Les trois groupes de l’opposition parlementaire représentés au sein de la Mission d’information sur les opérations militaires menées par la France, d’autres pays et l’ONU au Rwanda, entre 1990 et 1994, après avoir très largement participé aux travaux de la Mission, ont pris connaissance du volumineux rapport qui leur a été soumis les dimanche 13 et lundi 14 décembre, à huis clos.

La lecture de ce rapport qui, pour une large part, recueille l’adhésion de ces groupes, soulève cependant de nombreuses objections de fond qui empêchent l’approbation du rapport en l’état.

Les parlementaires RPR, UDF et Démocratie Libérale, présents au sein de la Mission, tiennent tout d’abord à souligner les divers aspects positifs du rapport présenté.

La qualité et l’importance des travaux de recherches et d’investigations doivent être, dès l’abord, soulignées. Il convient d’y ajouter le caractère objectif de la démarche suivie pour tout ce qui concerne l’analyse des divers éléments constitutifs du drame rwandais.

L’objectivité de la démarche des rapporteurs et la qualité d’un compte rendu exhaustif des travaux, débouchent sur plusieurs constats qu’il y a lieu de mettre en exergue.

Dans la tragédie rwandaise, la France seule, contrairement à la quasi totalité de la communauté internationale, n’a pas failli. Son action, au cours des années ayant précédé le drame, avait notamment permis l’aboutissement des accords d’Arusha et la mise en place du seul gouvernement de coalition nationale ayant jamais existé dans ce pays. Son intervention en 1994, volontairement placée sous l’égide des Nations Unies, a sûrement limité l’ampleur du génocide.

L’Armée française quant à elle, sollicitée et engagée par les autorités politiques du pays dans toutes sortes de missions allant de la mise en sécurité armée de sites, de villes et de régions, aux actions humanitaires les plus difficiles, a assumé ces missions et responsabilités avec honneur et efficacité.

Au total, notre pays peut et doit être fier de l’action qu’il a conduite dans ce malheureux pays.

A côté de ces aspects positifs, le travail des rapporteurs comporte plusieurs éléments et propositions considérés par les parlementaires RPR et UDF et Démocratie Libérale, comme inacceptables.

En premier lieu, la tonalité de l’introduction favorise une tendance à rejeter sur la France la responsabilité des événements qui ont conduit au génocide. Or, selon nous, les trois premières parties montrent que, sous réserve d’erreurs partielles, la France a fait ce qu’elle a pu, sans être appuyée ou aidée par quiconque, notamment par les puissances européennes ou par les Etats-Unis. Par contre, le rapport est accablant sur le comportement de l’Organisation des Nations Unies, indépendamment des responsabilités qui incombent aux membres du Conseil de sécurité lors du vote des résolutions. La faillite de l’ONU dans une crise comme celle du Rwanda rejoint les analyses qui ont pu être faites par ailleurs sur les interventions des Nations Unies en Somalie ou dans l’ex-Yougoslavie. La tonalité de l’introduction constitue donc un premier motif de refus d’approbation du rapport.

Est ensuite tout à fait contestable la publication des auditions à huis clos. Le principe de cette publication a été soumis à l’approbation de la Mission. Les parlementaires RPR, UDF et Démocratie Libérale considèrent que le huis clos, qui a été proposé à certaines personnalités auditionnées, empêche de facto toute publication. Ces parlementaires en font une question de principe.

Par ailleurs, et s’agissant de l’analyse des faits, les parlementaires des deux groupes constatent que le rapport ne tire pas explicitement les conclusions positives pour la France que cette analyse fait pourtant apparaître.

Les propositions abondantes qui accompagnent le rapport appellent quant à elles les plus expresses réserves à la fois sur le plan de l’opportunité et quant à leur contenu.

Sur le plan de l’opportunité, on peut s’interroger sur le fait de savoir s’il entre dans l’objet même d’une mission d’information très précisément définie, d’introduire des propositions allant jusqu’à la réforme de la Constitution, la modification de l’ordonnance de 1959 portant organisation générale de la Défense ou le fonctionnement des services de renseignements français.

De telles propositions apparaissent comme étrangères à l’objectif même de la Mission et inacceptables dans un tel contexte.

En tout état de cause, elles reflètent à l’évidence un positionnement politique auquel les parlementaires de l’opposition ne sauraient souscrire.

En conséquence, les parlementaires RPR, UDF et Démocratie Libérale ont voté contre l’approbation du rapport.


Source : Assemblée nationale. http://www.assemblee-nationale.fr