Le groupe communiste approuve le rapport de la Mission d’information, eu égard notamment aux propositions qu’il contient, même s’il estime que la question reste ouverte des pouvoirs plus importants d’une commission d’enquête pour procéder à des investigations plus profondes, et que la publication partielle des auditions à huis clos pourrait être cause d’un doute dommageable.

Les leçons à tirer de ce rapport sont d’abord qu’il y a une responsabilité collective et que celle-ci ne doit pas être située d’abord sur un plan militaire mais sur un plan de politique générale à l’égard de l’Afrique. Si la France ne peut s’extraire de cette responsabilité collective, il ne serait cependant ni juste ni sain qu’elle la supporte essentiellement car il y a bien eu abandon de la communauté internationale.

L’échec est celui d’une politique : l’échec du recours à la force pour régler des problèmes humains. De ce point de vue, le rapport ne fait pas suffisamment ressortir que c’est la misère et la pauvreté qui sont à la base des problèmes de l’Afrique, même si d’autres facteurs se sont greffés sur ces réalités.

Face à cette affirmation de fond, les propositions de la Mission d’information paraissent tout à fait positives au groupe communiste, et concernent bien les points sur lesquels il est urgent d’avancer : transparence et cohérence dans les choix et la conduite des actions ; rôle du Parlement et son association aux décisions, approfondissement de la question de la coopération, sécurité africaine et conditions de l’assistance, rôle et efficacité de l’ONU, établissement d’une juridiction pénale internationale.

S’agissant de la misère, le maintien d’un flux d’aide substantiel évoqué par le rapport paraît sous-estimer la question du volume de l’aide et de ce fait ne pas poser la vraie question qui est celle de l’ampleur des moyens nécessaires pour sortir un milliard d’êtres humains, et plus, de la misère. A-t-on ces moyens ? Peut-on se les donner et comment ? Mieux aborder cette question aurait sans doute permis d’éviter de se pencher trop longuement sur la question de l’aide militaire, qui, si elle a sa place, n’est cependant pas centrale dans les problèmes africains, et donc pas davantage pour le Rwanda.

Ce rapport devrait donc être une incitation plus forte à débattre de la redéfinition de notre politique de coopération et à porter ce débat au plan international. C’est un des grands enjeux du siècle prochain. Il ne s’agit pas tant de fabriquer des forces pour étouffer l’expression multiforme des misères ou leur exploitation que de donner plus d’ampleur à l’aide économique, sociale et culturelle pour les peuples qui en ont besoin, sans distinction.

Le groupe communiste note également que sont constatées les limites de la conception qui confie à un homme ou à un petit groupe d’hommes, sans intervention du Parlement, la gestion de situations qui sont lourdes.

De ce point de vue, chaque fois qu’on élargit le cercle de l’information, de l’association aux décisions et du contrôle, on crée un peu plus de démocratie. Que ces questions soient posées dans ce rapport et qu’elles fassent l’objet de propositions de modification de la Constitution est extrêmement important.

En ce qui concerne le domaine militaire, l’assertion aux termes de laquelle le traité d’Amsterdam ouvre de nouvelles perspectives pour la paix avec le développement du rôle du représentant de l’Union semble bien inutile. Il paraît préférable de s’en tenir à un cadre rigoureux pour toute intervention c’est-à-dire un mandat du Conseil de sécurité de l’ONU en coordination avec l’OUA. Ceci n’excluant pas la concertation au niveau de l’Europe.

Enfin, il faut s’interroger sur quatre des points traités par la Mission d’information : le caractère prévisible ou non des événements, l’encadrement des FAR par l’armée française, l’attentat contre l’avion présidentiel et les livraisons d’armes. Sur ces quatre points il faut constater qu’après le travail de la Mission d’information il reste bien des zones floues. C’est à ce propos que l’on peut s’interroger sur les possibilités plus importantes d’investigation d’une commission d’enquête.

Devant les questions encore en suspens il serait souhaitable que le tribunal d’Arusha dispose de moyens accrus pour accélérer l’enquête sur les faits qui lui sont soumis.

Ces réserves émises, le groupe communiste approuve le rapport de la Mission d’information eu égard notamment à la qualité des propositions qu’il formule, car dans cette affaire l’un des objectifs majeurs de cette Mission n’était-il pas de savoir tirer les leçons d’un effroyable drame humain ?


Source : Assemblée nationale. http://www.assemblee-nationale.fr