’établissement d’un fichier foncier et l’informatisation du service des douanes. Ces secteurs avaient été privilégiés parce qu’essentiels pour le développement du pays.

En 1992, le Rwanda possédait le réseau téléphonique le plus moderne du monde, entièrement numérisé. Le bon état des routes était particulièrement vital dans un pays enclavé, toujours menacé d’asphyxie. L’établissement d’un fichier foncier représentait un premier coin enfoncé dans le problème de la répartition des terres et devait contribuer à gérer le nombre croissant de déplacés qui s’accumulaient autour de Kigali. L’informatisation des douanes était particulièrement importante dans un Etat dont 75 à 80 % des ressources provenaient des exportations de café, même si le Rwanda était parvenu à se hisser en 1990, avec un PNB par habitant de 300 dollars, dans la partie haute de la catégorie des pays les moins avancés.

M. Pierre Brana a demandé si M. Patrick Pruvot avait eu connaissance d’une aide que la France aurait pu apporter au projet de suppression de la mention ethnique sur les cartes d’identité.

M. Patrick Pruvot s’est souvenu avoir entendu évoquer ce problème mais a déclaré ne pas avoir eu à en connaître directement, aucune demande des autorités rwandaises n’étant parvenue à la Mission de Coopération.

Le Président Paul Quilès a précisé que cette question avait été soulevée lors d’une visite de M. Jacques Pelletier au Rwanda en 1990.

M. Patrick Pruvot a déclaré ne pas en avoir gardé le souvenir. Il en a sans doute été question lors de l’entretien entre MM. Jacques Pelletier et Juvénal Habyarimana en 1990 mais il faudrait revoir les télégrammes diplomatiques de cette époque pour savoir ce qui avait été convenu.

Le Président Paul Quilès s’est étonné du temps qu’il a fallu pour mettre en oeuvre cette décision.

M. Patrick Pruvot a souligné que la Mission de Coopération n’avait pas à connaître directement de cette décision de changer les cartes d’identité, sauf si la France avait souhaité accorder une aide qui, très probablement d’ailleurs, aurait été une aide budgétaire.

M. Pierre Brana a fait remarquer que le comité directeur du FAC avait à connaître de dossiers de financement de ce type puisqu’il examine par exemple des demandes concernant la réalisation de cartes d’électeurs infalsifiables.


Source : Assemblée nationale. http://www.assemblee-nationale.fr