Introduction
1. Le 14 février 2005, une explosion dans le centre-ville de Beyrouth a tué vingt personnes, parmi lesquelles l’ancien Premier ministre, Rafic Bahaeddine Hariri. Ont également été tués Yahia Moustapha el-Arab, Mohammed Ben Saadeddine Darwich, Talal Nabil Nasser, Ziad Mohammed Tarraf, Omar Ahmed el-Masri, Mohammed Riad Hussein Ghalayini, Mazen Adnane el-Dahabi, Yamama Kamel Dharine, Haytham Khaled Osman, Alaa Hassan Asfour, Zahi Halim Abou Rjeyli, Joseph Émile Aoun, Rima Mohammed Raef Bazzi, Ryad Hussein Haidar, Sobhi Mohammed el-Khodr, Abdo Toufic Boufarah, Abdel Hamid Mohammed Ghalayini, Mahmoud Saleh el-Khalaf, Mohammed Saleh el-Hamad el-Mohammed. En sus des tués, Farhan Ahmed el-Issa est toujours porté disparu et présumé victime. 220 autres personnes ont été blessées.
2. Le 15 février, le président du Conseil de sécurité a publié, de la part du Conseil, une déclaration demandant au secrétaire général de « suivre de près la situation au Liban et d’établir d’urgence un rapport sur les circonstances, les causes et les conséquences de cet acte terroriste ». Le secrétaire général a annoncé, le 18 février, qu’il envoyait à Beyrouth une mission de recherche des faits pour réunir autant d’informations que nécessaire afin qu’il puisse faire rapport au Conseil de sécurité de manière diligente. Après un échange de lettres entre le secrétaire général et le président du Liban, une mission dirigée par Peter Fitzgerald, commissaire divisionnaire de la police irlandaise, la Garda Siochina, et comprenant deux policiers enquêteurs, un conseiller juridique et un conseiller politique, a été envoyée au Liban pour réunir les faits au sujet des causes, des circonstances et des conséquences de l’assassinat. En renfort, des experts en explosifs, en balistique, en ADN et en examen de la scène du crime ont été dépêchés le 6 mars, avec l’assentiment des autorités libanaises, pour examiner la scène du crime et les échantillons qui y ont été prélevés.
3. Depuis leur arrivée à Beyrouth le 25 février, les membres de la mission de recherche des faits (citée dans la suite du texte comme « la Mission ») ont rencontré un grand nombre d’officiels libanais, de représentants de différents groupes politiques. Ils ont passé en revue les investigations libanaises et les procédures légales, examiné la scène du crime et les preuves réunies par la police locale, collecté et analysé des échantillons prélevés sur la scène du crime, interviewé en relation avec le crime quelques témoins. Du moment que certaines personnes interviewées ont requis l’anonymat, ce rapport n’inclut pas une liste complète des interviewés. La Mission a clôturé son enquête au Liban le 16 mars 2005. Le présent rapport comprend ses découvertes et ses recommandations.
Découvertes
4. Les découvertes de la Mission s’inscrivent sous les trois catégories définies par le Conseil de sécurité : les causes, les circonstances et les conséquences.
Les causes
5. Les « causes » spécifiques de l’assassinat de M. Hariri ne peuvent être établies d’une manière fiable avant que les coupables ne soient traduits en justice. Il est cependant clair que l’assassinat a eu lieu dans un contexte politique et sécuritaire marqué par une polarisation tenue autour de l’influence syrienne au Liban et par l’échec de l’État libanais à prodiguer une protection appropriée à ses citoyens.
Le contexte politique
6. Le Liban a fréquemment servi de champ de bataille aux protagonistes du conflit arabo-israélien, avec un impact dévastateur sur son unité nationale et sur son indépendance, comme le montrent la tragique guerre civile (1975-1990) et les campagnes militaires variées sur son sol. La Syrie a maintenu une présence militaire au Liban depuis mai 1976 avec le consentement du gouvernement libanais. Elle a aussi exercé une influence politique sur les affaires libanaises, une influence qui a sensiblement augmenté depuis 1990 et qui a été consacrée en 1991 par un traité de « fraternité, de coopération et de coordination ».
7. L’influence syrienne au Liban est généralement restée sans contestation jusqu’à ce qu’Israël retire ses forces du Liban-Sud en 2000. Des pôles politiques ont commencé à élever la voix pour exprimer leur opposition à la perpétuelle influence syrienne, en appelant à compléter l’application des clauses restantes des Accords de Taëf (1989), qui si elle était parachevée aurait substantiellement réduit la présence syrienne au Liban, jusqu’à un possible retrait total. Bien que M. Hariri évitât soigneusement ces débats, ses relations avec le président Émile Lahoud, qui est généralement décrit comme le favori de la Syrie, étaient tendues. Comme l’a dit à la Mission un éminent officiel de sécurité proche de la Syrie, les deux hommes avaient de fréquents conflits durant le mandat de M. Hariri (2000-2004) à un point que cela nécessitait « une intervention extérieure et une médiation sur une base quotidienne ». Le conflit entre M. Lahoud et M. Hariri affectait la capacité de ce dernier à diriger le gouvernement, à mener à bien ses politiques, parfois jusqu’à la paralysie. Les difficultés de M. Hariri avec M. Lahoud étaient largement interprétées comme un signe de défiance de la Syrie à l’encontre du disparu.
8. Le mandat de M. Lahoud dans ses charges aurait dû venir à terme en 2004, sans possibilité de renouvellement, selon la Constitution. M. Hariri espérait clairement que la fin du mandat de M. Lahoud lui permettrait de regagner le contrôle de son gouvernement. Cependant, durant 2004, certaines voix au Liban ont suggéré que l’on amendât la Constitution pour permettre une extension du mandat de M. Lahoud. Cette possibilité est devenue une partie du débat sur la présence syrienne au Liban, qu’elle a alimenté par la suite. Selon la distribution des sièges au Parlement, un amendement constitutionnel nécessitait le soutien du bloc de M. Hariri, un appui qu’il n’était pas préparé à prodiguer. Plus encore, nous avons été informés par des sources fiables que M. Hariri s’était arrangé pour obtenir des dirigeants syriens un engagement à ne pas rallonger le mandat de M. Lahoud.
9. Cependant, la direction syrienne a décidé par la suite de soutenir un rallongement du mandat présidentiel de trois ans au lieu de six. La pression pour la prorogation était considérable, suscitait de la division et conduisait à des conséquences de longue portée. Comme l’a dit à la Mission un officiel libanais proche de la direction syrienne, la décision syrienne adressait à M. Hariri un message clair de devoir partir : « Il n’y avait pas moyen que les deux puissent travailler ensemble. » M. Hariri a rencontré le président Assad à Damas, dans une dernière tentative de le convaincre de ne pas soutenir la prorogation. La mission a reçu des échos de cette rencontre de diverses sources au Liban et ailleurs, toutes les sources affirmant avoir recueilli leurs données auprès de M. Hariri lui-même peu après l’entrevue. La mission n’a pas d’échos du côté de M. Assad : les autorités syriennes ont refusé la demande de la mission de le rencontrer. Les témoignages reçus se recoupent, se corroborent les uns les autres presque verbatim.
10. Selon ces témoignages, M. Hariri a rappelé à M. Assad sa promesse de ne pas chercher à étendre le mandat de M. Lahoud, et M. Assad a répliqué qu’il y avait eu un retournement politique, que la décision était déjà arrêtée. Il a ajouté qu’on devait considérer M. Lahoud comme son représentant personnel au Liban et que « s’opposer à lui revenait à s’opposer à Assad lui-même ». Il a ajouté qu’il (M. Assad) « casserait le Liban sur les têtes de (M.) Hariri et (du leader druze Walid) Joumblatt, plutôt que de voir sa parole cassée au Liban ». Selon les témoignages, M. Assad a alors menacé aussi bien M. Hariri que M. Joumblatt de sévices physiques s’ils s’opposaient à la prorogation pour M. Lahoud. L’entretien, indique-t-on, a duré dix minutes, et c’était la dernière fois que M. Hariri rencontrait M. Assad. Après la rencontre, M. Hariri a dit à ses supporters qu’ils n’avaient pas d’autre option que de soutenir la prorogation pour M. Lahoud. La Mission a également reçu des indications de menaces ultérieures proférées à l’encontre de M. Hariri par des officiels de sécurité au cas où il s’abstiendrait de voter en faveur de la prorogation « ou même au cas où il songerait à quitter le pays ».
11. Le 2 septembre 2004, le Conseil de sécurité a adopté la résolution 1559 qui, entre autres clauses, appelle « toutes les forces étrangères restantes à se retirer du Liban » et « déclare son soutien à un processus électoral libre et juste au Liban, à une élection présidentielle organisée conformément aux règles constitutionnelles libanaises en vigueur sans interférence ou influence étrangère ». On croit ferme, au Liban et ailleurs, que M. Hariri a prodigué un appui actif à cette résolution. De nombreuses sources au Liban ont informé la Mission que la direction syrienne a tenu M. Hariri personnellement responsable de l’adoption de cette résolution qui a marqué la fin d’une quelconque confiance ayant pu exister entre les deux parties. Le 3 septembre, le vote sur la prorogation a eu lieu au Parlement. M. Hariri et son bloc ont voté en sa faveur. Trois ministres ont voté contre, dont Marwan Hamadé, un proche allié aussi bien de M. Hariri que de M. Joumblatt. L’amendement a passé, et le mandat de M. Lahoud a été rallongé de trois ans. Le 9 septembre, M. Hariri a annoncé sa démission.
12. La tension politique a atteint un nouveau sommet avec cette démission. Un nombre croissant de pôles politiques ont alors rejoint ce que plus tard on a appelé l’« opposition ». Qui militait surtout pour un réexamen des relations syro-libanaises. Certains leaders opposants préféraient que la révision de ces relations se fasse en base de la résolution 1559 (2004) ; d’autres, en base des Accords de Taëf. Les prochaines élections législatives étaient largement considérées comme devant constituer un tournant, et il était clair que les protagonistes se préparaient pour une lice finale. Jusqu’à la prorogation pour M. Lahoud, l’opposition était principalement composée de politiciens et de groupes chrétiens. La décision de M. Joumblatt et de son bloc de s’y rallier, d’y unir leurs forces a constitué un développement majeur dans la mesure où la coalition opposante débordait désormais les lignes confessionnelles, particulièrement en regard de l’alliance traditionnelle de M. Joumblatt avec la Syrie. La démission de M. Hariri a apporté à l’opposition un surcroît de force en y faisant entrer la large et influente communauté sunnite.
13. Le 2 octobre, l’ancien ministre Marwan Hamadé a échappé à la mort de justesse quand une bombe a explosé près de sa voiture. Son garde du corps a été tué dans l’explosion. L’attentat contre la vie de M. Hamadé a soulevé une vague de choc à travers le Liban et a rajouté au clivage. Les coupables de la tentative d’assassinat n’ont pas été identifiés, et l’impression générale était qu’ils ne le seraient pas. Une atmosphère tendue a régné sur une scène libanaise « où chacun était sous la menace », comme plus d’un officiel de sécurité l’a dit à la Mission. Une large frange de gens, au Liban et ailleurs, ont dit à la Mission que M. Hariri et M. Joumblatt craignaient pour leur vie et voyaient dans l’attentat contre la vie de M. Hamadé une résultante de la lutte de pouvoir engagée avec la direction syrienne.
14. Dans le sillage de cette escalade de la tension, la consolidation de la coalition de l’opposition se poursuivait, en même temps que les préparatifs pour les prochaines élections législatives. Des contacts et des négociations ont eu lieu entre M. Joumblatt, M. Hariri et le leader maronite exilé M. Michel Aoun. Fin janvier 2005, il y avait un formidable bloc puissant émergent au Liban, du fait que se retrouvaient ensemble, pour la première fois, des représentants de presque toutes les communautés politiques ou religieuses, à l’exception notable des groupes chiites Amal et le Hezbollah. Ce bloc de pouvoir était indépendant de l’influence syrienne, sinon hostile à cette influence, et se montrait confiant de remporter une claire majorité lors des élections à venir. Il bénéficiait aussi du soutien de joueurs principaux de la communauté internationale et semblait confiant dans ses capacités de forcer la Syrie à appliquer les engagements restants sous le couvert de l’accord de Taëf et/ou de la résolution 1559 (2004). Au centre de ce bloc de pouvoir, un homme se dressait comme architecte reconnu : l’ancien Premier ministre Rafic Hariri. Le 14 février, il a été assassiné.
15. Il est clair que l’assassinat de M. Hariri s’est inscrit dans la trame de sa lutte de pouvoir avec la Syrie, nonobstant qui a bien pu perpétrer cet assassinat et dans quel but. Il est toutefois important de garder en tête que seule une enquête véritable – et non une analyse politique – peut mener à l’identification de ceux qui ont ordonné, planifié et exécuté ce crime abject. Ce serait une violation des principes de base de la justice de sauter aux conclusions au sujet des coupables de cet assassinat sans une enquête véritable, des preuves convaincantes et un procès en règle.
Le contexte sécuritaire
16. M. Hariri a été unanimement décrit à la Mission comme « la personnalité la plus importante de la vie publique libanaise ». Son assassinat soulève donc la question du niveau de protection qui lui était assuré par l’appareil sécuritaire libanais. Le système sécuritaire libanais est formé de plusieurs agences. Les services de renseignements militaires y occupent une place primordiale ; ils sont chargés de la sécurité nationale, des missions de contre-espionnage et contre-terrorisme. De plus, ils sont une force de frappe. Ils disposent également d’une section d’interception des communications. La Sûreté générale s’occupe des questions relatives aux étrangers, aux passeports et aux frontières, sans parler des questions de sécurité liées à la politique. Les Forces de sécurité intérieure comprennent une force de police et un service de collecte d’informations. La sécurité de l’État est responsable des questions sécuritaires liées à la politique. La garde républicaine est chargée d’assurer la protection du président, sous le contrôle du commandant en chef de l’armée. Les services de renseignements militaires syriens ont un bureau central en Syrie, avec des bureaux dans plusieurs endroits, y compris Beyrouth. Contrairement aux affirmations faites à la Mission par le chef de ces services, les preuves et les témoignages nous poussent à croire sans aucun doute que cette branche (des SR syriens) jouait un rôle crucial dans la vie politique libanaise et participait activement, pour ne pas dire supervisait directement, la gestion des questions sécuritaires au Liban.
17. Selon les règles et lois en vigueur, ces différentes agences coordonnent leurs activités entre elles et font toutes partie d’un Conseil central de sécurité qui se réunit une fois par mois sous la direction du ministre de l’Intérieur. Toutefois, de nombreuses sources, y compris des responsables sécuritaires, des ministres et d’anciens présidents, ont affirmé qu’en pratique, les choses se passaient différemment. D’abord, la coopération entre les différents services est quasi inexistante : ledit Conseil est plus un organe formel qu’un mécanisme de coordination. Ensuite, la transmission des informations suit les allégeances personnelles et politiques plutôt que les dispositions constitutionnelles. Les responsables sécuritaires transmettent les informations importantes à « ceux qui les ont nommés, à qui ils portent allégeance », en laissant au Conseil central de sécurité les formalités et les questions superflues. De plus, on note un grave manque de supervision ou/et de révision judiciaire de l’activité des agences de sécurité. Par exemple, la section d’interception des communications des renseignements militaires est autorisée à intercepter n’importe quelle communication qu’elle juge nécessaire, et cela ne nécessite que la signature du chef de l’agence sans aucune supervision ou révision externe. Parallèlement, le manque, voire l’absence de responsabilisation semble évident, excepté celle qui s’inscrit dans le cadre des allégeances informelles et extraconstitutionnelles.
18. Ce contexte explique partiellement le manque de confiance que semblent éprouver les Libanais vis-à-vis de leurs agences de sécurité. Toutes les personnes interrogées par la Mission, presque sans exception, y compris certains responsables sécuritaires, ont déclaré douter de la capacité et/ou de la volonté des agences de sécurité d’assurer la protection des personnalités politiques menacées. Alors que certains ont accusé l’appareil sécuritaire d’être directement impliqué dans les menaces adressées aux hommes politiques, d’autres ont affirmé que les hommes politiques devaient se protéger par leurs propres moyens, ou encore, que l’appareil sécuritaire n’était pas assez puissant pour protéger les personnes menacées. Beaucoup ont souligné qu’un grand nombre d’assassinats politiques se sont produits au Liban au cours des trente dernières années dont la plupart n’ont pas été élucidés jusqu’à ce jour.
19. Suite aux entretiens effectués avec nombre de responsables sécuritaires, y compris les chefs des services de renseignements militaires, du Département des forces spéciales et de contre-terrorisme, du Département d’interception des communications, de la Sûreté générale, des Forces de sécurité intérieure, et de la garde républicaine, la Mission a conclu que l’appareil de sécurité libanais avait gravement failli à sa responsabilité de prévoir et d’empêcher l’assassinat de M. Hariri. Malgré les rumeurs sur des menaces d’atteinte physique à M. Hariri et/ou à M. Joumblatt, ou même d’atteinte à leur vie et/ou à celle de membres de leurs familles, et malgré l’attentat contre l’ancien ministre Marwan Hamadé, aucun service de sécurité n’a pris de mesures supplémentaires pour les protéger.
20. Tous les services de sécurité nient avoir reçu des informations sur une menace réelle ou éventuelle contre MM. Hariri, Joumblatt, ou leurs familles. Néanmoins, toutes les personnes en dehors des services de sécurité interrogées par la Mission semblaient être au courant de telles menaces. De plus, en dépit de la tension accrue, aucun service de sécurité n’a préparé une « évaluation de risque » sur la sécurité de M. Hariri, « la personnalité politique la plus importante au Liban ». Aucun de ces services n’a proposé, conseillé, ou essayé d’augmenter le niveau de protection assurée à M. Hariri. Bien au contraire, l’équipe de protection personnelle assurée par les Forces de sécurité intérieure et composée de quarante membres a été réduite à huit personnes peu après son départ du pouvoir. Bien que cette réduction soit conforme aux réglementations en vigueur, elle néglige les circonstances du moment. Au moment de l’assassinat, la protection de M. Hariri était presque entièrement assurée par son équipe de sécurité privée.
21. Lorsque la Mission a évoqué ce point avec des responsables sécuritaires libanais, beaucoup d’entre eux ont affirmé que le concept de « prévention » était étranger à la gestion de la sécurité au Liban. Cet argument est inadmissible : la prévention est essentielle et fait partie intégrante de tout système de sécurité actif. De plus, cet argument est faux : la garde républicaine nous a déclaré qu’elle préparait régulièrement des « évaluations de risques » relatives à la sécurité du président, comprenant une évaluation des menaces et risques auxquels il fait face, en se basant sur l’analyse de la situation politique, des rumeurs, et de la situation sécuritaire en général. Un système de sécurité actif, crédible et professionnel aurait préparé et entretenu une telle évaluation de risques portant sur la sécurité de la « personnalité politique la plus importante au Liban ».
22. Pour toutes les raisons sus-mentionnées, la Mission estime que l’appareil sécuritaire libanais n’a pas pu assurer la protection qu’il fallait à M. Hariri, créant ainsi un contexte qui facilitait son assassinat.
Les circonstances
23. En enquêtant sur les faits liés aux circonstances, la Mission a identifié les derniers déplacements de M. Hariri juste avant l’attentat, déterminé l’origine de l’explosion, le type et le poids des explosifs utilisés, et révisé les principales pistes de l’enquête menée par les autorités libanaises, selon les normes internationalement reconnues. La révision de l’enquête porte sur les éléments essentiels suivants : la gestion de la scène du crime, la préservation des preuves, l’enquête sur la vidéo revendiquant l’attentat et diffusée par la chaîne de télévision al-Jazira, l’enquête sur l’auteur soupçonné de l’attentat et sur le véhicule suspect, ainsi que sur des remarques générales sur l’honnêteté de l’enquête.
Les derniers déplacements de Hariri
24. Lundi 14 février 2005, vers 12h30, M. Hariri est sorti du Parlement situé au centre de Beyrouth et a marché environ 70 mètres en direction d’un café (place de l’Étoile) de la place de l’Étoile où il a rencontré des gens. Vers 12h50, il a quitté le café en compagnie de l’ancien ministre et député Bassel Fleyhane. Son convoi sécuritaire était composé de 6 véhicules : le 1er, une jeep avec quatre hommes de police libanais (la tête de convoi) ; le 2e, une Mercedes noire avec trois agents de sécurité privés ; le 3e, une Mercedes noire blindée que conduisait Hariri accompagné de M. Fleyhane ; le 4e, une Mercedes noire avec à son bord trois agents de sécurité privés ; le 5e, une Mercedes noire avec à son bord trois agents de sécurité privés ; et le 6e, une jeep noire (une ambulance) clôturant le convoi avec à son bord trois agents de sécurité privés. Trois des véhicules étaient équipés de brouilleurs de signaux à forte puissance (4GHz), qui étaient en activité au moment du drame. Tous les véhicules étaient équipés d’armes à feu et tous les gardes du corps étaient bien entraînés.
25. L’itinéraire choisi n’a été communiqué à la tête du convoi qu’au moment où M. Hariri quittait le café. Le convoi est sorti de la place de l’Étoile et a pris la rue Ahdab et la rue Foch. Au croisement de la rue Foch et de la rue du Port, le convoi a bifurqué à gauche et a pris la route côtière en direction de Aïn Mreïssé et de l’hôtel Saint-Georges.
26. À 12h56 pile, le convoi de M. Hariri passait directement devant l’hôtel Saint-Georges, une route qu’il n’avait prise que six fois au cours des trois derniers mois. Une grande explosion s’est produite, causant la mort de M. Hariri, de sept de ses gardes du corps, et de douze civils dans les alentours immédiats. M. Hariri a été transporté à l’hôpital de l’Université américaine (AUH) où son corps a été identifié par son médecin personnel et par le médecin légiste désigné par le gouvernement. L’identification a été possible grâce à des marques corporelles, aux rayons X et aux registres dentaires de M. Hariri. La cause du décès est une lésion directe au cerveau ayant provoqué un arrêt cardiaque.
L’explosion
27. La Mission a examiné, analysé et effectué des tests sur la scène de l’explosion durant une période de sept jours. Son avis sur la nature et le type de l’explosion se base sur l’interprétation fournie par ses experts sur base de quatre éléments essentiels : a) la dispersion, la taille et la forme des fragments résultants de l’explosion ; b) la taille et la forme du cratère créé par l’explosion ; c) des interprétations balistiques et d) des interprétations des dommages causés aux immeubles dans et autour de la scène de l’explosion.
28. L’analyse des fragments causés par l’explosion et de la forme du cratère donne des indices qui soutiennent aussi bien l’hypothèse d’une explosion en surface que celle d’une explosion souterraine. Toutefois, l’analyse du dommage causé aux immeubles dans et autour de la scène du crime suggère une explosion en surface. Les fragments de métal fondu sont un indice certain d’une grande charge explosive ; le fait que les experts de la Mission aient retrouvé des traces de métal fondu sur les véhicules et sur des barrages métalliques placés devant l’hôtel Saint-Georges favorisent la thèse d’une explosion en surface. Des fragments métalliques retrouvés collés sur le bord des voitures indiquent l’explosion d’un véhicule lourd et la dispersion de ces fragments dans cette direction.
29. Plusieurs indices marquant une explosion souterraine, comme les fragments d’asphalte, des plaques d’égouts ou autres retrouvés dans les étages supérieurs de l’hôtel Saint-Georges, l’impact sur le dos des véhicules et le dommage infligé aux parties supérieures des immeubles adjacents, n’écartent pas la thèse d’une grande explosion en surface.
30. Après avoir mené et débattu de toutes les analyses des échantillons recueillis, les experts de la Mission ont conclu qu’il s’agissait très probablement d’une explosion en surface, que l’explosif utilisé était le Trinitrotoluène (TNT), d’un poids d’environ 1 000 kg.
La scène du crime
31. La scène du crime est située à Aïn Mreïssé, Beyrouth, devant l’hôtel Saint-Georges. Le résultat immédiat de l’explosion est une scène de chaos, avec des services d’urgence de plusieurs agences, des journalistes, et des centaines de passants ou de résidents de Beyrouth qui se précipitent sur le lieu du drame pour aider et observer. L’évacuation des corps et des blessés a commencé presqu’immédiatement. Une grande partie de ces efforts a été effectuée par des personnes arrivées sur place avant les services d’urgence.
32. Immédiatement après l’explosion, le 14 février, le tribunal militaire et le juge Rachid Mezher dudit tribunal ont été saisis de l’enquête et le tribunal s’est chargé de l’entière responsabilité de l’enquête, y compris la gestion de la scène du crime et la préservation et la collecte des preuves par les autorités locales compétentes. Comme il s’agit d’une question touchant à la sécurité de l’État, le dossier a été transmis à la Cour de justice conformément aux lois en vigueur et le 21 février, le juge Michel Abou Arrage, juge principal de la cour pénale, a été chargé de l’enquête à la place du juge Rachid Mezher.
33. Les faits suivants ont clairement montré dès le début que les principales démarches liées à cette responsabilité n’avaient pas été effectuées :
a) La découverte, le 15 février, du corps d’une personne ayant survécu près de douze heures à l’attentat.
b) La découverte d’un corps par hasard le 22 février 2005.
c) La découverte du corps d’une personne par les membres de sa famille le 1er mars 2005.
d) Une personne a été portée disparue et l’on soupçonne qu’elle soit encore sur la scène de l’explosion.
La préservation des preuves
34. La préservation des preuves, élément vital pour le succès de toute enquête, demeure secondaire par rapport à la préservation de la vie et la récupération des corps. Dans ce cas comme dans toute autre situation d’urgence majeure, la préservation de la scène du crime n’était pas la première préoccupation des membres des services d’urgence arrivés sur place. Toutefois, après le chaos initial et l’évacuation des corps et des blessés, les services de sécurité, sous la direction et le contrôle du juge chargé de l’enquête, Rachid Mezher, devaient avoir évacué toutes les personnes présentes sur le terrain et interdit tout accès non autorisé au site. Après une recherche détaillée dans la zone pour s’assurer que tous les corps et les blessés ont été retrouvés, le site aurait dû être suffisamment sauvegardé pour préserver toutes les preuves disponibles. Les autorités compétentes ne l’ont pas fait.
35. La Mission a également noté les défaillances suivantes :
a) Le 14 février, peu avant minuit, les six véhicules formant le convoi de M. Hariri et une BMW (non liée au convoi) ont été évacués de la scène de l’explosion et transportés à la caserne Hélou à Beyrouth. Bien que les véhicules aient été couverts après leur évacuation, ils n’étaient plus désormais dans leur emplacement respectif sur les lieux de l’explosion, empêchant ainsi toute analyse balistique, analyse d’explosifs et collecte de preuves sur le site.
b) La police militaire et les services de renseignements, y compris les experts en explosifs, sont intervenus et ont retiré de possibles preuves sans les répertorier ni les documenter et sans informer quiconque de leurs agissements et initiatives.
c) Les médias ont eu immédiatement accès au site après l’explosion. Le juge Mezher leur a également accordé des permis d’accès officiels au lendemain de l’attentat (le 15 février) après que les services de sécurité eurent encerclé le site.
d) Le cratère de l’explosion a été inondé au cours des jours suivant l’assassinat. Les autorités locales / la police n’ont pas réussi à endiguer le flot des eaux en provenance des canalisations endommagées. Ainsi, des indices de première importance ont été perdus.
e) Après l’attentat, des membres des services de sécurité ont apporté des débris de camion sur le lieu du crime ; ils les ont déposés dans le cratère, puis photographiés et consignés comme étant des preuves.
f) La Mission a également observé que jusqu’au 6 mars 2005, un grand nombre de civils ou de personnes en uniforme ont circulé sur les lieux du crime. Les personnes ayant pénétré ou quitté le site n’ont pas été répertoriées. De plus, aucun contrôle n’a été exercé lors du dépôt ou retrait des objets / échantillons sur le lieu du crime.
g) Le 8 mars 2005, au cours d’une rencontre avec l’équipe en charge de l’enquête locale, les membres de la Mission ont demandé un rapport chronologique relatif au lieu du crime ; c’est-à-dire le personnel ayant eu accès au site, les indices rassemblés, les pièces à conviction, les tests et les informations sur la gestion des lieux. Le 15 mars 2005, la Mission fut informée qu’un tel rapport n’existait pas et n’était pas, par conséquent, disponible.
h) Il existe des preuves attestant que les juges en charge de l’enquête n’avaient aucun contrôle sur le processus d’investigation.
i) Les agences du gouvernement / des services de renseignements ont accédé au site de l’attentat sans la supervision d’une autorité légale et n’ont donc pas réussi à coordonner leurs recherches.
36. La Mission estime donc que le lieu du crime n’a pas été convenablement géré ou préservé. Ainsi, des indices importants ont été retirés ou détruits sans avoir été répertoriés. Les personnes responsables de cette mauvaise gestion devraient en rendre compte.
Diffusion par la chaîne câblée al-Jazira
37. Le 14 février 2005 à environ 13h30, le directeur et présentateur principal de la chaîne al-Jazira à Beyrouth a reçu un appel téléphonique d’un homme qui, selon lui, parlait mal l’arabe ou prétendait ne pas maîtriser cette langue. L’homme lui a déclaré qu’« au nom des opprimés, le groupe Nasra et Jihad de la Grande Syrie revendiquait la responsabilité de la mise à mort de l’agent Hariri ». La chaîne al-Jazira a diffusé cette déclaration à environ 14 heures. À 14h19, un autre homme « parlant un très bon arabe » a contacté al-Jazira affirmant qu’un film vidéo avait été déposé près du bâtiment des Nations unies à Beyrouth. Un employé fut dépêché sur place pour retirer ce film, mais ne réussit pas à le faire. Un autre employé fut alors envoyé pour retrouver cette vidéo ; la cassette fut retirée et envoyée au directeur. À 15h27, la chaîne reçut un troisième appel d’un homme qui demandait pourquoi la vidéo n’avait pas été diffusée. Le directeur l’informa qu’il fallait d’abord obtenir l’autorisation du quartier général au Qatar. L’homme, qui s’était mis à hurler, menaça le directeur, lui disant qu’il regretterait de ne pas avoir diffusé cette vidéo. À 17h04, al-Jazira reçut un dernier appel téléphonique ; la même voix masculine, très en colère, demanda au directeur si la vidéo serait diffusée. Le directeur mit l’appel en attente puis fut informé qu’elle le serait. L’interlocuteur fut alors prié de regarder la télévision. La vidéo, diffusée par la chaîne al-Jazira, montrait un jeune homme barbu annonçant sa responsabilité dans l’assassinat de M. Hariri au nom du groupe « Nasra et Jihad de la Grande Syrie ». La personne sur la vidéo a été identifiée ; il s’agissait d’Ahmed Abou Adas, résidant à Beyrouth et âgé de 22 ans.
38. À la même date, le 14 février 2005 à 14h11, une consultante de l’agence Reuters reçut un appel téléphonique d’une personne ayant une voix masculine et n’ayant pas l’accent libanais mais « imitant l’accent palestinien ». Elle déclare que l’interlocuteur criait et qu’il lui avait enjoint d’une voix autoritaire : « Écris, écris et ne parle pas », « nous sommes le groupe Nasra et Jihad de la Grande Syrie ; en ce jour, nous avons infligé à l’infidèle Rafic Hariri le châtiment qu’il méritait, et que cela serve d’exemple aux autres gens de son espèce. » Suivant les instructions reçues, les employés de Reuters ne diffusèrent pas le contenu de cet appel car ce dernier n’avait pas été authentifié.
39. Sur les cinq appels adressés à al-Jazira et à Reuters, il a été possible de localiser la source / le lieu d’origine de quatre appels seulement. D’après la police, il s’agissait de téléphones publics dans la ville de Beyrouth. Le fait qu’une ou plusieurs personnes liées à l’assassinat de M. Hariri aient fait parvenir une vidéo représentait une piste importante pour les forces de sécurité libanaises. Cependant, les autorités chargées de l’enquête n’ont quasiment pas exploité cette piste. À aucun moment l’enquête n’a porté sur les caméras de surveillance placées à deux endroits stratégiques, mentionnés par les membres de la Mission. Les témoins travaillant dans le secteur n’ont pas été interrogés bien qu’ils aient été également identifiés par la Mission. Les enquêtes de base n’ont pas non plus été menées. Les personnes responsables de cette partie de l’enquête ont fait preuve d’une grosse négligence.
Le suspect
40. Ahmed Abou Adas est un jeune homme d’origine palestinienne. Né à Djeddah (Arabie saoudite) le 29 août 1982, il est arrivé au Liban avec sa famille en 1991. Ses parents sont Tayssir Abou Adas et Nohad Moussa Fateh. Il a deux sœurs (toutes deux résidant à Beyrouth) et un frère (actuellement en Allemagne). Il était au chômage. L’enquête a révélé que le 16 janvier 2005 à environ 07h00, Ahmed Abou Adas a quitté son domicile au premier étage de l’immeuble Iskandarani 6, dans le quartier de l’Université arabe à Beyrouth. Il fut officiellement porté disparu le 19 janvier 2005.
41. D’après l’enquête menée par la Mission, Ahmed, l’adolescent insouciant, est devenu un fondamentaliste religieux il y a trois ans. Environ un mois avant d’avoir été porté disparu, Ahmed avait raconté à sa famille qu’il avait fait la connaissance d’un nouvel ami à la mosquée al-Houri où il faisait parfois ses prières. D’après la mère d’Abou Adas, le 15 janvier à environ 21h00, l’ami en question avait appelé la maison pour donner rendez-vous à son fils le 16 janvier 2005 à 07h00, disant qu’il lui avait préparé une surprise. Toujours d’après la mère, le 16 janvier à 07h00, quelqu’un avait klaxonné en dessous de l’immeuble pour appeler Ahmed. Ce dernier était déjà debout. Il avait fait sa prière du matin. Il a demandé de l’argent à sa mère mais n’a pris que 2 000 livres libanaises (l’équivalent d’un dollar et 33 cents) et a annoncé qu’il serait absent pour quelques heures seulement. Ahmed aurait demandé à sa mère de s’excuserde sa part auprès d’un autre ami à qui il avait donné rendez-vous le même jour.
42. Le 14 février 2005, la famille Abou Adas regardait la télévision lorsque la chaîne al-Jazira diffusa la vidéo montrant Ahmed endossant la responsabilité de l’assassinat de M. Hariri au nom du groupe « Nasra et Jihad de la Grande Syrie ». Le 14 février à 20h30, le père, la mère et la jeune sœur se rendirent à la police et furent arrêtés tous les trois. Les parents furent détenus environ sept jours, mais la jeune sœur fut libérée dès le deuxième jour. Dans le cadre de l’enquête sur Ahmed Abou Adas, sa famille fut arrêtée et interrogée, les amis furent interrogés, les appels téléphoniques examinés et la maison perquisitionnée. D’après les informations résultant de l’enquête, Ahmed Abou Adas possédait un ordinateur chez lui ; il fut confisqué comme pièce à conviction. Les autres objets confisqués comprenaient : 11 vidéos, 55 CD, une disquette floppy et un disque dur. Mis à part les données / informations subversives soi-disant trouvées sur le disque dur, il y a très peu de preuves qu’Ahmed Abou Adas avait des tendances violentes ou subversives.
43. L’enquête sur cette partie du crime a révélé les manquements suivants :
a) Les officiers chargés de l’enquête avaient assuré à la Mission qu’Ahmed Abou Adas avait accès à l’Internet à partir de sa maison et que les informations contenues sur le disque dur de l’ordinateur avaient été téléchargées directement sur l’ordinateur à la maison dudit Ahmed. Cependant, l’enquête effectuée par la Mission a révélé qu’Ahmed Abou Adas n’avait pas accès à l’Internet à partir de sa maison et qu’il ne pouvait pas par conséquent avoir eu accès aux sites susmentionnés à partir de son ordinateur. L’enquête menée par la Mission prouve que les forces de sécurité n’ont pas enquêté auprès des cybercafés afin de déterminer l’origine des données soi-disant trouvées sur l’ordinateur d’Ahmed Abou Adas.
b) Il existe très peu d’indices soutenant la théorie qu’Ahmad Abou Adas avait des tendances de militant extrémiste.
c) Il n’y a aucune preuve qu’Ahmed Abou Adas avait planifié son départ ou bien qu’il ne reviendrait pas après avoir quitté son domicile le 16 janvier 2005.
d) Il n’y a aucun renseignement disponible sur un groupe intitulé « Nasra et Jihad de la Grande Syrie », que ce soit avant ou après l’explosion.
e) Cet assassinat nécessite l’accès à d’importantes ressources financières. Sa mise en application nécessite également une précision militaire et un support logistique important. Il dépasse donc les capacités d’un simple individu ou un petit groupe terroriste. Aucun indice ne suggère qu’Ahmed Abou Adas disposait des ressources financières ou des moyens de planifier et de perpétrer seul cet assassinat.
Le véhicule suspect
44. Une branche de la banque HSBC est située près du lieu de l’explosion. La banque dispose de son propre système de caméras de sécurité. Ces dernières ont enregistré les mouvements du convoi de Hariri juste avant l’explosion sans pour autant enregistrer l’explosion. Plusieurs services libanais de sécurité ont pris des copies de l’enregistrement de ces caméras après le début de l’enquête. Un examen minutieux des images montre qu’un camion pick-up blanc avait pénétré l’aire d’explosion juste avant le convoi de M. Hariri. L’enregistrement montre clairement que ce camion avançait six fois plus lentement que tous les autres véhicules traversant le même tronçon de route. Une analyse du rapport temps / vitesse a été menée sur les 50 à 60 mètres couverts par la caméra. Une voiture normale mettrait 3 à 4 secondes à couvrir ce tronçon. Un grand camion avançait besoin de 5 à 6 secondes pour couvrir la même distance. Le pick-up suspect, quant à lui, a mis environ 22 secondes pour traverser cette distance et pénétrer l’aire d’explosion une minute 49 secondes avant le convoi de Hariri. D’après les estimations, si le pick-up avait continué à la même vitesse, il aurait été exactement au centre de l’explosion environ une minute neuf secondes avant le convoi de Hariri. Toujours d’après les estimations, si le pick-up avait poursuivi sa route à la même vitesse et sans s’arrêter, il aurait été touché par l’explosion et serait probablement resté sur le lieu du crime. S’il avait voulu éviter l’explosion, le pick-up aurait dû considérablement accélérer après être sorti du champ de vision des caméras de surveillance de la HSBC. Il n’y a aucune preuve de cela.
45. Les officiers libanais chargés de l’enquête ont estimé que ce pick-up et son comportement suspect ouvraient la voie à une importante piste pour l’enquête. La marque et le modèle du véhicule ont été identifiés : il s’agit d’un Mitsubishi Canter (modèle datant probablement de 1995-1996).
Dans le cadre de leur enquête, les forces de sécurité libanaises ont surtout tenté d’identifier le propriétaire : ils ont tenté de retrouver la liste de ses précédents propriétaires grâce aux papiers de la voiture, aux contrôles aux frontières ou aux documents de vente ou de construction. Au cours des recherches sur le site, les forces de sécurité ont supposément découvert des débris de pick-up conformes au modèle du véhicule suspect et ayant apparemment subi une explosion. D’après la police, 21 débris de ce véhicule auraient été trouvés sur le lieu de l’explosion et dans les alentours. Les forces de sécurité chargées de l’enquête se concentrent principalement sur cette piste. La Mission a déterminé que le pick-up, tel qu’il est apparu sur les écrans des caméras de surveillance de la HSBC, a bel et bien existé et qu’il était sur le lieu du crime juste avant l’explosion qui a causé la mort de Rafic Hariri. La Mission reconnaît également que la théorie selon laquelle ce camion aurait eu un rôle à jouer dans cette opération d’assassinat est crédible ; elle requiert une enquête complète et plus approfondie. Les forces de sécurité libanaises ont retrouvé à l’intérieur du cratère et dans les alentours de petits débris appartenant à un camion Mitsubishi. Elles ont également trouvé des débris du camion dans la mer qui est adjacente au lieu de l’explosion. La Mission a également retrouvé un bout de métal à l’intérieur du cratère ; il est similaire au genre de métal utilisé dans la fabrication des pièces de camion ; il porte des traces qui permettent d’appuyer la théorie d’une explosion en surface / au-dessus du sol.
46. Cependant, l’enquête à ce niveau n’a pas été complète. Il est de l’avis de la Mission que ce que les forces de sécurité ont fait ou ont omis de faire sur le terrain a considérablement nui à l’enquête :
a) Environ un mois après l’assassinat, les forces de sécurité ont peu ou n’ont pas tenté de déterminer les mouvements de ce camion suspect avant, vou juste après l’explosion. Cette partie de l’enquête aurait pu permettre de découvrir des indices d’une importance capitale tels que l’identité du (ou des) coupable(s), le lieu de stationnement du camion juste avant l’explosion et, surtout, si ce dernier avait continué son chemin sans être impliqué dans l’assassinat de quelque manière que ce soit.
b) La Mission estime que peu, voire pas d’efforts ont été faits pour savoir si le pick-up suspect avait continué son chemin. De plus, les efforts pour retrouver les séquences des caméras de surveillance ou les témoins présents sur la route après l’explosion ont été quasiment nuls.
c) La Mission peut affirmer sans le moindre doute que peu de temps après l’assassinat, un membre des forces de sécurité a apporté des pièces de camion et les a déposées sur le cratère. Les forces de sécurité ont ensuite photographié les débris dans le cratère. Cette ligne de conduite fait naître de sérieux doutes quant au rôle joué par ce camion dans l’assassinat. De plus, elle sape la crédibilité de la piste d’enquête la plus probante. Cette dernière est désormais quasi inutilisable, sans parler du fait qu’elle ouvre la voie à des questions sur la crédibilité et les initiatives judiciaires.
47. En somme, la manière dont a été menée cette partie de l’enquête montre de grosses négligences, peut-être accompagnées d’actions criminelles dont les responsables devront répondre.
Évaluation globale de l’enquête
48. Outre les déficiences mentionnées ci-dessus, la Mission a noté les manquements suivants dans l’enquête libanaise :
a) Les membres de l’équipe en charge de enquête locale ont fait preuve d’un manque flagrant de communication.
b) Les juges en charge de l’enquête et les forces de sécurité chargées de l’enquête ont souffert d’un manque de coordination.
c) Les hauts responsables chargés d’enquêter sur la totalité du meurtre ont fait preuve d’un manque de rigueur et de contrôle.
d) Les techniques employées au cours de l’enquête ont été utilisées avec un manque de professionnalisme.
e) Il n’existe aucune information provenant des services de renseignements. De plus, les divers services travaillant sur cette enquête ont peu, voire pas du tout, communiqué entre elles.
f) Les équipements et le matériel technique nécessaires dans ce genre d’enquête ont fait défaut.
49. À la lumière de ce qui précède, la Mission tire les conclusions suivantes : l’enquête n’a pas été menée avec volonté d’effectuer une investigation efficace ; elle n’est également pas conforme aux normes internationales en vigueur. La Mission estime également que l’enquête locale n’a ni les capacités ni l’engagement qui lui permettent d’aboutir aux résultats escomptés, sans parler du fait qu’elle ne jouit pas de la confiance du peuple qui ne lui accorde que peu de crédibilité.
50. L’assassinat de M. Hariri a eu l’effet d’un séisme au Liban. Perplexité, anxiété et incrédulité caractérisaient la principale réaction des gens avec lesquels nous avons parlé. Perplexité car les pratiques que la plupart pensaient être révolues semblaient réapparaître. Incrédulité face au meurtre d’un homme que les gens plaçaient au rang des figures immortelles. Enfin, anxiété que le Liban ne replonge dans le chaos à la suite de ce « séisme ». Ces sentiments ont vite fusionné en un cri fort et unifié réclamant « la vérité ». Tous ceux qui ont parlé à la Mission ont clairement signalé que la vérité sur l’assassinat de M. Hariri était leur plus grande priorité et que la paix et la sérénité ne pouvaient être rétablies au Liban si cette question n’était pas dûment résolue. Beaucoup ont rappelé à la Mission les assassinats politiques précédents qui n’ont pas fait l’objet d’enquêtes convenables et n’ont pas abouti à des résultats convaincants. Tous les interlocuteurs ont convenu que cet assassinat était la goutte qui a fait déborder le vase, que ce qu’ils ont qualifié de « culture d’intimidation et de force brutale » devait prendre fin et que les Libanais et leurs chefs politiques méritaient de vivre loin de la peur, de l’intimidation et de la menace physique.
51. Les familles des victimes étaient toujours sous le choc quand la Mission les a rencontrées. La famille de M. Hariri n’arrivait toujours pas à croire qu’un homme qui a consacré sa vie au service de son pays puisse être éliminé aussi simplement et que la vérité concernant son meurtre dépende d’une enquête dont la crédibilité est mise en question. Les familles des autres victimes – les gardes du corps, les ouvriers, les passants, et tous ceux qui ont été accidentellement tués – n’arrivent toujours pas à comprendre ce qui leur est arrivé ou pourquoi ceci leur est arrivé. Parler des capacités des services de sécurité, de la coordination ou des scénarios envisagés par la population ne faisait qu’augmenter leurs souffrances. Ils n’aspirent qu’à la vérité, un moyen de clore ce chapitre pour leur permettre de pleurer leurs proches.
52. Les familles des victimes et les chefs politiques et communautaires, y compris des responsables et des membres du gouvernement, ont tous indiqué que la formation d’une commission d’enquête internationale et indépendante était le seul moyen de révéler la vérité concernant l’assassinat de M. Hariri. Certains interlocuteurs ont accusé les services de sécurité libanais et syriens d’être impliqués dans cet attentat, d’avoir intentionnellement dérouté l’enquête libanaise afin de couvrir leur propre crime. D’autres, du côté du gouvernement, ont indiqué qu’une enquête internationale était nécessaire pour, justement, prouver l’innocence des services de sécurité libanais, ce qui ne peut être vrai sans aide externe vu la crédibilité contestée des services de sécurité et des enquêteurs libanais.
53. Durant notre séjour au Liban, les gens nous arrêtaient dans les rues de Beyrouth pour nous remercier des efforts que nous déployions afin de dévoiler la vérité, nous suppliaient de ne pas laisser cette question en suspens et nous rappelaient l’importance de traduire les coupables en justice « pour le bien du Liban ». Des posters dans les rues de Beyrouth montraient un mot écrit en deux langues : « la vérité, al-haqiqa ». Des politiciens, des responsables du gouvernement à tous les niveaux, et même des responsables au sein des services de sécurité nous ont dit qu’il fallait dévoiler la vérité « cette fois » pour réinstaurer la paix dans le pays, diminuer la tension et permettre au Liban d’avancer normalement.
54. De même, l’assassinat de M. Hariri semble avoir fait éclater les tensions politiques qui couvaient l’année dernière. Les accusations et les contre-accusations se multiplient et entretiennent un débat politique profondément polarisé. Certains accusent le commandement et les services de sécurité syriens d’avoir assassiné M. Hariri qui était devenu un obstacle insurmontable à leur influence au Liban. Ils considèrent que l’élimination de cet homme était devenue une nécessité pour la Syrie afin qu’elle reprenne le contrôle de la scène politique libanaise, surtout si elle est forcée de retirer ses troupes. Les partisans de cette théorie affirment que le commandement syrien se souciait peu de ne pas apparaître comme « le premier suspect » et qu’il avait employé des tactiques similaires par le passé sans se soucier de ne pas laisser des traces. Selon ces sources, cette attitude fait partie de la manœuvre syrienne dans la gestion coercitive des affaires du Liban. D’autres prétendent que le commandement syrien ne s’attendait pas à une telle réaction de la part des Libanais et de la communauté internationale. À leur avis, la décision d’éliminer M. Hariri était « une erreur stratégique » similaire aux autres erreurs commises par le gouvernement syrien.
55. Les partisans de la Syrie ripostent en déclarant que M. Hariri a été assassiné par « les ennemis de la Syrie » ; ceux qui voulaient créer une pression internationale sur le commandement syrien afin d’accélérer le déclin de l’influence syrienne au Liban et/ou provoquer des réactions en chaîne qui aboutiraient en fin de compte « au changement du régime » en Syrie. Selon les tenants de cette théorie, l’assassinat de M. Hariri est une erreur trop flagrante pour être commise par le commandement syrien. Non seulement la Syrie serait « le premier suspect », mais elle serait également le premier perdant. Ceux qui prônent cette théorie ont rappelé à la Mission que les assassinats politiques ne sont pas commis par revanche, mais pour aboutir à certaines conséquences. Les conséquences de l’assassinat de M. Hariri sont, à leur avis, clairement défavorables à la Syrie.
56. L’assassinat a vite élargi le clivage entre les factions politiques libanaises et a gravement polarisé la scène politique. Après l’assassinat, celle-ci s’est divisée entre « opposants » et « loyalistes ». Elle est marquée par un débat au sujet du gouvernement/président libanais actuel et des relations libano-syriennes. Deux semaines après l’assassinat, un grand nombre de Libanais est descendu dans la rue pour exprimer sa tristesse, sa colère, son anxiété et son opposition politique à l’ingérence syrienne dans les affaires du Liban. Les protestataires et les chefs de l’opposition ont accusé les services de sécurité libanais d’être impliqués dans l’assassinat et ont demandé au gouvernement de démissionner et aux troupes et services de sécurité syriens de quitter le Liban. Bien que le Premier ministre Karamé dispose de la majorité au Parlement et soit sûr de pouvoir remporter le vote de confiance, il a prêté l’oreille à la rue et a annoncé la démission de son gouvernement alors que les manifestants étaient toujours rassemblés non loin du Parlement.
57. Les manifestants et les chefs de l’opposition ont poursuivi leur campagne appelant à la révocation de tous les chefs des services de sécurité, au retrait des troupes syriennes et des agents de sécurité, à la formation d’un gouvernement « neutre » ayant pour mission l’organisation des prochaines élections législatives et à la conduite d’une enquête internationale indépendante. Les loyalistes se sont hâtés de répondre en descendant dans la rue le 8 mars lors d’une manifestation regroupant plus de 500 000 personnes qui ont affiché leur soutien au gouvernement et à la Syrie. Juste après, le président syrien a annoncé l’intention de son gouvernement de retirer ses troupes jusqu’à la vallée de la Békaa en application des accords de Taëf signés en 1989, et de poursuivre ultérieurement le retrait jusqu’à la frontière syrienne. Toutefois, l’annonce n’a pas clos le débat sur la présence syrienne. Les chefs de l’opposition sont demeurés sceptiques sur les intentions syriennes et ont exigé un calendrier du retrait total ; certains ont appelé à achever le retrait avant les élections législatives.
58. Selon les estimations disponibles, un million de personnes environ se sont rassemblées le 14 mars place des Martyrs à Beyrouth, réclamant « l’indépendance » du Liban, la création d’une commission d’enquête internationale et indépendante, le renvoi des chefs des agences de sécurité et la constitution d’un gouvernement « neutre » chargé de l’organisation des prochaines élections législatives. Les craintes d’un vide constitutionnel sont parvenues à la Mission ainsi que l’incapacité de voter une loi électorale à temps ou l’organisation adéquate des élections législatives de mai. Selon plusieurs responsables, une supervision internationale des élections serait nécessaire pour garantir leur intégrité. Ils ont en effet affirmé que des élections crédibles contribueraient à stabiliser la situation politique. L’on craint également le déclenchement d’une guerre civile puisque le clivage entre le camp des opposants et celui des loyalistes est chargé de sentiments communautaires. Ces bouleversements politiques menacent la paix et la sécurité du Liban et ont des retombées évidentes sur la stabilité de la région toute entière.
59. Par ailleurs, les hommes politiques libanais, toutes tendances confondues, ont exprimé à la Mission leur inquiétude de voir le Liban se transformer de nouveau en un champ de bataille tiraillé entre les forces étrangères. Nombreux ont pris la guerre civile tragique comme exemple de la lutte menée par des pouvoirs étrangers par l’intermédiaire d’acteurs libanais. Ils ont signalé que l’édifice libanais était fragile et que sa capacité à subir les pressions était limitée. Nombre de personnalités politiques ont souligné leur inquiétude de voir le Liban s’embourber dans une confrontation probable entre la Syrie et la communauté internationale, confrontation qui aurait de graves retombées sur la paix et la sécurité du Liban. Tous les chefs politiques libanais ont prié la Mission d’appeler la communauté internationale à ne pas se servir du Liban comme outil de pression. Selon l’un des interlocuteurs rencontrés par la Mission, « cet outil est très fragile et risque de rompre facilement ».
Remarques et recommandations
60. La Mission estime que les services de sécurité libanais et les services de renseignements syriens sont les premiers responsables de la défaillance au niveau de la sécurité, de la protection, de la loi et de l’ordre au Liban. Les services de sécurité libanais ont fait preuve de graves négligences systématiques dans l’exercice des missions qui incombent d’habitude à un dispositif de sécurité nationale. Ainsi, ils ont gravement manqué à leur mission d’assurer aux citoyens libanais un niveau acceptable de sécurité et ont ainsi contribué à la propagation d’une culture d’intimidation et d’impunité. Les services de renseignements militaires syriens partagent au plus haut degré cette responsabilité vu leur implication dans la gestion des services de sécurité au Liban.
61. Deuxièmement, la Mission considère que le gouvernement syrien est le premier responsable de la tension politique ayant précédé l’assassinat de l’ancien premier ministre Rafic Hariri. Le gouvernement syrien a explicitement exercé une influence qui va au-delà d’une relation de coopération ou de bon voisinage. Ce gouvernement s’est mêlé dans les moindres détails de la gouvernance au Liban, il a eu la main lourde et s’est montré inflexible, ce qui a conduit à la polarisation politique qui a suivi. Sans prévoir les résultats de l’enquête, il est évident que cette atmosphère a tissé la toile de fond qui a entraîné l’assassinat de Hariri.
62. Troisièmement, il est évident pour la Mission que le processus d’enquête libanaise souffre de graves imperfections. Il est invraisemblable que ce processus aboutisse à des conclusions satisfaisantes, que cela soit dû à un manque de capacités ou d’engagement. De plus, la crédibilité des autorités libanaises chargées de l’enquête est remise en question par nombre de Libanais, aussi bien au sein de l’opposition que du gouvernement. La Mission considère ainsi qu’il faut mener une enquête internationale indépendante pour dévoiler la vérité. À cette fin, il faudrait constituer une équipe autonome comprenant l’ensemble des experts et spécialistes généralement impliqués dans la conduite de telles enquêtes ayant comme cadre un système national. Elle aura besoin de l’aide de l’équipe de soutien et des ressources nécessaires, ainsi que du savoir-faire du système judiciaire concerné.
Elle pourrait être assistée et conseillée juridiquement par des Libanais sans que cela ne touche en quoi que ce soit son indépendance. Il est cependant plus que douteux qu’une telle enquête puisse être menée à bien – et recevoir la nécessaire et efficace coopération de la part des autorités locales – tant que l’actuelle hiérarchie des services de sécurité libanais restera en place.
63. Quatrièmement, et en conclusion, la Mission pense que la restauration de l’intégrité et de la crédibilité de l’appareil sécuritaire libanais est d’importance vitale pour la sécurité et la stabilité du pays. Un effort soutenu de restructuration, de réforme et d’entraînement des services de sécurité libanais sera nécessaire pour atteindre cet objectif, ce qui nécessitera certainement l’assistance de la communauté internationale et un engagement actif de sa part.
En base de l’appréciation de l’état présent de l’appareil sécuritaire libanais, la Mission a identifié six principaux points de réforme prioritaires de l’appareil sécuritaire libanais :
a) séparer sécurité et politique et établir un service professionnel ;
b) nationaliser l’appareil sécuritaire en le désengageant de toute influence externe et en le hissant au-dessus des allégeances sectaires ;
c) établir un service policier démocratique, spécialement attentif au règne de la loi et aux droits de l’homme ;
d) définir des structures claires de responsabilité et de comptes à rendre ;
e) établir des structures de capacitation (capacity-building) ;
f) introduire des mécanismes clairs de responsabilité et de supervision judiciaire.
64. Finalement, la Mission est également d’avis qu’un appui international et régional sera nécessaire pour protéger l’unité nationale libanaise et en défendre la fragile constitution des pressions indues. Améliorer les perspectives de paix et de sécurité dans la région offrirait aussi de meilleures conditions pour la restauration de la vie normale au Liban.
Version française : L’Orient-Le Jour.
Documents de référence sur la crise libanaise :
– Accords de Taëf (23 octobre 1989)
– Résolution 1559 (2 septembre 2004) souveraineté du Liban
– Rapport d’évaluation du Secrétaire général de l’ONU sur l’application de la résolution 1559 (1er octobre 2004)
– Rapport Fitzgerald (24 mars 2005)
– Résolution 1595 (7 avril 2005) Commission d’enquête
– Premier rapport semestriel du Secrétaire général de l’ONU sur l’application de la résolution 1559 (26 avril 2005)
– 1er rapport sur l’assassinat de Rafik Hariri (Mehlis) (20 octobre 2005)
– Deuxième rapport semestriel du Secrétaire général de l’ONU sur l’application de la résolution 1559 (26 octobre 2005)
– Résolution 1636 (31 octobre 2005) Comité des sanctions
– 2ème rapport sur l’assassinat de Rafik Hariri (Mehlis) (10 décembre 2005)
– Résolution 1644 (15 décembre 2005) Prorogation de la Commission
– Résolution 1655 (31 janvier 2006) Prorogation de la Finul
– Document d’Entente CPL-Hezbollah (6 février 2006)
– 3ème rapport sur l’assassinat de Rafik Hariri (Brammertz) (14 mars 2006)
– Rapport préliminaire du Secrétaire général de l’ONU sur la création d’un tribunal spécial pour le Liban (20 mars 2006)
– Résolution 1664 (29 mars 2006) Tribunal pénal international
– Troisième rapport semestriel du Secrétaire général de l’ONU sur l’application de la résolution 1559 (19 avril 2006)
– Résolution 1680 (17 mai 2006) Souveraineté du Liban
– 4ème rapport sur l’assassinat de Rafik Hariri (Brammertz) (10 juin 2006)
– Résolution 1701 (11 août 2006) Cessation des hostilités
– Premier rapport du Secrétaire général de l’ONU sur le suivi de la cessation des hostilités (daté 18 août 2006)
– Deuxième rapport du Secrétaire général de l’ONU sur le suivi de la cessation des hostilités (12 septembre 2006)
– 5ème rapport sur l’assassinat de Rafik Hariri (Brammertz) (25 septembre 2006)
– Quatrième rapport semestriel du Secrétaire général de l’ONU sur l’application de la résolution 1559 (19 octobre 2006)
– Rapport du Secrétaire général de l’ONU sur la création d’un tribunal spécial pour le Liban (15 novembre 2006)
– 6ème rapport sur l’assassinat de Rafik Hariri (Brammertz) (12 décembre 2006)
– Troisième rapport du Secrétaire général de l’ONU sur le suivi de la cessation des hostilités (14 mars 2007)
– 7ème rapport sur l’assassinat de Rafik Hariri (Brammertz) (15 mars 2007)
– Cinquième rapport semestriel du Secrétaire général de l’ONU sur l’application de la résolution 1559 (7 mai 2007)
– Quatrième rapport du Secrétaire général de l’ONU sur le suivi de la cessation des hostilités (28 juin 2007)
– 8ème rapport sur l’assassinat de Rafik Hariri (Brammertz) (12 juillet 2007)
– Sixième rapport semestriel du Secrétaire général de l’ONU sur l’application de la résolution 1559 (24 octobre 2007)
– Cinquième rapport du Secrétaire général de l’ONU sur le suivi de la cessation des hostilités (30 octobre 2007)
– Rapport du groupe de travail sur les détentions arbitraires du Comité des Droits de l’homme de l’ONU (30 novembre 2007) Détention arbitraire des généraux libanais
– Sixième rapport du Secrétaire général de l’ONU sur le suivi de la cessation des hostilités (28 février 2008)
– Septième rapport semestriel du Secrétaire général de l’ONU sur l’application de la résolution 1559 (21 avril 2008)
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