Robin Cook se désole que même sur la question du Darfour, les États-Unis refusent de soutenir la Cour criminelle internationale. Dans le même temps, Newt Gingrich et George Mitchell présentent la mission parlementaire qu’ils co-président à propos de l’Organisation des Nations unies. Elle marque une étape décisive dans la politique étrangère du Congrès : désormais républicains et démocrates s’accordent contre l’ONU.
Kanan Makiya, intellectuel irakien collaborationniste, se félicite dans le Wall Street Journal et Gulf News de la forte participation aux élections irakiennes. Il y voit une condamnation populaire du terrorisme. Cependant, les chiffres les plus contradictoire circulent sur cette participation et les observateurs internationaux qui pourraient les vérifier n’ont pas été autorisés à remplir leur mission. En outre, comme nous l’avons déjà noté dans ces colonnes, chacun a son interprétation du scrutin, mais sur place, les partis Kurdes ont appelé à voter pour l’indépendance et les partis chiites contre l’occupation. Surtout, Kanan Makiya tient un discours contradictoire : il dénonce la dictature ba’asiste qui, selon lui, visait à gommer les identités ethniques, mais appelle les nouveaux parlementaires à se prononcer sur le projet de constitution en faisant abstraction des identités ethniques. Bref, la laïcité du Ba’as était un crime, mais il faut admettre que sans laïcité, l’Irak éclaterait.
De leur côté, l’ambassadeur des États-Unis en Irak, John Negroponte, et le commandant en chef de la Force multinationale, le général George W. Casey, célèbrent dans le Guardian ce jour où, en faisant voter les Irakiens, ils ont vaincu la peur du terrorisme. Derrière cette fanfaronnade se cache un cynisme sans bornes. Les États-Unis ont été contraints d’organiser ces élections, faute de quoi le gouvernement de transition serait devenu illégal et leur présence en Irak à sa demande aussi.
Le républicain Newt Gingrich et le démocrate George Mitchell présentent dans le Washington Times la mission parlementaire qu’ils co-président à propos de l’ONU. Selon eux, l’Organisation ne parvient pas à surmonter la crise du Darfour, le scandale du programme pétrole contre nourriture et celui des viols commis par des casques bleus au Congo. Ils proposeront donc des réformes pour « renforcer » l’ONU, mais à la différence de leurs prédécesseurs, ils les concevront en fonction des intérêts US et non de ceux, supposés, de la communauté internationale. Notons que, par sa composition, cette mission parlementaire marque une étape décisive dans la politique étrangère du Congrès : désormais républicains et démocrates partagent la même intention de détruire le droit international et de ravaler l’ONU au rôle de courroie de transmission de l’impérialisme états-unien. Ce sont les Etats-Unis, seuls, qui détermineront à l’avenir ce qui est bon pour la communauté internationale.
L’ancien ministre britannique Robin Cook s’interroge dans le Guardian sur l’avenir du Tribunal pénal international. Les Etats-Unis ne veulent en aucun cas qu’une juridiction permanente puisse exister, devant laquelle ils auraient à rendre des comptes, et préfèrent des tribunaux ad hoc, pour les seuls conflits où ils sont vainqueurs. Il s’en suit qu’aucune justice n’est possible dans les temps où elle est nécessaire. Au fait, en quoi juger les exactions commises au Darfour conduirait à incriminer des États-Uniens ?
À ce sujet, pour les amateurs de show-bizz humanitaire, John Prendergast de l’International Crisis Group cosigne une tribune dans le Washington Times avec l’acteur Don Cheadle. Joignant les bonnes intentions et la fibre émotionnelle, ils appellent à la prise de sanction contre le régime de Khartoum. L’exercice n’est pas nouveau : il consiste à amalgamer des situations différentes (ici établir un parallèle entre le génocide rwandais et les massacres soudanais grâce au dernier grand rôle de l’acteur, un directeur d’hôtel au Rwanda pendant le génocide) pour se dispenser d’analyse précise et énoncer avec fougue une conclusion politiquement correcte.
Shah Navaz Tanai, ex-dirigeant afghan pro-soviétique aujourd’hui réfugié au Pakistan, sort de son silence. Dans une interview à RIA Novosti, il dément être le mollah Omar et confirme que celui-ci vit toujours dans les montagnes afghanes. Il souligne que l’invasion du pays par les États-Unis, au prétexte du 11 septembre, n’est que la continuation et la conclusion de la guerre qu’ils livrèrent contre les Soviétiques.
La peur du communisme russe fait encore recette. Le Corriere Della Sera, qui a rendu public le projet de la Commission européenne d’interdire les symboles nazis et communistes, a interrogé à ce sujet Daniel Cohn-Bendit et, dans une bien plus longue interview, André Glucksmann. Pour le premier, toute censure est une limitation de l’intelligence, tandis que pour le second, le moment est venu de dé-communiser l’Europe de l’Est comme on a dé-nazifié l’Allemagne. Au passage, l’essayiste nous apprend que Saddam Hussein était la synthèse entre nazisme et communisme.
Le nouveau ministre de l’Intérieur ukrainien, Youri Loutsenko, déclare dans les Izvestia tout savoir du complot pour empoisonner Viktor Yuschenko, mais ne pas vouloir accuser les Russes sans preuves. Il se contente donc de les désigner comme suspects.
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