Il n’existe plus guère qu’en Corée du Nord et au Vatican que l’on pratique le culte de la personnalité. Le décès du pape Jean-Paul II aura ainsi été l’occasion de scènes de deuil dignes de la mort de Kim Il Sung. Cependant, cette liturgie s’accompagne pour le « Souverain Pontife » d’une rhétorique sulpicienne particulière au catholicisme. Ainsi, dans le Los Angeles Times, l’ancien président Lech Walesa rend grâce à Dieu d’avoir donné un pape à la Pologne. Il affirme tout lui devoir et se sentir aujourd’hui orphelin.
Dans ce déluge hagiographique, l’éditorial de Joseph Samaha dans As Safir détonne. Avec talent et un certain goût de la provocation, l’intellectuel libanais établit une comparaison entre deux leaders religieux présentés par leurs fidèles comme des « combattants de la liberté » : Jean-Paul II et Oussama Ben Laden. Tous deux avaient le même patron : Ronald Reagan ; et le même adversaire : les Soviètiques. Jean-Paul II les chassa de Pologne et Oussama Ben Laden d’Afghanistan. Pour mener à bien leur mission, les deux hommes s’appuyèrent sur les forces les plus réactionnaires de leur communauté religieuse et luttèrent contre les réformistes.
Poursuivant cette réflexion rafraîchissante, le père Adolf Holl, suspendu a divinis par le cardinal Josef Ratzinger (nouvellement élu pape sous le nom de Benoît XVI), rapporte dans Die Presse que le conclave est arrangé à l’avance. Comme l’attestent des documents établis par la Curie pour l’élection précédente, les cardinaux sont notés par les nonces apostoliques et les papabile soigneusement sélectionnés. Les palabres sont illusion, l’intervention du Saint-Esprit aussi.

Sergueï Markov, directeur de l’Institut de recherches politiques de Moscou, commente dans Gazeta SNG le voyage du nouveau président ukrainien aux États-Unis. Viktor Yushchenko est d’abord allé remercier celui qui l’a fait roi. Cependant cette entente est fragile. Pour Washington, l’Ukraine est un pion permettant d’affaiblir la Russie, mais Yushchenko hésitera entre satisfaire son protecteur pour rester au pouvoir coûte que coûte et servir ses intérêts nationaux.
De son côté, l’ambassadeur des États-Unis en Russie, Alexander Vershbow, affirme dans le Moscow Times que son pays a besoin d’une Russie forte. Il entend apporter ainsi un démenti aux analyses, désormais largement répandues dans la presse russe, selon lesquelles Washington manipule les révolutions colorées pour encercler et affaiblir la Russie. Cependant cette déclaration n’est en rien apaisante : le diplomate poursuit en indiquant ce qu’il entend par « Russie forte » : un pays qui s’ouvre au commerce mondial et accepte de livrer ses hydrocarbures pour le développement des États-Unis.

L’écrivain et homme politique estonien, Jaan Kaplinski, observe, dans le journal finlandais Turun Sanomat, que ce qui se passe aujourd’hui en Russie n’est pas un retour au Stalinisme, mais plutôt une modernisation autoritaire comparable à celle conduite par Atatük en Turquie au début du XXe siècle. Plutôt que de s’en offusquer, on ferait mieux d’aider la Russie à cultiver à la fois son redressement et les libertés civiles.
Dans un entretien accordé à RIA-Novosti à la veille de son arrivée à Moscou, le vice-président argentin, Daniel Scioli, souligne les points communs et la complémentarité des deux pays. Tous deux ont connu récemment une grave crise économique et s’en sont relevés. L’Argentine vend à la Russie des produits alimentaires et lui achète des machines agricoles et des engrais. Surtout, la Russie offre une réponse aux besoins énergétiques et un partenariat équitable qui permet à Buenos Aires de se défaire de la tutelle de Washington.

Enfin, le colonel Austin Bay dénonce dans le Christian Science Monitor le trucage des élections au Zimbabwe et le maintien au pouvoir de Robert Mugabe. Considérant que les Etats-Unis ont renoncé, pour le moment, à déclencher une révolution colorée, il appelle de ses vœux un pape noir pour débloquer la situation comme Jean-Paul II le fit pour la Pologne.