Présidence de M. Alain TOURRET, Président
Mme Demichel et M. Lévy sont introduits.
M. le président leur rappelle que les dispositions législatives relatives aux commissions d’enquête leur ont été communiquées. A l’invitation du président, Mme Demichel et M. Lévy prêtent serment.
Mme Francine DEMICHEL : Monsieur le président. mesdames et messieurs les députés, je rappellerai tout d’abord les caractéristiques principales du régime de la sécurité sociale étudiante, défini par la loi de 1948 dont on sait que les principes sur lesquels elle repose n’ont guère changé.
Même s’il n’y a pas un " métier étudiant ", car il n’est pas question de l’exercice d’une profession, il existe néanmoins dans le système français, sinon un " statut ", comme d’aucuns le disent, du moins une condition étudiante spécifique. Ainsi dans le cadre du régime général, la spécificité du régime de la sécurité sociale étudiante repose sur deux idées que nous sommes d’ailleurs en train d’approfondir et de reprendre dans le cadre du plan social étudiant, à savoir, celle de la globalisation de la situation étudiante, et celle de la responsabilisation de l’étudiant.
La globalisation correspond au fait que l’on ne peut pas découper en tranches la situation d’un étudiant. L’étudiant, en effet, poursuit des études mais, en même temps, il a une vie propre. Il se trouve confronté à des problèmes sanitaires, à des problèmes de logement, de restauration ; il a des activités extra-universitaires, sportives, culturelles... Il est donc nécessaire de prendre en compte cette situation globale.
Parallèlement, et de façon d’ailleurs assez articulée, on considère, dans le cadre de ce régime, qu’il convient de responsabiliser les étudiants car c’est finalement la communauté universitaire étudiante qui est la mieux à même de répondre aux besoins globaux de l’étudiant, d’où cette idée de responsabilisation.
Ces principes conservent encore tout leur sens aujourd’hui.
Le champ d’application individuel du régime étudiant de sécurité sociale obéit à l’idée qu’entre vingt ans et vingt-huit ans, il y a obligation d’avoir une sécurité sociale propre sauf si l’on relève d’un régime salarié ou si l’on est ayant droit d’un conjoint qui est lui-même assuré mais non-étudiant, mais ce sont là des situations relativement marginales.
Nous tentons aujourd’hui d’étendre ce régime aux étrangers. En effet, la politique du ministre est d’essayer d’attirer en France davantage d’étudiants étrangers dont le nombre chute de façon importante d’année en année ; nous en avons perdu plus de 10 %. La France est parmi les pays développés qui attirent le moins d’étudiants étrangers. Or, il faut bien dire que le régime de sécurité sociale y est assez compliqué puisque ne bénéficiaient jusqu’alors de la sécurité sociale étudiante que les étudiants étrangers dont le gouvernement avait passé une convention avec notre pays.
Nous travaillons actuellement à un texte, soumis pour le moment à la signature des deux ministres concernés, qui permettra à tout étudiant étranger, en situation de séjour régulière, de bénéficier de plein droit du régime de sécurité sociale étudiante.
Il y a donc tout à la fois une volonté d’élargir et de simplifier le régime de la sécurité sociale étudiante.
Le champ d’application institutionnel détermine véritablement la spécificité du régime étudiant avec l’intervention de ce que nous appelons dans notre jargon administratif de l’Education nationale un guichet unique qui permet aux mutuelles d’entrer dans la chaîne d’inscription des étudiants, de sorte que ces derniers paient en même temps, grâce à ce système, leur cotisation de sécurité sociale et s’ils le souhaitent, la cotisation à la mutuelle et sont remboursés de façon unique. C’est une formule qui simplifie considérablement la gestion par l’étudiant de son propre régime de sécurité sociale.
Ce système s’est mis en place conformément à la définition de l’étudiant comme celui qui est inscrit dans un établissement habilité par l’Etat. Il existe donc une liste d’établissements actuellement au nombre de 4 051, dont l’habilitation est accordée conjointement par le ministère de l’Education nationale et par le ministère des Affaires sociales et qui concerne 997 communes.
Les étudiants inscrits dans ces établissements habilités vont donc pouvoir bénéficier du régime de sécurité sociale selon un système qui lie très fortement le statut d’étudiant avec une habilitation nationale et le régime de sécurité sociale étudiante.
Sur un plan financier la cotisation annuelle s’élevait pour la rentrée universitaire 1998-1999 à 1 050 F.
A ce propos, je souligne que nous avons introduit, pour la rentrée 1999, des bourses à taux zéro dont pourront bénéficier 11 500 étudiants, qui se situent au-dessous des catégories sociales pouvant bénéficier du régime des bourses. Ces derniers seront exonérés des droits d’inscription et des droits de sécurité sociale, cela afin d’améliorer le système d’aides en faveur d’un certain nombre d’étudiants qui sont à la marge du régime de sécurité sociale.
Le fonctionnement de ce guichet unique relève de l’exclusivité des mutuelles, ce qui a soulevé le problème du régime de libre concurrence avec les assurances.
Il convient de préciser qu’aucune habilitation générale valable pour l’ensemble du territoire n’a été accordée à ce jour à une mutuelle étudiante. Si la MNEF est implantée dans la plupart des académies, les arrêtés d’habilitation, pris en sa faveur depuis 1949, ont toujours porté l’indication nominale des centres universitaires où elle était habilitée à jouer le rôle de section locale de sécurité sociale étudiante. Les mutuelles régionales ont, pour leur part, une compétence limitée au maximum à trois académies. Aujourd’hui, on dénombre dix mutuelles régionales, regroupées au sein de deux fédérations.
On est donc dans un régime de compétition, mais seulement entre mutuelles. Dans ce système chaque établissement détermine lui-même, selon le principe de l’autonomie des établissements défini par la loi Savary de 1984, les mutuelles présentes dans la gestion de ce guichet unique.
Par conséquent, l’administration n’intervient à aucun titre dans le choix des mutuelles arrêté par l’établissement : il s’agit réellement d’un choix autonome. Il est évident que les mutuelles régionales ont plus de chances d’être présentes dans les universités de leur région que dans une université parisienne, encore que les grandes universités parisiennes introduisent actuellement davantage de concurrence entre mutuelles.
Cela étant, il y a une exclusivité des mutuelles et aucune intervention des assurances et je crois que ce régime qui a soulevé des problèmes se justifie assez fortement par le fait que nous nous situons dans le cadre d’une mission de service public et que la sécurité sociale étudiante doit vraiment remplir une mission de service public.
D’ailleurs, la Cour des comptes, dans le rapport dont vous avez eu connaissance, spécifie bien que l’une des dérives des mutuelles est de ne pas avoir séparé nettement ces missions de service public des missions qui seraient des missions marchandes.
Par ailleurs, il faut bien prendre conscience que la situation de l’étudiant a profondément changé. D’abord, le nombre des étudiants a considérablement augmenté, même si une stabilisation, voire une baisse des effectifs est attendue pour les années qui viennent. Nous sommes dans une université de masse avec presque 2,2 millions d’étudiants dont 1,3 million sont affiliés au régime de la sécurité sociale, soit plus de la moitié. Ensuite, la population étudiante n’est plus socialement homogène. Le modèle de l’étudiant classique que nous avons connu - fils de la classe moyenne, voire de la bourgeoisie, doté d’une culture universitaire, informé de ce qu’était l’université ou les grandes écoles et qui arrivait dans un milieu familier - est complètement révolu.
Aujourd’hui, un certain nombre d’étudiants subissent un véritable dépaysement, ce qui explique qu’ils soient pris en charge dans toutes les dimensions de leur vie.
C’est ainsi que l’on observe, par exemple, deux phénomènes relativement nouveaux puisqu’ils remontent à une dizaine d’années. Premièrement, il y a une précarisation très importante d’une frange des étudiants qui n’étant pas boursiers sont, soit brutalement exclus de leur famille, soit sujets à des pressions qui les poussent à la quitter, soit encore issus de familles en situation de rupture.
De ce fait, ils se retrouvent dans des situations que l’on ne sait plus comment traiter ce qui nous a conduit à mettre en place, pour la rentrée 1999, une allocation d’études qui va être gérée par des commissions locales telles que l’université ou le CROUS dans lesquelles il serait également souhaitable de retrouver les mutuelles en raison de l’urgence qu’il y a à réagir - et pas uniquement au plan financier - à certaines situations extrêmement difficiles auxquelles est confronté un certain nombre d’étudiants.
Deuxièmement, une aggravation de l’état de santé général des étudiants. Compte tenu de la condition sociale de leur famille, les étudiants, notamment dans le premier cycle, abordent leurs études avec de très fortes réactions d’angoisse. On enregistre une très nette augmentation des maladies liées au stress, des maladies nerveuses, voire mentales, des étudiants, qui est tout à fait préoccupante.
Cela suppose, pour nous, d’avoir une vision beaucoup plus globale d’un milieu qui est devenu assez disparate. Je considère que les mutuelles étudiantes qui fonctionnent sur le principe du compagnonnage ou de l’examen par les pairs répondent de la façon la mieux adaptée à ces situations.
Pour toutes ces raisons, même s’il y a eu incontestablement des dérives, même s’il faut que le ministère des Affaires sociales qui organise le contrôle sur les mutuelles - l’Education nationale ne faisant que les choisir - doit tout à la fois les simplifier, les accélérer et les accentuer, notamment par une comptabilité analytique de façon à ce qu’il n’y ait pas de mélanges entre les comptes visant les rapports marchands et ceux visant la gestion du service public au sens strict, je considère, personnellement, que notre système est encore le meilleur pour gérer cette situation de masse qu’est la sécurité sociale étudiante aujourd’hui.
Actuellement, l’ensemble de la sécurité sociale étudiante représente 4 milliards de francs dont environ 27 % sont couverts par les cotisations, le reste relevant du régime général. Il s’agit donc évidemment d’un enjeu national, même si l’enseignement supérieur intéresse au premier chef l’Education nationale.
Pour ce qui est des perspectives, j’estime qu’il y a un certain nombre d’améliorations à apporter. Assez modestement, puisque notre intervention se situe un peu en bout de course dans ce système dont l’Education nationale ne possède pas l’entière maîtrise, je dirai qu’il y a eu des excès, d’ailleurs parfaitement relevés par la Cour des comptes.
Concernant le problème du montant des remises de gestion, il y a eu des abus, mais je crois, sans vouloir exonérer les mutuelles, qu’il faut bien prendre en compte le fait qu’un tiers du fichier étudiant change tous les ans entre ceux qui sortent du système, ceux qui y entrent, sans parler de ceux qui quittent leur famille, changent de domicile etc. C’est une proportion énorme qui prouve combien cette population est mobile et difficile à cerner, et qui explique objectivement certains dysfonctionnements, tels que les retards ou les écarts constatés dans la gestion des fichiers.
Sur l’ensemble du régime, il faut effectivement qu’il y ait davantage de transparence, et que notamment les contrôles sur la gestion des mutuelles soient plus adaptés.
Un prochain arrêté des ministres des Affaires sociales et de l’Education nationale va modifier notamment le système en vigueur pour les établissements privés habilités, qui était extrêmement compliqué et qui sera remplacé par un système quasi-automatique de contrôles a posteriori plus qualitatifs, plus rapides et moins lourds que les contrôles menés a priori.
Un certain nombre d’améliorations de ce genre s’imposent et, de façon générale, il convient d’introduire davantage de transparence dans la gestion des fonds.
Pour ce qui me concerne, voyant les choses de l’Education nationale, ce que je souhaiterais, c’est qu’il y ait un plus grand partenariat au niveau local pour assurer la gestion de la santé des étudiants.
Aujourd’hui la gestion de la santé des étudiants doit être collective et locale, c’est-à-dire conduite au plus près du terrain, car les grandes règles qui sont fixées nationalement ne peuvent pas rendre bien compte d’une situation qui est extrêmement diverse. Lorsque vous prenez les étudiants de Nanterre, de Saint-Denis ou de l’Ecole polytechnique, il s’agit toujours d’étudiants mais il est certain que leurs problèmes de santé ne sont pas les mêmes.
Sur la base d’une part de l’amélioration de la gestion des mutuelles qui est souhaitée par la Cour des comptes, et d’autre part de ce que nous mettons en place avec le plan social étudiant, il faut parvenir à créer un véritable partenariat local de prévention de la santé étudiante J’entends par là que toutes les activités et tous les domaines doivent être couverts jusqu’aux activités sportives, car le manque d’équipements sportifs n’est pas sans effets sur la situation qui prévaut aujourd’hui : il faut consentir un effort considérable pour en équiper les universités françaises. Je veux également parler du problème de la prévention des maladies sexuellement transmissibles ou de la prévention de la tuberculose - dont on sait qu’elle est en recrudescence - car tous ces aspects de prévention sont insuffisamment traités au niveau collectif et local !
En conséquence, j’ai l’intention d’introduire, à travers le plan social étudiant, de vraies bases pour mener une action préventive. Selon moi, la sécurité sociale étudiante remplit ses fonctions en matière curative - je pense que lorsqu’un étudiant est malade, il est correctement soigné - mais que des progrès doivent être réalisés dans le secteur de la prévention où les mutuelles étudiantes doivent intervenir, livrer leur sentiment et participer à une action qui, encore une fois, ne peut être que collective et locale.
C’est la raison pour laquelle, dans le cadre du plan social étudiant, nous nous efforcerons d’articuler cette nouvelle gestion des mutuelles en matière de sécurité sociale étudiante avec le plan national que nous tenterons de mettre en place dès la rentrée 1999.
M. le Président : Madame la directrice, je vous remercie pour cet exposé liminaire très clair. J’aurai un certain nombre de questions à vous poser et j’aimerais notamment, concernant le titre d’étudiant, connaître votre sentiment sur une proposition qui nous a été faite hier au cours d’une des nos auditions, visant à conserver ce titre jusqu’au premier emploi qui suit les études. Qu’en pensez-vous ?
Mme Francine DEMICHEL : Je crois qu’il faut conserver un cadre strict. Un étudiant, c’est quelqu’un qui est inscrit dans une formation pour faire des études. Il est vrai que le problème se pose de la couverture sociale des étudiants qui, après avoir terminé leurs études, sont en recherche d’emploi mais il faudrait trouver une autre justification pour leur accorder une couverture sociale. Si l’on dilue la notion d’étudiant, on va avoir un régime qui ne sera plus clair et, selon moi, tout le système actuel qui repose sur la notion de communauté étudiante n’y résistera pas. En outre, je vous signale que l’étudiant, lorsqu’il sort de l’établissement où il a poursuivi ses études, reste couvert pendant encore douze mois.
Il y a le problème du chômage mais, spontanément, je vous répondrai que l’on ne peut pas demander, non plus, au système de l’Education nationale de répondre à tous les problèmes de la société. Il faut considérer qu’il y a un type de régime de sécurité sociale étudiante, qu’il convient de l’améliorer mais qu’il faut vraisemblablement le maintenir dans son cadre d’autant plus que l’on s’attend, dans l’enseignement supérieur, à une multiplication des reprises d’études qui vont se traduire par un accroissement de la population adulte. Actuellement relativement faible, cette population dite " en formation continue " va augmenter, elle est couverte, par un régime de sécurité sociale qui est son régime salarial ou éventuellement un régime de congé formation ou autre.
Par conséquent, je me demande s’il ne conviendrait pas plutôt d’aller chercher la solution du côté de ces dispositifs de formation continue dans le cadre d’une activité salariale, permettant une reprise d’études avec une couverture, plutôt que de s’orienter vers une prolongation du statut étudiant au-delà de douze mois, à laquelle, a priori, je ne suis pas personnellement très favorable.
Je reste plutôt favorable à ce que le statut d’étudiant, avec ses avantages mais aussi ses obligations, qui sont de s’inscrire pour suivre des études et de les réussir, soit maintenu dans son homogénéité.
M. le Président : Je voudrais également vous interroger sur le logement social étudiant puisque loger 2 millions d’étudiants ne va naturellement pas sans poser des problèmes considérables et que, parmi les activités des mutuelles, le logement est une des préoccupations importantes.
Avez-vous l’impression que ce besoin est actuellement correctement assuré et existe-t-il, dans le cadre du régime social étudiant, lato sensu, une possibilité de mieux traiter cette question ?
Mme Francine DEMICHEL : Actuellement, nous recevons les recteurs et les présidents d’université sur U3M et le logement social est au cœur de toutes les préoccupations. Or, dans ce domaine, on constate qu’un très gros effort a été réalisé et un net progrès a été accompli dans toutes les régions à l’exception de l’Ile-de-France et de Paris !
On distingue deux catégories de logements sociaux : les logements sociaux type " CROUS traditionnel " pour lesquels les étudiants paient globalement entre 300 F et 500 F et une seconde catégorie de logements sociaux réalisés par des entreprises privées avec les PLA ordinaires pour lesquels les étudiants doivent débourser davantage puisque le montant à payer est de l’ordre de 800 F. C’est pour nous un vrai problème car nous devons parvenir à mettre en place un système où la part de l’étudiant soit inférieure à 800 F.
Cela étant dit, nous poursuivons la politique de logement social. Vous savez que le ministre souhaite qu’un quart du budget qui sera consacré à U3M soit réservé uniquement à la vie étudiante ce qui veut dire au logement étudiant, à la restauration étudiante, aux bibliothèques universitaires et à l’aménagement des campus et des sites, etc.
Le logement est donc l’une de nos préoccupations mais je pense que, dans ce domaine, les mutuelles ont incontestablement un rôle à jouer, car elles connaissent l’environnement et la situation sociale des étudiants. D’après les informations qui me sont parvenues - nous n’avons pas encore le retour de tous les recteurs - le problème prioritaire aujourd’hui est celui de la réhabilitation du parc social existant.
La population étudiante a changé. Du temps où j’étais étudiante et où je résidais en cité universitaire, on acceptait que les toilettes soient dans le couloir et un certain nombre d’autres contraintes alors que les étudiants actuels, faisant partie d’une société qui a connu une évolution du confort, exigent, par exemple, ce qui est normal, des chambres avec des douches intégrées.
M. Jean-Pierre BAEUMLER : La séparation des garçons et des filles !
Mme Francine DEMICHEL : Oui, ils redemandent, ce qui est assez curieux, des cités pour filles et des cités pour garçons au motif que les filles ne veulent pas être confrontées à des harcèlements sexuels : c’est assez intéressant... Je me suis rendue dans une cité de Nice où les filles demandaient à avoir au moins des étages séparés parce qu’elles trouvaient les garçons un peu entreprenants. Il y a donc un problème de réhabilitation du parc et l’effort réalisé en matière de logement étudiant doit absolument être poursuivi. Les recteurs demandent 500 logements environ par ville universitaire, ce qui n’est pas énorme si on pense au parc qui serait nécessaire. Il est intéressant de noter, en outre, que la demande est assez diversifiée, de nombreux étudiants ne voulant plus habiter dans des résidences universitaires de 300 à 500 chambres, situées sur les campus, souhaitent plutôt des logements en ville dans des petites résidences d’une trentaine de chambres, intégrées dans le tissu urbain.
Il y a donc là une réflexion à mener : il me semble que l’on ne satisfera pas la demande étudiante en continuant à raisonner en termes de grandes cités universitaires, comme celle d’Antony, telles qu’on les a réalisées dans les années 1970, quand on parquait les étudiants à la périphérie des villes. Aujourd’hui, la demande est différente et si nous ne réfléchissons pas, en ne procédant pas à une analyse qualitative du logement, nous allons nous trouver, comme c’est parfois déjà le cas, avec des résidences inoccupées au motif que les jeunes ont évolué, que leurs comportements et leurs besoins ont changé.
M. le Président : Je souhaitais également vous poser une question sur les problèmes spécifiques à la maternité puisqu’un grand nombre de jeunes étudiantes sont susceptibles d’avoir des enfants. A ce sujet, nous avons entendu citer des chiffres très inquiétants et nous avons mesuré la difficulté qu’éprouvent les étudiantes à concrétiser leur désir d’enfant, faute de couverture et de protection sociales.
Quelle est votre appréciation sur cette question ?
Mme Francine DEMICHEL : Nous ne possédons pas de données précises sur ce point. Nous mettons en place depuis un an des groupes de travail sur la santé étudiante, mais nous en savons peu sur la maternité.
Je peux néanmoins témoigner de mon expérience de présidente de l’université de Saint-Denis, université dite de Lettres et Sciences humaines qui est fréquentée majoritairement à 55 % par des filles.
A cette époque j’ai vu arriver - mais je pensais que c’était un phénomène propre à cette université - des étudiantes attendant un bébé et qui avaient besoin d’aide. C’est par un système de cagnotte, grâce à un fonds spécial, le FAV - Fonds d’aide à la vie étudiante - qui est prélevé sur droits d’inscriptions d’étudiants, que nous aidions alors les jeunes femmes enceintes qui se trouvaient dans une situation difficile, qui avaient quitté leurs parents ou qui n’étaient pas totalement couvertes du point de vue social.
S’agit-il d’un problème important ? Sans doute, puisqu’il a été soulevé, mais il faudrait interroger les responsables des CROUS et surtout les assistantes sociales car ce sont elles qui, soit dans les universités, soit dans les CROUS, reçoivent ces étudiantes. Il faut savoir, en effet, que beaucoup d’étudiants qui se trouvent en situation difficile ont du mal à l’avouer : il est dur de reconnaître que l’on demande quelque chose ! Or, ces jeunes femmes qui se trouvent en quelque sorte en situation de mendicité préfèrent se confier et s’en remettre aux assistantes sociales.
Dans l’enseignement supérieur, nous manquons actuellement d’assistantes sociales : nous en réclamons tous les ans à l’occasion du budget mais l’insuffisance en médecins et en assistantes sociales persiste. Le problème est encore plus aigu pour les secondes que pour les premiers car en ce qui concerne les médecins, il est possible d’obtenir des systèmes de convention alors que les assistantes sociales doivent être là en permanence.
Certains garçons se trouvent également en situation difficile, notamment lorsque, à la suite d’accidents de voiture ou de moto, ils rencontrent des difficultés à reprendre le travail.
Sur tous ces problèmes très divers, il n’y a guère que les assistantes sociales qui puissent intervenir.
M. le Rapporteur : S’agissant du logement social étudiant et de son évolution, vous souhaitez, si je vous ai bien compris, que les mutuelles s’impliquent dans ce domaine. Or, il se trouve que cela fait partie des dossiers où la diversification a posé quelques problèmes d’opacité de gestion et j’aimerais que vous nous expliquiez comment les mutuelles pourraient intervenir à ce sujet sans retomber dans les mêmes travers.
Mme Francine DEMICHEL : Il y a eu incontestablement des dérives de gestion par manque de contrôles mais je considère, néanmoins, que dans une telle affaire il ne faut pas " jeter le bébé avec l’eau du bain ".
Les mutuelles étudiantes étant composées d’étudiants et gérées par eux, il s’agit donc maintenant de faire en sorte que ces derniers participent à la vie étudiante et s’y impliquent davantage, sans toutefois qu’ils deviennent des professionnels des mutuelles : nous sommes d’accord pour convenir que c’est seulement lorsque des professionnels gèrent les mutuelles que l’on aboutit à des dérives. Il n’en reste pas moins que les étudiants sont les usagers au quotidien du logement social étudiant et qu’il faut donc penser à eux. Alors que déjà, pour la plupart, ceux-ci se trouvent dans une situation extrêmement difficile, désorientés à leur entrée à l’université ou dans une école du fait de ne pas savoir ce qui les attend, confrontés à des difficultés de travail, à un milieu social inconnu, si de surcroît ils arrivent dans un logement qui ne correspond pas à leurs attentes et à leurs besoins, nous ne ferons qu’accroître les difficultés.
J’ai ainsi constaté que beaucoup d’étudiants - y compris des étudiants boursiers, c’est-à-dire des étudiants aidés qui habitaient dans une résidence universitaire - vivaient, par exemple, très mal la rupture de Noël et que, restés sur place et se sentant isolés, du fait que l’université était fermée et que leurs copains avaient regagné leur famille, ils étaient très souvent amenés à arrêter leurs études.
J’estime donc que l’on ne peut pas penser le logement étudiant, aujourd’hui, indépendamment de la façon dont l’étudiant souhaite mener sa vie. Il faut, en effet, bien prendre en compte que ce sont des adultes responsables mais, en même temps, extrêmement fragilisés : les étudiants de premier cycle , par exemple, sont actuellement beaucoup plus fragiles, pour de multiples raisons dont les difficultés de l’emploi, qu’ils ne l’étaient, il y a vingt ans !
En conséquence je défends la participation des mutuelles, non pas en tant que mutuelles mais en tant que mutuelles étudiantes.
Si vous étudiez les analyses de l’Observatoire de la vie étudiante, par exemple, qui a engagé des études sur les résidences universitaires et sur la précarisation, vous constaterez qu’il en ressort une recherche d’un mode de vie que je qualifierai d’assez " communautariste ", l’adjectif étant pris au sens large. Je ne suis pas compétente pour définir les modalités de participation des mutuelles mais je prétends que si on ne les implique pas dans un processus de construction de la vie étudiante de masse, on sera de nouveau confronté aux erreurs du passé avec des résidences universitaires sans liens avec la vie étudiante.
J’ai assez confiance dans les étudiants pour organiser quelque chose qui corresponde aux besoins réels de l’ensemble de leurs camarades : c’est à ce titre que j’assume ma position et non pour justifier ce qui s’est passé. N’ayant pour source d’informations que la presse, et juriste de formation, je préfère observer la plus grande prudence sur le sujet et attendre que des décisions soient prises par la justice.
A mon avis, il faut rechercher une implication forte des étudiants.
Vous me permettrez d’insister et de dire que nous sommes, en France, dans un système extrêmement étatique dans lequel on considère que les fonctionnaires et l’Etat de façon générale peuvent donner des réponses aux besoins des gens sans avoir à les consulter. C’est ainsi que certains architectes construisent des appartements où ils ne mettent jamais les pieds par la suite et où d’ailleurs - c’est le cas en Seine-Saint-Denis, département que je connais bien - je doute qu’ils accepteraient eux-mêmes de vivre...
Il faut donc éviter de commettre une telle erreur pour les étudiants et à cette fin, il faut les responsabiliser et leur donner la possibilité de s’impliquer et de faire des choix. Pour ce qui nous concerne, nous tentons de conduire un groupe de travail sur le logement étudiant parce que nous sentons bien qu’il existe à la fois des besoins quantitatifs et qualitatifs mais que ce n’est pas nous - l’Etat et les ministères - qui pouvons y répondre.
Comment voulez-vous, dans ce genre d’actions, entendre la voix des étudiants si ce n’est par le canal des mutuelles ? Qu’on le veuille ou non l’expression de leurs besoins passe par elles...
M. André ANGOT : Vos réponses m’étonnent quelque peu... Je crois, pour ma part, que la construction de logements est un métier et que la couverture sociale en est un autre. On pourrait très bien laisser aux mutuelles le soin de faire ce qu’elles savent faire, c’est-à-dire la protection sociale, la couverture maladie et la couverture complémentaire et créer des structures autour des offices d’HLM, par exemple, qui sont très spécialisés dans la construction, quitte à ce que dans la conception et la gestion interviennent des comités d’étudiants et à ce que les mutuelles participent à la gestion de ces bâtiments, voire à leur conception et à leur fonctionnement.
Il me semble particulièrement difficile d’être compétent dans tous les métiers et on a bien vu les dérives qui en ont résulté.
Par ailleurs, concernant le manque de logements étudiants, j’ai cru comprendre qu’il était qualitatif, ce qui est indéniable mais aussi quantitatif. Sur ce dernier aspect, j’aimerais savoir si vous anticipez et prenez en compte la baisse de la démographie étudiante qui s’annonce pour les années à venir, puisqu’on sait que la fréquentation baisse régulièrement dans les collèges et les lycées et qu’automatiquement ce phénomène va se répercuter sur l’enseignement supérieur.
Mme Francine DEMICHEL : Je répondrai par l’affirmative à votre seconde question. Pendant quelques années, nous allons enregistrer une baisse qui se trouvera compensée par le gros effort que nous allons consentir en direction de la formation des adultes qui, eux, n’ont pas besoin de résidences étudiantes puisqu’ils sont insérés dans la vie professionnelle. Donc, incontestablement, les besoins vont baisser quantitativement.
Cela étant dit, il reste des régions où les besoins restent très forts, notamment l’Ile-de-France, où pratiquement très peu de choses ont été faites en matière de logement étudiant mais nous devrions parvenir, dans le cadre du Plan U3M, à améliorer considérablement la situation des logements étudiants.
Certes, la construction est un métier, et chacun doit exercer ses compétences, mais il n’est pas question dans mon esprit de laisser les étudiants construire directement, mais de les faire participer via les mutuelles à la gestion de ce besoin en logements.
Bien sûr que les sociétés d’HLM savent construire mais le temps de construction est souvent assez long et un délai important peut s’écouler entre le moment où le besoin s’exprime et celui où il est satisfait.
Pour dire les choses nettement, je vais vous citer un exemple. Nous essayons de régler le problème de l’université de Paris XIII qui est située à Villetaneuse et qui jouxte une cité HLM, devenue une cité de transit avec toutes les conséquences que cela suppose : très peu de familles, de la délinquance et des agressions permanentes et quotidiennes sur le campus universitaire où, par voie de conséquence, se multiplient les rondes de sécurité avec chiens de garde etc.
Cette situation n’est pas acceptable et nous nous efforçons, avec l’accord du Préfet, du recteur et de toutes les autorités compétentes de récupérer cette cité HLM, dont les habitants seraient relogés dans Villetaneuse, pour en faire une résidence universitaire destinée à abriter des étudiants et des enseignants étrangers. Cela fait maintenant près de deux ans que nous tentons de régler le problème. Tout le monde se renvoie la balle et en attendant, l’affectation de ces centaines de logements puisqu’il s’agit d’un ensemble très important, est impossible.
A priori, si on veut faire des logements étudiants dans le parc HLM, il faut que le rythme de réponse et de construction soit plus rapide, car ce qui m’inquiète beaucoup, au niveau des dossiers que j’ai eu à traiter avec les cités HLM, c’est le retard qui est pris et le fait que l’on considère parfois que la population étudiante est une population qui n’est pas nécessairement prioritaire, ce qui est normal, dans le cadre des logements sociaux d’un département ou d’une ville.
C’est pour toutes ces raisons peut-être que je ne me montre pas plus confiante dans le système de gestion des HLM mais, a priori, je maintiens que si l’on pouvait trouver un système mixte, susceptible d’intégrer une participation des organismes étudiants, ce ne serait pas plus mal !
M. Jean-Pierre BAEUMLER : Je voudrais préalablement dire, en tant que président d’un office HLM, que nous savons aussi construire très vite et prendre en compte les besoins de nos locataires. Maintenant, je n’oublie pas non plus qu’il y a dans le domaine du logement un savoir-faire d’un certain nombre de mutuelles et de filiales de mutuelles : je pense notamment à la MGEL qui est l’une des mutuelles connues en Alsace et qui réalise des constructions de logements qui, à Mulhouse, par exemple, ont vraiment donné pleine satisfaction.
Mais, le débat se poursuivra sur cette diversification des activités des mutuelles et nous aurons l’occasion d’en reparler.
J’en viens à ma première question qui portera sur les dérives et le problème des abus. Vous avez réclamé plus de transparence et de contrôle et j’aimerais que vous puissiez préciser votre pensée, notamment sur la manière dont ces contrôles doivent être effectués.
Ma seconde question concernera, en dehors du logement, les réponses que votre ministère envisage d’apporter aux besoins des étudiants en matière aussi bien de santé physique et morale que d’animation culturelle et sportive dans les campus et les cités.
Mme Francine DEMICHEL : Je pense qu’à l’avenir il faut diversifier les formules de logement et parvenir à mettre sur pied un système susceptible de répondre à des attentes et à des délais différents car le système unique, en cas de blocage, paralyse tout !
Sur la transparence et le contrôle, j’ai lu le rapport de la Cour des comptes - je rappelle au passage que nous n’exerçons aucun contrôle sur les mutuelles, cette fonction incombant au ministère des Affaires sociales - et qu’à l’Education nationale, nous avons certainement moins d’informations que vous et pas plus que la presse.
J’approuve les conclusions et les exigences émises par la Cour des comptes : je crois qu’il faut que les comptes soient plus rigoureux, qu’il y ait une comptabilité analytique et davantage de transparence quant à l’utilisation des remises de gestion qui doivent être beaucoup plus claires qu’elles ne le sont aujourd’hui, ce qui ne signifie pas qu’il ne doit pas y avoir d’activités dans le secteur marchand mais qu’elles doivent être bien séparées des autres types d’activités de service public où la compétence n’est pas partagée et où la concurrence n’existe pas.
Cela étant, sur les mécanismes de contrôle, je sais par expérience que les contrôles de l’administration centrale tels que nous les effectuons, et qui sont des contrôles théoriques, généraux et par voie de textes - ils sont d’ailleurs très peu nombreux puisque nous avons à faire à des établissements de l’enseignement supérieur qui sont autonomes - sont assez largement inefficaces ! Je crois beaucoup plus aux contrôles de terrain pour voir concrètement comment les choses se passent et, de ce point de vue, les évaluations et les contrôles de la Cour des comptes ou des cours régionales des comptes sont sans doute plus efficaces que les nôtres.
Pour ce qui est de la diversification des activités proposées aux étudiants, elle constitue l’un de nos objectifs. C’est pourquoi d’ailleurs une carte de l’U3M leur est consacrée. Il faut en effet savoir qu’en France, la part réservée à des activités non théoriques, non intellectuelles, est assez faible, y compris dans l’emploi du temps. Quand on étudie l’emploi du temps des classes préparatoires, on est effrayé et on se demande quand les étudiants peuvent bien trouver le temps d’aller au cinéma ou de pratiquer un sport. On touche là au problème de la surcharge des activités intellectuelles qui, bien qu’un peu moindre dans l’emploi du temps des universités, reste encore très pesante.
Cette situation suppose un changement de fond dans notre système, qui passe par l’allégement des programmes dans le supérieur - je ne parle pas du secondaire. Comme chaque acteur du système veut ajouter sa spécialité ou sa matière, cela se fait au détriment des activités extrathéoriques. Par conséquent, si l’on n’installe pas les équipements sportifs au pied des amphithéâtres, les étudiants ne pourront pas s’y rendre. Si, à défaut d’être inscrits dans un club, solution réservée aux plus fortunés, il leur faut traverser toute la ville pour pratiquer une discipline sportive, ils n’y auront pas accès ! Il nous faut donc envisager de " terminer les campus " en y construisant des équipements sportifs et autres.
Quelques expériences de ce genre ont été tentées dans le passé : à Grenoble, par exemple, une piscine avait été construite, mais faute d’entretien, des accidents sont survenus et elle a dû être temporairement fermée.
Notre souhait est donc, dans le cadre des contrats d’établissement, du contrat de plan Etat-Région, de financer de tels équipements en accord avec les régions. Il est à noter que les villes ont fait un gros effort en mettant leurs équipements à disposition mais, vous le savez mieux que moi, elles mettent d’abord ces équipements à disposition du secondaire et des élèves des lycées et ensuite seulement à disposition des universités et de l’enseignement supérieur !
Un effort très important doit donc être accompli sur les campus. C’est ce que nous appelons la politique des sites universitaires, " terminer un site universitaire" , c’est vérifier qu’il est doté d’une maison de l’étudiant, d’un lieu d’animation théâtrale, musicale ou autre, ainsi que d’équipements sportifs et non pas seulement, comme c’est aujourd’hui le cas, du mur d’escalade qui rencontre beaucoup de succès, mais qui se multiplie surtout au motif qu’il occupe peu de place.
Les jeunes ressentent un très fort besoin d’activités sportives et demandent d’ailleurs instamment que l’on finance les Services universitaires des activités physiques, sportives et de plein air - SUAPS - pour qu’ils puissent s’inscrire à des stages de voile, de ski etc. Vous n’ignorez pas, non plus, l’actuel engouement pour les filières STAPS - Sciences et techniques des activités physiques et sportives - qui sont celles de l’enseignement supérieur qui rencontrent actuellement le plus de succès.
C’est un peu surprenant, également un peu angoissant car il faut trouver des débouchés, mais cela correspond quand même à un besoin réel d’une partie des jeunes, garçons et filles, qui cherchent dans ce type d’activités à se réaliser de façon personnelle au sein d’une société qui ne leur propose pas toujours des perspectives qui les motivent.
Cet effort doit être accompli relativement tôt car les jeunes - je pense toujours aux étudiants du premier cycle parce que ce sont eux qui sont dans la situation la plus difficile - ont vraiment besoin d’avoir une pratique sportive ou une pratique musicale, activité dont vous savez qu’elle est très peu développée en France.
Nous allons donc nous attacher à réaliser cet effort et à le financer et vous pourrez d’ailleurs bientôt constater, puisque vous serez les premiers à être informés de ces mesures, qu’U3M comportera de nombreuses demandes d’équipements sportifs.
M. Bruno BOURG-BROC : Même si vous n’avez cessé d’en parler tout au long de votre exposé, j’aimerais savoir, madame la directrice, quels seraient, si on vous demandait de résumer l’essentiel du statut étudiant que vous auriez la liberté de bâtir, les trois ou quatre points que vous retiendriez.
Mme Francine DEMICHEL : Un statut dans lequel l’étudiant serait davantage participant qu’il ne l’est aujourd’hui. Je crois qu’il faut développer la prise en charge par l’étudiant de son destin en tant que tel. Pendant cette vie étudiante, les étudiants dans leur majorité sont encore trop passifs et se comportent trop souvent comme des assistés ; ils attendent de l’Etat ou des uns et des autres un certain nombre de choses qui doivent leur être apportées.
M. Jean-Pierre BAEUMLER : Ils attendent aussi des parents !
Mme Francine DEMICHEL : Oui, lorsque les parents répondent, parfois ils ne répondent pas et dans ce cas, la situation se complique !
Je pense profondément que l’enseignement est excellent en France et que nous n’avons pas de problèmes de niveau des études mais un problème d’orientation des étudiants. Cela relève de la responsabilité des étudiants. Il faut donc que nous les aidions et si nous y parvenons, s’ils participent à leur cursus de formation, si, au lieu d’attendre qu’on les oriente, ils réfléchissent un peu en amont, ce sera un réel progrès.
Tout tient à un problème d’orientation et de responsabilisation et je crois que c’est sur ce thème qu’il faut travailler, beaucoup plus que sur le système de formation dont je pense qu’il fonctionne bien ! Je crois qu’il faudrait incontestablement accroître la participation, c’est pourquoi nous avons proposé qu’il y ait des vice-présidents étudiants dans les instances universitaires afin qu’ils s’approprient l’université et que cette dernière ne soit plus seulement le lieu des enseignants mais devienne également celui des étudiants. Je me résumerai donc en disant que je souhaite un statut plus participatif.
Pour ce qui me concerne, je pense que cela ne vous étonnera pas, je considère que l’on ne peut pas, en France, et je n’y suis pas, personnellement, favorable, envisager un système où il y ait un autofinancement plus important des universités par le biais des droits d’inscription - le principe de gratuité du service public étant très fortement ancré dans la société française on ne peut pas le remettre en cause - mais qu’il est indispensable que les universités elles-mêmes, en tant qu’institutions, se soucient davantage de l’étudiant qu’elles ne le font aujourd’hui.
Actuellement, vous le voyez bien, les universités et les universitaires dans leur ensemble, délivrent un savoir sans se préoccuper de la vie de l’étudiant, ce qui aboutit à un système cloisonné avec les CROUS d’un côté, qui s’occupent de la restauration, et du logement, et de l’autre côté les assistantes sociales, qui pallient les difficultés d’un autre ordre. C’est en ce sens que j’ai usé du terme de globalisation.
Le ministre de l’Education nationale veut " mettre l’étudiant au centre du système " mais, pour ce faire, il faut que les universitaires prennent conscience qu’ils ne sont pas là simplement pour délivrer un savoir mais qu’ils délivrent un savoir à des gens qui sont dans une situation sociale bien déterminée, qui ont une vie propre, ce qui nécessite davantage d’échanges.
C’est dans cette direction qu’il convient d’améliorer le système car, pour le reste, j’estime qu’il est de bonne qualité et qu’il est à peu près au point.
M. Joël GOYHENEIX : Madame la directrice, par rapport au manque de contrôles, régulièrement dénoncé, des mutuelles dans leurs activités, que penseriez-vous de la présence de l’Education nationale dans les conseils d’administration des mutuelles comme c’est envisagé pour la sécurité sociale ?
A défaut de l’Education nationale, les établissements publics autonomes que sont les universités ne pourraient-ils pas être représentés, soit de façon consultative, soit d’une autre façon ?
Mme Francine DEMICHEL : Il faut noter que l’article R. 381-29 du Code de la sécurité sociale prévoit la participation d’un représentant du ministère chargé de l’éducation nationale ou du ministre chargé des universités au conseil d’administration de chaque section locale universitaire. Je serais assez favorable à la présence d’un président d’université ou d’un directeur d’école.
Je pense, d’une façon assez générale que les organismes doivent, je ne dirai pas être cogérés, car le terme a été assez galvaudé, mais qu’ils doivent faire l’objet d’une participation concrète, et pouvoir rendre, ensuite, des comptes de leur activité. Je crois assez à cette formule et au fait que, sur le terrain, les gens s’assoient autour d’une table et envisagent les conséquences de leurs actes.
M. le Président : Madame la directrice, nous vous remercions de votre présence et de la qualité de vos explications dont nous nous efforcerons de faire le meilleur usage.
Source : Assemblée nationale (France) : http://www.assemblee-nationale.fr
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