Le Conseil de sécurité a prié la Commission d’enquête internationale indépendante de lui rendre compte du déroulement de son enquête, y compris la coopération reçue des autorités syriennes.
Le présent rapport rend compte de l’évolution des différents aspects des investigations au sujet de l’assassinat de Rafic Hariri et de 17 autres affaires, dont l’assassinat en juin 2007 du membre du Parlement Walid Eido, pour lesquelles la Commission était chargée de fournir une assistance technique aux autorités libanaises.
Depuis son précédent rapport au Conseil, daté du 15 mars 2007 (S/2007/150), la Commission a poursuivi activement ses investigations mais a également réalisé un examen complet de l’ensemble des informations, résultats d’analyses et constatations en sa possession. Cet important travail, auquel a participé l’ensemble de son personnel d’enquête, a débouché sur plusieurs résultats positifs brièvement décrits dans le présent rapport. En particulier, il lui a permis d’affiner son plan de travail pour la prochaine période afin de tirer le meilleur parti de ses ressources limitées.
Au cours de la période considérée, la Commission a continué de recevoir en règle générale des réponses positives aux demandes d’assistance qu’elle a adressées au Liban, à la République arabe syrienne et à d’autres États. La coopération de l’ensemble des États reste indispensable, et la Commission lance un appel afin qu’il soit répondu favorablement à ses demandes d’assistance.
La Commission constate avec préoccupation la détérioration de la situation politique et des conditions de sécurité au Liban depuis son précédent rapport au Conseil. Bien qu’elle ait mis en place, en étroite collaboration avec les autorités libanaises, des mesures destinées à protéger son personnel et ses locaux, cette détérioration aura probablement un impact sur ses activités au cours des prochains mois.
Du fait de la création par le Conseil de sécurité, en vertu de la résolution 1757 (2007), d’un Tribunal spécial pour le Liban, la Commission a pris plusieurs mesures afin de faciliter le transfert de ses activités au Tribunal lorsque celui-ci entrera en fonctions.
I. Introduction
1. Le présent rapport est soumis en application des résolutions 1595 (2005), 1636 (2005), 1644 (2005), 1686 (2006) et 1748 (2007) du Conseil de sécurité dans lesquelles le Conseil a prié la Commission d’enquête internationale indépendante (« la Commission ») de lui faire rapport tous les quatre mois sur les progrès de l’enquête et sur les questions de coopération, y compris la coopération reçue des autorités syriennes.
2. Le présent rapport, qui est le huitième de la Commission, fait le point des questions évoquées dans les précédents rapports au Conseil et rend compte de l’évolution des travaux de la Commission depuis son dernier rapport, en date du 15 mars 2007 (S/2007/150).
3. Comme décrit dans de précédents rapports, la Commission est particulièrement consciente de son obligation d’assurer la confidentialité de ses investigations, aussi bien pour assurer l’intégrité du processus juridique que pour protéger ceux qui lui ont fourni informations et assistance. Elle bénéficie à cet égard du plein accord des autorités judiciaires libanaises.
4. Depuis le précédent rapport au Conseil, la sécurité s’est sensiblement détériorée au Liban, comme en témoignent les longs affrontements entre l’armée libanaise et des militants dans le nord du pays, l’assassinat du membre du Parlement Walid Eido et de plusieurs autres personnes dans le centre de Beyrouth le 13 juin 2007 et l’attentat contre un convoi de la Force intérimaire des Nations Unies au Liban (FINUL) dans le sud du pays, le 24 juin 2007, qui a fait six victimes parmi les soldats du maintien de la paix. Au cours de la période considérée, plusieurs autres importants attentats à la bombe ont eu lieu dans tout le pays. Cette détérioration de la sécurité va de pair avec une aggravation des tensions politiques au Liban comme dans l’ensemble de la région. La Commission, en étroite coopération avec les forces de sécurité libanaises et d’autres organes de l’ONU, reste extrêmement attentive à ces événements et essaie d’atténuer les effets qu’ils pourraient avoir sur ses investigations comme sur la sécurité de son personnel.
5. La Commission reste en étroite liaison avec les autorités libanaises pour toutes les questions intéressant son mandat. Les réponses reçues d’autres États, y compris la République arabe syrienne, restent généralement satisfaisantes. Les contacts que la Commission peut avoir avec divers États, y compris le Liban et la République arabe syrienne, constituent un élément important de sa capacité à s’acquitter de son mandat.
6. La Commission a pris note de l’adoption par le Conseil de sécurité, le 30 mai 2007, de la résolution 1757 (2007), par laquelle le Conseil a créé un Tribunal spécial pour le Liban. Elle se réjouit de coopérer étroitement avec ce dernier lors de la phase de transition au cours de laquelle elle transférera ses travaux au Bureau du Procureur du Tribunal, et a pris plusieurs mesures importantes afin d’assurer le bon déroulement de ce transfert au moment voulu.
7. À cet égard, la période considérée a été marquée par le regroupement de l’ensemble des informations que la Commission a recueillies au cours de ses diverses investigations, ainsi que de ses constatations et recommandations, ce qui s’est traduit par la production de rapports récapitulatifs confidentiels comptant au total plus de 2 400 pages, dont un rapport de 2 000 pages consacré à l’enquête sur l’assassinat de l’ancien Premier Ministre Rafic Hariri et de 22 autres personnes à Beyrouth le 14 février 2005, rapport qu’elle se tient prête à remettre au Procureur du Tribunal spécial pour le Liban au moment opportun.
8. Par ailleurs, au cours de la période considérée, la Commission a avancé dans différents domaines de l’enquête sur l’assassinat de Rafic Hariri. Comme demandé par le Conseil de sécurité, elle a également continué de fournir une assistance technique aux autorités libanaises s’agissant de 17 autres affaires, y compris l’assassinat de Walid Eido, et de la recherche de liens éventuels entre ces différentes affaires et l’affaire Hariri. Au total, elle a organisé 84 entretiens couvrant l’ensemble de ses investigations en cours.
II. Regroupement des constatations et évolution des enquêtes
9. Depuis son précédent rapport au Conseil de sécurité, la Commission s’est notamment attachée à rassembler l’ensemble des informations recueillies afin de faire le point des progrès réalisés dans tous les domaines d’investigation et d’identifier les prochaines mesures à prendre en priorité. Parallèlement, elle a poursuivi son enquête dans l’affaire Hariri et a continué de fournir aux autorités libanaises une assistance concernant 17 autres affaires, y compris l’assassinat de Walid Eido.
A. Récapitulatif des constatations, des résultats d’analyses et des recommandations
10. En mars 2007, la Commission a entrepris de rassembler l’ensemble de ses constatations, résultats d’analyses et recommandations, ce qui supposait d’analyser en détail le volume important d’informations qu’elle possédait au sujet de l’ensemble de ses investigations. Cet exercice a pris fin en juin 2007 et s’est traduit par la réalisation d’un certain nombre de rapports détaillés couvrant différents aspects des enquêtes et comptant au total plus de 2 400 pages.
11. La tâche était compliquée par le fait que la méthodologie suivie variait au cas par cas en fonction de l’objet de l’enquête. Chaque rapport contient un examen critique de l’ensemble des constatations en la possession de la Commission, y compris de celles résultant d’enquêtes des autorités libanaises. Le cas échéant, les rapports rappellent et évaluent les hypothèses passées et actuelles sur lesquelles la Commission s’est fondée ou se fonde pour mener ses enquêtes. Ils évaluent par ailleurs en détail les résultats obtenus ainsi que les lacunes, et contiennent des recommandations quant aux mesures à prendre en priorité pour chaque enquête.
12. Cet exercice, qui a duré plusieurs mois, a eu plusieurs résultats positifs. Tout d’abord, il a permis à la Commission d’évaluer de façon critique et exhaustive l’ensemble des informations et des données d’analyse qu’elle avait recueillies depuis le début de l’enquête, ainsi que les progrès réalisés. Ensuite, en dressant un tableau à jour et détaillé des différents éléments de l’enquête, il lui a permis de définir des priorités s’agissant de l’utilisation de ses ressources limitées au cours des prochains mois. Il a également permis d’identifier des points importants et des individus présentant de l’intérêt pour divers aspects des enquêtes.
13. Enfin, ces rapports, qui seront mis à jour en fonction de nouvelles constatations et des nouveaux résultats d’analyses, constitueront un bon point de départ de la transition entre la Commission et le Tribunal.
14. Parallèlement, la Commission a dressé un inventaire détaillé de ses données qui a révélé que depuis sa création en 2005, elle avait accumulé plus de 9 200 pièces, soit environ 1 200 déclarations, 1 800 notes établies par le personnel chargé des enquêtes et plus de 6 900 autres documents, dont de nombreux rapports d’analyse et documents reçus en réponse aux demandes d’assistance adressées au Liban, à la République arabe syrienne et à d’autres États, représentant au total plus de 120 000 pages.
15. Comme indiqué dans de précédents rapports, pour être plus efficace et pour faciliter ses travaux, la Commission a créé et mis en place un système de gestion de l’information qui fait référence afin de stocker de manière systématique et sûre les informations considérables dont elle dispose et d’y accéder facilement. En outre, le système offre aux utilisateurs des fonctions de recherche et d’analyse puissantes. Il a été conçu à partir des meilleures pratiques utilisées par les tribunaux internationaux spéciaux existants et devrait se révéler particulièrement utile pour le Tribunal spécial pour le Liban. Il s’agit d’un travail considérable et qui, compte tenu des ressources actuelles, devra se poursuivre au-delà de la venue à échéance du mandat actuel de la Commission.
B. L’enquête Hariri
16. Au cours de la période considérée, la Commission a continué de consacrer l’essentiel de ses ressources à l’enquête Hariri. Le regroupement de l’ensemble de ses données concernant cette affaire a été l’occasion d’un examen général des travaux menés dans un grand nombre de domaines différents, y compris des résultats des examens scientifiques et des analyses des communications. Cet effort s’est concrétisé par un rapport récapitulatif de 2 000 pages couvrant l’ensemble de l’enquête.
17. La Commission a également poursuivi ses travaux d’investigation : depuis son précédent rapport au Conseil, elle a organisé 32 auditions, dont un certain nombre particulièrement importantes et détaillées au Liban, en République arabe syrienne et dans d’autres pays.
1. Lieu du crime et questions connexes
18. La Commission a méthodiquement rassemblé un nombre considérable d’informations et de constatations scientifiques recueillies à l’occasion de ses investigations. Il s’agit notamment d’une série de rapports d’analyses détaillées établis par elle-même et par les autorités libanaises, avec la participation de plusieurs experts internationaux, au sujet de l’explosion et d’autres aspects scientifiques concernant le lieu du crime, établis à partir de 58 examens différents réalisés par la Commission et par des experts indépendants, qui sont pour la majorité terminés. L’enquête sur le lieu du crime a produit au total plus de 10 000 pages d’informations.
19. Les résultats des différents examens et rapports scientifiques et leur analyse ont été résumés et évalués de façon critique dans un rapport récapitulatif qui précise par ailleurs certaines des questions auxquelles il n’a toujours pas été apporté de réponses définitives.
Engin explosif improvisé
20. Concernant la question de l’engin explosif improvisé utilisé lors de l’attentat, la Commission a regroupé ses constatations au sujet du type d’explosif utilisé, de la quantité d’explosifs, du type de système de mise à feu utilisé et du moyen de transport utilisé. Depuis la création de la Commission, plusieurs hypothèses ont été testées au moyen de l’analyse des débris trouvés sur les lieux, d’explosions réelles ainsi que des résultats de l’analyse des tâches de sang, d’une analyse de documents, d’analyses métallographiques et de peinture, de recherches sur les empreintes digitales et l’ADN, de l’analyse des lésions, de l’analyse des dommages aux bâtiments environnants, de 14 explosions expérimentales de puissance progressive et de nombreuses simulations numériques réalisées à la demande de la Commission. Celle-ci a également étudié les résultats des analyses sismologiques effectuées pour tester différentes hypothèses concernant le nombre d’explosions, le moment où ces explosions se sont produites et leur signature sonore.
21. En ce qui concerne le type d’explosif utilisé, la Commission a rassemblé les résultats fournis par des échantillons prélevés sur le lieu du crime et les analyses chimiques. Ces divers éléments ont permis de confirmer que l’explosif utilisé était un mélange de RDX, PETN et TNT. L’analyse du cratère de l’explosion et la comparaison avec les résultats d’explosion expérimentale ainsi qu’avec d’autres aspects de l’enquête, ont permis de confirmer les conclusions antérieures de la Commission, à savoir une explosion unique provoquée par une charge en surface d’environ 1 800 kilogrammes d’explosifs dont la détonation est intervenue à 12 h 55 mn 5 s. Les efforts visant à déterminer l’origine précise des explosifs et à identifier d’éventuels liens avec d’autres affaires constitueront des priorités au cours de la prochaine période.
22. S’agissant du dispositif de mise à feu, l’examen de débris électroniques retrouvés sur les lieux de l’attentat ainsi que des contre-mesures électroniques utilisées par le convoi, de même que la présence sur les lieux du crime d’un certain nombre de restes humains appartenant à un homme non identifié, confirment les conclusions avancées précédemment selon lesquelles il s’agit selon toute probabilité d’un attentat-suicide. La théorie d’une attaque aérienne a été pour l’essentiel rejetée par la Commission.
23. La Commission a également regroupé toutes ses informations et ses constatations au sujet du transport de l’engin explosif improvisé. Elle a revu les résultats de l’examen des pièces à conviction recueillies sur le lieu du crime ainsi que ceux de l’analyse des caractéristiques de la boule de feu provoquée par l’explosion, les effets thermiques de la détonation sur les objets environnants, les caractéristiques du cratère provoqué par l’explosion et les résultats des explosions expérimentales ainsi que la trajectoire des fragments de véhicules, ce qui a renforcé sa conclusion antérieure selon laquelle l’explosion a, selon toute vraisemblance, été déclenchée à partir d’une camionnette Mitsubishi Canter.
Investigations concernant la camionnette Mitsubishi
24. Au cours de la période précédente, les investigations concernant la camionnette Mitsubishi Canter, qui a été selon toutes probabilités utilisée pour transporter les explosifs, ont progressé. L’origine et l’historique récents de la camionnette ont pu être établis. D’après les investigations menées par la Commission et par les autorités libanaises, la camionnette est sortie d’une usine Mitsubishi au Japon en février 2002 et a été déclarée volée dans la ville de Kanagawa au Japon en octobre 2004. Elle a été ensuite expédiée aux Émirats arabes unis et transportée jusqu’à un magasin d’exposition à proximité de Tripoli, dans le nord du Liban, en décembre 2004, où elle a été vendue. La Commission a récemment obtenu des informations au sujet de la vente à des individus qui pourraient avoir été impliqués dans les préparatifs finals concernant la camionnette en vue de l’attentat contre Rafic Hariri. Ces investigations sont poursuivies à titre prioritaire.
Identité de l’auteur présumé de l’attentat-suicide
25. En ce qui concerne l’identité de l’auteur de l’attentat-suicide, la Commission a regroupé et examiné les résultats d’un grand nombre d’analyses orthodontiques, isotopiques et de fréquence d’allèles en cours et terminées ainsi que d’investigations. Au vu des premiers résultats, il semblerait toujours que l’auteur de l’attentat-suicide était un homme probablement âgé de 20 à 25 ans, aux cheveux sombres et courts, qu’il venait initialement d’une région plus aride que le Liban et qu’il n’a pas passé sa jeunesse au Liban mais y a vécu au cours des deux à trois mois précédant son décès, ce qui correspond aux constatations concernant d’autres domaines d’investigation. Les experts de la Commission sont également parvenus à la conclusion provisoire selon laquelle l’auteur de l’attentat-suicide a passé les 10 premières années de sa vie dans un environnement urbain et les 10 dernières dans un environnement rural.
26. Des expériences sont en cours afin de déterminer l’origine géographique de l’homme non identifié dont on pense qu’il est l’auteur de l’attentat-suicide. Comme indiqué dans le rapport précédent, la Commission a recueilli au total 112 échantillons de sol et d’eau provenant de 28 sites en République arabe syrienne et au Liban à des fins de comparaison. De nombreux autres échantillons ont été prélevés sur 26 sites situés dans d’autres pays au cours de la période couverte par le présent rapport. Au vu des premiers résultats, la Commission a été en mesure de réduire à un petit nombre les pays dont l’auteur de l’attentat-suicide pourrait être originaire.
27. La Commission est en mesure de confirmer qu’Ahmed Abou Adass, l’individu qui apparaît dans la vidéo revendiquant l’attentat, n’est pas l’auteur de l’attentat-suicide.
Autres questions scientifiques
28. Dans le cadre de son travail de regroupement des différentes informations à sa disposition, la Commission est en train de constituer une base de données d’ADN et d’empreintes digitales dans laquelle seront stockés 256 profils d’ADN nucléaire et 66 profils d’ADN mitochondrial, 159 empreintes digitales et 2 empreintes de paume de la main retrouvées sur les lieux du crime ainsi que sur des objets saisis présentant une importance particulière pour les investigations. Ces différentes données sont actuellement comparées avec celles figurant dans les bases de données de divers organismes nationaux et internationaux de police et d’application des lois.
29. Au cours de la période considérée, la Commission a entrepris de dresser l’inventaire de l’ensemble des pièces à conviction physiques et biologiques accumulées au cours de ses investigations. Ce processus a commencé par la création d’une base de données spécifique, l’adoption de procédures opératoires types et la constitution d’un laboratoire spécialisé. Environ 2 200 pièces à conviction, soit environ la moitié des différentes pièces à conviction scientifiques que possède actuellement la Commission, figurent à présent dans cette base de données, et au rythme actuel, le processus devrait être terminé d’ici la fin de la prochaine période.
30. De plus, la Commission a regroupé les résultats de l’ensemble de ses examens biologiques, y compris les résultats détaillés provenant de l’identification de toutes les victimes de l’attentat du 14 février 2005. Au total, plus de 300 examens biologiques ont été réalisés, dont les résultats, y compris les profils d’ADN et les dossiers orthodontiques et photographiques, ont été ainsi regroupés.
31. La Commission a par ailleurs établi une base de données pour stocker puis retrouver aisément les portraits-robots établis à partir de témoignages de témoins oculaires au cours des investigations. Au total, 24 portraits-robots ont été réalisés et saisis dans la base de données, qui représente un outil particulièrement utile lors des auditions comme pour comparer les descriptions physiques d’individus recueillies au sujet de divers aspects de l’affaire Hariri, comme d’autres affaires.
32. Des experts extérieurs ont terminé trois projets de visualisation numériques destinés à aider les enquêteurs à se faire une image claire de la ville et du lieu du crime, de l’itinéraire suivi par le convoi ainsi que des mouvements de Rafic Hariri au cours de son dernier jour d’existence, y compris les communications qui auraient été échangées entre les diverses personnes impliquées dans l’attentat le long du trajet du convoi. Un quatrième projet est en cours, qui permettra aux utilisateurs de « se déplacer » sur les lieux du crime. Ces différents moyens visuels pourraient être particulièrement utiles pour présenter certains faits devant un éventuel tribunal.
Autres investigations sur les lieux du crime
33. Le regroupement des constatations concernant le lieu du crime a permis de répondre à un certain nombre d’autres questions, à savoir, notamment, comment avait été choisi l’itinéraire du convoi allant du Parlement à la résidence de Rafic Hariri, la nature des systèmes de brouillage électronique utilisés par la sécurité de Rafic Hariri, la liste des personnes informées du déplacement du convoi et la composition du convoi le jour de l’assassinat.
34. Par ailleurs, la Commission a désormais une idée claire du contexte entourant certains véhicules présents sur les lieux du crime ou à proximité. Elle a ainsi pu déterminer le bien-fondé de travaux sur la route à proximité du lieu du crime avant l’attentat, et apporter une réponse aux allégations d’interférence avec le lieu du crime après l’attentat.
35. Un certain nombre d’autres questions continuent de faire l’objet d’investigations, notamment l’identification de l’ensemble des personnes présentes sur les lieux de l’attentat au moment de l’attentat et immédiatement après, et leur audition.
36. Il convient de noter que le lieu du crime n’est plus interdit à la population et que la route a été rouverte à la circulation au cours de la période considérée.
2. Personnes impliquées dans la perpétration du crime
Ahmed Abou Adass
37. La Commission a achevé un examen approfondi de l’information et des constatations ayant trait à Ahmed Abou Adass, l’individu qui, sur la vidéo, revendique l’attentat perpétré contre Rafic Hariri. Ces renseignements ont été établis à partir de plus de 70 entretiens et d’un examen détaillé de tous les documents utiles. Plusieurs articles, notamment ceux saisis au domicile de la famille d’Abou Adass, ont également été examinés par la Commission pour déterminer leur intérêt pour l’enquête. L’information recueillie grâce aux articles saisis auprès d’autres individus et groupes associés a également été examinée et intégrée dans la synthèse, et c’est notamment le cas de 10 ordinateurs, de lecteurs USB, de nombreux CD-ROM, et des disquettes, téléphones mobiles et cartes SIM.
38. Cette synthèse a permis à la Commission de parvenir à une compréhension plus détaillée du milieu d’origine et de la personnalité d’Ahmed Abou Adass, son caractère, sa famille, ses associés, les différents emplois qu’il a occupés et ses opinions politiques et religieuses. L’ensemble de ces éléments a également permis de dresser un tableau général d’ensemble détaillé des circonstances de la disparition d’Abou Adass de son domicile et des activités de ses parents et amis pendant les mois qui ont précédé et suivi sa disparition. L’ensemble des informations dont dispose la Commission concernant la fabrication, l’acquisition et le maniement de la vidéo a également été passé en revue.
39. Comment on l’a indiqué plus haut, la Commission est en mesure de conclure qu’Ahmed Abou Adass n’est pas le commando suicide qui a déclenché l’explosion qui a coûté la vie à Rafic Hariri. La Commission continue à enquêter sur deux hypothèses possibles : a) qu’Ahmed Abou Adass a été contraint par la force ou la ruse d’enregistrer la vidéo dans laquelle il revendique l’assassinat de Rafic Hariri, puis, vraisemblablement, tué ; b) qu’Ahmed Abou Adass a librement enregistré la vidéo en compagnie d’individus appartenant à un groupe extrémiste plus large qui a pu se réunir pour entreprendre le tournage de la revendication de responsabilité, acheter la camionnette Mitsubishi et la truffer d’engins explosifs. Les membres de ce groupe ont alors peut-être participé au choix du commando suicide et ont peut-être aidé à le transporter, avec la bombe, jusqu’au lieu de l’attentat. À ce sujet, la Commission a établi que certains des associés d’Ahmed Abou Adass avaient bien des liens avec des réseaux impliqués ces dernières années dans des activités extrémistes au Liban et ailleurs.
40. En outre, la synthèse a permis de recenser des lacunes dans l’information dont dispose la Commission et de vérifier certaines de ses hypothèses de travail concernant Ahmed Abou Adass. Ces lacunes concernent ses faits et gestes entre sa disparition de son domicile le 16 janvier 2005 et l’assassinat de Rafic Hariri et ensuite. La Commission améliore également sa compréhension des motifs du tournage de la vidéo, des personnes impliquées dans sa production et sa présentation et les relations et les liens entre Abou Adass et certains autres individus et groupes. Les prochaines étapes vont consister à identifier en priorité ces individus et groupes pour aider à préciser ces questions et à obtenir une meilleure image de l’identité et du rôle joué par certaines personnes présentant un intérêt pour l’enquête qui auraient pu avoir un motif, l’occasion et la possibilité de commettre l’attentat.
Analyse des communications
41. La Commission a fait la synthèse du très grand nombre de fichiers d’appel, de données et d’analyses des communications, ayant trait à des périodes, des institutions et des individus précis intéressant l’enquête Hariri. Depuis sa création, la Commission a ainsi recueilli plus de 5 milliards de fichiers d’appels téléphoniques et de messages envoyés par téléphone mobile au Liban, ainsi que des données sur les communications émanant de plusieurs autres pays. La Commission a également obtenu un très grand nombre de fichiers détaillés d’appels faits par des abonnés. Depuis 2005, la Commission a émis plus de 300 demandes d’assistance pour faciliter son analyse des communications d’intérêt pour l’enquête Hariri.
42. L’analyse des communications effectuée par la Commission apporte une contribution précieuse aux investigations car elle permet d’établir des liens entre des individus, d’analyser le comportement et l’activité d’un certain nombre de personnes d’intérêt pour l’enquête et de repérer des appels fréquents provenant de numéros précis, ou faits à des dates et dans des lieux précis. C’est également une ressource très précieuse pour préparer les entretiens avec les témoins. Étant donné la valeur éprouvée, pour l’enquête, et les possibilités offertes par l’analyse des communications, la Commission a récemment cherché à obtenir les services de spécialistes extérieurs pour exploiter et analyser la masse des données provenant des fichiers de communication. La Commission a également acquis récemment de nouveaux ordinateurs et de nouveaux logiciels qui lui permettront de poursuivre ses recherches dans ce sens de façon plus poussée encore.
43. Sur la base de cette synthèse, la Commission a confirmé et approfondi ses conclusions antérieures, à savoir que les individus qui avaient utilisé les six cartes SIM sur des téléphones mobiles avaient agi de façon coordonnée pour conduire la surveillance exercée sur Rafic Hariri pendant les semaines qui ont précédé son assassinat. Une analyse détaillée de l’utilisation qui a été faite de ces cartes le jour de l’assassinat indique que ces individus ont joué un rôle critique dans la planification et l’exécution de l’attentat lui-même, ce que démontrent leurs mouvements et leurs appels téléphoniques. La Commission a établi l’origine de ces cartes SIM et parachève son analyse des circonstances de la vente de ces cartes et d’un certain nombre d’appareils mobiles aux individus qui les ont utilisés pour la surveillance de Rafic Hariri. Plusieurs entretiens ont eu lieu, durant la période couverte par le présent rapport, pour faire progresser cet aspect de l’enquête.
44. La Commission a également procédé à une analyse détaillée des fichiers de communication qui concernent Ahmed Abou Adass, notamment par une analyse des appels qu’il a fait depuis son domicile et depuis son lieu de travail et des lignes téléphoniques de ses associés présumés. Cette analyse a révélé des informations intéressantes concernant les circonstances de sa disparition de son domicile et confirme les conclusions de la Commission selon lesquelles certaines des personnes associées à cet individu avaient des liens avec des réseaux impliqués dans des activités extrémistes au Liban et ailleurs, ces dernières années. Au total, 18 rapports d’analyse des fichiers de communication ont été produits sur Ahmed Abou Adass.
45. Des mesures ont été prises aussi pour mieux connaître les individus qui ont appelé les médias au sujet de la vidéo où Ahmed Abou Adass revendique la responsabilité de l’attentat. La Commission continue à chercher à identifier les personnes qui ont fait ces appels et à déterminer s’il existe des liens entre elles et les individus ou groupes pouvant présenter un intérêt pour les enquêtes.
46. La Commission s’est également efforcée, par l’analyse des fichiers de communication téléphonique, de déterminer les liens horizontaux et verticaux éventuels entre les individus présents sur le lieu du crime et ceux qui pourraient avoir été impliqués dans la préparation de l’attentat ou pourraient en avoir eu connaissance à l’avance. Plusieurs numéros de téléphone ont été identifiés et étudiés pour faire progresser l’enquête.
3. Motifs et personnes présentant un intérêt pour l’enquête
47. Une proportion notable des ressources de la Commission est consacrée à l’analyse des facteurs qui pourraient expliquer les motifs de l’assassinat de Rafic Hariri. La synthèse des analyses de la Commission à ce titre représente une étude approfondie des activités politiques et autres de Rafic Hariri. Cette synthèse inclut aussi un examen systématique de la situation politique et de la sécurité au Liban et dans les pays voisins dans les années qui ont précédé l’attentat, en raison de leur lien possible avec les motifs du crime.
48. La Commission est arrivée à une compréhension satisfaisante des événements entourant le scandale de la Banque Al Madina, dans l’optique de l’enquête. La Commission est en mesure de conclure que l’affaire Al Madina n’est pas un motif principal de l’assassinat. Cependant, les éléments dont dispose la Commission sur cette affaire lui ont permis de mieux comprendre les relations financières existant entre plusieurs individus, par l’intermédiaire de la Banque Al Madina, durant la période étudiée.
49. Comme elle l’a indiqué dans son rapport précédent au Conseil, la Commission a pu limiter notablement son enquête sur les divers motifs possibles de l’attentat à ceux qui sont liés aux activités politiques de Rafic Hariri et à ses relations politiques et personnelles avec les autres dirigeants politiques et hauts responsables libanais, syriens et d’autres pays durant cette période. La Commission a fait la synthèse de l’information dont elle dispose et de ses constatations dans plusieurs domaines ayant trait à la situation politique au Liban, notamment durant la période 2004-2005. Il y a lieu de noter que cette synthèse, utilisée surtout dans l’affaire Hariri, est également utile pour les enquêtes relatives aux attentats visant d’autres personnes bien précises.
50. La Commission a amélioré sa compréhension de la situation entourant l’adoption de la résolution 1559 (2004) du Conseil de sécurité. Elle a regroupé ses constatations sur certains aspects importants du rôle qu’ont pu jouer Rafic Hariri et d’autres personnalités politiques libanaises et internationales lors de l’adoption de la résolution ainsi que sur la perception de ce rôle par certains acteurs extérieurs. Si certains événements ayant trait à l’adoption de la résolution 1559 (2004) doivent faire l’objet d’un complément d’enquête, l’hypothèse de travail de la Commission est qu’il est probable que ces événements ont joué un rôle important dans la genèse de l’assassinat de Rafic Hariri.
51. La Commission a également réfléchi à la séquence des événements qui ont conduit au vote d’un amendement à la Constitution libanaise rendant possible la prorogation du mandat du Président Émile Lahoud et à la pertinence de ces événements pour l’enquête. La Commission est parvenue à une compréhension satisfaisante du rôle global et de la position des divers acteurs politiques pendant la période en question et de l’effet que cela a pu avoir sur les motifs de l’assassinat.
52. La Commission a examiné les éléments d’information en sa possession concernant la nouvelle loi électorale qui était alors en discussion et son effet sur les différentes formations politiques qui ont présentés des candidats aux élections parlementaires de 2005 et notamment la formation de Rafic Hariri. La Commission a également réfléchi à la perception que les différents acteurs, au Liban et ailleurs, ont eue des résultats possibles des élections, les éléments expliquant cette perception et leur pertinence pour l’enquête.
53. Bien qu’elle ait longuement analysé dans cette perspective les motifs de l’assassinat de Rafic Hariri, la Commission continue aussi à examiner d’autres hypothèses. Parmi celles-ci figure l’éventualité que Hariri ait été visé par exemple par des groupes extrémistes parce qu’il était largement considéré au Liban et dans le monde arabe comme une personnalité dominante dans sa communauté. On ne saurait exclure que les motifs ayant conduit à l’assassinat de Hariri aient pu résulter d’une combinaison de facteurs politiques et religieux. Plusieurs aspects de cette hypothèse sont encore en cours d’examen.
54. La Commission a réuni et résumé ses constatations concernant la structure de certains organes de sécurité et de renseignement présentant un intérêt pour l’enquête et qui étaient implantés au Liban dans la période qui a précédé l’assassinat de Rafic Hariri et en particulier en 2004 et au début de 2005. Pour faire progresser l’enquête dans cette voie, la Commission a cherché à mieux comprendre les structures, en droit et en fait, des divers organes qui présentent un intérêt pour l’enquête à cet égard.
55. Après un examen détaillé de toute l’information et des constatations, la Commission a amélioré sa compréhension des conditions qui ont pu susciter une volonté d’assassiner Rafic Hariri. Sur la base de cette analyse et avec l’aide de plusieurs constatations faites sur d’autres aspects de ses enquêtes, la Commission a établi l’identité d’un certain nombre de personnes présentant un intérêt particulier qui pourraient avoir été impliquées dans certains des aspects de la préparation et de la perpétration de l’assassinat ou qui auraient pu savoir à l’avance qu’un tel projet était en cours. La Commission a fait la synthèse de son information, de ses constatations et des prochaines mesures qu’elle pourrait prendre concernant la participation possible de ces individus à l’assassinat de Rafic Hariri. Au cours de la période sur laquelle portera le prochain rapport, l’enquête sera poursuivie en priorité dans ce sens.
4. Autres questions intéressant l’enquête
56. La Commission continue d’évaluer les rapports faisant état de plusieurs menaces, avertissements et assurances spécifiques dont aurait eu connaissance Rafic Hariri par le biais de divers intermédiaires dans les derniers mois de sa vie. Sa conclusion préliminaire reste que les tensions s’étaient exacerbées au cours des mois qui ont précédé l’assassinat au point que certains aspects de la sécurité personnelle de Rafic Hariri avaient fait l’objet de discussions à haut niveau aussi bien au Liban que dans d’autres pays. La Commission continue aussi d’examiner les renseignements selon lesquels, pour désamorcer ces tensions, certaines personnes avaient engagé des tentatives de rapprochement, en tirant parti de nouvelles voies de communication. Il s’agit là d’une piste d’enquête à suivre que la Commission approfondira au cours de la prochaine période.
57. La Commission est parvenue à retracer de manière satisfaisante l’emploi du temps de Rafic Hariri les jours avant l’attentat. En outre, elle a établi une liste exhaustive des réunions importantes qu’il avait organisées au cours des quelques mois ayant précédé son assassinat. Elle a aussi passé en revue les événements qui ont entouré sa démission du poste de premier ministre en octobre 2004. La Commission continue de rechercher et de vérifier certains points de détail concernant quelques-uns de ces réunions et événements majeurs.
5. Protection des témoins
58. La nécessité d’assurer la sécurité des témoins de façon à préserver l’intégrité des éléments de preuve reste une priorité pour la Commission, eu égard surtout à la mise en place du Tribunal spécial pour le Liban. Bien qu’elle soit convaincue de pouvoir établir en temps voulu un dispositif opérationnel approprié si la situation l’exigeait, la Commission est aussi consciente du fait que les dispositions prévues à cet égard devront être réexaminées, systématisées et étendues dans le proche avenir.
C. Concours technique apporté dans les autres affaires
59. La Commission a fait la synthèse des informations, conclusions et recommandations qu’elle avait réunies sur chacune des autres affaires et a étudié les dossiers constitués par les autorités libanaises. Des rapports consolidés représentant plus de 400 pages ont été établis et les conclusions finales et préliminaires des 25 analyses scientifiques réalisées par la Commission et par des experts extérieurs ont été passées en revue. En regroupant les conclusions relatives aux 17 affaires, on s’est surtout attaché à mettre en évidence les liens éventuels avec l’affaire Hariri, en application du mandat de la Commission et de l’Accord sur la création du Tribunal spécial pour le Liban, visé dans la résolution 1757 (2007) du Conseil de sécurité.
60. Durant la période considérée, et conformément au mandat confié par le Conseil de sécurité, la Commission a continué d’apporter un concours technique aux autorités libanaises dans leurs investigations sur ces 17 autres affaires, notamment l’assassinat du député Walid Eido et de sept autres personnes le 13 juin 2007 dans le centre de Beyrouth. Il a été procédé au total, durant la période considérée, à 25 auditions sur les neuf attentats à l’explosif et à 27 auditions sur les attentats ciblés.
1. Les neuf attentats à l’explosif
61. La Commission a fait la synthèse des informations reçues des autorités libanaises ainsi que des résultats de son propre travail d’enquête sur les neuf attentats à l’explosif qui n’étaient, semble-t-il, dirigés contre personne en particulier, notamment les attentats d’Ain Alaq du 13 février 2007. Cet effort de synthèse lui a permis de déterminer les nouvelles orientations à donner aux investigations en cours.
62. S’agissant des attentats d’Ain Alaq, la Commission, travaillant en coopération avec les autorités libanaises, a établi que, pour chacun des deux autobus visés, un individu de sexe masculin est monté dans l’autobus, a placé un engin explosif improvisé sous l’un des sièges et est redescendu avant l’explosion.
63. Des progrès ont été réalisés au cours de la période considérée, grâce aux entretiens menés par la Commission et par les autorités libanaises, dans l’identification des coupables. Les autorités libanaises ont arrêté plusieurs individus en liaison avec les attentats à l’explosif d’Ain Alaq. L’un d’entre eux a avoué avoir placé un engin dans l’un des autobus. D’après les dépositions des personnes arrêtées, les auteurs des attentats pourraient être liés à des groupes extrémistes actuellement actifs au Liban.
64. Selon un rapport de police scientifique préliminaire, il n’y a eu qu’une explosion dans chaque autobus et, dans chaque cas, l’engin explosif avait été placé du côté gauche du véhicule, entre la quatrième et la septième rangée de sièges. Le rapport confirme aussi que l’engin explosif placé dans l’autobus de marque Mitsubishi renfermait environ 1,5 kilogramme d’explosif associé à des roulements à bille en acier d’un poids total compris entre 0,5 et 1 kilogramme et que les substances explosives utilisées dans les deux autobus avaient une haute vitesse de détonation, comparable à celle du TNT. Ces conclusions concordent avec les informations fournies par plusieurs témoins et suspects dans leurs dépositions.
65. Plus de 120 pièces à conviction ainsi que des échantillons ADN ont été récupérés sur les lieux des attentats d’Ain Alaq et font actuellement l’objet d’analyses scientifiques. La Commission a aussi récupéré des enregistrements effectués par les systèmes de télévision en circuit fermé qui pourraient présenter de l’intérêt et qui seront examinés au cours de la prochaine période.
66. À ce stade, le travail de la police scientifique n’a permis d’établir aucun lien solide entre les attentats d’Ain Alaq et l’une quelconque des autres affaires en cours d’investigation. Il ressort des éléments de preuve et des dépositions recueillis par la Commission et par les autorités libanaises que la date choisie, c’est-à-dire la veille du deuxième anniversaire de l’assassinat de Rafic Hariri, pourrait toutefois donner une indication quant au motif de ces attentats. La Commission continue d’enquêter sur la base de ces informations et d’autres pistes pouvant faire apparaître des liens entre l’affaire Ain Alaq et les autres affaires de son ressort.
67. La Commission a étudié dans la même optique les informations et conclusions reçues des autorités libanaises à propos des huit autres attentats à l’explosif non ciblés pour lesquels il lui a été demandé de fournir une assistance aux autorités libanaises. L’objectif de cet examen est double : analyser dans une optique constructive l’enquête menée par les autorités libanaises dans chaque cas et mettre en évidence les liens possibles avec d’autres affaires ou d’autres domaines d’intérêt de la Commission, concernant en particulier l’affaire Hariri. La Commission a établi au total trois rapports analytiques détaillés comparant ces attentats. Il convient de noter, toutefois, qu’en raison des ressources limitées dont elle dispose et de ses autres travaux d’enquête prioritaires, ses investigations concernant ces dossiers n’ont guère progressé.
2. Les huit attentats ciblés
68. La Commission a rassemblé toutes ses informations, conclusions et recommandations relatives aux attentats visant Marwan Hamedeh, Samir Kassir, George Hawi, Elias El-Murr, May Chidiac, Gebran Tueni, Pierre Gemayel et Walid Eido. Elle a aussi poursuivi son travail d’investigation sur ces dossiers au cours de la période considérée.
Profils des victimes et motifs possibles
69. Dans le cadre de son effort de synthèse, la Commission a affiné son profil de chacune des principales victimes et s’est employée à établir une description détaillée des faits pour chaque dossier.
70. Compte tenu du profil des victimes, la Commission a accordé une attention particulière aux activités publiques et politiques de chacune d’entre elles au cours de la période précédant les attentats, son hypothèse de travail étant que ces activités ont probablement beaucoup contribué à déterminer les circonstances qui ont motivé les attentats. Ces travaux ont été menés en parallèle avec des travaux du même type réalisés dans l’enquête sur l’affaire Hariri.
71. La Commission a aussi fait la synthèse des éléments en sa possession et de ses conclusions concernant la position publique des victimes sur plusieurs événements majeurs ayant marqué le paysage politique libanais ces dernières années, notamment l’adoption de la résolution 1559 (2004) du Conseil de sécurité, la prolongation du mandat du Président Emile Lahoud, l’assassinat de Rafic Hariri et le retrait des troupes syriennes du Liban. Cette analyse a révélé à la fois des points de convergence notables et des divergences potentiellement intéressantes dans les positions adoptées par les personnalités visées.
72. En outre, la Commission a fait la synthèse de ses informations et analyses concernant les relations entre chacune des victimes et plusieurs individus et institutions présentant un intérêt particulier pour les enquêtes. Pour ce domaine d’investigation, l’hypothèse de travail de la Commission est que certaines de ces relations ont un rapport avec des aspects présentant un intérêt particulier dans l’enquête Hariri.
Le mode opératoire
73. Tous les attentats, à l’exception de l’assassinat de Pierre Gemayel, ont été perpétrés au moyen d’un engin explosif improvisé placé soit dans le véhicule même de la victime, soit dans un véhicule garé sur le trajet emprunté par la victime le jour de l’attentat.
74. Le mode opératoire dans chacun des attentats perpétrés au moyen d’un engin explosif ne diffère que dans la mesure où un niveau de sophistication différent s’est révélé nécessaire pour maximiser les chances de succès. Dans les attentats visant May Chidiac, Samir Kassir et George Hawi, un engin explosif a été placé sous le véhicule de la victime stationné sans surveillance.
75. Dans les cas de Marwan Hamadeh, Elias El-Murr et Gebran Tueni, qui s’étaient entourés d’un certain dispositif de sécurité, un mode opératoire différent a été choisi pour déjouer ce dispositif, impliquant un véhicule garé en bordure de route dans lequel a été placé un engin explosif actionné à distance.
76. L’exercice de synthèse et de comparaison de ses conclusions auquel s’est livrée la Commission dans chacun des dossiers fait apparaître d’autres similitudes entre les explosifs et les véhicules utilisés dans plusieurs des attentats. La Commission utilise aussi dans le cadre de ses enquêtes les profils d’ADN, les empreintes et les portraits-robots contenus dans ses bases de données. Elle approfondira ces diverses pistes dans les mois à venir.
Menaces et revendications
77. La Commission a aussi rassemblé un grand nombre d’informations sur les menaces reçues par certaines victimes et a déterminé que les mêmes individus auraient menacé plusieurs des victimes dans les affaires en cours d’investigation. Ces individus pourraient aussi être liés à l’enquête Hariri.
78. En outre, et comme cela a été noté dans les rapports précédents, les conclusions de la Commission donnent à penser qu’un lien pourrait exister entre le groupe revendiquant l’assassinat d’Hariri et celui revendiquant les attentats qui ont coûté la vie à Samir Kassir, Gebran Tueni et Pierre Gemayel. La Commission d’enquête a aussi mené plusieurs entretiens pour approfondir cette piste d’enquête et continue d’étudier plusieurs questions intéressant ces groupes.
Analyse des communications
79. L’analyse des échanges de communication pertinents a fait progresser considérablement l’enquête sur les attentats ciblés. La nature de ces attentats et le profil des victimes donnent à penser que les auteurs des attentats ont mené des opérations de surveillance au cours des journées et des semaines qui ont précédé les événements. Par ailleurs, il est vraisemblable que des contacts téléphoniques aient été entretenus au sein de chacune des équipes impliquées dans les attentats immédiatement avant et après les incidents.
80. La Commission a procédé à une analyse détaillée des communications afin de déterminer si l’on pouvait déceler des éléments de cette surveillance en examinant les relevés d’appels de personnes présentant un intérêt pour l’enquête et les caractéristiques des appels dans des zones géographiques et à des périodes données. Elle estime que, dans l’ensemble, cette analyse a enregistré des progrès et a permis de découvrir des pistes intéressantes.
81. L’analyse des communications a contribué à confirmer l’hypothèse de la Commission selon laquelle un certain nombre de personnes pourraient être impliquées dans l’affaire Hariri et une ou plusieurs dans les autres affaires. Elle procédera à des entretiens pour étudier plus avant les liens identifiés jusque-là.
Affaire Pierre Gemayel
82. La Commission a prêté son concours aux autorités libanaises en procédant, depuis mars 2007, à huit entretiens concernant l’affaire Gemayel, ce qui porte à 19 le nombre des entretiens menés par la Commission dans le cadre de cette affaire. Elle examine un certain nombre de motifs potentiels du crime, en continuant aussi à essayer d’établir si M. Pierre Gemayel était sous surveillance au cours des journées qui ont précédé l’attentat et qui pouvait avoir été au courant de ses projets de déplacement. S’appuyant sur les témoignages recueillis jusque-là, la Commission a conclu que M. Gemayel a peut-être été choisi dans un groupe restreint de cibles potentielles parce que ne disposant que d’un dispositif de sécurité très limité.
Affaire Walid Eido
83. Le 13 juin 2007, aux environs de 17 h 45, M. Walid Eido, son fils, deux gardes du corps et quatre autres personnes ont été tués lorsqu’un engin artisanal a explosé près du véhicule de M. Eido. M. Eido était membre du bloc parlementaire majoritaire et était considéré comme proche de M. Rafic Hariri. L’attentat a eu lieu dans une zone connue sous le nom de Corniche de Manara, dans le centre-ville de Beyrouth, où la circulation est généralement dense à l’heure où s’est produit l’attentat.
84. Le 14 juin 2007, suite à une requête du Premier Ministre libanais adressée au Secrétaire général de l’ONU, la Commission a reçu mandat de fournir une assistance technique aux autorités libanaises pour l’enquête qu’elles menaient sur cet attentat.
85. Une équipe de la Commission s’est rendue sur les lieux du crime le 15 juin 2007, accompagnée de six experts légistes internationaux. Par la suite, durant deux semaines, la Commission et les autorités libanaises ont procédé à un examen médico-légal des lieux.
86. L’enquête concernant cet attentat en est encore à ses débuts et la Commission attend les résultats des travaux des experts légistes. Cependant, en œuvrant en collaboration étroite avec les autorités libanaises, la Commission a pu établir des éléments présentant un certain intérêt. Les conclusions préliminaires livrent des informations sur le type de véhicule utilisé pour transporter l’engin explosif. L’analyse se poursuit pour confirmer ces conclusions et pour déterminer le type et la quantité d’explosifs utilisés pour perpétrer l’attentat.
87. La Commission a également commencé à établir des hypothèses de mobile de l’attentat, à dresser le portrait de la victime ciblée et à élaborer un descriptif des événements. Elle continuera aussi à identifier les liens éventuels avec d’autres attentats et avec l’affaire Hariri. L’enquête se poursuivra au cours de la période couverte par le prochain rapport.
III. Coopération extérieure
A. Relations avec les autorités libanaises
88. Depuis la transmission de son dernier rapport au Conseil, la Commission a continué de collaborer étroitement avec les autorités libanaises dans toutes les affaires en cours d’instruction. Des réunions et des séances d’information périodiques ont continué de se tenir entre la Commission et le Procureur général et ses collaborateurs ainsi qu’avec les juges d’instruction en charge des différentes affaires.
89. Au cours de la période considérée, la Commission s’est encore employée à tenir les autorités libanaises régulièrement informées de ses activités et de l’évolution de ses enquêtes. Elle a continué de partager avec les autorités libanaises compétentes un volume important d’informations recueillies lors des entretiens ou consignées dans les rapports de synthèse.
90. Depuis la communication de son dernier rapport au Conseil, la Commission a adressé au Procureur général 88 demandes d’assistance tendant notamment à ce que celui-ci l’aide à obtenir des documents et à organiser des entretiens et d’autres missions en territoire libanais. Ces demandes portent à 218 le nombre de demandes d’assistance adressées aux autorités libanaises depuis janvier 2006. La Commission sait gré aux autorités libanaises d’avoir continué de donner promptement toute la suite voulue à ces requêtes.
91. La Commission a également continué d’entretenir d’étroites relations de travail avec les Forces de sécurité intérieure et l’armée libanaise, qui assurent la sécurité du personnel et des installations de la Commission. La Commission est reconnaissante à ces institutions de l’excellent appui qu’elles lui apportent.
B. Coopération avec la République arabe syrienne
92. La République arabe syrienne a continué d’apporter à la Commission une coopération globalement satisfaisante, comme les résolutions 1636 (2005) et 1644 (2005) du Conseil de sécurité lui en font l’obligation et comme envisagé dans l’accord conclu entre elle et la Commission en 2006.
93. Depuis la transmission de son dernier rapport au Conseil, la Commission a soumis à la République arabe syrienne 11 demandes officielles d’assistance tendant à ce que celle-ci l’aide à organiser des entretiens et à obtenir des renseignements sur des personnes et des questions présentant un certain intérêt. Ces demandes portent à 57 le nombre de demandes d’assistance adressées aux autorités syriennes depuis janvier 2006. Les autorités syriennes ont également coopéré à l’organisation de quatre missions en territoire syrien au cours de la période à l’étude.
94. Au cours de la période considérée, la République arabe syrienne a continué de déférer aux demandes de la Commission dans des délais raisonnables et la Commission sait gré aux autorités syriennes du soutien logistique qu’elles lui ont apporté et des mesures de sécurité qu’elles ont prises pour lui permettre de mener ses activités en République arabe syrienne.
95. La Commission continuera de solliciter l’entière coopération de la République arabe syrienne, qui lui est indispensable pour la réussite de son mandat.
C. Coopération avec d’autres États
96. Au cours de la période considérée, 18 demandes d’assistance ont été adressées à 12 États, en plus de celles adressées aux autorités libanaises et syriennes. Ces demandes portent à 106 le nombre de demandes adressées à d’autres États depuis janvier 2006.
97. La Commission sait particulièrement gré aux États qui ont promptement donné toute la suite voulue à ses demandes, ce qui lui a été extrêmement utile.
98. Il demeure essentiel que la Commission puisse compter sur l’appui des États pour les informations, l’assistance, les compétences et les autorisations d’accès sollicitées. Au cours de la période à l’examen, la Commission a reçu d’un certain nombre d’États une assistance particulièrement utile et opportune.
99. La Commission sait également gré des compétences et autres formes d’assistance mises à sa disposition par nombre d’États et d’institutions internationales au cours de la période à l’étude. Elle souligne à nouveau que ces entités doivent continuer à lui apporter leur assistance en mettant régulièrement à disposition des ressources humaines qualifiées et spécialisées afin de faire progresser les enquêtes.
100. Comme elle l’a indiqué dans le dernier rapport qu’elle a adressé au Conseil, la Commission ne pourra s’acquitter effectivement de son mandat que si elle peut compter sur la coopération des États, qui devront lui fournir les informations sollicitées, lui assurer l’accès à certaines personnes, dont des responsables gouvernementaux, actuels ou anciens, et lui apporter d’autres formes d’assistance technique.
IV. Sécurité
101. Les conditions de sécurité se sont notablement détériorées depuis le dernier rapport de la Commission. Depuis plusieurs semaines, des affrontements continus opposent les Forces armées libanaises à des combattants liés au Fatah al Islam dans le camp de réfugiés de Nahr el Bared, près de la ville de Tripoli, dans le nord du pays.
102. Au cours de la période à l’examen, la violence ne s’est pas limitée à ces zones. Plusieurs autres incidents graves ont eu lieu, dont l’assassinat de M. Walid Eido et de sept autres personnes, le 13 juin 2007. Par ailleurs, de nombreux incidents impliquant des engins explosifs artisanaux se sont produits dans le pays, causant plusieurs victimes.
103. Le 24 juin 2007, six soldats de la Force intérimaire des Nations Unies au Liban (FINUL) ont été tués lorsque leur convoi a été atteint par un engin explosif artisanal près de la ville de Khiam, dans le sud.
104. L’évaluation des conditions de sécurité réalisée par la Commission en collaboration avec d’autres organismes laisse apparaître des perspectives inquiétantes pour les mois à venir. Cette situation s’explique, dans une large mesure, par les effets combinés de l’impasse politique actuelle entre la majorité et l’opposition libanaises et de la détérioration des conditions de sécurité dans la région. De l’avis général, la période précédant les élections présidentielles, qui sont prévues dans le courant de cette année, connaîtra une tension grandissante marquée peut-être par de nouveaux incidents. Par ailleurs, on ne peut prévoir quel impact la création du Tribunal spécial pour le Liban aura sur les conditions de sécurité dans le pays et sur la Commission au cours des mois à venir.
105. La Commission est pleinement consciente de ce climat de danger et des menaces spécifiques auxquelles elle doit faire face compte tenu de la nature de son mandat. Au cours de la période à l’étude, elle a procédé à des évaluations régulières de tous les aspects de la sécurité, en coopération étroite avec les Forces armées libanaises. À partir de ces évaluations et avec le plein appui des autorités libanaises, la Commission a pris des dispositions supplémentaires pour limiter les risques.
106. Si des mesures ont été prises pour réduire les risques auxquels la Commission et son personnel doivent faire face, la détérioration du climat de sécurité au Liban compromet, à plus d’un titre, la capacité de la Commission de s’acquitter de son mandat. D’abord, cette situation peut gêner l’évolution des enquêtes dans la mesure où elle limite la capacité de la Commission de réaliser librement, comme par le passé, des entretiens et d’autres activités liées aux enquêtes. Deuxièmement, du fait de l’instabilité actuelle des conditions de sécurité et de la situation politique, certains témoins peuvent hésiter à coopérer avec la Commission. Enfin, les préoccupations concernant la sécurité peuvent entraver la capacité de la Commission de recruter et de conserver, au cours des mois à venir, un personnel qualifié.
V. Appui administratif
A. Recrutement
107. Au cours des quatre derniers mois, la Commission a obtenu quelques résultats encourageants dans le domaine du renforcement de ses effectifs, notamment en ce qui concerne les sections des enquêtes, de la sécurité et des langues. Toutefois, le recrutement demeure un sujet de préoccupation. Sur les 188 postes internationaux approuvés, 125 ont été pourvus, contre 104 à la fin de la période précédente. Sur les 51 postes d’agent recruté sur le plan national, 44 ont été pourvus. La division des enquêtes comprend actuellement 50 fonctionnaires recrutés sur le plan international, dont 30 enquêteurs, analystes et experts techniques.
108. Dans son dernier rapport au Conseil, la Commission a relevé avec préoccupation le problème du recrutement d’un personnel linguistique qualifié, qui continue de jouer un rôle déterminant dans la capacité de la Commission de s’acquitter efficacement de son mandat. Au cours de la période à l’étude, la Commission a enregistré quelques progrès dans ce domaine. En tout, 17 postes des services linguistiques ont été pourvus, contre 3 à la fin de la période précédente. La Commission fait également appel à des interprètes indépendants pour combler les lacunes qui existent dans ce secteur. Le Département de l’Assemblée générale et de la gestion des conférences du Secrétariat de l’ONU a mis à disposition, pour une période de trois mois, les services d’un interprète et d’un traducteur, fonctionnaires de l’Organisation. La Commission lui sait gré de cet appui.
B. Budget
109. En juin 2007, la Commission a soumis une proposition de budget pour 2008. S’agissant d’un budget d’entretien, il n’est pas prévu d’importants changements en matière d’effectifs, hormis une légère augmentation des effectifs du service de sécurité, liée à la nécessité de disposer de locaux distincts pour les bureaux et le logement du personnel.
VI. Conclusions
110. La synthèse des informations, des analyses et des recommandations de la Commission, qui a été entreprise et menée à bien au cours de la période à l’examen, constitue une avancée importante dans l’enquête sur l’assassinat de M. Rafic Hariri. Les 2 400 pages de rapport, qui constituent une synthèse de l’affaire Hariri et des autres affaires, offrent une vue globale des progrès considérables enregistrés à ce jour et un outil qui devrait permettre d’identifier et d’étudier les démarches que la Commission doit encore entreprendre pour parvenir à une compréhension complète des faits liés à ces attentats.
111. Cette entreprise constitue une avancée importante à plusieurs titres. La synthèse ainsi réalisée a contribué à mettre en relief les nombreuses questions qui, pour la Commission, ont trouvé une réponse satisfaisante dans les différents domaines des enquêtes. Elle a également permis à la Commission d’identifier un certain nombre de questions clefs qui restent sans réponse et exigent la poursuite des enquêtes. En offrant une vue globale de l’état des différents domaines des enquêtes, la synthèse a aussi permis à la Commission de mettre au jour nombre de points importants qui sont communs aux différentes affaires. Ces points communs seront étudiés plus avant au cours de la prochaine période d’enquête. Enfin, le rapport de synthèse est un important point de départ de la transition entre la Commission et le Tribunal spécial pour le Liban.
112. La Commission note que le travail de synthèse a permis d’identifier nombre de personnes présentant un certain intérêt ; ces personnes peuvent avoir été impliquées dans l’un ou l’autre volet de la préparation et de la perpétration de l’attentat contre M. Rafic Hariri ou des autres attentats en cours d’instruction ou peuvent avoir eu au préalable connaissance de ces attentats. La Commission accordera un traitement prioritaire à cette piste d’enquête au cours des mois à venir.
113. En s’appuyant sur les résultats de la synthèse, la Commission a élaboré des plans de travail détaillés visant à déterminer les objectifs prioritaires de chaque domaine d’enquête. Ces plans de travail, qui couvrent 150 pages, portent notamment sur les examens médico-légaux, les documents à examiner, les auditions à mener et le recueil d’éléments de preuve supplémentaires. Ils aideront également, dans une large mesure, à faire le meilleur usage possible des ressources limitées de la Commission. La Commission prévoit que la prochaine période d’enquête sera particulièrement active dans la mesure où elle verra l’exécution des tâches prioritaires identifiées dans le cadre de la synthèse. Il est prévu de réaliser plus de 200 entretiens dans l’enquête sur l’affaire Hariri et une centaine pour les 17 autres affaires.
114. Dans tous les volets de ses activités, la Commission continue de bénéficier de la coopération étroite des autorités libanaises et particulièrement du Procureur général et de ses collaborateurs. Témoignant du rythme soutenu des enquêtes, le nombre des demandes d’assistance adressées aux autorités libanaises s’est considérablement accru depuis le dernier rapport de la Commission au Conseil. Les autorités libanaises ont cependant continué de donner toute la suite voulue à ces demandes.
115. La Commission relève également que la République arabe syrienne et d’autres États ont, pour l’essentiel, continué de répondre favorablement à ses demandes d’assistance. Il reste de la plus grande importance que tous les États apportent leur coopération à la Commission pour lui permettre de s’acquitter de sa mission dans les délais voulus. La Commission en appelle donc à tous les États afin qu’ils continuent à donner toute la suite voulue à ses demandes.
116. Depuis le dernier rapport que la Commission a présenté au Conseil, l’instabilité de la situation politique et des conditions de sécurité s’est aggravée au Liban, comme en ont témoigné les combats prolongés dans le camp de réfugiés de Nahr el Bared, l’assassinat de M. Walid Eido et l’attaque menée contre les troupes de la FINUL. Comme indiqué plus haut, la Commission prend toutes les dispositions nécessaires pour limiter les risques qui pèsent sur son personnel et ses locaux. Elle sait particulièrement gré aux forces de sécurité libanaises de l’appui exceptionnel qu’elles lui apportent dans ce domaine.
117. À la lumière de la résolution 1757 (2007) du Conseil de sécurité, la Commission s’attache à assurer un transfert harmonieux des responsabilités entre elle et le Tribunal spécial pour le Liban, lorsque ce dernier deviendra opérationnel. La Commission est disposée à coopérer avec le Secrétaire général de l’ONU et avec le Tribunal spécial pour le Liban concernant toutes les questions relatives à cette transition.
Pour en savoir plus :
Accords de Taëf (23 octobre 1989)
Résolution 1559 (2 septembre 2004) souveraineté du Liban
Rapport Fitzgerald (24 mars 2005)
Résolution 1595 (7 avril 2005) Commission d’enquête
1er rapport sur l’assassinat de Rafik Hariri (Mehlis) (20 octobre 2005)
Résolution 1636 (31 octobre 2005) Comité des sanctions
2ème rapport sur l’assassinat de Rafik Hariri (Mehlis) (10 décembre 2005)
Résolution 1644 (15 décembre 2005) Prorogation de la Commission
Résolution 1655 (31 janvier 2006) Prorogation de la Finul
Document d’Entente CPL-Hezbollah (6 février 2006)
3ème rapport sur l’assassinat de Rafik Hariri (Brammertz) (14 mars 2006)
Résolution 1664 (29 mars 2006) Tribunal pénal international
Résolution 1680 (17 mai 2006) Souveraineté du Liban
4ème rapport sur l’assassinat de Rafik Hariri (Brammertz) (10 juin 2006)
Résolution 1701 (11 août 2006) cessation des hostilités
5ème rapport sur l’assassinat de Rafik Hariri (Brammertz) (25 septembre 2006)
6ème rapport sur l’assassinat de Rafik Hariri (Brammertz) (12 décembre 2006)
7ème rapport sur l’assassinat de Rafik Hariri (Brammertz) (15 mars 2007)
8ème rapport sur l’assassinat de Rafik Hariri (Brammertz) (12 juillet 2007)
– Rapport du groupe de travail sur les détentions arbitraires du Comité des Droits de l’homme de l’ONU (30 novembre 2007) Détention arbitraire des généraux libanais
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