L’abondance de " cercles " socioprofessionnels, culturels, sectoriels, etc., issus du Front n’a pas pour seule fonction de capitaliser son influence idéologique dans la société civile. La multiplication de ces structures, dont un bon nombre sont des coquilles vides, permet aussi au Front d’avancer masqué et d’atteindre un public pour lequel sa marque reste rédhibitoire. S’adressant à un public étroitement ciblé, il peut développer des aspects circonscrits de son discours sans donner à voir les contradictions inhérentes à son programme, notamment entre sa promotion du libéralisme et sa démagogie sociale. Sous des appellations peu connues et sans connotation politique, le FN peut aussi trouver plus facilement des lieux de réunion, organiser des colloques et des meetings, sans éveiller la méfiance de ses adversaires.

Ainsi a-t-il pu organiser de très nombreuses réunions au Musée social (5, rue Las Cases, 75007 Paris), dans les locaux d’une fondation reconnue d’utilité publique depuis 1894, à vocation sociale, scientifique et culturelle. Malgré les troubles survenus à l’occasion d’une réunion du FNJ il y a un an, les responsables du Musée social ont vraisemblablement continué à être abusés par les multiples sigles des cercles frontistes. Néanmoins, après de nouveaux incidents survenus lors d’une réunion de l’IFAC (Institut de formation et d’action culturelle, la structure de formation des cadres du FN), en présence de Samuel Maréchal, leader du FNJ, le 5 mars 1997, la direction du Musée social a pris conscience de l’ampleur et de la durée de la manipulation. Réuni fin mars, le conseil d’administration du CEDIAS-Musée social prenait la décision (par vote à bulletin secret) de ne plus louer de salles de réunion qu’à des organismes dont l’objet social est directement relié au sien. Cette décision fut immédiatement notifiée aux organismes usagers. Par retour, l’IFAC changeait de nom, pour devenir l’IAC, Institut d’action culturelle, et l’ICAF-Social devenait " Entraide nationale ".