Michel Béchara el-Khoury dénonce dans Le Monde l’instrumentalisation du désir d’indépendance de son pays, le Liban, pour servir les appétits états-uniens. Il souhaite, comme beaucoup de ses compatriotes revenir au pacte constitutionnel de 1943. À ce titre, il souhaite le retrait syrien, mais pas pour que les troupes de Damas soient remplacées par celles de Washington. Il estime le moment venu de désarmer le Hezbollah, qui a défendu le pays lors de l’occupation israélienne, mais pas pour voir cette occupation se reproduire. Ceux qui prétendent aujourd’hui vouloir aider les Libanais semblent poursuivre avant tout leurs propres intérêts.
Dans le New York Times et l’International Herald Tribune, Flynt Leverett, le diplomate états-unien qui rédigea la « Feuille de route », s’interroge sur la stratégie de la Maison-Blanche. A-t-on bien compris que, « la nature ayant horreur du vide », le retrait syrien portera nécessairement le Hezbollah au pouvoir ? En réalité, ce retrait n’est souhaitable que graduellement, mais l’administration Bush est aveuglée par sa volonté de faire du Liban un État maronite. Ce faisant, elle reprend le vieux rêve de David Ben Gourion, pas celui des Libanais eux-mêmes.

Nicholas Eberstadt, de l’American Enterprise Institute, a développé devant le Congrès la théorie de la menace nord-coréenne. Son audition a été reproduite par le Washington Post. Il y rappelle que les États-Unis n’ont jamais signé de paix, simplement un cessez-le-feu, et sont donc toujours en guerre contre Pyongyang. Selon lui, le régime communiste ne vit que pour abattre l’Amérique et se dote de l’arme nucléaire pour la détruire. Il est donc indispensable de tirer les premiers « pour protéger le monde ».
Une démonstration qui est au moins convaincante sur un point : les États-Unis s’estiment toujours en guerre en Corée. Et à entendre leurs menaces, on comprend pourquoi la Corée du Nord s’est transformée en bunker.

Le premier ministre irakien sortant, Iyad Allaoui, tire le bilan de son action dans le Wall Street Journal. À ses yeux, la politique de démantèlement de l’armée et de déba’asification initiée, avant lui, par Ahmed Chalabi fut un désastre, dont il a hérité et qu’il a corrigé. Il appartiendra à son successeur de la poursuivre. Bien que M. Allaoui ne le précise pas, il convient d’indiquer qu’il préconise la création d’un poste de Conseiller national de sécurité auquel il postule. Dès lors ce bilan est aussi une demande d’emploi dans la prochaine administration. En Irak occupé, ce n’est évidemment pas parce que les électeurs ont sanctionné sa politique que sa carrière doit se terminer là.

Enfin, John Walters, le « tsar antidrogues » des États-Unis, publie une tribune inattendue dans Le Figaro. Il y apporte son soutien au ministre de la Santé français, Philippe Douste-Blazy, pour sa campagne contre l’usage du cannabis. On observera en premier lieu que les attributions de M. Walters sont très différentes de celles d’un ministre de la Santé. En effet, il traite la question des drogues d’un point de vue militaire et pénal. Il supervise notamment le Plan Colombie. Deuxièmement, on se posera la question de l’objectif commun affiché : « éliminer le cannabis ». Que cache l’idéologie d’un « monde sans drogues » et pourquoi éliminer cette drogue, plutôt qu’une autre ? En termes économiques, le marché des drogues en France représente un enjeu d’importance. Le cannabis disponible est principalement d’importation marocaine. Il représente la seconde source de revenu du royaume chérifien, après le tourisme. Sa production et sa commercialisation sont contrôlées par des sociétés liées, directement ou indirectement, à la famille royale ou au palais. Le retrait du cannabis du marché français ne manquerait pas de s’effectuer au profit d’autres produits, dérivés soit de la coca, soit du pavot, cultivés dans des zones sous contrôle militaire US, en Afghanistan par exemple. Il va de soi que le passage du cannabis vers ce type de produits s’effectuerait au détriment de la Santé publique.