Les États-Unis présentent comme un but de guerre l’imposition de régimes démocratiques en Irak et au Proche-Orient. Mais Fawaz A. Gerges pense que la guerre aura l’effet inverse. Dennis Jett utilise l’argument démocratique pour jeter l’opprobre sur le Venezuela d’Hugo Chavez en le comparant au Zimbabwe de Robert Mugabe. Et Mark Brzezinski, quant à lui, s’inquiète de ce que la démocratie en Russie permette à l’opposition locale de durcir les négociations au Conseil de sécurité.
« Les Illusions de la démocratie irakienne »
Illusions Of Iraqi Democracy
The Washington Post (États-Unis)
[AUTEUR] Fawaz A. Gerges est professeur de relations internationales au Sarah Lawrence College.
[RESUME] L’administration Bush prétend vouloir apporter la démocratie en Irak. Elle semble ignorer que la démocratie n’est pas du tout présente dans la culture politique irakienne et qu’elle sera très difficile à imposer.
L’Irak a une longue histoire sanglante, liée à une succession de coups d’État meurtriers. Les Irakiens, opprimés depuis 1958, ont perdu toute foi dans le système politique et se sont réfugiés dans le communautarisme. L’Irak est maintenant une société fragmentée en diverses ethnies et clans
Le renversement de Saddam Hussein entraînera de grands bouleversements dans le pays et dans toute la région. On peut en déduire un accroissement conséquent des règlements de compte ethniques et claniques dans les premiers temps de l’ère post-Saddam.
Il est probable que les groupes islamistes profiteront de cette situation pour accroître leur influence dans la région.
Tous ces éléments laissent à penser que, non seulement, une attaque américaine n’amènera pas la démocratie, mais menacera à plus long terme les intérêts américains en renforçant les groupes qui lui sont hostiles.
« Venezuela et Zimbabwe : la démocratie au bord du gouffre »
Venezuela and Zimbabwe : Democracy on the brink
The Christian Science Monitor (États-Unis)
[AUTEUR] Dennis Jett est doyen de l’International Center de l’University of Florida. C’est un ancien directeur sur les questions africaines du National Security Council et conseiller du Carter Center sur les questions africaines.
[RESUME] Robert Mugabe, président du Zimbabwe, et Hugo Chavez, président du Venezuela, ont un point commun : ils mènent leur pays à la ruine.
Pour rester au pouvoir, ils détruisent l’économie de leur pays, minent les institutions démocratiques et exacerbent les divisions nationales, Mugabe par le racisme et Chavez par la lutte des classes.
Mugabe a dépossédé les fermiers blancs de leurs terres sans compensations financières pour enrichir ses proches. Il a ainsi transformé son pays, grenier à blé de la région, en une contrée qui connaît des risques de famines. L’Union Africaine, n’a rien fait pour l’en empêcher.
Le Venezuela est dans une situation tout aussi grave mais moins désespérée grâce à l’action entreprise par l’Organization of American States (OAS) avec l’appui du Carter Center et du Programme de développement des Nations Unies.
Ces trois organismes ont permis un retour des discussions entre Chavez et son opposition. L’OAS a sauvé la démocratie au Venezuela en avril dernier en affichant sa désapprobation face à la tentative de coup d’État menée contre Chavez. Malheureusement, même avec la meilleure volonté, il sera difficile de sauver le Venezuela malgré lui une seconde fois.
[CONTEXTE] Dans sa Note d’information datée du 18/05/02, le Réseau Voltaire avait développé une tout autre analyse du coup d’État manqué contre le président Chavez.
Ce coup avait été fomenté par des services secrets américains et n’avait été déjoué qu’en raison de la forte mobilisation populaire en faveur du président Chavez.
Washington s’est montré beaucoup plus embarrassé par le retour de Chavez au pouvoir que par le putsch.
« Négociation avec la Russie »
Bargaining With Russia
New York Times (États-Unis)
[AUTEUR] Mark Brzezinski est attorney à Washington. Il a été directeur pour les questions russes et eurasiennes au National Security Council sous l’administration Clinton.
[RESUME] La Russie estime qu’une nouvelle résolution du Conseil de sécurité de l’ONU ne ferait qu’entraîner de nouvelles négociations avec Bagdad et retarderait le travail des inspecteurs. En privé, ses ambassadeurs s’interrogent sur la validité des analyses américaines concernant les stocks d’armes irakiens.
Cette position n’a pas d’autre but que de servir les intérêts nationaux russes. L’Irak a une dette de 8 milliards de dollars US vis-à-vis des Russes et ces derniers craignent de ne pas récupérer leur argent. Le programme " pétrole contre nourriture " a profité à 40 % à la Russie.
Au niveau de la politique intérieure, Ziouganov et Jirinovski, se rendent régulièrement à Bagdad et défendent dans les médias russes, les positions de Saddam Hussein. De plus, l’opinion publique russe accepterait difficilement de suivre la position américaine.
La Russie sait qu’elle peut exiger beaucoup contre la promesse qu’elle n’utilisera pas son veto à l’ONU et compte obtenir :
1) Des garanties concernant le remboursement de la dette irakienne à son encontre et une part du pétrole irakien.
2) La possibilité d’attaquer la Géorgie, base arrière des Tchétchènes, sans réaction américaine.
3) Une normalisation des relations commerciales avec les États-Unis, toujours sous le coup de lois issues de la guerre froide.
N’est-ce pas payer bien cher l’aval russe ?
N’oublions pas que la Russie a plus à gagner à être dans le camp des États-Unis que dans celui de Saddam Hussein. Si les USA cèdent sur ces points, que devront-ils concéder par la suite ?
Il faut que le président Bush parvienne à convaincre les différents États de lutter contre le terrorisme avec les États-Unis, pas d’en tirer parti.
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