Présidence de M. Alain TOURRET, Président

Mme Bails est introduite.

M. le président lui rappelle que les dispositions législatives relatives aux commissions d’enquête leur ont été communiquées. A l’invitation du président, Mme Bails prête serment.

M. le Président : Madame, notre commission souhaite être éclairée sur les liens qui peuvent exister entre la MNEF et ses dirigeants ou anciens dirigeants et la Fondation santé des étudiants de France. Je vous donne la parole pour un exposé liminaire au cours duquel vous pourrez présenter cette fondation et son fonctionnement. Nous aurons ensuite un échange.

Mme Marie-José BAILS : La Fondation santé des étudiants de France, santé, étude et formation des jeunes, créée en 1923 à l’initiative de l’UNEF, a pour tâche de concourir à la protection de la santé des étudiants, des élèves des enseignements du second degré et technique, ainsi que des jeunes travailleurs susceptibles de bénéficier de l’organisation scolaire de ces établissements, contre toute maladie à évolution prolongée. Elle leur assure les soins nécessaires, la continuation de leurs études ou les formations générales utiles pour leur promotion sociale, assortis, le cas échéant, de tout moyen de formation professionnelle. Ces tâches comprennent notamment la création et la gestion d’établissements sanitaires.

A l’origine, la Fondation a été créée pour faire face au fléau de la tuberculose. Aujourd’hui, nous sommes plutôt adaptés à l’évolution des problèmes des jeunes, en particulier le handicap et la psychiatrie.

Concernant le bilan et les perspectives de la Fondation, le projet d’entreprise définissait l’orientation de l’activité au profit des lycéens, des étudiants et jeunes travailleurs, ce qui n’était pas acquis. Il y a cinq ans seulement, 50 % des jeunes fréquentaient nos établissements. Aujourd’hui, nous avons atteint les 80 % par une consolidation de l’assise sanitaire en médecine active de soins de suite et de réadaptation, par une affirmation renouvelée du rôle central de la pédagogie dans la prise en charge des patients, par la mise en œuvre de prises en charge complémentaires à celle de nos établissements, visant à assurer, à l’issue de la période d’hospitalisation, une réinsertion pédagogique, professionnelle et sociale de nos patients, par la mise en œuvre également de prises en charge plus légères à vocation de prévention secondaire, fondées essentiellement sur des entretiens de courte durée destinés à établir un bilan et une orientation pour les patients.

La mise en œuvre de ces orientations dans nos établissements a eu de grandes conséquences sur le plan pratique. La redéfinition de la politique médicale de la plupart de nos établissements en a été, très certainement, le principal moteur. Celle-ci s’est traduite par une augmentation des moyens médicaux et par des reconversions de moyens logistiques au profit de moyens soignants. Elle a conduit à une réactualisation complète de nos agréments avec mise en conformité par rapport à une pratique. Elle a généré, avec l’inscription dans les schémas régionaux, une diminution du nombre de lits, une augmentation des alternatives à l’hospitalisation, une plus grande proximité des recrutements et une diminution de la durée moyenne des séjours, avec des conséquences sur les prises en charge pédagogiques. Elle a conduit à moderniser les plateaux techniques et hospitaliers des établissements, processus qui a sans doute pesé le plus lourdement sur la gestion de la Fondation pendant ces années, aux plans technique, humain et financier.

Les aspects institutionnels ont été le deuxième facteur important du changement.

Ils se sont traduits par le renforcement de la place des enseignants dans les instances de la Fondation, avec la présence du représentant des enseignements au bureau, du représentant des directeurs au conseil d’administration, par la création d’un comité pédagogique destiné à éclairer les choix du conseil d’administration en cette matière, par la transformation de la plupart des postes d’encadrement en postes de proviseur adjoint et de proviseur, par la généralisation des postes à profil et par la participation de plus en plus fréquente et de plus en plus dense des enseignants au développement des nouveaux projets menés par la Fondation.

Mais ils ont également conduit à la modernisation du fonctionnement statutaire et réglementaire de notre Fondation - le règlement intérieur ayant été approuvé par les pouvoirs publics en 1996 - au souci d’améliorer l’accueil des patients, avec notamment en 1997 l’élaboration d’un livret d’accueil du patient, au lancement du chantier PMSI et à la participation de la Fondation à l’élaboration de ce PMSI en soins de suite, en réadaptation et en psychiatrie, avec l’obtention d’un DIM central.

La Fondation est restée dans le cadre de la convention collective FEAT du 31 octobre 1951, qui préserve l’essentiel des acquis sociaux malgré la mise en place du plan Juppé.

Conjointement et malgré les tensions intervenues en février 1997, le dialogue social a été maintenu à un bon niveau.

Des actions institutionnelles ont également été menées en matière de communication avec la mise en place d’une charte graphique commune à tous les établissements, d’une plaquette de présentation de la Fondation et par la participation de la Fondation à de multiples manifestations.

Nous avons développé une politique ayant abouti à la reconnaissance institutionnelle de la Fondation en matière de prise en charge de l’insertion des handicapés, et notamment auprès de l’AGEFIPH. Cette nouvelle activité a notamment permis de générer, en 1997, un nouveau service de la Fondation, qui est le SAS d’Olonne.

L’avenir de la Fondation résulte de la confrontation entre des objectifs stratégiques et un plan d’action avec la réalité du paysage sanitaire et social des prochaines années. Le projet a été proposé au conseil d’administration renouvelé. Comme le projet d’entreprise précédent, celui-ci s’inscrit dans la continuité des actions menées, car le cycle de transformation dans le secteur sanitaire reste long, même si l’environnement législatif, réglementaire et financier, évoluant de façon très contraignante, a forcé le rythme de transformation des établissements.

Ce projet d’entreprise a été largement diffusé aux membres du conseil d’administration. Il suffit donc de rappeler ici ses principales caractéristiques. Tout d’abord, poursuivre les opérations engagées, notamment le développement des alternatives à l’hospitalisation et le processus de création d’une culture d’entreprise...

M. le Président : Chère madame, je me permets de vous interrompre. Je vois que vous avez un rapport écrit que vous allez nous communiquer. Mais ce sont là des considérations générales. J’aimerais que vous nous parliez des rapports entre la Fondation et la MNEF.

Mme Marie-José BAILS : J’ai, pour ma part, eu une mission, qui a justement été de resserrer les liens et le développement entre la MNEF et la Fondation. Nous travaillons sur le même terrain qui est, bien sûr, la santé et les jeunes. Je ne sais que vous dire. Peut-être pourriez-vous poser des questions ?

M. le Rapporteur : Lorsque vous avez été nommée administrateur de la Fondation santé des étudiants de France, était-ce au titre de la MNEF ?

Mme Marie-José BAILS : Bien sûr !

M. le Rapporteur : Etait-ce en tant que représentante de la MNEF au sein de la Fondation ?

Mme Marie-José BAILS : Oui, c’était une façon de mettre un pied dans la Fondation et de prendre contact. Il faut dire que j’étais intéressée par ces questions, étant donné que je suis moi-même mère d’un enfant handicapé. Je me suis dirigée en particulier vers l’insertion des jeunes handicapés. J’avais donc une mission à la Fondation...

M. le Rapporteur : C’est une mission qui vous avait été confiée par la MNEF ou par la Fondation ?

Mme Marie-José BAILS : Par la MNEF, de façon à resserrer les liens puisqu’il y a des liens institutionnels et statutaires entre les deux.

M. Jean-Pierre BAEUMLER : Vous y étiez en tant qu’étudiante ?

Mme Marie-José BAILS : Non, en tant que personnalité qualifiée.

M. le Rapporteur : Vous étiez au conseil d’administration de la MNEF en tant que personnalité qualifiée. Sur proposition de qui ?

Mme Marie-José BAILS : Au départ, les choses sont venues tout naturellement. Je connaissais M. Spithakis qui s’intéressait beaucoup à ces questions et, compte tenu des problèmes que je vivais ...

M. Jean-Paul BACQUET : C’est M. Spithakis qui a considéré que vous aviez une qualification en la matière ?

Mme Marie-José BAILS : J’ai aussi pris contact avec l’ex-présidente, Mme Marie-Dominique Linale, qui, au fur et à mesure des contacts et de l’intérêt que je portais à ces questions ...

M. le Rapporteur : A l’époque où vous êtes entrée au conseil d’administration de la Fondation santé des étudiants de France, quelles fonctions M. Spithakis y exerçait-il ?

Mme Marie-José BAILS : Il était président. Je suis entrée au conseil d’administration de la Fondation et c’est ainsi que j’ai commencé à m’intéresser à toutes ces questions, bien sûr.

M. Jean-Pierre BAEUMLER : Depuis combien de temps êtes-vous à la Fondation ?

Mme Marie-José BAILS : Depuis 1997. J’en suis la présidente.

Mme Catherine PICARD : C’est une fonction bénévole ?

Mme Marie-José BAILS : Totalement bénévole. C’est le cas de tout le conseil d’administration d’ailleurs.

M. Jean-Paul BACQUET : La Fondation est-elle subventionnée par la MNEF ?

Mme Marie-José BAILS : Non.

M. Jean-Paul BACQUET : Aucune aide ?

Mme Marie-José BAILS : Il y a des partenariats.

M. Jean-Paul BACQUET : Il n’y a aucune participation financière ?

Mme Marie-José BAILS : Je ne pense pas. Il sera difficile pour moi de vous répondre de façon précise car je m’intéresse aux questions plus philosophiques que techniques au sein de la Fondation, comme à la MNEF d’ailleurs.

M. Jean-Paul BACQUET : Quelles sont les ressources de la Fondation ?

Mme Marie-José BAILS : Elles proviennent des DASS. Nous avons un budget qui se situe entre 700 et 800 millions de francs par an.

M. Jean-Paul BACQUET : Ce sont les DASS qui vous subventionnent ?

Mme Marie-José BAILS : Oui.

M. Jean-Paul BACQUET : Avez-vous la responsabilité de la gestion de ce budget ?

Mme Marie-José BAILS : Bien sûr, j’ai une responsabilité.

M. Jean-Paul BACQUET : Avez-vous un directeur dans cette Fondation ?

Mme Marie-José BAILS : Oui, nous avons un directeur ainsi qu’un bureau, une direction générale et des comités consultatifs.

M. Jean-Paul BACQUET : Quelle formation a ce directeur ? Une école de commerce ?

Mme Marie-José BAILS : Il est diplômé d’HEC. C’est un très fin technicien et une personne de grande qualité.

M. le Rapporteur : En tant qu’administrateur à la fois de la MNEF jusqu’en 1998 et de la Fondation santé, depuis 1998, quelle est votre appréciation sur ce qu’on a appelé l’affaire de la MNEF ? Pourquoi y a-t-il eu une telle affaire ? Quel est votre sentiment à ce sujet ?

Par ailleurs, avez-vous le sentiment que le fait que votre prédécesseur, en tant que président, ait été directeur général de la MNEF au moment où cela commençait à s’agiter sérieusement, a porté préjudice à la Fondation santé des étudiants de France ?

Mme Marie-José BAILS : Non, cela n’a pas été le cas, pour la simple raison que mon prédécesseur, M. Spithakis, a très vite démissionné de son poste de président, justement pour éviter que la Fondation ne soit prise elle aussi dans la tourmente médiatique.

M. le Rapporteur : A-t-il encore des fonctions au sein de la Fondation ?

Mme Marie-José BAILS : Oui, il est administrateur et participe donc au conseil d’administration. Il est vrai, c’est important de le dire, que je continue à travailler encore avec lui, étant donné qu’il est mon prédécesseur et que mes actions s’inscrivent dans la continuité des axes stratégiques qui ont été décidés de la Fondation. Nous travaillons toujours à son développement et à ses évolutions et, bien sûr, en tant qu’ex-président, M. Spithakis m’aide parfois à travailler sur certains dossiers.

M. Jean-Paul BACQUET : Vous siégez au conseil d’administration de la MNEF en tant que personne qualifiée ?

Mme Marie-José BAILS : Non, je n’y suis plus.

M. Jean-Paul BACQUET : Vous avez siégé au conseil d’administration de quelle année à quelle année ?

Mme Marie-José BAILS : Au même moment que pour la Fondation, depuis 1997 jusqu’au renouvellement du bureau.

M. le Rapporteur : Votre curriculum vitae ne fait pas état de cette concomitance puisqu’il vous mentionne comme administrateur de la Fondation santé des étudiants de France depuis 1998 et de la MNEF depuis 1997. Ce n’était pas tout à fait en même temps.

Mme Marie-José BAILS : Pour la MNEF, je suis sûre de la date, 1997. Mais comme je travaillais beaucoup avec la Fondation ... il est vrai que pour la Fondation, j’étais secrétaire générale en 1998, non, je suis désolée, c’était en 1997.

M. Jean-Paul BACQUET : En tant que personne qualifiée, vous avez siégé au conseil d’administration de la MNEF un ou deux ans maximum ?

Mme Marie-José BAILS : Oui.

M. Jean-Paul BACQUET : Donc, vous avez siégé régulièrement au conseil d’administration de la MNEF ?

Mme Marie-José BAILS : Oui, régulièrement.

M. Jean-Paul BACQUET : Comment avez-vous vécu ces conseils d’administration ? Comme des séances d’enregistrement ?

Mme Marie-José BAILS : Non, pas du tout. C’était des réunions riches en débats.

M. Jean-Paul BACQUET : Considérez-vous que les élus du conseil d’administration avaient toute compétence pour apprécier ce qui se passait à la MNEF ? Considérez-vous que, lorsque le commissaire aux comptes présentait les comptes, les élus du conseil d’administration avaient toute compétence pour prendre en considération les conclusions qui leur étaient présentées et les apprécier à leur juste valeur ?

Mme Marie-José BAILS : Je pense que les élus étudiants jouaient bien leur rôle, malgré tout. Peut-être dans les limites de leurs compétences, effectivement.

M. Jean-Paul BACQUET : Combien de temps en moyenne, les séances du conseil d’administration duraient-elles ? Etaient-elles très animées par de nombreuses questions ?

Mme Marie-José BAILS : Elles duraient au minimum deux heures, me semble-t-il, au cours desquelles des questions étaient posées. Il y avait un ordre du jour et le conseil d’administration était là pour voter les décisions qui devaient être prises à ce moment-là.

M. Jean-Pierre BAEUMLER : En tant qu’administrateur de la MNEF touchiez-vous une indemnité ?

Mme Marie-José BAILS : Oui, une indemnité d’un montant de 6 100 F.

M. le Rapporteur : A titre personnel, avez-vous eu des activités ou des intérêts dans une quelconque des soixante-dix filiales de la MNEF ?

Mme Marie-José BAILS : Non.

M. le Rapporteur : A aucun moment ?

Mme Marie-José BAILS : A aucun moment. C’était d’ailleurs un sujet peu évoqué dans le conseil d’administration.

M. le Rapporteur : On ne parlait pas des filiales dans le conseil d’administration ?

Mme Marie-José BAILS : Si, quand il fallait voter des budgets. Mais il y a eu très peu de débats techniques.

M. le Président : C’était très philosophique. Vous nous l’avez dit.

M. Jean-Paul BACQUET : Lorsque l’" affaire " médiatique a éclaté, comment avez-vous vécu cela au conseil d’administration ? Y a-t-il eu des questions particulières ? Est-ce que tout le monde savait ?

Mme Marie-José BAILS : Des questions ont été effectivement posées au conseil d’administration. Et M. Spithakis a, à ce moment-là, donné vraiment toutes les réponses.

M. Jean-Paul BACQUET : Par exemple, tout le monde était-il au courant que la MNEF avait, par l’intermédiaire de ses filières, des parts sur un bateau ou l’avez-vous appris à ce moment-là ? Cela a-t-il suscité une réflexion, une interrogation ou une approbation ?

Mme Marie-José BAILS : Je ne peux pas vous dire que cela s’est passé sans problème. Comme je le disais précédemment, il y a eu des questions, des interrogations, et M. Spithakis a su donner toutes les réponses. Mais il n’y a pas eu d’interrogations profondes.

Ensuite, avec tout le problème médiatique qui tournait autour de la MNEF, tout a basculé dans une autre atmosphère, une tension terrible. Il y a eu tout un remaniement.

M. Jean-Paul BACQUET : Personnellement, étiez-vous au courant de l’histoire du bateau ?

Mme Marie-José BAILS : Oui, cela a été évoqué. Je lis les journaux comme tout le monde.

M. Jean-Paul BACQUET : Mais avant ?

Mme Marie-José BAILS : Avant, non.

M. le Rapporteur : Qu’est-ce qui, selon vous, a justifié que M. Spithakis vous choisisse comme administrateur de la MNEF ?

Mme Marie-José BAILS : Je pense que la société civile a aussi un rôle à jouer.

M. le Rapporteur : Aviez-vous auparavant des responsabilités associatives ?

Mme Marie-José BAILS : Bien sûr ! J’ai toujours eu des activités, des responsabilités dans le monde associatif.

M. le Rapporteur : Quel type de responsabilité aviez-vous ? Dans quelles associations ?

Mme Marie-José BAILS : Avant la MNEF, j’ai eu des responsabilités dans la vie associative, de par mon enfant qui m’a amenée à m’investir dans le monde associatif, notamment dans tout ce qui concerne les établissements et le handicap en général, et la vie associative dans un sens plus large, que ce soit avec l’école, la fédération des parents d’élèves, etc.

M. le Rapporteur : C’est à l’occasion de ces activités associatives que vous avez rencontré des dirigeants de la MNEF ?

Mme Marie-José BAILS : J’ai eu l’occasion de rencontrer des dirigeants de la MNEF, mais avant tout, je connaissais M. Spithakis qui, compte tenu de ma situation, m’a offert cette opportunité au sein de la Fondation, il faut dire que lui-même s’investit terriblement sur tout ce qui est insertion des jeunes, en général. C’est presque un hobby pour lui. Il a aussi une dimension humaine qui a fait qu’il s’est intéressé à mon cas.

M. le Président : Madame, je tiens à vous remercier. La commission fera sienne vos observations et s’en servira dans le cadre de son rapport.


Source : Assemblée nationale (France) : http://www.assemblee-nationale.fr