La classe dirigeante washingtonienne sombre dans le virtualisme. Faute d’armes de destruction massive, le coordinateur des faucons, Frank. J. Gaffney Jr, a trouvé pour le Washington Times une justification a posteriori de l’agression de l’Irak par son pays : Saddam Hussein ne menaçait pas l’Amérique, il l’avait déjà frappée sans qu’on le sache ! Selon les enquêtes de deux de ses amies, c’est l’Irak qui avait commandité le premier attentat contre le World Trade Center (1993) et contre l’immeuble fédéral d’Oklahoma City (1995).
Le New York Times, qui s’est trompé avec constance sur tous les grands sujets de politique intérieure et extérieure états-unienne, renonce à toute analyse rationnelle de la campagne électorale présidentielle. Aussi donne-t-il la parole à l’astrologue Erin Sullivan pour évaluer les chances des prétendants démocrates à grand renfort de calculs ésotériques et de conjonctions planétaires. Sur cette base, il dresse un profil de chacun, qui reflète le sens commun. La méthode laisse songeur sur la « démocratie » états-unienne.

Le ministre israélien des Affaires étrangères, Silvan Shalom, plaide dans le Guardian pour que la Cour de justice de La Haye rejette la tentative palestinienne de l’instrumentaliser pour condamner la « barrière de séparation ». Il présente son point de vue comme exclusivement animé par le souci de préserver les valeurs fondamentales de l’ONU qui seraient menacées par ce qui ne serait qu’un détournement de procédure. Reste à espérer que cette noble préoccupation conduira Silvan Shalom à appliquer enfin les 600 résolutions de l’ONU qu’Israël viole quotidiennement.
L’ambassadeur Peter W. Galbraith, qui supervise le démantèlement à venir de l’Irak après avoir réalisé celui de la Yougoslavie, se souvient de son ami Sami Abdul Rahman, décédé dimanche, victime du double attentat suicide d’Erbil. Il se félicite dans le New York Times de l’unité maintenue entre les deux partis kurdes pour gérer ensemble leur région. Et regrette les pressions exercées par la Turquie, et relayées par le gouverneur L. Paul Bremer pour démanteler ce qui évoque l’embryon d’un Kurdistan indépendant. Son raisonnement le conduit à défendre la création d’une frontière kurde avec le reste de l’Irak en recyclant les arguments utilisés par Sivan Shalom pour annexer une partie de la Palestine : cette frontière serait indispensable parce qu’elle aurait pour finalité d’empêcher la pénétration de kamikazes au Kurdistan et non d’établir une souveraineté sur un territoire.

Le lieutenant-colonel Gal Luft s’inquiète de l’intrusion d’un nouveau protagoniste au Proche-Orient : la Chine qui, pour poursuivre sa croissance, doit désormais importer du pétrole. Dans le Los Angeles Times, il préconise de faire preuve de souplesse pour prévenir un éventuel rapprochement sino-saoudien qui serait préjudiciable à l’influence régionale des États-Unis.

Enfin, si nous avons été surpris par le fossé séparant les auditions de la Commission Hutton des conclusions de son président, Danny Morrison n’en a pas été surpris. L’ancien directeur de la communication de l’IRA, condamné par Lord Hutton à huit ans de prison selon une procédure d’exception, se rappelle aux bons souvenirs de ce magistrat dans le Guardian. Il en résume la carrière honteuse de défenseur de l’injustice et du désordre établis et nous rend confus de notre naïveté.