De 1989 à 1992, j’ai commandé la 372ième compagne de police militaire, une compagnie qui est aujourd’hui au centre du scandale de la prison d’Abu Ghraib. Autrefois motif de fierté, cette affectation est devenu un motif de honte. Nous ignorons encore exactement ce qui s’est passé mais ce qui est sûr, c’est qu’il y a eu un grave dysfonctionnement de la chaîne de commandement.
Je ne crois pas que le sergent Ivan L. Frederick soit le plus haut responsable de ces errements. Le commandant de la compagnie est directement responsable des actes commis par ses hommes, il savait donc, ou aurait dû connaître, les actes qu’ils ont commis. Tous ces dirigeants ont échoué dans leur responsabilité première : superviser leur soldat dans l’exercice de leur devoir. Si la général Janis L. Karpinski avait passé autant de temps à faire son travail qu’elle en passe aujourd’hui à affirmer sur les plateaux de télévision qu’elle ignorait tout, le problème aurait peut-être été réglé plus tôt. Par acte ou par omission, elle est responsable.
La responsabilité hiérarchique n’exonère cependant pas les soldats fautifs de leur culpabilité car ils ont failli au premier devoir de la police militaire : protéger les prisonniers ennemis une fois qu’ils ont été désarmés. Certains affirment, pour les excuser, que les soldats n’ont pas eu assez d’entraînement, mais en quoi faut-il de l’entraînement pour comprendre qu’il ne faut pas faire des piles de corps humains dénudés avec des prisonniers ? Ce qui s’est passé est bien pire que du bizutage comme certains l’affirment et nous devons être extrêmement sévères avec ceux qui ont commis ces exactions pour restaurer l’honneur de la 372ième compagnie.

Source
Washington Post (États-Unis)
Quotidien états-unien de référence, racheté en août 2013 par Jeff Bezos, fondateur d’Amazon.

« Not Just Following Orders », par James D. Villa, Washington Post, 12 mai 2004.