Présidence de M. Alain TOURRET, Président

M. Rocard est introduit.

M. le président lui rappelle que les dispositions législatives relatives aux commissions d’enquête leur ont été communiquées. A l’invitation du président, M. Rocard prête serment.

M. le Président : Monsieur le Premier ministre, je tiens tout spécialement à vous remercier d’avoir accepté de vous rendre à notre invitation.

Vous êtes au courant de la création de cette commission d’enquête, qui concerne aussi bien les problèmes de la MNEF que ceux de la sécurité sociale étudiante en général. La commission a tenu à être éclairée sur les problèmes posés par l’inévitable application des directives européennes sur l’assurance, aux mutuelles régies par le Code de la mutualité.

Au cours d’un exposé liminaire, vous pourrez nous présenter votre approche de ces problèmes, nous préciser l’objet de la mission qui vous a été confiée par le Premier ministre et les initiatives que peut prendre la France lors de la transposition de cette directive européenne.

M. Michel ROCARD : Monsieur le président, Monsieur le rapporteur, messieurs les députés, je viens de prêter serment sans l’ombre d’un faux-fuyant et avec une absolue conviction ; je ne pense pas être détenteur de secrets d’Etat, mais je suis heureux de déférer à cette nécessaire solennité.

Monsieur le président, c’est toujours un honneur d’être cité en tant que témoin devant une commission du Parlement, par conséquent j’ai eu fierté à répondre immédiatement à votre invitation. J’ai cependant eu un petit doute : le champ de la mission qui m’a été confiée par le Premier ministre, sur la transposition des directives " assurances " aux mutuelles a-t-il la moindre zone séquente avec le champ d’enquête couvert par votre commission ?

Vous êtes passés d’une enquête sur la MNEF qui, dans le rapport que je remettrai la semaine prochaine au Premier ministre, n’est pas citée une seule fois, à un champ élargi aux mutuelles étudiantes, du fait de la saisine de la justice, sur certains faits propres à la MNEF. C’est dans le cadre de cet élargissement que je suis prêt à contribuer à vos travaux dans la mesure de mes moyens et de la compétence qui m’a été donnée juridiquement - et que j’ai peut-être acquise intellectuellement.

Le champ de votre commission d’enquête et celui de ma propre mission ont peu de points communs. Je peux cependant, pour ouvrir le débat, aborder deux points particuliers. Premièrement, l’application du droit communautaire des assurances ne met pas en cause la gestion par une mutuelle du régime obligatoire. Nous pourrons peut-être explorer, sous l’angle juridictionnel, comment le problème se présente devant les institutions européennes.

La Commission européenne nous a cependant clairement indiqué qu’elle examinerait cette délégation du service public à l’aune des règles de la concurrence qui interdisent les subventions dissimulées, et exigent la rémunération d’un service à son coût réel. A terme, cela peut poser la question des conditions dans lesquelles l’Etat concède la gestion d’un service public à un ou plusieurs organismes privés.

Par ailleurs, l’application du droit communautaire conduira à un renforcement des pouvoirs de contrôle de la Commission de contrôle des mutuelles et des institutions de prévoyance (CCMIP). A cet égard, il convient de préciser que le contrôle qu’elle opère ne se limite pas à celui des règles comptables, des règles de provisionnement, mais doit aussi, aux termes des directives européennes elles-mêmes, porter sur l’organisation administrative et sur le contrôle interne.

La difficulté qui a conduit le Premier ministre à me charger de cette mission résidait dans le fait qu’après la publication des troisièmes directives européennes " assurance ", en 1992, la France s’est trouvée dans l’obligation de les transposer en droit interne. Cette transposition a été faite dans les délais - moins de douze mois - pour les compagnies privées d’assurance et les institutions de prévoyance.

En revanche, pour le cas particulier des mutuelles relevant du Code de la " Mutualité 1945 " et non du Code des assurances, le Gouvernement ne s’est pas trouvé en situation de proposer au Parlement dans les délais un projet de transposition en droit français des directives. La Commission européenne a donc traduit la France devant la Cour européenne de justice pour cause de retard dans l’application des directives.

C’est pour tenter de sortir de cette situation que j’ai été chargé d’une mission exploratoire des difficultés. Après une analyse des marges de liberté et des compatibilités - faibles - ou zones de non-contradiction du droit communautaire avec les exigences du mouvement mutualiste français, je vais donc remettre un rapport au Premier ministre sur les conditions auxquelles on pourrait, tout en préservant la spécificité des mutuelles, traduire enfin cette directive de 1992 dans le droit français.

Trois problèmes principaux sont posés : la gestion d’œuvres sociales par des mutuelles par ailleurs gestionnaires de l’assurance complémentaire maladie ; les conditions de transmission des portefeuilles en cas de faillite ou de disparition d’un organisme mutualiste ; les conditions de la réassurance. On pourrait rajouter à ces trois problèmes celui du complément de retraite épargne fonctionnaire - le CREF.

C’est sur ces points qu’ont porté nos travaux, éclairés par les auditions de toutes les fédérations mutualistes, le rapport de force dans l’élection du conseil supérieur de la mutualité étant de 95 % des voix pour la Fédération nationale de la mutualité française (FNMF), les 5 % restant étant partagés entre la FNIM et la FMF.

Je suis prêt à détailler devant vous mes suggestions sur ces points ; il me reste à entendre de vous la confirmation qu’il s’agit bien des points qui vous intéressent, puisqu’aucun ne concerne directement ou exclusivement la MNEF.

M. le Rapporteur : L’objet de la commission d’enquête est relatif au régime étudiant de sécurité sociale et à sa gestion par des mutuelles d’étudiants. Si nous avons souhaité vous entendre sur les problèmes liés au droit communautaire, c’est parce que l’objet de cette commission est non seulement de faire le constat de ce qui s’est passé, mais également de formuler un certain nombre de propositions.

Or nous souhaiterions que ces propositions tiennent compte des probables évolutions et de la probable soumission du droit français au droit communautaire en la matière. Le problème de la gestion des œuvres sociales nous intéresse, car il est évident qu’il existe deux types de problèmes dans la mutualité étudiante : d’une part, la gestion du régime obligatoire - et le bon niveau des remises de gestion - et, d’autre part, la gestion des œuvres sociales qui a conduit les mutuelles, et en particulier la MNEF, à une politique de filialisation qui pose beaucoup de problèmes, en raison des dérives légales et illégales auxquelles elle a donné lieu. Les aspects transmission des patrimoines et libre concurrence sur les réassurances sont moins cruciaux dans le domaine de la mutualité étudiante aujourd’hui que l’évaluation du coût de gestion du service public.

M. Michel ROCARD : Dans ces conditions, Monsieur le rapporteur, je vais entrer dans le vif du sujet.

Le premier élément fondamental est de savoir si, au regard du droit communautaire, un organisme de droit privé qui exerce une activité d’assurance, peut être chargé en plus, de la gestion d’un régime obligatoire.

La réponse européenne est parfaitement claire et elle est positive. Aucune disposition du droit européen ne s’oppose à ce qu’un Etat confère la responsabilité de la gestion d’un régime obligatoire d’assurance maladie à un organisme de droit privé moyennant une rémunération. Nous sommes renvoyés au droit pur et simple de la concurrence, qui implique que les remises de gestion rémunérant l’exercice de ce risque n’en excèdent pas le volume et le coût, ce qui nécessite un contrôle approprié.

Pour avoir, dans ma jeunesse, été amené à soutenir auprès des autorités françaises de l’époque, le fait que dans le cadre de la Mutuelle nationale des étudiants de France, il y avait sous-évaluation du coût de gestion du régime général et urgence à revaloriser ces remises de gestion - je reste fidèle à cette vision - je n’ai jamais revendiqué pour autant qu’on les surrémunère.

Ce point est en droit européen parfaitement clair. Il peut ouvrir des objets de contentieux éventuels que je n’ai pas eu à traiter et donc sur lesquels je n’ai pas compétence, sur des questions telles que " qui exerce ce contrôle ? ", " qui est responsable d’un contrôle du contrôle ? ", etc. Mais nous sommes dans le champ explorable et connu du droit de la concurrence qui est clair bien que technique.

Les autres problèmes que vous avez évoqués relèvent de la spécificité mutualiste. Permettez-moi d’insister sur les éléments principaux de cette spécificité mutualiste que sont la gestion des œuvres, la transmission de portefeuille et la réassurance.

Je commencerai par une considération générale. Le droit européen ne connaît pas cette spécificité mutualiste. Il aborde les problèmes du risque maladie essentiellement en référence à la concurrence, mais avec une possibilité d’ouverture en faveur d’une exception à l’application des principes de la concurrence pour des raisons d’intérêt général. Cette possibilité induit une obligation juridique : l’intérêt général, dont on fait état pour demander une application particulière des règles de la concurrence, doit être législativement spécifié.

En matière d’assurance maladie, nous sommes, en France, devant une évolution coutumière très fortement marquée par la tradition mutualiste mais celle-ci ne bénéficie pas d’une traduction législative de l’intérêt général qu’elle sert. Plus encore, cette spécificité mutualiste, si elle existe, se résume à une forte densité d’éléments statutaires et réglementaires internes aux mutuelles elles-mêmes, ou d’éléments liés au contenu du contrat d’adhésion. L’adhérent mutualiste est plus qu’un assuré, il participe aux décisions de gestion générale de sa mutuelle.

Cependant, ces spécificités mutualistes n’ont nulle part été définies en droit ; par conséquent, il n’y a pas de texte national, pour le moment, c’est pourquoi les conclusions de mon rapport proposent d’en adopter un au nom duquel une spécificité mutualiste puisse servir de base légale à un traitement différencié, à son profit, des règles d’exercice de la concurrence.

Si spécificité mutualiste il y a, on en devine les traits. Ils comportent le caractère viager de l’engagement de la mutuelle à l’encontre d’un fonctionnement que j’appellerai de libre entreprise, suivant lequel, très fréquemment, des compagnies d’assurance se donnent le droit de ne plus garantir une personne devenant " à risque " en raison de la survenue d’une maladie. La spécificité mutualiste, c’est de prendre l’engagement inverse.

La deuxième spécificité est d’organiser une solidarité, soit professionnelle, soit territoriale, indépendamment de la matérialisation du risque. C’est l’exercice de cette solidarité qui est antagonique avec la sélection des bons risques. Indépendamment de tout critère de solidarité, la spécificité mutualiste, par rapport au monde de libre entreprise de l’assurance, est de ne pas faire de sélection des bons risques, donc, par exemple, de ne pas soumettre l’adhésion à une mutuelle, à des questionnaires médicaux ou de ne pas cibler un public à faible risque. Je sais, néanmoins, que certaines mutuelles passent outre à cet engagement.

Les résultats que ce système mutualiste a acquis, en qualité de prestations d’assurance, en respect de ses assurés - l’ensemble de la mutualité compte 22 millions de cotisants et 30 millions d’ayants droit - sont importants. Ce système repose également sur une tradition historique et une légitimité immense. Mais son fonctionnement est coutumier, et n’est pas estampillé par des dispositions fondamentales du droit français. Sous réserve de quelques points, le droit communautaire peut très bien s’accommoder des contraintes statutaires particulières à tel organisme au nom desquelles il renchérit ses coûts à condition qu’il fasse des choses que les autres ne font pas. En revanche, il n’accepterait pas un privilège général issu d’une disposition législative qui soit en elle-même un biais à la concurrence.

C’est sous cette réserve que la France a maintenant, dans l’accompagnement du travail de transposition du droit européen en droit français, l’obligation de définir cette spécificité mutualiste. Ce point est général mais central, et nous entrons maintenant dans le détail.

Je développerai trois points majeurs au sujet de l’assurance complémentaire maladie. Le premier concerne la gestion des œuvres sociales. Le principe mutualiste conduit nos mutuelles à prendre en charge, moins des risques de maladies spécifiques que des personnes. C’est leur honneur mais cela ne résulte pas de la loi. A ce titre, le raisonnement mutualiste consiste à dire que l’assurance du risque survenu est une chose, mais que le contrat d’adhésion à une mutuelle concernant des personnes encore valides, crée, pour la mutuelle, l’obligation d’agir sur le risque par la prévention et une offre de soin pas uniquement liée à la survenance du risque qu’est la maladie. Là commence le conflit conceptuel avec les règles issues des troisièmes directives européennes adoptées à l’unanimité des Etats membres en 1992.

A ce titre, l’élément majeur des directives européennes est la spécialité de l’activité d’assurance. Je vous rappelle d’ailleurs que si le problème se pose c’est bien parce que les mutualistes français ont demandé, en 1992, à être inclus dans le champ de transposition des directives européennes, avec le double souci de ne pas être isolés et coincés dans la concurrence, et de voir leur philosophie mutualiste capable de s’expatrier et de se diluer chez les autre pays d’Europe, ce qui était, après tout, souhaitable et le demeure. Dans ces conditions, tout organisme agréé pour faire de l’assurance maladie se voit contraint, par ces directives, à la spécialité de l’activité d’assurance. Il résulte de cette disposition qu’il y a pour toute mutuelle une incompatibilité entre la gestion de l’assurance maladie et la gestion directe d’œuvres sanitaires, parasanitaires ou sociales.

Cela a provoqué une vraie colère du mouvement mutualiste. Toutes les mutuelles n’ayant pas la même vision de tout cela, et je pourrais détailler leurs divergences, je parle au nom d’une vision un peu arithmétique et globalisante d’une position des mutualistes qui en fait n’existe pas. Je m’efforce de retenir une moyenne lourde entre ces positions divergentes.

Nous avons été chargés d’explorer, avec la Commission européenne, les marges de liberté. Je ne dis pas " négocier ", car il est exclu que la France puisse espérer que la Communauté européenne révise les directives. L’idée de refabriquer une unanimité du Conseil des ministres européens sur une nouvelle directive pour répondre à une exception française car la mutualité n’existe nulle part ailleurs, est complètement exclue.

Il y a deux marges de liberté. Premièrement, le droit européen exige-t-il que toutes les prestations d’assurance maladie soient nécessairement des prestations en espèce, interdisant toute prestation en nature ? La réponse est non. En l’absence d’une disposition communautaire contraire, une prestation d’assurance complémentaire maladie peut avoir la forme d’une prestation en nature. Cela ne règle pas le problème de savoir si cela vaut uniquement en cas de survenance du risque ou si cela inclut la prévention, mais c’est déjà une ouverture.

La gestion par le mouvement mutualiste de cette disposition selon laquelle on peut traduire un contrat d’assurance par des prestations en nature emporte tout de même des conséquences fortes dont la plus importante est que ces prestations ne peuvent être délivrées qu’aux adhérents. Elle interdit donc la gestion d’œuvres mutualistes ouvertes au grand public. Par exemple, dans un hôpital public, cela impliquerait de faire la distinction entre les mutualistes et les autres. Un organisme mutualiste, au regard du droit communautaire, ne peut, en dehors de la prévention, fournir des prestations en nature à d’autres qu’à ses adhérents et à condition que cette prestation repose sur un fondement juridique qui pourrait se rapprocher de la notion d’intérêt général. On ne peut, en disant cela, écarter tout risque contentieux. Clairement, cela veut dire que les mutuelles ne pourront plus assurer directement la gestion de leurs colonies de vacances ou de leurs centres d’optique.

Cela m’a amené à explorer la deuxième voie possible, à savoir celle des mutuelles sœurs qui ont déjà été évoquées dans le rapport de M. Alain Bacquet, président de la section sociale du Conseil d’Etat, de mai 1994, qui n’a pas été suivi. Une mutuelle non agréée au titre de l’assurance maladie, servant des prestations en nature, peut être gérée par le même conseil d’administration, les mêmes autorités, qu’une mutuelle sœur qui, elle, fait de l’assurance maladie. Ce concept est acceptable en droit européen - la Commission me l’a confirmé, en répondant à des questionnaires un peu incisifs que je lui avais adressés.

S’il choisit cette option des mutuelles sœurs, le mouvement mutualiste devra en discuter avec le gouvernement français pour arriver à une clarification fiscale des transferts de fonds entre les mutuelles sœurs. Il devra également se poser la question de la nature du contrat dans le cadre duquel l’adhérent de base, qui aurait souscrit aux deux mutuelles à la fois, pour une unique cotisation, ventilée entre les deux, accepterait une procédure dans laquelle, finalement, la mutuelle bénéficiaire - celle de l’assurance maladie - verrait, sous réserves des règles prudentielles applicables aux compagnies d’assurance, une possibilité de transférer régulièrement des fonds pour financer la mutuelle prestataire de services en nature qui correspond à l’exercice des anciennes œuvres.

Le mouvement mutualiste aura à explorer la faisabilité des choses. Il a besoin d’une négociation de bonne foi avec le Gouvernement, et d’une clarté durable dans le traitement fiscal des transferts financiers. Une solution de cette nature, même si elle complique la vie à un certain nombre de mutuelles, je ne sais pas ce qu’il en serait pour la MNEF, je sais que pour la MGEN ce serait difficile, est possible, compatible avec le droit européen, et pourrait donc être introduite en droit interne au moment de la transposition.

Le deuxième problème est celui du transfert des portefeuilles. Les règles de concurrence supposent que tout organisme d’assurance, s’il a des difficultés, doit pouvoir être racheté dans des conditions marchandes. Il en serait de même pour les mutuelles. Cependant, qu’advient-il de la spécificité mutualiste que j’ai définie auparavant, si une mutuelle est rachetée par une compagnie d’assurance privée ? Il devrait y avoir un droit de suite pour honorer les clauses d’un contrat mutualiste. Or les règles de la concurrence ne permettent pas d’assurer un privilège ou des conditions particulières. Par conséquent, la difficulté particulière, liée à ce problème, peut appeler un traitement du droit du transfert de portefeuilles dans l’univers mutualiste avec des conditions particulières.

L’engagement est un peu différent, et par conséquent j’ai la confirmation que le droit européen ne saurait s’opposer à ce que dans des cas aussi douloureux - celui de savoir à qui on transfère - on applique les règles propres à l’ultime réunion de l’organisme mutualiste. En conséquence, les conditions de solennité de la convocation en assemblée extraordinaire, de quorum et de majorité qualifiée ou des deux tiers, ne sauraient être, là, objectées, tellement la reconnaissance de la spécificité est indiscutable. Mais, ce ne peut être qu’une affaire statutaire interne au mouvement mutualiste.

Le mouvement mutualiste aurait aimé que la loi face l’ordre dans ses propres rangs plus vite qu’il n’est capable de le faire lui-même. C’est trop demander et la position de la Commission européenne fondée sur des évidences juridiques non susceptibles d’être combattues, me pousse à accepter cette solution comme la seule possible. Elle est tout de même forte, puisqu’elle admet que nous donnions des conditions de délibération spécifiques et fortes à un acte juridique, en effet inhabituel, pour sortir d’un univers mutualiste et passer dans un univers de libre entreprise.

Le troisième point est celui de la réassurance. Il est important parce que les mutuelles, croyant à leur éthique, mais un peu fragiles financièrement, ont besoin de se réassurer. Aucun organisme mutualiste sérieux ne fonctionne sans réassurance. Or plus l’organisme est fragile, plus le réassureur est le commandant. Quelle que soit l’intensité de l’engagement mutualiste, un réassureur conséquent cherchera à ne pas trop s’alourdir du caractère viager de l’engagement, à faire sentir ici ou là que tel malade a abusé et qu’il serait bon de le renvoyer vers l’aide sociale. Bref, qu’il conviendrait d’avoir une politique globale de sélection des risques - même si elle est un peu anonyme et indirecte - non pas nominative, mais par catégorie de public.

Le mouvement mutualiste sait que le pouvoir du réassureur est dangereux. Le mouvement mutualiste français demandait une quasi-obligation pour tout organisme mutualiste de se réassurer à l’intérieur du mouvement mutualiste, quitte à admettre qu’au sommet de ces pyramides, l’organisme central qui assure la réassurance générale puisse, lui, se réassurer sur le marché international - il a la puissance de résister et de négocier des contrats qui le mettent à l’abri des pressions. Mais que la loi décide de cela est résolument incompatible avec la législation européenne. La position de la commission sur ce point est inflexible et serait probablement suivie par la Cour de justice des communautés européennes.

Dans ces conditions, le droit de la réassurance ne peut être que libre. D’où une certaine inquiétude et même une vraie panique dans les organismes mutualistes français. Il convient donc de sortir du problème, et, pour se faire, de le subdiviser. Personne, dans le monde mutualiste, ne discute le fait que les chefs de file s’assurent sur le marché de la libre entreprise.

Aucune réglementation européenne ne créera une obligation particulière qui permette une réassurance à l’intérieur du monde mutualiste. Par conséquent, nous revenons comme pour le point précédent, à l’idée que l’obligation de réassurance sur-le-champ mutualiste ne peut être qu’une obligation statutaire interne. Tout organisme agissant sur le marché est loisible de se donner les contrats qu’il veut, quitte à ce que la tarification de ses services répercute ses obligations.

Je dis souvent à mes amis mutualistes " vous vouliez que la loi fasse la paix chez vous parce ce que vous avez du mal à maintenir l’ordre, ce n’est pas possible ". C’est un problème d’autorité intellectuelle, politique et éthique interne au mouvement mutualiste. Il appartient à chacun, statutairement, de décider de se réassurer au sein du monde mutualiste.

On peut cependant isoler un autre problème, celui des petites mutuelles de moins de 3 500 mutualistes. Nous sommes là dans un univers à fragilité plus grande, le réassureur pèsera donc d’un poids beaucoup plus fort que sur de gros organismes, sur la politique générale, le type de ciblage des publics et la fragilisation de l’engagement viager.

Il est donc admissible que dans ce cas la loi intervienne et c’est l’une des suggestions de mon rapport. Il conviendra de légiférer et de déterminer un intérêt général et, dans ce cadre, le traitement de la spécificité mutualiste au nom duquel il mérite une certaine protection. Si cet intérêt général est défini de manière incontestable, il est loisible qu’il se traduise par une obligation particulière de réassurance en univers mutualiste pour les mutuelles relevant de l’espèce. En l’occurrence je ne pense pas que ce soit le cas de la MNEF, elle est trop grosse.

L’intérêt général est un concept intervenant dans le droit européen, mais de façon conflictuelle. La Commission européenne, dans ses propositions de directives et de règlements, en a une vision très restrictive. Ses mandats la désignent davantage comme défenseur de la concurrence et des lois du marché.

L’organe qui ouvre à une interprétation un peu plus large de l’intérêt général, c’est la Cour de justice. Il existe des arrêts de jurisprudence dans lesquels la Cour en donne une définition relativement extensive.

Sous réserve de l’incontestabilité des arguments, l’intérêt général est un fondement aux entraves ou à des modifications ou à des limitations d’exercice de la concurrence. Nous sommes là devant un problème pour le législateur français futur ; au moment de la transposition, il devra définir cet intérêt général mutualiste - dont les grandes mutuelles se portent garantes toutes seules à cause de leur puissance et de leurs dispositions statutaires en matière de réassurance, alors que les petites mutuelles requièrent la protection de la loi afin de leur permettre de se réassurer dans le monde mutualiste - ce qui est un appel au renforcement des organes de contrôle. A condition de définir, de manière incontestable, ce qu’est la spécificité mutualiste et la manière dont elle sert l’intérêt général, ces dispositions sont acceptables par le droit européen.

Voilà, en ce qui concerne les trois points majeurs de difficultés de transposition, les conclusions de ma mission. Elles emportent un certain nombre de conséquences. La première vise le complément de retraite - le CREF - qui est une prestation étonnante, qui a 450 000 bénéficiaires, qui est une offre du mouvement mutualiste et qui a la bizarrerie unique en France de mélanger de la capitalisation, pour un tiers, et de la répartition, pour les deux tiers.

Cette prestation d’assurance est tout à fait intéressante ; elle n’est pas en contradiction, pour le moment, avec le droit communautaire, mais, pour éviter les problèmes contentieux, il conviendrait de légitimer cette procédure particulière du traitement du risque vieillesse par une base législative plus forte qu’elle ne l’est aujourd’hui. Il y a là aussi une obligation, pour la France, de définir les critères auxquels répond cette prestation, son rapport avec le service rendu pour lui donner une base opposable aux tiers, mais nous ne sommes pas là en opposition frontale avec le droit européen.

La loyauté m’oblige à ajouter un commentaire sur un autre point de mon rapport. La France est devant la Cour de justice pour cinq ans de retard dans la transposition ; je n’ai pas fait de miracle, cette mission ne pouvait pas faire changer le droit européen. Mais pourquoi a-t-on fait appel à mes services ? Parce que l’administration française ne disposait pas d’organisme pour traiter le problème.

La délégation interministérielle à l’économie sociale que j’avais créée et installée auprès du Premier ministre a été, fin 1991, sortie des attributions du Premier ministre et rattachée au ministère des Affaires sociales. Cette délégation n’avait donc plus compétence ni possibilité de sortir du ministère des Affaires sociales et donc de toucher à des aspects internationaux, de négocier avec les finances - et de ne pas oublier de négocier avec l’agriculture puisqu’un bon quart des mutualistes sont dans le secteur agricole. J’ai donc été nommé en catastrophe pour cette mission en raison de l’absence d’un organe administratif rattaché au Premier ministre.

Il convient donc de récréer cet organe. En outre, étant donné qu’il conviendra de légiférer - pour transposer -, qu’il y aura un suivi contentieux non seulement national, mais également international qui devra être une synthèse des positions des ministères des Finances et des Affaires sociales, la création d’un tel organisme interministériel est une condition nécessaire pour que l’on suive les affaires dans les délais.

M. le Rapporteur : En ce qui concerne la spécificité du système français, je voudrais revenir sur cette notion de non-sélection du risque. Selon vous, celle-ci peut-elle devenir un critère d’intérêt général ?

M. Michel ROCARD : Oui, mais pas pour 58 millions de citoyens français en même temps. Il existe une " sous non-sélection " du risque à l’intérieur de groupes professionnels ou géographiques urbains/ruraux, salariés/non salariés, fonction publique/non-fonction publique. Reste que le critère a de la force. Il fait partie de l’éthique mutualiste. Par ailleurs, il a une autorité de légitimité. Cependant, le mouvement mutualiste est fort hétérogène et l’authentification de ce critère, aujourd’hui, doit être fournie aux autorités européennes qui sont juges en dernier ressort, en raison des traités qui leur transfèrent la compétence en matière de concurrence et sur l’efficacité des contrôles s’y rapportant.

Je vous signale que la Commission de contrôle des mutuelles et des institutions de prévoyance (CCMIP) est sous-équipée en moyens. En outre, elle n’a pas les mêmes pouvoirs que son homologue la Commission de contrôle des assurances. Cette dernière peut sanctionner, y compris financièrement, des organismes déviants. La CCMIP ne le peut pas. Vous trouverez donc, dans mon rapport, deux pages assassines sur l’insuffisance des moyens juridiques de l’appareil de sanctions et des moyens en personnel.

J’évoquerai un dernier point. Il y a de l’assurance maladie obligatoire dans les quinze pays de la Communauté ; c’est la carte d’identité de l’Europe. Par ailleurs, nous sommes tous en train d’assainir la gestion de nos finances publiques dans un univers où l’on n’a pas compris assez vite que les finances publiques servent à financer des services dans lesquels les progrès de productivité ne marchent pas aussi vite que là où l’on produit des biens. Par conséquent, les taux de remboursement de l’assurance maladie obligatoire sont en baisse. Ils étaient à 80 % en moyenne voilà 10 ans, ils sont actuellement inférieurs à 70 % - la France étant lanterne rouge avec 62 ou 63 %.

Si dans ce chiffre de la comparaison européenne des taux de remboursement assurance maladie obligatoire, nous distinguons le gros risque - l’hôpital presque pourtant remboursé à 100 % - du reste, nous nous apercevons que pour la médecine ambulatoire les taux de remboursement sont tombés en moyenne en Europe à 60 % - alors que la France, avant dernière avant la Grèce, est à 52 %. Nous commençons à atteindre un niveau où l’accès aux soins, pour la population peu aisée, est en train de devenir dépendante de l’assurance complémentaire maladie. Il s’agit là d’un problème de société fondamental.

Or, en matière de complémentaire maladie, la France est la seule, parmi les Quinze, à disposer de cet extraordinaire système mutualiste qui apporte les critères de non-sélection des risques, de solidarité par profession ou par région, et de non-tarification en fonction du risque. Partout ailleurs, l’assurance maladie est soumise aux règles du marché dans ce qu’elles ont de brutal, c’est-à-dire l’absolue sélection des bons risques.

Ce qui veut dire que le mouvement qui nous pousse vers une médecine duale joue dans ce sens et commence à susciter des inquiétudes. Autrement dit, la France est sur la défensive devant le problème de la traduction des directives européennes dans des conditions qui préservent une certaine spécificité mutualiste, mais elle est intellectuellement et politiquement à l’offensive sur l’idée de provoquer, demain, et je vise dans mon rapport l’engagement de ce combat au Parlement européen, une législation européenne qui étende ces critères de non-sélection des risques et d’engagement viager à l’assurance maladie complémentaire.

Il n’y a pas besoin d’être mutualiste pour cela. Les compagnies d’assurance, du moment qu’elles font payer le risque, peuvent accepter tout cahier des charges. Mais on est en train d’assister à une dégradation de la signification sociale de l’assurance maladie à travers l’excessive sensibilité aux seules exigences du marché à court terme de la complémentaire maladie.

Il convient donc de préserver cette éthique mutualiste pour ensuite en faire un instrument de redémarrage, de réflexion, non pas d’une expansion du mouvement mutualiste français en Europe, mais d’une extension à l’Europe de critères éthiques de gestion de l’assurance complémentaire maladie dont nous tenons l’origine, du mouvement mutualiste français.

M. Joël GOYHENEIX : Monsieur le Premier ministre, vous nous dites que votre rapport ne sera remis que la semaine prochaine à M. le Premier ministre, or, j’ai déjà lu dans la presse les réactions de fédérations de mutuelles. Selon vous l’accueil réservé à ce rapport est différent selon les fédérations. Pouvez-vous nous en dire davantage à ce sujet ?

M. Michel ROCARD : Toutes les fuites de presse ne sont que des bavardages ! Personne ne possède d’exemplaire de ce rapport. Ce rapport va certainement décevoir parce qu’il est horriblement technique et ennuyeux. L’occasion de faire du symbolique sera donc nulle !

La FNIM, 3 % du mouvement mutualiste, a depuis longtemps séparé ses œuvres sociales de toute gestion assurancielle et avale la totalité de la transposition des directives sans poser de problème, en clamant son horreur au reste du monde mutualiste pour le retard pris qui la gêne.

La FMF, 3 ou 4 % du mouvement mutualiste, plaide le contraire. Elle trouve scandaleux que l’Europe se permettre de mettre en cause des éléments de notre identité mutualiste ; elle conteste l’orientation du gouvernement français à légiférer pour transposer ces directives. Elle revendique sa préoccupation civique qui est que l’assurance maladie est en train de devenir capitaliste et crée une société à deux vitesses ; l’Europe, si elle s’en occupe, ferait mieux de traiter tout le problème des règles auxquelles doit obéir l’assurance maladie : régime obligatoire et surtout régime complémentaire. La FMF a donc une attitude plutôt négative dans l’attente d’une victoire politique globale au niveau européen.

La FMF refuse toute concession sur l’urgence de se réassurer de manière mutualiste, sur le combat législatif contre tout risque qu’à l’occasion de transferts de portefeuilles, les garanties qu’a souscrites un mutualiste, puissent être mises en cause et a fortiori, sur la gestion des œuvres sociales par des mutuelles d’assurance maladie complémentaire, à raison de leur vocation de faire de la prévention, du traitement de risque global et statistique, notamment par la prévention par l’éducation des patients.

La FNMF, qui regroupe 94 % du corps électoral au Conseil supérieur de la mutualité, porte en elle toutes les contradictions intérieures du mouvement. Elle est composée de mutuelles interprofessionnelles, géographiques, de professions privées ou indépendantes et des mutuelles de fonctionnaires. Elle porte la responsabilité de défendre la cause des plus lourdement engagés dans la défense de la gestion d’œuvres sociales dans un cadre strictement mutualiste, comme la MGEN et quelques autres mutuelles de fonctionnaires.

La FNMF est probablement la plus attachée à la dimension européenne de son activité et des projets. Elle est donc la plus attachée à suivre loyalement les processus de transposition des lois et d’intégration dans un concept juridique européen, sur lequel elle a mauvaise conscience à se sentir en difficulté. Elle a cherché à préserver ce qu’elle a pu et c’est pour ça qu’on n’a pas transposé pendant cinq ans.

Cependant, le fait que l’on n’ait pas encore transposé résulte d’une insuffisante attention du monde mutualiste lui-même mais aussi d’une totale carence de l’administration publique.

Cinq gouvernements de suite n’ont rien fait, c’est beaucoup !

M. le Rapporteur : Vous avez fait référence à la différence importante de statuts qui existait entre la Commission de contrôle des assurances et celle de la mutualité et des institutions de prévoyance. Convient-il d’aller vers une modification majeure du statut de la Commission de contrôle des mutuelles ?

M. Michel ROCARD : Il s’agit de l’un des rares points que le rapport ne tranche pas car les investigations sont encore insuffisantes. Il y a deux solutions.

Premièrement, la fusion des deux organes de contrôle. Mais l’inquiétude réside dans le fait que cet unique organe de contrôle ayant dans son champ d’attribution 12 % d’organismes mutualistes et 88 % de compagnies d’assurance, aurait à vérifier l’application de leur éthique par les mutuelles en plus de règles prudentielles et des réserves mathématiques. Une telle solution devient, de ce fait, peu plausible. Le vrai problème est un problème de sociologie administrative. Il est inconcevable, si l’on fusionne les deux organismes, que ce ne soit pas la philosophie du ministère des Finances qui la domine.

L’autre solution est de maintenir deux organismes. Si le gouvernement choisit cette solution, il y a un énorme travail à faire pour rehausser le second. D’abord, parce que les pouvoirs de sanction des deux commissions sur leurs populations institutionnelles ne sont pas les mêmes. Ensuite, parce que les moyens donnés à chacune ne sont pas les mêmes non plus. Et le corps des IGAS n’est jamais susceptible d’être détaché à temps plein pour une unique mission.

Par conséquent, on ne peut consolider la CCMIP à côté de la CCAS qu’à la condition d’avoir réalisé le travail législatif qui consiste à donner une base législative certaine aux missions par lesquelles elle vérifie des organismes qui ne sont pas seulement des compagnies d’assurance, mais qui gèrent l’intérêt général au nom d’une spécificité mutualiste qu’aujourd’hui personne ne connaît.

Je rappellerai, par ailleurs, que la Commission européenne n’a jamais prétendu s’occuper du droit du contrat, mais que le problème de la situation juridique du contractant, selon qu’il contracte avec une compagnie d’assurance privée ou avec une mutuelle, n’est pas de même nature. Les mutuelles nient qu’il s’agit d’un contrat d’assurance - c’est un contrat d’adhésion à un organisme qui délibère sur la préservation de la santé avec l’accord de ses adhérents.

Si donc l’on doit isoler ce secteur pour en préserver la spécificité, tout en sachant qu’il faudra durcir les contrôles pour pouvoir affirmer que cette spécificité existe et qu’elle est respectée, il y a un problème de puissance de moyens et de capacité de sanctions et d’outils équivalent à ceux de la CCAS qui n’est pas encore réglé.

Je ne tranche pas entre les deux solutions, mais choisir de maintenir les deux, c’est s’obliger à un travail administratif de renforcement de la CCMIP, peut-être plus lourd qu’on ne l’imagine, le statu quo étant exclu.

M. le Rapporteur : Vous travaillez depuis plusieurs mois sur ce problème de transposition des directives européennes en droit français. Nous disposons, en France, du Code de la mutualité qui date de l’après-guerre, dont l’article premier définit l’objet de la mutualité qui est extrêmement large. Les termes choisis par le législateur de l’époque ne recouvrent peut-être plus la même réalité qu’aujourd’hui. Quelles sont, selon vous, les modifications utiles que l’on pourrait apporter au champ d’activité de la mutualité ?

M. Michel ROCARD : Monsieur le rapporteur, la lettre de mission que j’ai reçue du Premier ministre me chargeait de proposer une nouvelle écriture du Code de la mutualité. Ma prudence a voulu que je lui réponde assez rapidement que je n’entreprendrai rien de tel et que je me contenterai d’explorer le reste du cahier des charges, c’est-à-dire le degré de liberté qu’offrait le dispositif législatif européen.

S’il existe un intérêt général dans la manière dont l’assurance maladie, fut-elle complémentaire, est gérée, il exige d’être défini par la loi. Si derrière cet intérêt général se présente, sans prétention au monopole de son exercice d’ailleurs, une spécificité mutualiste, il faut aussi qu’elle soit définie par la loi. Les accrocs à la concurrence ne sont légitimes que quand ils ont des raisons fortes, juridiquement définies. C’est la jurisprudence de la Cour de justice. Je ne suis pas en état de vous répondre sur les conditions dans lesquelles on peu décrire ce qu’est l’engagement viager d’une société mutualiste d’assurance maladie complémentaire relevant du Code de 1945 par rapport à une compagnie d’assurance. Je ne suis pas en état de vous écrire ici ce qu’est la non-sélection des bons risques et l’engagement de non-tarification au risque.

Il s’agit là d’une carence qui m’est personnelle en fonction de ma culture, mais cela ne veut pas dire que le mouvement mutualiste n’a pas plein de choses à dire. Dans l’écriture du droit, chaque mot compte, chaque virgule mal placée compte, un temps de travail de consultation et d’élaboration est plus que nécessaire ; or seule pourrait le faire une délégation interministérielle à l’économie sociale placée auprès du Premier ministre.

M. le Rapporteur : Monsieur le Premier ministre, je vous remercie de la clarté de vos explications.

M. Michel ROCARD : Monsieur le rapporteur, je vous remercie de cet accueil. Vous vous êtes rendu compte que je m’étais passionné pour ce sujet auquel je ne connaissais rien avant. C’est une vraie grande bataille et elle mérite d’être menée. Je suis très sensible au fait que le Parlement français, partant d’un incident délinquant limité, prolonge son questionnement à des problèmes d’intérêt général de haute importance.


Source : Assemblée nationale (France) : http://www.assemblee-nationale.fr