Il est de bon ton à Washington de s’indigner du massacre des partisans d’Aung San Suu Kyi et de l’incarcération du Prix Nobel de la paix par la junte birmane. Cependant, nul n’assume les liens qui unissent le régime dictatorial le plus cruel de la planète avec l’Occident comme avec ses voisins. Le comble de l’hypocrisie est atteint par Al Santoli dans le Washington Times. Cet analyste assure sans rire que la junte birmane, comme le régime militaire pakistanais, seraient des créatures de la Chine communiste dirigés contre les États-Unis. Et s’il existe des violences parmi les populations bouddhistes et chrétiennes de Birmanie et de Thaïlande, se serait la faute d’Al Qaïda. Loin de cette absurde langue de bois, Jose Ramos-Horta élude la question des responsabilités extérieures pour se concentrer pragmatiquement sur ce qui peut être fait afin d’améliorer la situation. Dans l’International Herald Tribune, il se félicite de la prise de position de l’ASEAN sur la situation intérieure birmane et préconise une action concertée des États membres de l’ASEAN et des Occidentaux pour faire pression sur la junte.
Abdallah El-Ashaal constate dans Al-Ahram que, de facto, le régime de Saddam Hussein avec ses prétentions extravagantes était le principal obstacle à l’unité arabe. Il espère que son renversement par la Coalition n’ouvrira pas une ère états-unienne au Proche-Orient, mais au contraire suscitera l’unité arabe face à l’ingérence extérieure. La question est d’autant plus vive qu’un axe USA-Israël-Turquie-Irak-Jordanie semble en cours de formation pour attaquer la Syrie et le Hezbollah.
Fania OzSalzberger s’interroge dans l’International Herald Tribune sur la réticence des Européens à envisager l’adhésion d’Israël à l’Union. Il rappelle que la moitié de la population de l’État hébreu est d’origine européenne et que le concept même de l’État d’Israël est né en Europe. Israël appartient donc culturellement à l’Europe et est fondé à vouloir y appartenir aussi politiquement. La candidature d’Israël, qui est bloquée par la détérioration de son image aux yeux des Européens, pourrait avancer formellement au cours de la présidence italienne de l’Union. Cette idée a en effet été énoncée par Emma Bonino, puis reprise à son compte par Silvio Berlusconi. On observera que ce projet, clairement soutenu en sous-main par Washington comme l’était celui d’adhésion de la Turquie jusqu’à la rebuffade d’Ankara à propos de l’Irak, contredit la proposition officielle du département d’État de créer un « marché commun proche-oriental ». Il pose aussi la question de l’indépendance de l’Union face aux États-Unis, notamment après l’adhésion de nouveaux membres tous dévoués à Washington, comme la Pologne.
Dennis McShane a précisément présenté la vision blairiste de l’Europe et du monde devant le Royal Institute for International Affairs. Dans ce texte, reproduit par The Independant, il prend acte de la supériorité militaire des États-Unis et de leur domination sans partage. Il évalue cette situation comme positive par rapport aux affrontements de la Guerre froide et qualifie en conséquence le rêve français d’un monde multipolaire de retour en arrière. Les États-Unis et l’Europe ne seraient donc pas appelés à rivaliser, mais à agir en partenaires. On observera que ce point de vue, très représentatif de la classe dirigeante britannique, se fonde sur l’idée, jadis développée par Margaret Thatcher, que le Royaume-Uni bénéficiera plus que tout autre de la puissance états-unienne dans la mesure où il partage une langue et une histoire commune avec eux. Cependant, il est en totale contradiction avec le discours économique libéral qui condamne les monopoles et valorise la libre concurrence. La concentration hégémonique, qui serait le mal absolu en matière économique, serait donc souhaitable dans le domaine politique.
Tribunes libres internationales interrompt ses parutions quotidiennes en juillet et août. Ce service du Réseau Voltaire reprendra en septembre.
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