« La démocratie minée »

Democracy undermined
Washington Times (États-Unis)

[AUTEUR] Vétéran de la guerre du Vietnam, Al Santoli a publié plusieurs best-sellers d’interviews d’anciens combattants. Il est assistant du représentant Dana Rohrabacher (Rep - Californie). Il est aujourd’hui vice-président de l’American Foreign Policy Council et directeur de l’Initiative Asie-Pacifique dans cette organisation. À ce titre, il est rédacteur en chef des hebdomadaires China Reform et Asia Security Monitors.

[RESUME] Aung San Suu Kyi est emprisonnée par la junte militaire birmane. Ce régime est en place depuis une décennie et maintient une situation de guerre permanente contre son peuple. S’il se maintient au pouvoir, c’est grâce à l’aide de la Chine communiste.
La République populaire de Chine a forgé une alliance militaire et politique avec tous les régimes militaire et les dictatures de la région : le Pakistan, la Birmanie, le Laos, le Cambodge et la Corée du Nord. Ces alliances ont un triple objectif : empêcher l’émergence d’un mouvement démocratique qui pourrait encourager les démocrates chinois, encercler l’Inde et empêcher les États-Unis d’installer de nouvelles bases en Asie. L’alliance entre le Pakistan, la Chine et la Birmanie menace les démocraties asiatiques. Le rapport annuel de l’année 2003 du ministère de la Défense indien estime que la situation dans la région est désormais à l’avantage de la Chine.
Cette coalition déstabilise également la région en soutenant le terrorisme et le trafic de drogue. La Chine a une politique à deux niveaux : elle négocie pour laisser les pays voisins espérer un compromis, tout en développant sa présence militaire dans la région en s’appuyant sur la Birmanie. C’est dans ce contexte qu’on évoque de plus en plus la présence d’Al Qaïda à la frontière entre la Birmanie et la Thaïlande, dans la région contrôlée par les trafiquants de drogues.
L’action de la Chine pourrait entraîner une situation où les États-unis n’ont plus de véritables alliés dans la région. Les États-Unis doivent donc mettre en place une politique de sécurité en Asie qui soutienne des mouvements démocratiques.

« La démocratie pour la Birmanie »

Democracy for Burma
International Herald Tribune (États-Unis)

[AUTEUR] Jose Ramos-Horta qui a reçu le Prix Nobel de la Paix en 1996 est ministre des Affaires étrangères du Timor oriental.

[RESUME] Le régime militaire birman ne doit pas seulement relâcher Aung San Suu Kyi et ses partisans et rouvrir les bureaux de son parti, il doit accepter une restauration de la démocratie en Birmanie.
Les attaques contre la Prix Nobel de la Paix sont conduites par les durs du régime qui s’opposent aux membres plus tolérants de la junte. Moi et beaucoup d’autres nous inquiétons de son sort et de celui de sa centaine de partisans incarcérés. Les ministres des Affaires étrangères de l’ASEAN, organisation dont la Birmanie est membre, ont brisé un tabou en se mêlant de ce qu’ils considèrent généralement comme une « affaire intérieure » et en demandant la libération d’Aung San Suu Kyi. La Chine et le Japon, en tant que puissances régionales, doivent travailler avec l’Indonésie, présidente actuelle de l’ASEAN pour favoriser la restauration de la démocratie. L’ONU doit travailler en collaboration avec l’organisation asiatique. Les États-Unis et l’Union européenne doivent répondre à chaque pas en direction de la démocratie par une levée partielle des sanctions contre la Birmanie.
Il faudra encourager l’installation d’un système fédéral pour éviter les tensions ethniques. L’ASEAN souffre d’un manque de crédibilité à cause de la répression en Birmanie et il faut sortir de cette impasse.

« Une question d’ordre »

Point of order
Al Ahram (Égypte)

[AUTEUR] Abdallah El-Ashaal est assistant au ministère égyptien des Affaires étrangères.

[RESUME] La période suivant l’attaque états-unienne contre l’Irak offre la possibilité de reconfigurer un ordre arabe affaibli par la conquête irakienne du Koweit, l’incapacité des Arabes à réconcilier l’Irak et ses voisins et à empêcher Washington d’attaquer Bagdad. Aujourd’hui, quoi qu’on pense de la guerre, il faut admettre que le régime irakien a été un des obstacles majeurs à la reconstruction d’un ordre arabe et d’une sécurité collective.
Après la guerre, on peut craindre la constitution d’une alliance entre les États-Unis, Israël, l’Irak, la Turquie et la Jordanie qui irait à l’encontre des intérêts arabes et relancerait les plans israéliens de domination de la région. Il semble qu’Israël et la Turquie aient déjà désigné leur prochaine cible : la Syrie. Cette dernière fait déjà l’objet d’accusations proches de celles qui ont été lancées contre l’Irak.
Sans unité arabe, le scénario irakien se répètera en Syrie et déstabilisera toute la région, ce qui est le but ultime de la campagne. Le monde arabe doit donc être uni derrière la Syrie, un pays qui n’est pas l’Irak, qui est engagé dans une profonde réforme sociale et politique et qui est sincère dans son attachement à la cause arabe. Les accusations de soutien au Hezbollah et aux organisations de résistance palestinienne ne doivent pas être un motif de honte, mais une preuve de l’engagement syrien pour la cause arabe.
L’affrontement serait contre-productif, aussi les Arabes doivent soutenir le dialogue entre Damas et Washington tout en revigorant le système de coopération arabe.

« L’Europe oublie les origines d’Israël »

Europe forgets Israel’s origins
International Herald Tribune (États-Unis)

[AUTEUR] Fania OzSalzberger est historienne à l’Université d’Haïfa et membre du Conseil public de l’Israeli Democracy Institute

[RESUME] Silvio Berlusconi a affirmé dernièrement qu’il était favorable à l’admission d’Israël dans l’Union européenne, une position que peu d’Européens et d’Israélien considèrent comme réaliste. L’image d’Israël s’est sérieusement détériorée en Europe. Les Israéliens sont divisés entre ceux qui s’irritent de l’hostilité européenne à leur égard et ceux qui trouvent qu’Ariel Sharon ne les représente pas bien et qui espèrent plus de compréhension de la part des Européens.
S’il ne l’est pas géographiquement, Israël est européen historiquement et culturellement. 50 % de la population israélienne est de première deuxième ou troisième génération européenne. Le Sionisme est né en Europe au moment de l’affaire Dreyfus et Israël est aussi un lieu où s’expriment, pour le meilleur ou pour le pire, des idées nées en Europe, comme le nationalisme, la démocratie et le souhait de justice sociale. La tradition de débat juive est également européenne.
Il existe également beaucoup de francophones en Israël. L’Europe doit ouvrir un dialogue culturel et historique avec Israël avant peut-être de mettre en place un dialogue politique.

« L’Amérique et l’Europe ne doivent pas être rivales »

America and Europe need not be rivals
The Independant (Royaume-Uni)

[AUTEUR] Denis MacShane est le ministre britannique travailliste des Affaires européennes. Cette tribune est adaptée d’un discours prononcé par le ministre britannique devant le Royal Institute for International Affairs.

[RESUME] Au XIXème siècle, Victor Hugo affirmait, qu’un jour, l’idée même d’une guerre entre pays européens serait aussi absurde que les guerres entre Rouen et Amiens ou entre Boston et Philadelphie. Il nous a fallu attendre ce moment, mais nous y sommes parvenus. Pour en être sûr, l’Europe ne cherchera jamais à développer la même puissance militaire que les États-Unis.
Parler d’un monde multipolaire renvoie à la Guerre froide et aux sphères d’influence du XIXème siècle. C’est envoyer l’Europe dans la mauvaise direction. L’Europe et les États-Unis doivent être partenaires, pas rivaux.
Aujourd’hui, l’Union européenne déploie des forces dans les Balkans et développe une législation antiterroriste. Ce n’est pas encore parfait, mais cela démontre qu’elle accepte enfin ses responsabilités.