Salman Rushdie commente les élections indiennes dans le Washington Post, The Independent et Le Monde. Il voit dans la défaite du BJP une sanction de sa passivité face aux violences anti-musulmanes. Et il interprète la victoire du Parti du Congrès comme le fruit d’un vote protestataire issu du retour de l’antagonisme opposant les pauvres ruraux aux riches urbains. Toutefois cette tribune, largement diffusée, frappe par la prudence de son expression : le BJP, parti prônant un État hindouiste exclusif, est critiqué pour sa passivité face aux violations des Droits de l’homme, pas pour son idéologie fanatique qui a suscité ces violences. De même, il critique le Parti du Congrès pour l’autoritarisme dont il a fait preuve, il y a trente ans, et lui reproche de tirer profit du retour de la lutte des classes pourtant imputable à la politique anti-sociale du BJP.

Le prix Nobel de la paix José Ramos-Horta justifie dans le Wall Street Journal la guerre entreprise par les Etats-Unis contre l’Irak au motif qu’elle a permis de renverser la dictature de Saddam Hussein. Son analyse se fonde sur la croyance en des sondages selon lesquels les Irakiens se sentiraient plus heureux aujourd’hui. Pourtant que valent ces sondages alors que, fin mars, le peuple irakien s’est soulevé et que les forces d’occupation ont été contraintes, pour reprendre certaines villes, de les bombarder à nouveau ?
Le démocrate Joseph I. Lieberman exprime dans le même quotidien le choc qu’il a ressenti à la vision des photos de tortures en Irak. Avec une candeur déroutante, il s’interroge sur la cause de ces agissements : seraient-ils inhérents à la guerre ? ou proviendraient-ils du développement de la pornographie et de l’immoralité sur internet ? Quoi qu’il en soit, il les condamne moralement, mais n’admet pas pour autant qu’ils déstabilisent le secrétaire à la Défense, le républicain Donald Rumsfeld. Rappelons que M. Lieberman est un des parlementaires les plus engagés en faveur d’Israël et qu’il n’a jamais critiqué l’usage de la torture par Tsahal.

Christopher Whitcomb, ancien patron du Groupe de réponse aux incidents critiques au FBI, revient dans le New York Times sur l’absence de coordination entre la CIA et le FBI. C’est à tort que le public y verrait une guerre des polices, alors qu’il ne s’agit que de barrières bureaucratiques visant à prévenir des excès de pouvoir. La création d’un centre de coordination entre les deux agences n’a pas permis de résoudre les problèmes de fond. Il faut réorganiser toute la communauté du renseignement autour de trois domaines de compétence : le contre-terrorisme, la guerre et l’assistance diplomatique.
Les ministres allemand et français de la Justice, Brigitte Zypries et Dominique Perben, se félicitent dans Le Figaro de leur action commune aussi bien en matière civile que pénale. D’une manière fort malhonnête, ils utilisent les avancées concernant le règlement des problèmes matrimoniaux des couples binationaux comme des justifications de la coopération en cours en matière de guerre au terrorisme, une coopération qui inclut également les États-Unis et qui, à la suite de l’US Patriot Act, remet parfois en cause des droits fondamentaux. C’est justement sur ce point que Jimmy Carter proteste dans le Washington Post. Il affirme que la généralisation des violations des Droits de l’homme dans le monde sont la conséquence des lois anti-terroristes des États-Unis et des adaptations des systèmes juridiques des États alliés à ces lois. Il aura fallu deux ans et l’ouverture d’une campagne électorale présidentielle au Centre Carter pour en prendre conscience.

Le professeur Chris Reus-Smith de l’Australia National University s’étonne dans The Age de l’exception politique que représente le gouvernement de John Howard. Il est le seul, dans l’histoire australienne, à s’être aligné ainsi sur les États-Unis, et l’un des rares au monde à considérer que l’unipolarité actuelle est une bonne chose. Il faut admettre aujourd’hui qu’il est irresponsable de suivre Washington dans toutes ses aventures.

Enfin, le Los Angeles Times reproduit le discours du chef d’orchestre Daniel Barenboim devant la Knesset. L’artiste israélien y souligne le fossé qui sépare l’idéal des pères fondateurs d’Israël de la triste réalité actuelle. Il plaide pour un retour aux principes originels qui avaient convaincu sa famille, et bien d’autres, de devenir israélienne.