Dans la campagne opposant George W. Bush à John Kerry on peut noter que républicains et démocrates s’accordent sur l’approche du monde après le 11 septembre et que la principale différence d’analyse porte sur la doctrine des frappes préventives rejetée par Kerry.
Bush a affirmé que l’Irak, l’Iran et la Corée du Nord, en construisant des armes de destruction massive qui pouvaient être données à des terroristes, représentent un danger immédiat qui justifie une action préventive. Depuis l’énonciation de cette doctrine, on a compris que la menace avait été exagérée et que la vraie menace de prolifération ne venait pas de ces pays, mais du Pakistan, un allié des États-Unis. Elle est, de plus, apparue comme un moyen de justifier une guerre contre un régime particulier, celui de Saddam Hussein. L’Iran, qui correspond beaucoup mieux à la description du danger immédiat que l’Irak, n’est pas menacé d’invasion, pas plus que la Corée du Nord.
Dans les cas iranien et nord-coréen, comme pour la Libye, l’administration Bush a choisi d’adopter l’option qu’elle décriait tant dans l’administration Clinton : la négociation. Ayant participé aux négociations de 1999 avec la Libye, je peux affirmer que le choix libyen de renoncer à ses armes de destruction massive n’a rien à voir avec l’invasion de l’Irak.
Bien qu’elle s’en défende, l’administration Bush est en train de revenir à une forme de multilatéralisme avec un retour au soutien à l’ONU en Irak et à l’Agence Internationale de l’Energie Atomique (AIEA) en Iran. Les frappes préventives ne sont plus une doctrine, c’est une option.

Source
The Age (Australie)

« How Bush’s doctrine of pre-emption was ambushed by reality », par Martin Indyk, The Age, 26 mars 2004. Ce texte est adapté d’un discours prononcé devant la Lowy Institute for International Policy.